Chapitre II - Partie I
Lyra se tenait au milieu d'un nuage. Tel un oiseau, elle restait suspendue dans les airs, comme emprisonnée par des fils doux invisibles.
Seuls des nuages remplissaient le vaste vide, sous ses pieds. Une étendue à perte de vue de ciel, que même l'horizon était invisible.
Une forme apparut au loin. Ce n'était pas un nuage, c'était gigantesque.
De la taille d'environ un million de manoirs. Cette forme se clarifiait, laissant place à une grande cité suspendue dans les airs. Des tourelles d'argent, recouvertes de neige. Cette Cité était magnifique, majestueuse, ce que vous voulez.
Puis elle disparut. Lyra se pressa, courut, lentement. C'était une torture, elle n'en pouvait plus. Dans un éclat d'argent, un jeune adolescent, d'environ 2 ans de plus que Lyra, apparut, à l'endroit même où se tenait la cité quelques secondes.
Il était beau. C'était tout ce qu'elle trouva à dire. Des cheveux blonds lui encadraient son visage parfaitement tracé, ses yeux verts profonds la fixaient vaguement, comme si elle n'était que brume. Mais son regard était glacial, hautain. Son expression n'était pas interprétable. Du dégoût, de l'insouciance et de l'arrogance se mêlaient autour de son nez
Une voix résonna dans le ciel étoilé, entre le jour et la nuit. Elle se répercutait dans un endroit dénué de gens, ou seul le silence et le vide régnaient.
Une voix qui ne l'avait jamais quitté. Une voix qu'elle n'avait pourtant pas entendu depuis longtemps. Un voix douce, fluide, mais forte.
- Quoi que tu fasses, je serais toujours là pour toi. Je t'aimerai toujours, ma petite fleur.
Lyra éclata en sanglots. Cette voix l'emplissait de mélancolie, et elle se débattait pour ne pas hurler.
- Aie confiance en toi. Même si la vie est dure, fais ce que tu sais faire de mieux : être toi-même.
Lyra se recroquevilla, mouillant le vide de ses larmes.
Elle leva les yeux vers les étoiles. Elles se ressemblaient tellement... Mais de proche, chacune avait sa propriété fabuleuse. Était-ce un rêve ? Ce ne pouvait qu'être ça. Pourtant, tout semblait si réel...
Puis, dans des étincelles violettes et rouges, l'homme éclata en confettis bleus et se changea en un dragon de couleur bordeaux. Il était majestueux, et semblait se glisser dans l'air comme une plume dans le vent.
Une grande galaxie vivante apparut entre eux, dans un éclat magique. Elle trouva parmi sa galaxie Nitralia. Nitralia, sa planète. Le dragon souffla et elle se tourna vers lui, effrayée.
Il avait des écailles grises et rouges étincelantes, des dents acérées et flamboyantes, mais il semblait étrangement rassurant.
Chacun de ses mouvements était gracieux, il semblait se jouer de la gravité. Il se tortillait dans les airs, faisait les figures les plus folles ; Lyra avait l'étrange sensation qu'il voulait l'impressionner. Il y avait quelque chose d'anormal chez lui. Elle ne savait pas quoi, mais elle en était sûre.
Puis, le dragon s'approcha doucement d'elle, continuant à flotter gracieusement. Il s'arrêta à un mètre d'elle. Elle sentit son souffle contre son visage. Ce n'était pas un souffle chaud, non. Ni glacé. Non.
C'était un souffle frais, comme une essence de vie. Cependant, elle remarqua quelque chose de légèrement embêtant.
- Si tu dis que tu as bonne haleine, je me sentirais obligée de répliquer, dit-elle.
C'est seulement là qu'elle fit le déclic. Ses yeux croiserent ceux du dragon. L'un flamboyant, on aurait dit du feu emprisonné dans un oeil, et l'autre oeil était clair. Elle regarda plus profondément.
Ses yeux s'ouvrirent grand quand elle la vit. Une cicatrice profonde entaillait le monstre du sourcil à la joue.
- Tu... tu es aveugle, murmura-t-elle en hésitant à le caresser.
Le dragon hocha la tête lentement et se pencha vers Lyra. Que voulait-il qu'elle fasse ? Elle n'en avait aucune idée.
Elle tendit la main vers le front du gigantesque animal, hésitante. Ses yeux croiserent de nouveau ceux de la bête. Un élan de mélancolie flottait entre eux. Les yeux du dragon semblaient refléter des souffrance, mais pas les siennes ; celle d'un monde entier. Des batailles. Des destructions. Des morts. Des gens qui enfonçaient leurs armes dans le ventre de leurs ennemis, des Salamandres des Ténèbres brûlant tout être et toute maison. Des champs dévastés par la haine, de l'espoir animé par l'amour. Un espoir qui ne dura pas, comme son peuple.
Lyra détourna le regard. Elle ne pouvait regarder le dragon sans souffrir. De l'intérieur, certes, mais aussi de l'extérieur.
La longue bête, inclinant la tête, sensit Lyra hésiter longuement. La main dans le vide, aussi immobile qu'une statue.
Le dragon aquiesça d'un hochement de tête. Lyra se mordit la lèvre, puis toucha les écailles de l'animal.
Elle tourna la tête vers sa cicatrice. Elle prit une longue inspiration, puis posa la main sur la blessure de la bête majestueuse.
Le dragon poussa un gros cri strident.
- Chht... chtt.., marmonna-t-elle à l'immense bête.
Le dragon se calma et ferma les yeux. Lyra sourit, puis ferma elle aussi les yeux.
Elle ressentit l'énergie parcourir son corps, et sa main s'illumina. Chaque partie de son corps semblait se battre pour effacer cette cicatrice. Mais Lyra était déterminée. Elle donna encore plus d'énergie. Elle aurait pu battre n'importe quel être, sa puissance commençait à faiblir, et elle se sentait faible et démunie. Elle lâcha prise, et le dragon hurla de douleur. Ils se tortilla, gémit, ils se tordait de douleur et Lyra ne pouvait rien faire.
Puis, l'éclat que le dragon avait créé se dissipa, et laissa place à une atmosphère glaciale et sombre.
Le dragon vola en éclats gris, et Lyra sentit ses forces l'abandonner.
Soudain, le sol se déroba sous ses pieds et elle tomba dans le vide, sans pousser aucun cri, juste se laissant tomber dans la pénombre.
- CRAKKKKKKKK !
Lyra se réveilla en sursaut. Elle gardait les yeux fermés.
Elle palpa son environnement, vérifiant ou elle se trouvait. Elle sentit un oreiller en-dessous de sa tête.
Soulagée, elle souffla, rassurée. Elle était bel et bien dans sa chambre, il n'y avait pas de quoi s'inquiéter.
- Et bien ? On fait une petite sieste digestive ? demanda une voix.
Lyra sursauta et sauta de son lit, prit la robe marine et se précipita derrière les rideaux violets de la salle d'essayage.
Alienor leva les yeux aux ciel. Ele reposa son pinceau de maquillage prit de la poudre et en aspergea ses joues. Elle approcha sa tête du miroir, émit un petit gémissement, et rajusta une barrette noir dans ses cheveux.
- Mincedismoiquejesuispasenretard, marmonna Lyra. "
Alienor reposa la poudre et se tourna vers les rideaux en inclinant la tête.
- Je suis désolée, dit-elle, j'ai rien compris..."
Lyra pouffa derrière les rideaux.
- Excuse-moi, dit-elle, amusée, je m'inquiétais juste qu'on puisse être en retard.
Alienor gratta quelque chose sur le miroir et dit, de sa voix aigue et douce :
- Oh non, ne t'en fais pas, Dame Levis n'arrive que dans une demi-heure, il n'y a pas de quoi s'inquiéter. Tu as dormi une heure. Pourquoi ?
Lyra se souvint de son rêve et décida de ne pas en parler.
- Pour, commença-t-elle, pour rien, laisse tomber. "
Alienor haussa les épaules et se leva. Elle prit différentes poses devant le miroir en ajustant de temps en temps sa robe, sa coiffure, ou son maquillage.
Puis elle se tourna vers Lyra, un sourire éclatant mais malicieux aux lèvres.
- Donc ça signifie que je vais pouvoir te maquiller et te coiffer ?
Lyra se recourba. Oh non... On en a pour une heure... pensa-t-elle.
- Pas trop de maquillage, et pas trop serrée, la coiffure, s'il te plaît.
Alienor gloussa et commença à tripoter les cheveux de la jeune adolescente. Lyra se tenait aux acoudoirs pour éviter de hurler.
- Oh la la ! Tes cheveux sont trop longs, Lyra ! marmonna Alienor.
Lyra poussa un petit cri aigu.
- Tu as bientôt fini de me torturer ? demanda-t-elle, en pleine souffrance.
- Presque, répondit Alienor.
À la fin de la torture, Lyra poussa un soupir de soulagement. Alienor avait tellement tiré sur ses cheveux qu'elle avait mal à la tête.
Puis, elle s'habilla de la jolie robe marine. Elle ne fut pas difficile à mettre, et Alienor se plaignit tout de même à la fin :
- M'enfin, Lyra, tu sais pas mettre une robe, ou quoi ?
Elle lui resserra la ceinture ; Lyra faillit s'étouffer. Et Alienor lui récita toutes les règles à respecter durant la venue de Dame Levis. Lyra peinait à se concentrer - comme d'habitude - mais retint quand même les points essentiels.
Du couloir résonna une voix stressée et presque incompréhensible.
- Le fiacre de Dame Levis est devant le manoir ! hurla la petite voix sifflante d'Astoria.
Alienor se pressa en dehors de la chambre en dévalant les escaliers à toute vitesse. Quant à Lyra, elle prit une grande inspiration en sortant calmement de la chambre.
On entendit la porte tourner sur ses gonds. Lyra descendit des escaliers marche par marche, essayant de paraître la plus gracieuse possible.
Une dame marchait dans le jardin, en direction du manoir, une capuche sur la tête.
- Ravie de vous recevoir, Dame Levis, dit Astoria tandis que la dame passait le seuil de la porte.
La dame examina attentivement le Hall.
- Bonjour, murmura-t-elle simplement.
Un grand silence se fit dans le Hall pendant un moment, puis Lyra prit la parole :
- Voulez-vous que... Euh... j'aille accrocher votre manteau ?
La dame la regarda attentivement puis enleva sa capuche. Son manteau était digne de son statut : elle était la princesse de Nedlens, leur royaume ennemi. Le manteau était léger, comme si c'était un simple manteau de Printemps. Pourtant, à Ecryne, pendant ces périodes, il faisait assez froid. Le manteau était gris, et ressemblait plus une cape qu'à autre chose.
La dame était très jeune. Elle devait avoir deux ans de plus que Lyra. Ses cheveux châtains lui tombaient sur les épaules en de petites boucles brunes et ses yeux pervenches reflétaient le Hall.
- Non, ne vous en faites pas, Mademoiselle, dit-elle.
Elle frisonna et Astoria s'empressa de refermer la porte.
La dame posa son manteau sur un des porte-manteaux de l'entrée et s'inclina gracieusement devant Astoria.
- Ravie de vous rencontrer, Comtesse de Biknighan, dit-elle.
Elle semblait en proie avec la douleur. Elle paraissait déprimée, et Lyra n'eut pas le moindre doute sur le sujet : la dame avait été horrifiée en voyant l'état d'Ecryne.
- Quelque chose ne va pas ? demanda Astoria, voyant la mine déprimée de son invitée.
La dame hésita, puis se lança :
- Vous pouvez m'appeler Aurianna, madame. C'est que... dans notre royaume, personne n'est tellement dans la famine qu'ici. Vous avez tout l'air si pauvres...
Elle semblait sincère. Mais apparement, cette intervention avait blessé Astoria. Cette dernière retint un hoquet.
- C'est-à-dire ? demanda Astoria avec un voix glaciale.
Aurianna réfléchit quelque secondes avant de décider de ce qu'elle allait sortir, priant pour ne pas vexer Astoria une seconde fois.
- À Nedlens, les gens sont heureux, ils ne sont pas pauvres...
Sur la bouche d'Astoria se dessina une grimace vexée, et Aurianna se mordit la lèvre, consciente de la bêtise qu'elle venait de faire.
- C'est sans doute parce les batailles vous sont plus victorieuses.
Astoria avait dit ça sur un ton sec et glacial.
Aurianna semblait si gênée et confuse que Lyra décida de couper ce silence, sur un ton qu'elle espéra convaincant :
- Bon ! Je pense que nous pouvons aller dans le salon !
Plusieurs murmures circulerent avant que tout le monde parvienne au salon.
Alienor fit asseoir Mlle Aurianna dans le deuxième fauteuil le plus confortable ; Astoria avait déjà pris le premier. Tandis que Lyra s'assit sur un tabouret boitant, d'où elle faillit tomber en s'y asseyant.
Une minute s'écoula avant qu'Aurianna prenne la parole. Tous les regards étaient plongés dans le vide. Tout le monde n'avait rien osé dire quand elles s'étaient assises et elles furent surprises d'entendre la voix d'Aurianna s'élever dans le silence gênant :
- Bon, nous commençons ?
[...]
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