11 juillet 20**

Bonjour le journal,

Je reviens vers toi après un moment, la vie à l'hôpital est bien prenante. J'ai quelques nouvelles à partager, alors accroche-toi.

Ce mois-ci, j'ai dû faire face à deux épisodes de ma santé chancelante. Heureusement, ça va mieux, relativement parlant.

Une nouvelle rencontre a illuminé mon quotidien. Rainn est son nom. Sheffield, qui veille sur moi ici, en parle souvent. Comme si c'était son propre fils. Pourtant, ses yeux trahissent une douleur quand il évoque Rainn. Je n'ai pas encore saisi toute l'ampleur de cette situation.

Rainn porte en lui une histoire complexe. Son combat acharné contre une réalité qu'il n'a pas choisie m'a bouleversé. Il a touché le fond, envisageant même de mettre fin à sa propre existence. La détresse peut être aveuglante, rendant le suicide l'ultime appel à l'aide. Mais je perçois aussi en lui une force intérieure.

À ses débuts ici, Rainn se terrait dans sa chambre, comme s'il redoutait le monde extérieur. J'ai reconnu en lui un reflet de mon propre passé. Son sourire cachait souvent une tristesse profonde. Parfois, ses yeux trahissaient des larmes qu'il ne laissait pas couler. Je n'ai pas osé aborder ce sujet douloureux.

Heureusement, Rainn s'épanouit peu à peu. Nos discussions se sont prolongées, nos vies se sont dévoilées. Il possède cette capacité rare d'écoute sincère, une qualité rare et précieuse.

Il nourrit des sentiments pour Jemima, un lien que je peux aisément comprendre. Mais la destinée est taquine, car elle a déjà donné son cœur à un autre. Les histoires sentimentales, si complexes et déconcertantes.

Des amitiés se sont également tissées autour de Rainn. Taki, Hope, Mehdi et Max l'entourent. Chacun a ses propres fardeaux à porter. Ensemble, ils constituent un réseau de soutien, un rempart face aux épreuves de la vie.

Un festival musical a animé l'hôpital. Hélas, j'ai manqué ce rendez-vous, plongé dans un sommeil ininterrompu. Les aléas de ma condition ont eu raison de moi cette fois.

D'après les praticiens, mes jours s'amenuisent. Selon eux, j'aurais dû rendre l'âme il y a déjà belle lurette. Peut-être demain, ou le lendemain, ou le jour qui suit. Une lutte perdue d'avance, voilà ce qu'ils affirment. Mon quotidien s'est affaibli, mais je m'obstine à me battre avec une détermination inflexible.

C'est paradoxal. Je me berce d'illusions. Je reconnais bien la justesse des propos des médecins, mais je continue de m'agripper à une vie qui semble m'esquiver. Le compte à rebours est amorcé. Je suis conscient que je pourrais ne pas voir poindre la nouvelle année, elle qui se profile à l'horizon. Je le sais trop bien. Ma fin est proche. Mais Rainn ne semble pas en avoir connaissance. Je ne désire pas qu'il en prenne connaissance. L'idée de susciter un énième regard teinté de commisération m'est insupportable.

Je maudis ce jour où le praticien m'a étiqueté "malade". Ce jour-là, mes espoirs et mes rêves ont amorcé une pente descendante. C'est ainsi que je suis devenu ce spectre en vie, ou peu s'en faut.

Néanmoins, un souhait résiste, un petit espoir de voir le jour de mes dix ans éclairer ma trajectoire avant que l'obscurité n'envahisse tout.

Maintenir l'espérance est un défi ardu, un mensonge quotidien. Convaincre mon esprit que je peux survivre est un art subtil. Mon masque social affiche un sourire, mais en mon for intérieur, les cris de ma détresse sont assourdissants. Mon épuisement est patent, mais je persévérerai. Le temps s'écoule, la route s'étire, le vent souffle. Je poursuivrai mon existence, je combattrai, en solitaire, mais avec une détermination indomptable.

C'est une utopie, une douce illusion.

Je demeure conscient que ces propos ne sont qu'artifice et mensonge. Mais à force de me les répéter, ils pourraient devenir réalité à mes yeux et peut-être, par quelque miracle, me survivre.

Par moments, je m'étonne du nombre de gens qui endurent le malheur dans cette existence. Cette vie est-elle un vaste jeu de hasard ? À la naissance, chaque individu tire un billet de loterie, bon ou mauvais. Le sort, le destin, semble déterminer le fond de notre quotidien, entre joie et tourment. Nous autres, captifs de corps souffreteux et enchevêtrés dans les mailles de la médecine, avons hérité des billets perdants. Dès notre arrivée au monde, nous avons échoué à ce grand jeu qu'est la vie.

Néanmoins, l'optimisme demeure ancré en moi. La littérature demeure mon échappatoire. Ma bibliothèque personnelle, posée sous la fenêtre, me réconforte. Les mots des autres m'emmènent ailleurs, me libérant de mes tourments, ne serait-ce qu'un court instant.

Le 25 décembre, dans cinq mois, je célébrerai mes 10 ans. Je souhaite sincèrement être présent pour cet événement. C'est une étoile lointaine, visible mais hors de portée.

Le crépuscule descend doucement sur la ville, tandis qu'une guitare entame son mélodieux chant. Lassé, je me dirige vers le repos nocturne, me laissant bercer par les sons environnants.

À la prochaine, cher journal.

Byeol