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Chapitre 25

***SOKHNA DIARRA TAVARÉZ***

Allongée sur le dos, les yeux fixés sur le plafond, je réfléchissais à ma vie. Cette vie que j'avais failli perdre il y a à peine un jour.

Les images de cet événement terrifiant défilaient dans ma tête, et l'adrénaline qui pulsait encore dans mes veines me laissait étourdie.

J'étais assaillie par une profonde gratitude mêlée d'une certaine perplexité. Comment avais-je pu échapper à ce destin funeste qui semblait me tendre les bras ?

Était-ce une série de coïncidences fortuites ou de simples rencontres fortuites ? Je ne saurais le dire.

Je suis consciente que les circonstances avaient joué en ma faveur, mais je ne pouvais nier qu'il y avait aussi une part indéniable de chance. La chance d'avoir Papis à mes côtés à ce moment précis, qui s'est même pris un coup de couteau pour me sauver, pour nous sauver.

Nom de Dieu, je n'ose même pas imaginer ce qui se serait passé s'il n'avait pas été là. J'aurais sans doute été tuée par ces voyous et on parlerait de moi aujourd'hui au passé.

Et dire que je le méprisais, pour ne pas dire que je le haïssais, depuis notre confrontation au tribunal et nos rencontres hasardeuses en dehors du cadre professionnel qui n'avaient pas contribué à mieux nous connaître.

Mais aujourd'hui, tout avait changé. La perspective de la mort imminente avait balayé toutes mes rancœurs envers lui. J'étais submergée par une profonde reconnaissance envers cet homme que j'avais si facilement jugé par le passé, sans vraiment le connaître. Je pouvais désormais voir en lui un héros, quelqu'un prêt à risquer sa propre vie pour en sauver une autre.

Ma gratitude envers lui était immense, mais je ressentais également une certaine perplexité. Je me demandais comment nous avions pu en arriver là ? Comment avais-je pu être si aveugle face à sa véritable nature ? Je me sentais remplie d'un mélange d'émotions contradictoires, oscillant entre la reconnaissance et le regret.

Reconnaissance, car la vie m'offrait une nouvelle chance de respirer, de sentir et surtout d'aimer mon entourage, en particulier ma famille, surtout mes parents que je négligeais souvent en les rendant visite que très souvent.

Je me rends compte de tous ces précieux moments que j'avais ignorés, des rêves que j'avais repoussés pour plus tard, persuadée d'avoir tout le temps du monde.

Mais cette illusion s'était dissipée lorsque ma vie avait frôlé le précipice. J'avais réalisé l'urgence de vivre pleinement, de saisir chaque instant avec détermination et gratitude.

Et je ressentais du regret, car j'avais jugé trop hâtivement une personne sans la connaître, ce qui n'est pas dans mes habitudes. Mon erreur a été de me focaliser sur la partie apparents au point d'en oublier qu'il y'a toujours une partie cachée mais c'est fini. J'ai bien compris la leçon.

C'est avec ces pensées que j'ai décidé d'appeler sa mère pour prendre de ses nouvelles. Lorsque j'ai quitté l'hôpital, il était toujours inconscient, et sa mère m'a forcé à aller me changer et profiter pour me reposer. Ah que dire de cette femme ? Une perle rare Ma Sha الله avec une bonté extrême.

C'est après la quatrième sonnerie qu'elle répondit enfin.

—Assalamou Aleykoum Tata Fary ! L'ai-je saluée.

—Wahanleykoum salam Sokhna. Nagua déf ?(Comment vas-tu ?)

—Ça va tata je vais bien Alhamdoulilah.

—Mba nopalou ngua bou bakh (Tu t'es bien reposé j'espère ?) S'enquit-elle avec une telle douceur et bienveillance.

—Wa légui mom thiono bi wathie na (Oui ça va maintenant la fatigue est partie).

—Alhamdoulilah alors.

—Naka Papis nak ? Yéwouna ? (Et Papis alors ? Il s'est réveillé ?)

—Waw si mbakhou yalla yéwouna. Ma ngui la beugone wo sakh lata nguakoy déf pour yeugueul lako (Oui, par la grâce du Tout-Puissant, il est réveillé maintenant. J'étais sur le point de t'appeler pour te l'annoncer, mais heureusement tu l'as fait).

—Ah Ma Sha الله quelle bonne nouvelle ! Je suis tellement soulagée d'entendre cela. Je vais de ce pas m'apprêter et venir le voir.

—Néné touti yaw tamit boul sonal sa bopp. Déjà yaw ya ngui fanane fi ba parei ngua beug déplacé wou encore. Togual nopalou toguayou hôpital dafa méti (Ma chérie, ne te fatigue pas davantage. Tu as déjà passé la nuit ici et tu veux encore revenir. Repose-toi, les hôpitaux sont insupportables)

—Dédétt Tata bayil ma nieuw rék. Papis limou déf dafa reuy, dafma walou tei amana noumou done démé tay fofou mou teudeu mane mi mafa narone teudd wayei yalla da wédi rék (Non, non, Tata, laisse, je vais venir. Papis a risqué sa vie pour me sauver. Peut-être que c'est le destin, mais je suis convaincue que le coup de poignard m'était destiné, et non pas à lui).

—'Mouk ! Boul wakhati mouk lolou Sokhna. Yaw tamit boula dara dalone nonou lay amé louma méti nakhté iow ak Papis yeup la bolei yamalé kone boul meusseuti guéné Yeine kaddu yi (Ne redis plus jamais ça Sokhna. S'il t'était arrivé quelque chose, je me serais vraiment sentie mal. Tout comme Papis, tu es ma fille et je ne souhaiterais jamais vous voir dans de telles conditions. Alors, ne laisse plus de telles paroles sortir de ta bouche) M'admonesta-t-elle d'un ton ferme.

—'Ma ngui diégalou Tata (Je m'excuse Tata)

—'Amoul solo. Baxna kone ma ngui lay khar basi kanam (Ne t'inquiète pas. Je t'attends alors à tout à l'heure).

—D'accord In Sha الله.

Après avoir prononcé ces mots, j'ai raccroché et me suis rapidement préparée avant de quitter mon appartement. Heureusement, j'avais fait appel à un mécanicien qui avait réparé ma voiture, réglant ainsi le problème rencontré.

J'en profitai alors d'acheter de la nourriture en cours de route pour exprimer ma reconnaissance envers Papis, même si je savais que cela ne serait jamais suffisant pour le remercier comme il le méritait.

Quelques minutes plus tard, j'ai atteint l'hôpital. Je me suis renseignée auprès d'une infirmière qui passait par là, et elle m'a indiqué la chambre où se trouvait Papis.

Une fois devant la porte, j'ai pris une profonde inspiration avant de toquer et d'entrer, avec précaution, dans la pièce.

J'ai trouvé sa femme, que Tata Fary m'avait présentée un peu plus tôt, assise près de lui, lui tenant la main avec tendresse.

—Assalamou Aleykum. Euh...excusez-moi je vais repasser. Balbutie-je en tenant le poignet de la porte.

—Wahaleykoum Salam. Non vas-y Sokhna, entre. Je vais vous laisser seuls. Me répondit-elle gentiment.

Elle murmura quelques mots à son mari, puis l'embrassa doucement sur le front avant de quitter la chambre. J'hésitai un instant avant de m'approcher, mais Papis me demanda de venir m'installer sur la chaise. Pour la première fois, je me sentais mal à l'aise dans une telle situation.

—Papis, comment te sens-tu ? Demandai-je finalement.

Il esquissa un sourire et répondit faiblement.

—Comme si j'avais été poignardé.

Je souris malgré moi et posai le sac en papier sur la table de chevet.

—J'ai apporté de la nourriture pour toi. J'espère que tu as faim.

—Merci, c'est gentil de ta part, répondit-il.

—Je t'en prie, c'est le moins que je puisse faire, dis-je.

Un silence s'installa entre nous, qui dura quelques secondes ou peut-être des minutes. Je me sentais vraiment mal à l'aise. Nos regards se croisèrent à deux reprises, mais j'ai préféré détourner les yeux.

—Qu'est-ce qui se passe ? Je ne te connaissais pas aussi silencieuse. Où est passée Maître TAVARÉZ, l'avocate a la langue bien pendu ? Dit-il finalement, m'arrachant un rire pendant quelques secondes.

—Franchement, je ne sais même pas quoi dire. Je me sens tellement mal de te voir cloué sur ce lit, avec ce bandage et tout ça. Vraiment, je te demande pardon, Papis. Je suis vraiment désolée pour tout ça. Tout est de ma faute. J'aurais dû t'empêcher de te mettre en danger. J'aurais dû prendre ce couteau à ta place.

Il me regarda fixement avant de répondre calmement.

—Mais voyons, Sokhna, tu n'as pas besoin de t'excuser, ni de te reprocher quoi que ce soit. Nous étions juste au mauvais endroit au mauvais moment. Et si tu parles de cette blessure, ce n'est rien, ça guérira bientôt si Dieu le veut. Alors ne te prends pas la tête avec ça, c'était inévitable.

—En tout cas, cela ne m'empêche pas de te demander pardon. Parfois, nous sommes certes adversaires en tant qu'avocats, mais ça ne signifie pas que je te souhaite du mal. Loin de là. D'ailleurs, sache que je suis là pour toi si tu as besoin de quoi que ce soit.

Papis sourit légèrement et répondit avec un léger sarcasme.

—Veux-tu dire que tu vas prendre tous mes clients pendant que je récupère ?

Je ris et secouai la tête.

—Non, je ne suis pas si impitoyable que ça.

Nous continuâmes à discuter de tout et de rien, partageant des anecdotes et des souvenirs de notre travail d'avocat. Je me surpris à apprécier sa compagnie, réalisant que je l'avais sous-estimé. Il n'était pas seulement un concurrent, mais aussi un être humain avec des émotions et des histoires personnelles.

Le temps passa rapidement et je me levai pour partir.

—Je vais te laisser te reposer maintenant. Je passerai sûrement te voir chez toi une fois que tu sortiras d'ici, In Sha الله.

Il sourit faiblement et me fit signe de la main.

—D'accord. Merci Sokhna.

Je lui souris en retour et sortis de la chambre, me sentant un peu plus légère qu'avant.

***KEISHA NIANG***

Aussitôt que Charlotte descendit pour me laisser seule dans ma chambre, je me suis effondrée sur mon lit, essayant de contrôler mes émotions face aux vérités sanglantes qu'elle m'avait lancées au visage.

Entre colère, frustration et tristesse, je ne savais pas quel sentiment m'animait le plus. Il était indéniable qu'elle avait raison sur toute la ligne je devais le reconnaître.

Pourtant, au fond de moi, je savais qu'elle avait raison sur toute la ligne. Elle avait mis le doigt sur mes faiblesses, mes peurs les plus profondes, et cela me blessait au plus haut point. Je me rends compte que je faisais vraiment souffrir mon père dans toute cette histoire et franchement, il ne mérite pas cela.

Depuis le décès de ma mère il a toujours été là pour moi dans tous les moments de ma vie, alors que moi, c'est totalement le contraire. Et pourtant, il avait également perdu sa femme, avait été injustement emprisonné et avait traversé d'autres problèmes. Donc c'est moi qui devait plutôt lui montrer tout mon soutien et mon amour.

Cette prise de conscience me fit réaliser que tout cela devait prendre fin. Je devais tout arranger, et cela commencerait par cette rencontre avec cette femme.

Avec détermination, je pris mon sac à main et mes clés, puis je descendis. Je trouvai Charlotte seule dans le salon, sans la présence de mon père. J'en déduisis qu'il devait sûrement être dans sa chambre, et je décidai de lui parler dès mon retour.

Ensemble, nous sortîmes et prîmes ma voiture pour nous rendre chez cette femme. Sans que j'aie besoin de le lui demander, Charlotte mit l'adresse de la femme dans le GPS. Chacune de nous deux ne voulait parler d'où le silence tendu qui régnait dans la voiture créant une tension palpable entre nous.

Les conséquences de notre dispute insignifiante semblaient s'étendre bien au-delà de nous-mêmes, mettant à rude épreuve notre patience et notre capacité à communiquer. Et comme si cela ne suffisait pas, les embouteillages ajoutaient une couche supplémentaire d'agacement à notre trajet déjà peu réjouissant.

Les klaxons stridents, les moteurs ronronnants et les regards exaspérés des autres conducteurs semblaient se moquer de notre situation. Pourtant, aucun mot ne franchissait nos lèvres, créant un vide pesant dans l'habitacle.

Les regards évitent soigneusement de se croiser, chacun se perdant dans ses pensées. Le cœur battant, je cherchais désespérément les mots pour briser le mur de silence qui nous séparait. Mais chaque tentative était repoussée par une force invisible, une barrière érigée par notre fierté blessée.

Je me suis perdue dans les paysages urbains qui défilaient devant mes yeux, cherchant une distraction pour échapper à cette tension insoutenable. Les bâtiments imposants semblaient se fondre les uns dans les autres, tandis que les visages des passants devenaient flous et indistincts.

Le monde extérieur semblait lointain, détaché de notre réalité intime et silencieuse.
Le poids du silence se faisait de plus en plus lourd à mesure que les kilomètres défilaient. Je me suis demandée comment nous avions pu en arriver là, comment une simple dispute autour de nous pouvait avoir un impact aussi dévastateur sur notre relation.

Les petites choses prenaient soudainement une importance démesurée, amplifiant les frustrations et creusant un fossé entre nous.
Le bruit étouffé des pneus sur l'asphalte semblait être le seul compagnon sonore dans notre bulle de silence. Chaque minute qui passait nous enfonçait davantage dans un malaise palpable. Les secondes semblaient s'étirer à l'infini, révélant la fragilité de notre lien.

Pourtant, à travers cette ambiance tendue, je sentais une certaine réticence à lâcher prise. Un désir muet de réconciliation et de résolution flottait dans l'air. Nos regards furtifs se rencontraient brièvement, laissant entrevoir des éclats de tristesse et de regret.

Finalement, les mots se sont frayé un chemin hors de ma gorge nouée. D'abord hésitants, puis plus assurés, je me suis ouvert à Charlotte.

—Comment tu as fait pour connaître cette fille ? Demandai-je.

Oui, oui, c'est la seule chose qui m'est venue à l'esprit pour rompre la glace. Une question.

—Qui ça ?

—Cette fille... Amina.

Elle prit quelques secondes avant de me répondre.

—C'est sa mère qui me l'a dit. « Dire » pour ne pas dire présenter. Elle m'a révélé qu'elle la suivait à son insu jusqu'à ce découvrir sa maison mais aussi son lieu de travail, expliqua-t-elle.

—Mmh, et comment as-tu obtenu ses....enfin, nos échantillons pour le test ?

—Pour elle, je l'ai pris le jour où elle est venue à l'entreprise pour récupérer son argent, et pour toi... eh bien....le jour où nous nous sommes donné rendez-vous et que ton père t'a appelé juste après.

—En quelque sorte, tu nous as piégés, alors. C'est sympa. Vraiment sympa. Lançai-je, la regardant brièvement avant de reporter mon attention sur la route.

Suite à ces mots, les embouteillages se dissipaient peu à peu et la circulation devint plus rapide. Aucune de nous deux n'a reparlé, et c'est ainsi que nous restâmes jusqu'à ce que nous arrivions à destination.

Je garai la voiture devant une petite maison modeste mais jolie, d'un blanc éclatant, avec une devanture simple. Je ne m'attardai pas trop sur son apparence et sortis en même temps que Charlotte de la voiture.

Debout devant la porte, Charlotte sonna. Je ne savais pas pourquoi, mais j'avais un nœud dans l'estomac. J'avais l'impression que c'était une mauvaise idée de venir ici, mais je ne pouvais plus revenir sur mes pas. J'avais besoin de réponses à mes questions, en particulier concernant cette demi-sœur.

Une minute plus tard, une jeune femme d'environ quarante ans nous ouvrit la porte. Elle avait un teint caramel et une silhouette élancée. Ses cheveux noirs étaient soigneusement peignés et encadraient un visage émacié, mais ce qui attirait le plus mon attention étaient ses yeux

Ils brillaient d'une lueur curieuse, comme si elle avait longtemps attendu ce moment, la rencontre avec nous. Son regard était empreint d'une certaine tristesse mêlée d'une étincelle d'espoir.

Elle nous salua d'un sourire timide, les coins de ses lèvres frémissant légèrement. Son visage rayonnait d'une aura familière, et je ne pus m'empêcher de remarquer à quel point elle ressemblait à Amina, sa fille.

Les traits délicats, la courbe douce de ses sourcils, tout rappelait la jeune femme qui avait disparu de nos vies depuis trop longtemps.

Elle nous invita à entrer dans sa maison, et dès que nous franchîmes le seuil, une sensation de chaleur enveloppa mes sens. L'intérieur était simple mais chaleureux, les murs étaient habillés de tableaux d'art et d'un grand portrait de Serigne Babacar Sy. Contrairement à d'autres maisons, comme la mienne par exemple, les murs de celle-ci n'avaient pas de photos d'Amina.

Seules deux ou trois photos étaient encadrées, et ce n'étaient pas non plus des portraits de la dame des lieux, mais de deux personnes, un couple, dirais-je. Les images reflétaient un instantané du bonheur partagé, des souvenirs figés dans le temps.

Les éclats de rire cristallins, les sourires épanouis et les regards complices figés dans ces photographies révélaient une histoire de liens profonds et de moments précieux. Je pouvais presque sentir l'amour et la joie qui avaient imprégné ces murs au fil des années.

L'atmosphère dans la maison était calme, sereine, créant un contraste frappant avec la tension qui avait régné dans la voiture quelques instants plus tôt.

Chaque coin semblait respirer la quiétude, invitant à la détente et à la réflexion. Des fleurs fraîchement cueillies embellissaient la table basse du salon, diffusant un parfum subtil qui se mêlait à l'air ambiant.

La femme nous invita à nous asseoir sur un canapé confortable, recouvert d'un tissu aux couleurs apaisantes. Les nuances de bleu et de beige semblaient évoquer la tranquillité et l'harmonie. Je m'installai, absorbant chaque détail de l'endroit qui semblait déborder d'histoires à raconter.

Dans cette maison simple mais accueillante, je me sentais transportée dans un cocon où les soucis du monde extérieur s'atténuaient.

-J'imagine que vous êtes venues pour obtenir les réponses aux questions qui vous taraudent ? Commença la femme après nous avoir servi une boisson rafraîchissante.

Sa voix était douce et posée, mais je devinais une pointe d'appréhension dans son ton.

Voyant que je n'avais pas prononcé un mot depuis notre arrivée, Charlotte me lança un regard silencieux, me demandant ainsi la permission de parler. J'acquiesçai d'un signe de tête, lui laissant le soin de mener la conversation.

—Bon Madame Cissé, comme vous l'avez déjà connu de nom, voici Keisha Niang, la fille de Malick Niang, me présenta-t-elle.

—D'accord. Enchantée, Keisha. Je suis Samira Cissé, se présenta-t-elle à son tour.

—Enchantée. Répondis-je à voix basse, à peine audible.

Elle marqua une petite pause.

—Je tiens à vous remercier d'être venues jusqu'ici me rencontrer. Je sais que cela n'a pas été facile, mais vous êtes là, alors merci. Comme j'ai eu l'occasion d'en parler avec Charlotte, je suis la mère biologique de Amina. Je suis cette femme qui l'a abandonné si vous voulez.

Elle baissa la tête suite à ces mots, sûrement honteuse de devoir croiser nos regards et d'y lire une certaine répulsion, du moins de ma part. Mais moi, ce qui m'importait le plus, c'était de savoir. Savoir le pourquoi et le comment, et ainsi satisfaire cette curiosité brûlante en moi.

C'est pourquoi je n'ai pas pu garder le silence plus longtemps, et j'ai décidé de libérer les mots qui me brûlaient la gorge depuis mon arrivée. Je posai délicatement le verre de jus sur la table devant nous, me repositionnant pour lui faire face.

—Pourquoi avez-vous abandonné votre enfant ? Lâchai-je d'un ton sec, sans préambule.

—Keisha ! S'exclama Charlotte, choquée par ma brutalité, me pinçant discrètement le bras.

Je dégageais sa main sous le sourire discret de la dame.

—Non, laisse-la parler. Elle a le droit de savoir. C'est pour ça que vous êtes venues, non ? Alors, laissez-la s'exprimer. Vas-y, Keisha, je t'écoute. Tu peux me demander ce que tu veux, et je te répondrai sans détour.

—Moi, je veux juste une réponse claire et honnête. Je veux juste comprendre. Comprendre ce qui vous a motivée à abandonner votre fille. Comprendre pourquoi vous l'avez livrée à la rue, à la misère, au danger.

Elle m'écouta et encaissa mes mots, sans broncher. Elle devait s'y attendre, après tout. Elle devait savoir que je ne viendrais pas ici pour lui faire des compliments ou lui témoigner de la compassion.

—D'accord. Je vais vous répondre, mais s'il vous plaît, écoutez-moi jusqu'au bout. Ne me jugez pas avant de connaître toute l'histoire.

Elle marqua une pause et nous regarda à tour de rôle quelques instants comme pour voir

—Déjà, contrairement à ce que tu penses, à ce que vous pensez, sachez que je n'ai pas abandonné Amina par plaisir ou par indifférence. À cette époque, ma vie était très différente de ce qu'elle est maintenant. J'étais une jeune fille naïve, sans ressources et sans le soutien nécessaire pour élever un enfant. Certes, c'est moi qui ai joué avec le feu et qui m'en suis brûlée les ailes, mais lorsque j'ai appris que j'étais enceinte, mais lorsque j'ai découvert que j'étais enceinte, je me suis sentie dépassée par la situation. L'idée d'une grossesse était à la fois effrayante et écrasante pour moi. Je savais que je n'étais pas prête à être mère, mais malgré tout ça, je n'ai jamais pensé à avorter ni à rejeter la responsabilité de cet enfant. Je savais aussi que je ne pouvais pas faire ce mal à ta mère, qui m'a si généreusement accueillie dans sa maison comme une sœur et non comme une domestique. Je ne pouvais tout simplement pas lui révéler que j'avais flirté avec son mari, ton père, au point d'en tomber enceinte. Elle qui désirait tant avoir un bébé et qui n'y parvenait pas. Comment aurait-elle réagi si elle avait su ? Comment aurait-elle supporté cette trahison ? Non, je ne pouvais pas lui faire ça. C'est pourquoi j'ai pris la décision difficile de partir sans rien leur dire, espérant que c'était la meilleure chose à faire pour tout le monde. Je ne voulais pas que la naissance de Amina brise leur couple ni que toi, tu naisses dans une famille déchirée. Car oui, quelques mois après mon départ, j'ai appris que ta mère était enfin enceinte de toi. Et je me suis dit que j'avais bien fait de m'éclipser à temps. Je me suis mise à la recherche d'un travail pour subvenir à mes besoins et à ceux de mon enfant à naître. J'ai trouvé un emploi dans un bar miteux et c'est là-bas que j'ai donné naissance à Amina. Mais même en travaillant, je savais que je ne pourrais pas lui offrir une vie stable et épanouissante. Élever un enfant dans un environnement si malsain, entouré de personnes aux vies tumultueuses, n'était pas ce que je souhaitais pour elle. C'est pourquoi, avec un cœur lourd, j'ai pris la décision déchirante de confier Amina à d'autres mains. Comment ? En la déposant dans un coin d'une rue avec une note sur elle une semaine après sa naissance. Je suis restée dans les environs, gardant un œil sur elle, remplie de doutes et de peur quant à la décision que j'avais prise. Quand j'ai vu cet homme s'approcher d'elle, j'ai ressenti un mélange de soulagement et de tristesse. Je me suis dit qu'il allait peut-être lui offrir une meilleure vie que moi. Je me suis dit que je ne pourrais pas la reprendre sans bouleverser son destin. L'homme l'a prise dans ses bras et l'a emmenée chez lui, sans savoir qui j'étais ni pourquoi j'avais fait ça. Pendant des années, j'ai gardé un œil sur Amina, veillant sur elle de loin. Je me suis assurée qu'elle grandissait dans un foyer aimant et attentionné. Je sais que cela peut sembler égoïste de ma part d'avoir agi de cette manière, mais je n'avais pas le choix.

—Et voilà que vous ressortez la phrase fétiche de tous ceux qui se dédouanent de leur actes : « je n'ai pas eu le choix ». Crachai-je sarcastiquement. Je m'excuse d'avance pour la dureté de mes propos, Madame Cissé, mais je ressens le besoin de vous exprimer mon opinion. Je trouve que rien ne peut justifier votre choix passé. Vous avez fait une faute, une faute impardonnable, en abandonnant votre enfant qui n'avait jamais demandé à venir au monde. La situation difficile que vous avez vécue n'était en aucun cas la faute d'Amina, mais bel et bien la vôtre. Et je trouve qu'il était injuste de la condamner, car elle ne le méritait pas, tout comme aucun enfant ne mérite d'être abandonné par ses parents. D'ailleurs, je me demande si vous avez conscience de ce que cela implique de grandir sans pouvoir vivre avec ses deux parents, voire même avec un seul. Avez-vous seulement réalisé les épreuves que traversent les enfants abandonnés ? Et je ne parle même pas des conséquences psychologiques et émotionnelles profondes et durables qu'ils peuvent subir. Les enfants ont besoin d'amour, de soutien et de stabilité pour s'épanouir. En les privant de cela, on leur vole une part de leur innocence et de leur chance de mener une vie équilibrée. Ce qui s'est nettement reflété dans la vie de Amina, car je suppose que vous savez à quoi elle s'adonne ?

Je prononçai ces mots avec véhémence, sans regretter de les avoir prononcés. Je savais qu'ils pouvaient paraître blessants, voire cruels, mais je m'en fichais. Parfois, il fallait dire la vérité en face, sans mâcher ses mots.

Je ne sais pas ce qui m'avait poussée à réagir ainsi, mais je ne supportais pas d'entendre ses justifications. Je trouvais sa phrase "je n'ai pas eu le choix" complètement ridicule.

Comment osait-elle se décharger de sa responsabilité en abandonnant son propre enfant ? Comment pouvait-elle faire abstraction des conséquences dramatiques que cela avait eu sur la vie de sa fille ?

Ce n'était pas le moment de se lamenter ou de se chercher des excuses. C'était le moment d'assumer ses actes et d'en payer le prix.

Oui, je sais, je prenais la défense d'une fille que je ne connaissais pas, que je n'avais jamais rencontrée. Mais le simple fait qu'elle soit la victime de l'erreur de nos parents me suffisait comme motif. Sans compter qu'elle était aussi ma demi-sœur.

—Je comprends parfaitement ton ressentiment, Keisha, et je n'essaie pas de me trouver des excuses, car je sais bien que rien ne pourra justifier mon acte, mais je veux t'expliquer les choses, se justifia-t-elle d'un ton calme. Si je t'ai dit que je n'avais pas le choix, c'est parce que c'est la vérité. Outre le fait de vouloir offrir à Amina une vie meilleure que celle que je pouvais lui offrir à l'époque, je voulais la protéger. La protéger de la vie de débauche que je menais, mais surtout d'une personne. Une personne très dangereuse pour qui j'ai travaillé et qui n'aurait sûrement pas hésité à faire du mal à ma fille, voire à me séparer d'elle si elle avait découvert son existence et son lien avec Malick Niang, l'homme pour lequel cette personne nourrissait une haine profonde. Cette personne n'est autre que Mayacine Diop.

À l'évocation de ce nom, je tournai la tête vers Charlotte, qui affichait la même expression que moi. Nous étions toutes les deux sidérées par cette révélation. Encore ce salaud de Mayacine. Il était partout, il se mêlait de tout.

Je portai mes doigts à mes tempes pour les masser, sentant une migraine me gagner. J'avais envie de hurler, de pleurer, de tout casser.

—Choquées ? Nous demanda-t-elle, en voyant nos réactions muettes face à sa révélation.

Elle avait l'air surprise, comme si elle s'attendait à ce que nous soyons au courant. Charlotte lui répondit.

—Un peu oui, mais pas totalement. Depuis que nous avons commencé cette histoire de vengeance, nous avons découvert pas mal de secrets sur sa vie. Nous savons qu'il est impliqué de près ou de loin dans tout ce qui nous arrive. C'est lui qui tire les ficelles de tout ça pour faire court.

—C'est possible. Mais ce que vous ignorez, c'est que sa femme, Fatou Binetou, est toujours en vie. Lâcha-t-elle comme une bombe.

—QUOI ?!? Hurlâmes-nous en chœur, abasourdies par cette nouvelle.

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À suivre.....

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