Chapitre 56
17 décembre
Chris se sentait glacé malgré la tasse de thé chaude entre ses mains. Il ne comprenait pas comment Cam faisait pour rester aussi calme et composé.
Lui se sentait à la fois hors de lui, tremblant, sur le point de vomir et prêt à rugir sa colère. Il en avait des frissons.
[L'injustice de la situation me restait juste en travers de la gorge. J'ai déjà dit à quel point je déteste les situations injustes qui jugent sur la couleur de peau ou la sexualité ?
Je crois que oui, en fait.
Mais ça m'énerve, genre, vraiment.]
— Mais, elle va vraiment pas te laisser revenir , s'inquiéta Chris qui, pour une fois, ne supportait plus le silence.
— Je pense qu'elle doit être en train de balancer rageusement toutes mes affaires dans des cartons.
— Je peux faire quoi pour arranger le truc ? Parce que c'est à cause de moi ! Et c'est la deuxième fois ! Je...
— Ce n'était pas ta faute la première fois et c'est toujours pas le cas. Chris, calme-toi, chuchota Cam avant de se lever.
Le jeune homme marcha droit vers le bureau en désordre de son hôte, y récupéra le cube...
[Non, je ne le dirai pas.]
... et vint le glisser entre les mains de Chris.
—Je ne rentrerai pas. Pourquoi faire de toute façon... pour m'excuser ? Je n'ai rien fait de mal. Et toi non plus. Alors qu'elle aille se faire... tu vois ce que je veux dire. Tout ce que j'ai envie, là...c'est de rester avec toi, Chris. Rien que tous les deux.
— A..A..Alors les plans n'ont pas changé ? murmura Chris, incertain.
— Pas pour moi. Et... pour toi ?
[ Deux idiots qui essayent de flirter, voilà à quoi on ressemblait. Enfin, surtout moi, Cam était aussi sexy que quand il me sert des gratins de pâtes. Ou qu'il se déshabille. Ou qu'il chante. Enfin, il était Cam, quoi.
Alors, évidemment, Cam est bien plus qu'un beau gosse bien fait avec qui j'avais envie de m'envoyer en l'air. C'est juste qu'à ce moment-là précis, je voulais absolument ne penser à rien d'autre que ça pour éviter trop de pensées intrusives de venir.]
— Faut peut-être juste qu'on aille se doucher avant... il faisait chaud au cinéma, on pue un peu.
[Bon, d'accord, il y a mieux pour se mettre dans une ambiance romantique. Mais il faut pas trop m'en demander non plus. Même avec le recul, je vois pas trop ce que j'aurais pu dire à la place !]
Cam éclata de rire et acquiesça, non sans remarquer qu'il aimait la manière si particulière de Chris de dire les choses. Ce dernier bougonna pour se donner une contenance, mais il sentait bien ses joues chauffer.
Il était faible face aux compliments de Cam.
[Oui, oui ! On peut fêter ça, mais à ce moment-là, j'ai compris immédiatement que Cam me faisait un compliment ! Sans me poser de questions, sans avoir de doute, rien !
Cam me faisait un compliment et j'étais absolument ravi. Et gêné.
Et j'avais envie de m'enterrer dans un trou aussi, mais je suis plutôt aller m'enterrer dans la douche.
Même si on ne peut pas vraiment dire qu'on s'enterre sous un jet d'eau brûlante !]
Tandis qu'il marchait seul vers la salle de bain sous l'œil plus qu'intéressé de Cam, Chris ne savait pas s'il devait être soulagé de ce sursit ou déçu de devoir se laver seul.
[C'était pas le pire de mes questionnements à ce moment-là. Non, parce que même si je n'avais jamais couché avec un homme (ni une femme cela dit), j'en connaissais assez pour savoir que notre soirée coquine nécessitait quelques préparatifs.
En revanche, savoir comment s'y prendre pour ces fameux préparatifs, là, non. Vraiment pas. J'y suis allé à l'aveuglette. Je préfère ne rien dire de plus.]
Quand il ressortit de la salle de bain, Chris était incapable de regarder autre chose que ses orteils. Il ne releva pas le nez lorsqu'il invita Cam à aller se rafraichir à son tour, pas plus qu'il ne s'intéressa à son environnement quand il s'enfouit sous sa couette. Il avait juste pris la peine d'enfiler un pantalon de jogging floqué du nom de son groupe de KPOP préféré.
Pendant que Cam s'affairait dans la pièce voisine, Chris attrapa son téléphone. Il avait besoin de se changer les idées. Il échangea quelques messages avec Py qui était surexcité à la fois pour lui et pour Lise qui devait, elle aussi, "passer du bon temps".
[Autant dire que pour se changer les idées, c'était pas le bon plan]
Heureusement pour lui, Clem ne tarda pas à rejoindre la conversation et, de son ton à la fois maternelle et autoritaire, elle rassura Chris et le jeune homme serait resté calme...
[Enfin, aussi calme que possible parce que je n'avais pas osé leur parler de la mère de Cam, et ce tout petit point négatif me turlupinait un tantinet.]
... si Py n'avait pas lancé, juste avant de quitter le tchat : au pire, tu risques quoi à part d'avoir mal au cul demain ?
[La délicatesse de Py n'est à nulle autre pareille... et c'est une des raisons qui font que je l'apprécie ! Si quelque chose lui passe par la tête, il le dit avec franchise et sans honte. Mais toujours avec respect. Jamais il ne se permettrait d'être odieux sous couvert d'honnêteté !
Heureusement, parce que je le démarrerais comme il faut sinon.]
Chris se sentait gêné alors qu'il verrouillait son téléphone. La situation n'était elle pas un peu étrange ? Est-ce que le désir pouvait survenir sur commande de cette manière . Ne fallait-il pas réchauffer l'ambiance pour que ça fonctionne ?
Cam et lui n'allaient tout de même pas s'installer côte à côte et se dire " bon, on le fait ou pas ?" !
[Oui, oui, j'imaginais vraiment que ça pourrait se passer comme ça.]
La première chose que Chris fit quand Cam sortit de la salle de bain fut de le lui demander.
[Faux, la première chose que j'ai faite, c'est regarder les gouttes d'eau qui roulaient sur ses épaules, sur son torse et ses tétons. Ça paraît un peu cliché, je sais, mais...
Non, vraiment, j'étais captivé par les gouttes d'eau sur son corps. Qui ne le serait pas ?
Oui, bon, tout un tas de personnes ne le serait pas, mais je veux dire : qui, dans mon cas, avec le crush que j'avais sur Cam et l'envie d'en faire mon petit ami, ne le serait pas ?]
Cam se figea, le nez plissé et les sourcils froncés...
[Il n'avait juste pas remis ses lunettes, rien à voir avec ma question.]
... puis il rejoignit Chris sur son lit. Il lui saisit la main avec délicatesse, la porta à ses lettres et répondit par une simple question :
— Comment penses-tu que font les couples pris d'une envie subite ?
— Les plus pressés se contentent de baisser leurs frocs et se prendre contre un mur, non ?
— Je doute que ce soit la majorité, rit Cam. Je ne parlais pas de cette catégorie, mais imagine : un couple va au cinéma, il passe une bonne soirée. En rentrant, l'un des deux à envie d'aller plus loin...
Cam se rapprocha de Chris.
— L'autre est d'accord. Le premier se douche et attend que le deuxième fasse de même. Puis ils se retrouvent sur le lit, à moitié nu, bien heureux de pouvoir se rincer l'oeil. Tu trouves ça encore bizarre ?
— Tu... tu viens de nous décrire, déglutit Chris en tentant de ne pas loucher sur le torse bien fait et surtout très proche de Cam.
— Pure coïncidence, contra Ca en se penchant vers lui.
L'odeur du savon enivrait Chris. La manière dont Cam le dévisageait l'enflammait. ET cette proximité... Ces gestes de Cam entre l'effleurement et la caresse. L'attention qu'il lui portait.
— Peut-être que... qu'il y a besoin de rien pour être excité, souffla Chris. Que...que le mood... que...
— Moi je n'ai besoin que de te voir, l'interrompit Cam. Parce que tu es beau, parce que tu me plais, parce que tu es touchant, adorable, drôle. Parce que je rêve de ce moment depuis des mois. Parce que mes rêves ne valent pas la réalité. Parce que je me suis aperçu, en te côtoyant, que tu es tellement plus qu'un bel homme. Te trouver beau n'était que la première étape. Après, je t'ai trouvé intéressant. Intelligent. Logique. Intrigant. Passionné et passionnant. Et chaque minutes passées avec toi me montrait à quel point j'aurais eu tort de me limiter aux apparences. Avant, je te voyais. Puis je t'ai regardé. Et maintenant... je te vois. Si tu le veux bien, je vais te toucher maintenant. Embrasser ta peau, ton corps.
Fébrile, Chris hocha la tête, incapable de prononcer le moindre son.
[Et il faut le dire, incapable de comprendre que c'était juste un gros, un énorme, un incommensurable JE T'AIME que venait de me balancer Cam.
Chris entrave que dalle, tout ça, tout ça.]
Les mots de Cam s'empêtraient dans son esprit. Chris devait-il les croire ? Y comprendre un sens caché ?
[Ce n'était pas tellement caché...]
S'en méfier ? Était-ce juste une tirade pour les mettre dans l'ambiance ?
[Évidemment que non.]
Devait-il lui aussi formuler quelque monologue romantique à voix haute ?
[ Cam aurait bien aimé, mais entre nous, il ne s'attendait pas à ce que je le fasse. Il craignait juste que, encore une fois, je comprenne tout de travers.
Eh bien... craintes fondées !]
Devinant le malaise qui ne quittait pas tout à fait son faux petit ami, Cam pris les choses en mains. Il ne laissa pas à Chris le temps de penser à quoi que ce fut. Leurs derniers habits ne restèrent pas longtemps une barrière aux caresses. En tas au pied du lit, ils accueillirent bientôt Chardon et Renoncule qui étudiaient avec curiosité l'étrange ballet des deux humains.
[Je n'aurais jamais pensé que des chats pourraient être aussi voyeur, au passage.]
Si au début, Chris était encore tendu et inquiet, bientôt, il se découvrit presque plus demandeur que Cam. Les doigts et les lèvres de Cam le rendait fou. Il voulait à la fois en recevoir plus... et en donner plus.
Pour Cam, avec Cam, il ressentait un désir pas totalement inédit...
[Forcément, ce n'était pas la première fois qu'on s'amusait comme des adultes.]
... mais bien plus puissant que tout ce qu'il avait pu éprouver jusque là.
La sensibilité de sa peau se trouvait décuplée. Son odorat également. Son goût. Son ouïe. Il avait l'impression d'être conscient de chaque respiration, chaque soupir de Cam, chaque geste jusqu'au bruissement pourtant discret des trois préservatifs que le jeune homme extirpa du tas de vêtements.
[C'était une opération risquée : Chardon a bien failli chopper la ribambelle scintillante. Je l'ai chassé : aucune envie de retourner encore aux urgences vétérinaires pour "Chaton ayant mâchonné et avalé une capote".]
Toutes les inquiétudes de Chris s'étaient évanouies lorsque Cam lui demanda d'ouvrir le lubrifiant : il avait juste envie de se laisser porter par les événements sans réfléchir à qui ferait quoi, quand, comment. Il profitait juste de cette soirée merveilleuse. De Cam. De sa nudité parfaite, sa virilité...
[OK, stop ! Je dois admettre que c'est un peu gênant de repenser à ça. Enfin, gênant n'est pas le mot.
Mais penser à ce moment en étant si proche de Cam. De Cam nu. Alors que nous étions nus aussi à ce moment-là.
Repenser à ses mains sur moi, cette délicieuse sensation d'effleurement, aux sillons brûlants qu'il laissait sur ma peau.
Repenser à sa fermeté dans ma paume. À sa vigueur lorsqu'il m'a retourné sur le ventre. À cette étrange sensation d'agonie alors qu'il s'enfonçait lentement, très lentement.
Repenser à sa gentillesse, sa prévenance. "Est-ce que tu as mal ? Est-ce que ça va ? Je peux y aller plus fort ? Plus loin ? La position te convient ?"
Mais ce qui me donne le plus chaud, c'est de repenser à cet instant où il s'est allongé, offert, et m'a invité à lui faire l'amour à mon tour.
Je ne suis pas sûr de me souvenir de tout. Je sais que mon esprit a comme claqué à ce moment-là. Cam était trop beau. Trop désirable. Trop... lui.
Je n'ai pas été aussi doux que lui. Pas aussi attentif. Pas aussi patient. Et pourtant, Cam a continué d'être cet homme adorable et rassurant qu'il est toujours.
Je dois avouer quelque chose : il m'est arrivé de penser qu'après avoir conclu, je me désintéresserais peut-être de lui. Qu'au fond, je ne voulais que ça : coucher avec.
J'avais tort, totalement tort. Et surtout, je n'allais en prendre la pleine mesure que le lendemain, et pas de la plus agréable des manières.]
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