Quand le sixième anniversaire d'Agathe fut venu, son grand frère, pour une fois, lui acheta un cadeau magnifique.

Il ne faisait jamais grand chose pour Noël, mais quand l'anniversaire de sa petite sœur sonnait, il la gâtait comme un fou. Avant, bien évidemment.

Pour ses six ans donc, il lui offrit une guitare. Ce n'était pas une Fender, et en fait, elle n'avait pas de marque, mais cela suffisait à Agathe. Sa guitare était magnifique.

Très vite, elle s'imagina devenir célèbre avec le duo qu'elle formerait avec Blonk. La bonne blague.

Blonk, lui, jouait du tambourin la plupart du temps. On ne savait comme il se l'était procura, mais il l'avait et c'était le plus important. Son autre instrument caché était une petite trompette. Il ne la sortait que très rarement mais quand il en jouait, c'était magnifique.

Leur duo magique était là.

Avec la trompette et la guitare, Agathe et Blonk s'imaginaient, les soirs moroses, qu'ils étaient les plus grandes stars en vogue du jazz et de blues.

Ils s'imaginaient être là, tous les deux, l'un à côté de l'autre et en harmonie, sur une des plus grandes scènes de Louisiane ou de Nouvelle-Orléans.

«Ce soir, pour vous mesdames et messieurs, voici le duo de jazz le plus en vogue du moment ! Venant spécialement pour VOUS d'Allemagne, voici Agathe à la guitare et Blonk à la trompette. Musique maestro !».

Agathe s'occupait de la programmation des spectacles, alors que Blonk s'occupait de tout mettre en place.

Une fois qu'Agathe s'auto-annonça d'une manière endiablée, elle se plaça sur son lit, sa guitare dans les mains. Toujours sur l'armoire, Blonk portait sa petite trompette à sa bouche.

Alors que les doigts d'Agathe volaient sur les cordes et les frettes de sa guitare, Blonk entamait son solo. Une douce musique emplissait la pièce. Ce son de blues portait le nom de trois alcools qu'Agathe voyait souvent dans les mains de sa mère. Une sorte d'hommage qu'elle lui faisait.

Exténuée, Agathe pensait avoir joué des heures entières. Pourtant, il ne s'était écoulé que trente minutes. En un dernier effort, elle ouvrit sa onzième fenêtre de calendrier. L'image qu'elle abritait montrait un couple patinant amoureusement sur un lac gelé. Agathe fit une petite moue. Elle n'aimait pas vraiment la glace.