🚀 Le Monde de Rocannon [C]
Oh mais c'est pas vrai alors ! Deux déceptions d'affilée, venant pourtant de deux auteurs SF que je croyais être des valeurs sûres ! 🥲
Titre : Le Monde de Rocannon
Original : Rocannon's World
Auteure : Ursula K. Le Guin 🇺🇸
Traduction : Jean Bailache, de l'anglais (US)
Date : 1966
Quatrième de couverture
Cette planète sans nom du système stellaire de Fomalhaut est l'enjeu d'un conflit entre la Ligue de tous les mondes et un Ennemi inconnu. Cinq espèces intelligentes se la partagent. Aucune n'a dépassé le niveau féodal. Certaines communiquent par la pensée. Rocannon, ethnologue, y est envoyé par la Ligue afin d'observer les peuples qui l'habitent avant l'arrivée d'une mission technologique qui assurera le développement de la société la mieux placée. Mais l'Ennemi surgit de l'espace avant que le plan ne soit accompli. Avec une poignée de compagnons, Rocannon, devenu Olhor l'Errant, le Seigneur des étoiles, va entreprendre de chasser les envahisseurs.
C'est toujours intéressant lorsque sur le papier un roman a tout pour nous plaire, mais que la magie n'opère pas à la lecture. Cela permet parfois une prise de recul bienvenue sur ses propres goûts, ses attentes implicites, ses habitudes de lecture.
Je me demande donc : pourquoi ce livre n'a-t-il pas répondu à mes attentes ? Quelles étaient-elles ?
Tout d'abord, j'adore les littératures de l'imaginaire. Je viens y chercher du dépaysement, et paradoxalement je m'attends aussi à y retrouver les codes de genre qui me sont familiers. Quêtes épiques, créatures fantastiques ou pouvoirs surnaturels pour la fantasy, planètes extraterrestres ou technologies futuristes pour la science-fiction...
Difficile équilibre, d'autant que le passage du temps le perturbe : ce qui éblouit une génération de lecteurs devient la norme pour la suivante. Si à sa parution en 1966 ce livre proposait un univers sans doute assez original, aujourd'hui il m'a seulement paru très fade. Cela tient surtout au fait que je le trouve largement sous-exploité.
Le Guin avait de l'or dans les mains avec cette idée de mélanger fantasy et science-fiction dans un même univers cohérent.
L'histoire s'ouvre sur une nouvelle introductive faisant office de prologue.
Nous suivons Semlé, héroïne dont la quête est de restaurer la grandeur de sa lignée en retrouvant une relique ancestrale. Mais un brusque changement de point de vue relègue Semlé au rang de spécimen extraterrestre à étudier. À cause de la loi physique de la relativité du temps dont elle ignore tout, elle connaît une fin tragique.
Cette courte histoire laisse entrevoir tout le génie de l'auteure, qui maîtrise les codes et les questionne en les faisant s'affronter. Toute la perception des enjeux repose sur les codes, c'est cela qui définit nos attentes. La grande quête de toute une vie caractéristique de la fantasy paraît alors insignifiante lorsque l'on bascule dans de la science-fiction à l'échelle des galaxies.
Cette idée est vertigineusement puissante, car elle fait écho aux enjeux de nos propres vies.
Puis commence le roman. Nous suivons Rocannon, ethnologue étudiant les peuples de la planète de Semlé, et qui y perçoit une menace contre La Ligue de tous les mondes. Une fois posé, ce cadre soulève des questions très intéressantes :
1/ Son rôle de scientifique est-il compatible avec le fait d'intervenir dans les sociétés qu'il étudie ?
2/ Rocannon donne l'air de se considérer supérieur aux habitants de cette planète, ou en tout cas à côté et hors du temps, comment concilie-t-il cela avec son besoin primaire de sociabilisation ?
3/ Rocannon vient d'une société très avancée technologiquement, mais sans son matériel, que lui resterait-il de sa supériorité ?
Toutes ces questions en filigrane promettent des pistes passionnantes à explorer.
Mais la première n'est que trop vite abordée, car l'histoire devait bien se lancer.
La deuxième question non plus, car Rocannon développe des liens bien trop superficiels avec les autres protagonistes, dont les personnalités se limitent à l'impassibilité ou à une l'excitation démesurée.
Enfin, l'histoire esquive ma troisième question en dotant Rocannon d'une combinaison le rendant invincible et dont il ne se sépare jamais. Je trouve ce choix d'autant plus dommageable puisque l'enjeu de sa survie s'évapore immédiatement.
J'en viens à mon attente la plus importante lorsque je lis un livre, qu'il soit de science-fiction, de fantasy, ou quel que soit sa classification. Je souhaite qu'il m'apporte une réflexion qui me fasse comprendre un peu mieux le monde qui m'entoure.
J'aurais aussi bien apprécié que l'auteure choisisse d'autres pistes à explorer que les trois posées ici en exemple, du moment qu'elle les aborde frontalement et avec un minimum de profondeur. Et cela n'a jamais été le cas. On en reste à une succession de péripéties dans lesquelles je n'ai jamais réussi à me sentir investie. L'aventure est très linéaire et sa fin anti-climatique est loin d'être satisfaisante.
D'où ma grande déception, surtout que Le Guin avait mis la barre haut avec ce prologue et ses autres nouvelles philosophiques telles que la puissante Ceux qui partent d'Omelas.
Pour finir, juste un bref mot sur le style, car même s'il constitue rarement une attente pour moi, il a tout de même son importance pour apprécier une œuvre. J'ai trouvé les descriptions assez jolies. Les dialogues en revanche manquaient cruellement de naturel et de spontanéité.
Note : C
Pour conclure, de cette déception je retire tout de même un bon présage pour la suite de ma découverte de l'œuvre d'Ursula K. Le Guin. Il y avait tous les ingrédients pour me plaire dans ce premier roman mais chacun d'eux n'était pas encore assez travaillé à mon goût. Je place donc de grands espoirs dans ses œuvres suivantes, notamment Les Dépossédés et La Main gauche de la nuit, en espérant cette fois ne pas cultiver des attentes trop hautes.
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