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IV Double-Poitrail

Le front et la pommette en sang, l'épaule plus douloureuse que jamais, le ventre toujours trop vide, il fut traîné à l'intérieur du Veilleur. Il y faisait sombre et plus frais. Entouré de toute une troupe d'hommes, il gravit d'interminables escaliers. Sa tête tournait, ses forces l'abandonnaient. À plusieurs reprises il trébucha et fut remis sur ses jambes sans ménagement. Plus de doute quant à l'hostilité de ces gens. Il avait tué l'un des leurs.

Morgan se retournait parfois. Dans ses yeux se lisait une envie de meurtre. « Avance ! lâcha-t-il. Et ne te crois pas tiré d'affaire. Le dernier sbire du Cauchemar qu'on a amené devant Belius, il l'a tué à mains nues. »

Il n'y avait rien à répondre. J'aurais préféré mourir l'épée à la main, songea-t-il avec amertume. Il avait livré tant de combats, en vain. Et le destin persistait à se moquer de lui. Une ultime façon de le punir.

Le Brümien fut surpris lorsque l'ascension s'interrompit. Ils passèrent non loin d'une meurtrière et il jugea de la hauteur de cet étage. Il dominait à ce point la bourgade que le mercenaire n'en put rien distinguer, pas même le rempart. Et la vue sur le lac et sa vallée donnait un aperçu aérien du pays.

Ils traversèrent une antichambre luxueuse. Une coupe d'argent remplie de fruits attira son attention. Pommes, oranges et raisins lui rappelèrent cruellement qu'il mourrait en ayant faim. Puis il fut introduit dans une sorte de jardin. Le sol était dallé, de grandes vasques débordaient de verdure et de fleurs, des statues en garnissaient les coins. À l'extrémité de ce patio s'ouvrait une terrasse, très étirée, qui offrait une perspective plongeante sur toute la région. Ils se trouvaient à présent plus haut que le feu dans la paume de pierre. Sans doute était-ce là la vue du heaume, juste au-dessus du mézail.

La troupe s'arrêta au bord d'un bassin dans lequel trempait un mastodonte. Le Brümien peina à cacher sa surprise. L'homme dans l'eau, grand et robuste de nature, était rendu plus impressionnant encore par des difformités, des boursouflures, un peu partout sur le corps. Des plaques squameuses parcouraient sa peau, son cou était gonflé et épais, comme celui d'un taureau, son torse constitué d'un ensemble informe de muscle et de graisse. Hormis son visage et le fait de disposer de deux bras et de deux jambes, il n'avait pas grand-chose d'humain.

Autour de lui, trois femmes se prélassaient, nues à l'exception de quelques bijoux. L'une d'entre elles, une déesse à la peau d'un beau bronze et aux yeux en amandes, massait le dos puissant du seigneur des lieux. Ce dernier, de par ses proportions, les faisait paraître menues. Ses paupières étaient closes, il savourait pleinement ce moment de détente.

Le capitaine s'éclaircit la gorge. « Sire, dit-il simplement.

-Morgan, te voilà bien solennel. Je n'ai pas entendu les cors d'alerte, ni le tocsin. Ce n'est pas non plus l'heure des doléances. Alors pourquoi venir me déranger ?

-Un étranger est arrivé au Foyer.

-Un étranger, dis-tu ? » Il ouvrit un œil. « Voilà un moment que personne n'est venu à nous. Il est venu par la route ?

-Je... je l'ignore. Mais je le trouve suspect, il pourrait aussi bien nous être envoyé par nos ennemis et, de fait, il a causé des problèmes. Je vous l'ai amené pour que vous décidiez de son sort. »

Cette fois, Belius ouvrit les deux yeux et les vrilla à cet étranger blessé qu'on lui amenait. Il y avait une part d'obscurité dans ce regard, une part primale, animale. Et la barbe qui lui mangeait le visage accentuait encore cette impression de bestialité, effaçait presque les fragments d'humanité du monstre. Mais le Brümien ne cilla pas, ne détourna pas les yeux.

« Qu'est-ce que tu as fait ? demanda le seigneur des lieux.

-Il a refusé de se présenter, répondit Morgan, d'obtempérer...

-C'est à lui que j'ai posé la question. D'ailleurs, comment t'appelles-tu, étranger ?

-Appelez-moi comme bon vous semblera. J'ai renié jusqu'à mes origines. »

L'un des hommes de son escorte renifla. « Peuh ! Qu'un oiseau d'mauvais augure, pour sûr ! »

L'œil de Belius tomba sur son bouclier usé et sur le corbeau à demi effacé qui le blasonnait. « Certes, Faucheux, c'est plutôt bien vu. » Il sourit. « Il est abîmé, mais j'ai déjà vu cet emblème. C'est celui des Trevarïn. Tu es Brümien ?

-Je le fus. Je ne le suis plus.

-Très bien. Je t'appellerai néanmoins Corbeau, tant que j'aurai besoin de te nommer ou d'ici que j'apprenne ton nom véritable. Moi, c'est Belius, ou Double-Poitrail. »

Le capitaine s'agita à côté de lui. « Voyons, Belius, c'est un pillard, au mieux un mercenaire. Ce bouclier, il l'a probablement récupéré sur une dépouille. De même que cette épée. » Il brandit la lame de Ferfroy. « Tant qu'on y est, appelons-le ser Corbeau.

-Ser Corbeau », répéta le mastodonte, mais il n'y avait aucune moquerie dans son ton.

Il se redressa. La jolie masseuse s'interrompit et recula. Le Brümien croisa son regard et y lut de la curiosité, voire de l'intérêt. Mais son attention se reporta rapidement sur Belius qui, sorti du bassin, révélait aux yeux de tous l'intégralité de son anatomie. Sous la taille, rien ne le distinguait d'un homme particulièrement robuste, ou presque. Mais son tronc, noueux, puissant, semblait deux fois trop imposant. Et sa peau, épaisse et squameuse, était malgré tout parcourue de nombreuses cicatrices. Des traces laissées par des lames, mais aussi des fouets.

« Soraya, Mélys », appela-t-il avec une brusquerie qui trahissait une certaine pudeur.

La jolie orientale et une autre fille quittèrent le bassin à leur tour et jetèrent un peignoir de soie chamarré sur ses épaules. Le vêtement avait dû être taillé pour lui, à partir de deux pièces distinctes, d'après les motifs dissemblables. Puis il revint vers eux et prit l'épée. Ses mains épaisses manipulèrent l'objet avec une délicatesse insoupçonnée. « C'est à vous, ça ? »

L'étranger hocha la tête. Un héritage et une malédiction.

Morgan s'esclaffa. « Il l'aura volée, de même que le bouclier. Et le Cauchemar l'aura envoyé pour nous évaluer, pour voir s'il pouvait venir ici et tout nous voler à notre tour. Cette charogne !

-Un espion aurait donné un nom, même inventé, rétorqua Belius. Un espion mentirait. Et un espion n'apporterait pas ce joyau avec lui. » Ses yeux se posèrent à nouveau sur le prisonnier et s'étrécirent. « Cet homme est un Brümien. Je le sais. Je le sens. Il a un courage tout... barbare. Ça me plaît.

-Mais il a tué Eckman et blessé Moq...

-Uniquement parce que tu l'as provoqué et agressé ! » s'insurgea Miche. Le Brümien n'avait pas même réalisé qu'elle avait suivi les hommes jusqu'ici. Elle se tourna vers le mastodonte. « Tout ce qu'il a fait, c'est se défendre !

-Contre combien d'hommes ? » demanda Belius.

Il observa la troupe. Pour toute réponse, le silence. Miche fit un pas en avant et leva le menton dans une attitude de défi. « Z'avez perdu vos langues, bande de lâches ? Il était seul et ils n'ont pas hésité à se jeter sur lui.

-Vous tous ? Donc une dizaine d'hommes, dont mon capitaine ? De mieux en mieux...

-Il a attaqué par surprise, se justifia Morgan. Il avait une lame de Ferfroy...

-Et il savait s'en servir. »

Le Double-Poitrail leur tourna le dos et s'approcha d'une petite table, à côté du bassin. Il y posa l'épée, prit une cruche et remplit deux timbales d'un vin doré. Ensuite il en porta une à ses lèvres et sirota avec un plaisir évident. Où veut-il en venir ? On eût dit un chat qui jouait avec sa proie.

Il fit claquer sa langue. « Que désirez-vous, ser Corbeau ? À quoi aspirez-vous ? »

L'étranger hésita. Était-ce un piège ? Son regard se posa sur la lame, à côté de la carafe. « Je veux mon épée, me reposer et repartir sans ennui.

-Je vois. » Il fit une pause théâtrale. « Ce que je veux, moi, c'est quelqu'un comme vous. Nous manquons par trop de chevaliers, et qu'est-ce qu'un seigneur sans chevalier ?

-Je ne suis pas chevalier.

-Je sais. » Il s'avança, une timbale dans chaque main. « Mais j'ai besoin de votre vigueur, de votre courage, de vos compétences... Vous êtes arrivé jusqu'ici. Vous avez survécu à une route que plus personne n'ose emprunter. Vous avez une épée unique et vous la maniez comme personne. Je vous veux à mon côté. »

Morgan ne put retenir une exclamation. « Quoi ? C'est une plaisanterie ? Cet homme est dangereux ! »

Belius lui adressa un regard noir qui suffit à le faire taire. Puis son bras décrivit un arc de cercle, mais au-delà de la terrasse, du bassin, des femmes et du vin, il lui présentait le Foyer. « Vous pourriez mener une vie agréable ici. Cet endroit n'est pas si mal, en dépit du Déclin. Vous seriez mon chevalier.

-Je ne veux pas être chevalier. Je vous ai dit ce que je voulais.

-Mais vous êtes en mon pouvoir. Et je vous ai dit ce que moi je voulais. » Il sourit. « Je ne veux pas faire de vous un prisonnier. Donc voici ce que je propose : vous m'aidez, vous me secondez. Une fois mes problèmes réglés et la confiance établie, je vous rends votre épée. » Il lui tendit une timbale et le Brümien la saisit. « Et j'espère que, d'ici là, vous aurez révisé votre jugement et qu'un titre de chevalier, même de pacotille, vous intéressera. »

La situation avait pris un tour inattendu.

Ils burent pour sceller cet accord. Et Morgan grinça des dents.


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