Chapitre 10
« Avoir une équipe aussi soudée me fait chaud au cœur. Nous sommes tous là les uns pour les autres. Aujourd'hui, j'ai appris à mon aide de camp comment se servir d'une des armes inventées par Mike. Il s'est largement inspiré de nos anciens jeux vidéos. Je perdais jamais et maintenant, je dois faire en sorte que Andy non plus, ne perde pas avec une telle arme entre les mains...»
Extrait du journal de guerre du Ltn. Col. W. Abbot - Avril 2033
Wren
Harris arriva dans mon bureau et se laissa tomber sur la seule chaise de libre de mon bureau. Il me paraissait fatigué, mais déterminé.
– Tu fais quoi ce soir ?
– Je rentre chez moi et je mate un vieux film.
– Ratééééé ! Ce soir, on va à une soirée de contrebande d'armes.
Une vente d'armes illégale ? Je me redressais sur mon siège, intéressé, tandis que mon collègue me tendait un dossier. Comme d'habitude, j'attendis qu'il m'en fasse un résumé. Harris n'avait pas changé avec moi depuis que je lui avais appris, quelques semaines auparavant, qui j'étais.
– Apparemment, ton arme utilisée pendant la guerre est le clou du spectacle. Elle a été volée par des fanatiques alors qu'elle se trouvait chez Grand-mère, on la recherche depuis des années et d'après mes indics, elle serait là ce soir.
– Ils ont volé mon arme ? Quelle bande d'idiots, grognai-je. Elle est calibrée pour un nombre limité de personnes, dont ton arrière-grand-mère. Elle ne pourra jamais servir, sauf si quelqu'un est tombé sur les notes de Mike pour la réinitialiser
J'espérais que ce n'était pas le cas. Les armes utilisées durant le conflit étaient super puissantes. Un mélange de nucléaire et d'armes extraterrestres. Elles étaient faites pour éliminer toute menace. Une telle arme entre les mains de criminels pourrait être une catastrophe. À la fois réglée pour tuer les Arachnes et causer des dégâts technologiques, l'invention de Mike nous avait beaucoup aidés durant la guerre. Mais... elle pouvait aussi causer des dommages actuellement. Elle pourrait désactiver tous les robots d'un seul coup.
– C'est à quelle heure ?
Un sourire s'afficha sur le visage de mon coéquipier. Lui et moi, depuis que nous bossions ensemble, étions toujours prêts à affronter le mal de plein fouet. C'était exaltant d'arrêter des connards. J'avais une telle soif de justice. J'en avais parlé avec Élora d'ailleurs quand nous avions passé notre soirée à l'hôtel la nuit précédente. Elle m'avait parlé des carnets. Mes carnets. Ainsi Mike les avait gardés. Il avait dû les relire plus d'une fois... pourquoi ne m'avait-il rien dit la dernière fois que je l'avais vu ? Pourquoi ne pas me les avoir rendus ?
– Et sinon... c'est qui la fille ?
– Pardon ?
– Celle pour qui tu as changé ta coupe de cheveux la semaine dernière ?
Je me mis à ricaner avant de lui répondre.
– Élora Montalemont.
– Mais pourtant, tu tapes dans sa catégorie ! me charria-t-il. Bien joué mon pote ! Aucune femme n'est plus belle que la mienne, mais elle est mignonne. Jeune, mais mignonne.
Je soupirai en attrapant mon blouson de cuir.
– Oui, je sais qu'elle est jeune, mais... elle est vraiment incroyable, Joab. Pas autant que Sky, parce qu'elle est parfaite ta femme, mais elle est d'une intelligence hors du commun. Et elle n'est pas que mignonne, elle est belle. Elle est exceptionnelle.
– Et tu es amoureux d'elle après trois parties de jambes en l'air. Wow.
Je protestai mais mon ami ne semblait pas enclin à retirer ses paroles. Il se pencha vers moi et posa ses mains sur mon bureau.
– Mon pote. Tu as la lueur dans les yeux. Celle qui clame au monde que ton cœur est pris. Tu peux pas y échapper. T'es mordu de la petite Montalemont. Mais...
Il me scruta de son regard d'inspecteur.
– Tu vas lui dire quand ? Qui tu es vraiment ? ajouta-t-il comme si je n'avais pas compris ce dont il retournait.
– Je vais lui dire. Quand je saurais que c'est la bonne. Je ne vais pas révéler toute ma vie avant d'en être certain. Ce serait stupide.
– Grand-Mère Andy dirait que c'est toi qui es stupide.
J'émis un petit rire avant de commander une voiture pour ce soir. La vente d'armes se passait dans les bas-fonds de Seattle, littéralement. Nous allions devoir montrer patte blanche. Nous passâmes chez moi auparavant. J'avais de vieilles armes avec moi, non répertoriées par la police et elles allaient nous servir.
En ouvrant la porte de chez moi, la première chose que j'entendis, c'était du Gloria Taylor massacré par ma nièce, puis cette dernière en train de se trémousser en petite culotte. Quand elle nous vit, elle s'arrêta et se jeta dans mes bras.
– J'ai cru que tu étais mort quelque part ! Tu es pas rentré depuis une semaine, Wren ! Une semaine ! C'est a-bu-sé.
– Il s'est trouvé une copine pour de bon.
J'eus follement envie de tuer mon coéquipier, mais cela eut pour effet de faire taire ma nièce.
– Sérieux ? Élora Montalemont a accepté de te revoir plus d'une fois ? Je me disais bien que tu n'étais pas qu'entrain de travailler. Même toi tu as besoin de te reposer parfois ! Je suis super contente pour toi, oncle Wren.
– Et si tu allais t'habiller au lieu de te trémousser en slip devant mon collègue ?
– On dîne ensemble ce soir ?
Ses yeux brillants attendaient une réponse positive et ma non-réponse assombrit un peu son regard. J'ouvris la bouche pour lui promettre que c'était partie remise, mais un sourire désabusé s'afficha sur son visage.
– Je comprends, tu as une mission importante. J'espère juste que c'est pas à la vente d'armes de ce soir.
Les coins de ma bouche s'abaissèrent d'un coup. Comment pouvait-elle être au courant ? Harris émit un petit hoquet, et me fixa pendant un court instant.
– Oh, tu vas y aller. Vous ferez attention, n'est-ce pas ? J'ai cru comprendre que certains gros bonnets seraient présents et... ils sont dangereux. Vraiment dangereux.
– Leï... qu'est-ce que tu sais sur la vente de ce soir ?
– Mon ex n'était pas un gars bien, je te l'ai dit. Il fricotait avec des trafiquants et j'en ai entendu parler il y a des mois de ça quand ils sont venus à la maison. Et puis...
Son air taquin me fit penser furieusement à ma petite sœur.
– J'ai cru comprendre que ton arme faisait partie des œuvres. Il va de soi que je m'intéresse de près à tout ce qui touche notre famille.
– Tu connais des trafiquants ?
Je me tournai brusquement vers Harris, le regard furieux. Je savais ce qu'il allait proposer.
– Joab... grondai-je.
– Oui, je les connais. Vous voulez que je vous introduise auprès d'eux ? Y'en a un à qui j'avais tapé dans l'œil. Je pense que si je le contacte pour savoir ce qu'il fait ce soir... il va m'inviter et je pourrais me porter garante pour vous.
– Leïla, tu es...
– Je suis une Abbot, trancha-t-elle. Je suis aussi courageuse que toi ou que n'importe quelle personne de notre famille. Je peux très bien vous introduire auprès d'eux. Ensuite, je disparais et je rentre !
– Tu es une civile !
– Et la faute à qui, monsieur je refuse que ma filleule rentre dans l'armée ? Je sais me battre, tu me l'as appris, même si j'ai pas réussi face à Bike. Laisse-moi faire ça pour toi ! Oncle Wren... me supplia-t-elle presque. J'ai besoin de faire quelque chose pour quelqu'un, je vais devenir folle à rester ici, je suis perdue.
Elle savait que j'allais craquer. Elle le comprit avant même que j'ouvre la bouche. Elle attrapa son téléphone et appela sa connaissance. Tandis qu'elle le faisait, je me tournai de nouveau vers mon coéquipier.
– Fallait pas l'encourager.
– Je la protège coûte que coûte.
– Si ça devient trop dangereux, tu dois me promettre de partir avec elle. Moi, je ne mourrais pas comme ça. Par contre, c'est autre chose avec vous deux.
– Je te le promets. Je la mettrais en sécurité.
C'était tout ce que je voulais entendre. Lorsque ma nièce revint vers nous avec la certitude que nous pourrions rentrer, je la briefai légèrement sur la situation. Il était fort probable que le groupuscule anti-cyborg soit présent. Ils préparaient un mauvais coup, c'était certain ! Peut être que nous pourrions les infiltrer aussi. C'était pourquoi j'avais accepté que la prunelle de mes yeux se joigne à moi. J'étais son protecteur et même si Leïla était une adulte, il m'arrivait parfois de ne pas l'avoir comme tel. Elle était une enfant, la descendante de ma sœur. L'une des seules raisons pour laquelle je ne me détestais pas d'être encore en vie.
Elle revint vers Joan et moi, un sourire sur les lèvres.
– On a rendez-vous dans une heure ! Je lui ai dit que mon cousin et son pote étaient là et il avait hâte de vous connaître ! Je vais aller me changer tandis que tu me donnes une arme !
– Hors de question ! grognai-je.
Elle pouffa de rire en filant vers sa chambre. Je me tournai vers mon coéquipier mais il contemplait la ville en dessous de nous.
– La vue est splendide !
– Ouais c'est pas mal. Je t'avoue que je ne prends plus trop le temps de m'attarder là. J'ai une femme à la maison maintenant, je dois m'en occuper !
Joab me coula un regard étrange avant de remarquer que je plaisantais. Il n'était jamais venu chez moi. Il devait penser que je vivais dans un petit appartement mais c'était loin d'être le cas. À vrai dire, j'étais propriétaire de tout l'immeuble.
– Par contre, Jo... Je récupère mon arme à la fin. Elle disparaîtra des scellés. Je voulais juste t'en informer pour ne pas que tu t'inquiètes.
– Heu... d'accord ? Mais je préférerai ne pas perdre mon job.
– Je préviendrai le président. Il ne peut rien me refuser.
Je sentis du mouvement derrière moi. Je pivotai pour découvrir ma nièce vêtue d'une robe moulante. Elle vit ma désapprobation.
– Et comment tu comptes cacher une arme sur toi ? Il y a à peine assez de tissus pour couvrir ton corps !
– Vu que j'ai personnellement dû revoir ta garde robe, je refuse toute remarque de ta part, Wren. En plus je suis vachement sexy !
Je fis mine de vomir mais je l'embrassai quand même sur la tempe.
– Prends un manteau chaud, il fait super froid dehors. Et...
Je m'approchai du tableau pour dévoiler l'un de mes coffres forts. J'en sortis un flingue que je lui tendis avant de nous armer, mon coéquipier et moi.
– Je n'en veux pas, oncle Wren. Je suis nulle en tir, je risquerai de blesser un innocent. Je partirai dès le début de la vente.
Elle attrapa son manteau et réajusta son rouge à lèvres avant de laisser un nuage de parfum autour d'elle.
– Allons-y...
La voiture banalisée était déjà garée devant chez moi. Je pris le volant laissant les deux autres se battre pour aller devant à mes côtés. Ma petite nièce finit par obtempérer pour aller à l'arrière du véhicule. Elle nous écoutait égrener des conseils de sécurité mais je savais qu'elle ferait attention. Je m'étais beaucoup occupé d'elle quand elle était jeune et elle était très prudente. Elle n'était pas du genre à se mettre volontairement en danger.
En sortant du véhicule, elle avait son petit sourire insolent sur le visage. C'était le même quand elle était encore adolescente. Elle était contente de faire un mauvais coup. Je fixai les alentours sans pour autant avoir l'air d'un flic qui observait absolument tout. Joab semblait beaucoup plus détendu que moi. Nous étions dans un des endroits où j'aurais préféré ne jamais voir ma nièce déambuler Sombre, glauque, dangereux. Génial. Je me rapprochai d'elle alors qu'elle rentrait dans un bâtiment juste devant nous. La musique me paraissait trop forte, la fumée qui se dégageait des tables n'était pas constituée de tabac, et les gens... aucun n'était recommandable.
Je me rapprochai de ma nièce, chuchotant à son oreille que le premier qui la pelotait, je le décapitai. Elle m'adressa un sourire complice avant de se rendre près du bar, juste derrière un homme aux cheveux noués au catogan.
– Je vais prendre un Coswar et ce sera sur la note de monsieur, juste ici.
L'homme qu'elle venait de désigner pivota et j'eus la surprise de voir un agent infiltré de la police. Il ne nous remarqua pas immédiatement, mais il serra ma nièce dans ses bras.
– Salut beauté.
Son ton était un peu trainant. Il lui sourit en lui caressant la joue avant de lever les yeux vers nous. S'il se souvenait de nous, il n'en fit pas la moindre remarque. Il se contenta de nous fixer jusqu'au moment où Leï nous présenta. En aucun cas, je ne devais griller sa couverture.
– Ils ont eu peur pour moi. Tu aurais dû les voir en mode garde du corps dans la rue, c'était hi-la-rant. Je pensais que tu étais toujours en Océanie....
– Non, je suis rentré y'a deux jours... et toi, tu n'es plus avec Bike.
– Non. T'es loin d'être un enfant de chœur et pourtant... il me semble que tu as des valeurs. Tu aurais levé ta main sur ta copine toi ? Bike est donc un homme sans honneur, conclut-elle alors qu'il secouait la tête. Et ça, je ne le supporte pas.
Le barman lui apporta son verre et elle le porta à ses lèvres avant de soupirer.
– Mon Dieu que c'est bon ! Vous voulez boire quoi les garçons, je vous invite, lança-t-elle vers moi.
– Une pinte de Devil's, commanda mon coéquipier. Et je ne laisse pas les petites filles payer.
– Deux ! émis-je à mon tour. Moi je te laisse régler la note, j'ai pas autant d'honneur.
Elle me tapa dans le bras, ce qui eut pour effet de me faire rire. Une fois mon verre à la main, le fameux Leonard nous mena sur une table un peu à l'écart.
Son regard, je l'avais vu sur des centaines de mecs avant lui : en dépit de sa couverture, il était attaché à ma nièce. Elle le charmait mais je ne l'écoutais que d'une oreille.
– Tu veux qu'on aille danser dans un endroit un peu moins glauque ? proposa-t-elle.
– Non, princesse. Je suis occupé ce soir.
– Où ça ? Je ne pense pas que tu vas autant t'amuser que si tu restais avec moi, Leonard.
Il tourna la tête vers moi, suspicieux.
– Tu peux lui faire confiance, intervint ma nièce.. Je lui confierai ma vie. Plus loyal que lui, ça n'existe pas.
– Tu te souviens de l'affaire dont on avait parlé la dernière fois qu'on s'est vu chez Bike ? Elle doit se dérouler ce soir.
– J'avais oublié que c'était ce soir, j'étais pas trop au courant des projets de Bike mais ça m'arrange à vrai dire. Je peux te faire confiance, pas vrai ?
Elle posa sa main sur la sienne, prête à lui accorder le coup de grâce.
– Oui, évidemment.
– Bike m'avait dit qu'il y avait l'arme de Wren Abbot, c'est vrai ? Parce que si c'est le cas, j'aimerais que tu t'en portes acquéreur et que tu me la revendes ensuite.
Le regard de l'agent infiltré se changea, comme si sa perception de ma nièce venait de la changer irrémédiablement. Il allait refuser aussi sec et comme je n'avais pas l'intention que ma nièce se retrouve sur une liste de potentielle suspecte, j'intervins.
– Leï et moi sommes des descendants de la sœur de Wren Abbot. Nous aimerions récupérer ce bien de famille qui nous a été volé. Votre prix sera le mien, quel qu'il soit.
Le flic me coula un regard blasé.
– C'est pas comme ça que ça marche.
– Je sais. Alors je m'engage à vous aider quelque soit le domaine. J'aurais une dette envers vous.
– Et moi aussi, poursuivit Leïla. S'il te plaît, Leo... Tu nous rendrais un service immense.
Il hocha la tête après nous avoir scruté l'un après l'autre. J'allais devoir le chopper pour lui dire que nous étions nous aussi sous couverture, non pas pour la vente d'armes mais pour chopper le groupuscule que nous cherchions depuis des mois...
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