7 Décembre
La neige avait décidé d'être très abondante cette année. Vingt centimètres de neige couvrait les rues berlinoises, coupant ainsi toute circulation possible. Malgré cela, au bon désespoir d'Agathe, l'école était restée ouverte.
Pourtant, le temps était passé assez vite pour une fois. Sous le regard plus ou moins attendrissant de sa professeur d'arts, la petite fille avait passé la journée à imaginer mille et une façons de créer son sapin de Noël version « je n'ai pas d'argent et ma mère est alcoolo ».
Elle rentra ce soir-là heureuse, pressée de continuer ses croquis de sapins. Elle voulait surtout retrouver la chaleur de sa chambre qui était la seule pièce chauffée de la maison, et finalement la seule pièce habitée par une personne saine d'esprit.
Sur son chemin, alors qu'elle chantonnait un morceau qui disait que les filles n'avaient pas de chance, elle vit en tournant sur sa rue, une scène qui l'attrista pleinement. Le sans-abri qui avait l'habitude de se trouver là était dans un état de souffrance extrême en raison de la météo peu démente. Entre deux congères de neige, il était recroquevillé sur lui-même, essayant de réchauffer ses mains avec son simple souffle.
Rapidement, en courant même, elle passa devant le clodo, manquant de glisser plusieurs fois sur les plaques de verglas. Une fois chez elle, elle balança son sac sur son lit, prit un manala qu'elle avait fait elle-même sur la table de la cuisine, une orange et trois euros, venant de ses économies personnelles. Son sapin attendra.
Elle ressortit, puis se rendit à la boulangerie se trouvant à deux maisons de la sienne. Dedans, elle fut soulagée de voir qu'ils vendaient encore des chocolats chauds. Elle fit la queue, s'en payant un avec ses maigres trois euros et se redirigea à l'endroit où se trouvait le SDF. Celui-ci n'avait heureusement pas bougé. En même temps, pourquoi le ferait-il ?
«Tenez » dit Agathe timidement en arrivant à la hauteur du pauvre homme. « Ce n'est pas grand chose, mais c'est déjà ça».
Le clodo la fixa étrangement. Se foutait-elle de sa gueule ? Mais en voyant l'air insistant de la petite, il tendit ses bras frigorifiés pour prendre ce qu'elle lui tendait.
«Merci sincèrement ma p'tite».
L'homme porta à ses lèvres bleutées par le froid le petit verre en plastique contenant du chocolat chaud. Agathe avait toujours trouvé que la boulangerie faisait du chocolat chaud dégueulasse. Mais le sans-abri, lui, semblait n'avoir jamais gouté rien d'aussi bon. Il prit alors une bonne bouchée du petit homme de brioche.
«C'est moi qui l'ai fait toute seule, s'exclama fièrement Agathe. Ma maman n'a pas pu m'aider... C'est normal qu'il ait un goût bizarre.
-Ne dis pas ça p'tite. Il est excellent.
-Sûr ?
-Sûr. Même aussi sûr que si ta maman avait aidée, il serait encore moins bon.
-Merci beaucoup !
-Comment tu t'appelles ?
-Agathe. J'habite au 147, juste là-bas.
-C'est pour ça que je te vois aussi souvent...
-Exactement, j'habite là-bas depuis ma naissance. D'ailleurs, je vais devoir rentrer. J'ai des devoirs à faire, et...
-Et tu as froid. Ne t'inquiète pas, je comprends. Rentre vite !
-D'accord... Au revoir, Monsieur !
-Attends Agathe... Merci pour le chocolat et la nourriture. Beaucoup ne feraient pas ça. Tu es une très gentille petite fille. Tu reviendras me voir demain ? demanda l'homme plein d'espoir.
-Bien sûr ! Je vous apporterai une couverture ! Au revoir monsieur !».
Elle se dépêcha de rentrer, courant encore. Elle fonça se réfugier près de son radiateur, un petit sourire sur les lèvres.
La vie n'était pas sympa avec elle, mais elle, elle pouvait l'être pour ceux qui étaient dans le presque même état qu'elle.
Accolée au radiateur qui la réchauffait peu à peu, elle tendit la main vers son bureau, et arriva de sa hauteur à attraper son calendrier. Elle ouvrit la fenêtre du jour. Celle-ci abritait l'image d'enfants qui observait par la fenêtre la lune, resplendissante dans le ciel.
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