CHIHIRO
(pour une meilleure lecture, je vous conseille d'écouter Chihiro de Billie Eilish. bonne lecture!!!)
Maxime avait l'impression d'être amoureux d'un fantôme.
Cela faisait déjà plusieurs mois qu'il ne communiquait presque plus avec Sidjil, ne le croisant que par ci par là, n'échangeant qu'un bonjour sec et vide de tout sentiment. Quelque chose n'allait pas chez lui, ou alors il ne voulait plus rien avoir à faire avec Maxime. Il ne le reconnaissait même plus, il avait perdu son éclat. Et Maxime n'en pouvait plus. On lui avait arraché sa joie de vivre, la source de ses rires, l'amour de sa vie. Il y pensait peut-être de façon dramatique, mais c'était comme ça qu'il le ressentait.
C'était comme s'il avait oublié son prénom. Maintenant, il n'était plus que « Max » ou « Biaggi » dans la bouche de Sidjil, et Maxime peinait à accepter le vide dans son cœur lorsqu'il ne serait plus jamais son « Maxime ». Le son de sa voix et le mouvement de ses lèvres lorsqu'il prononçait son prénom, c'était d'une douceur mielleuse et tellement addictive que ce fut une sorte de deuil pour lui.
Ils allaient se revoir, après près de trois semaines, et Maxime anticipait déjà leurs interactions. Il se devait d'agir enfin, de lui parler, d'essayer ranimer la flamme entre eux.
Le cœur dans l'estomac, Maxime se dirigeait vers le distributeur de boissons avec lequel Sidjil semblait se battre. Il avait vraiment l'air d'un fantôme. Ses cernes creusaient ses yeux les couvrant d'un voile sombre, et sa barbe mal rasée laissaient penser qu'il n'était vraiment pas en forme. Il comptait des pièces dans sa main.
-Putain.
-Hey, Sid...
Son regard ne croisa le sien qu'une fraction de seconde, et pourtant Maxime sentait ses joues brûler sous l'émotion que ça lui apportait. Mais ses yeux étaient vides d'éclat, vides d'émotion, vides.
-J'ai de la monnaie, si tu veux. Pour ta boisson.
Maxime lui tendit quelques pièces et Sidjil les prit de sa main sans broncher, mais toujours dans le silence. Il avait l'air de vouloir être n'importe où, mais pas ici, avec lui, et Maxime sentit son cœur se serrer. Le grand brun acheta sa canette, et s'en alla dans le couloir, après avoir chuchoté un « merci » à Maxime. Ce dernier restait planté là, perplexe et confus de cet échange bref et gênant.
Une petite pensée angoissante le traversa. Et si Sidjil n'était juste plus intéressé par lui ? Et si il n'était plus l'ami dont il avait besoin ? Ou pire, s'était-il rendu compte des sentiments du plus petit à son égard ?
Peu importe, se dit-il, j'ai besoin de réponses. Alors il réessaierait. Encore et encore, quitte à le harceler, car son comportement devenait inquiétant. Maxime ne l'avait pas vu trop interagir avec les autres lors du tournage, et sa mine morose hantait ses pensées.
Maxime
bon sid
faut qu'on parles
tu me manques
C'était avec surprise que Maxime vit que Sidjil était en train d'écrire dans la minute où il avait envoyé ses messages.
Sidjil
euh
okay
tu me manques aussi, je suis désolé
Maxime
qu'est-ce qu'il se passe, sid ? t'as pas le droit de me dire que tout va bien
Cette fois-ci, il du attendre plusieurs minutes. Il avait l'impression que Sidjil lui écrivait un pavé. Maxime anticipait sa réponse, il s'attendait au pire.
Sidjil
c'est compliqué
Maxime
j'aime le compliqué, dis moi tout
Sidjil
c'est la guerre dans ma tête
je me sens juste pas bien, j'ai mes raisons
j'ai juste du mal à savoir quoi faire
C'était pire que tout ce qu'il aurait pu imaginer. Sidjil ne voulait pas lui en parler, et il se sentait plus impuissant que jamais.
Maxime
je peux pas t'aider si tu m'en dis pas plus
mais je suis là sid, pourquoi t'es si distant ?
Sidjil
j'en peux juste plus
je sais pas ce qui pourrait m'aider
Maxime
viens on se voit
C'était ainsi qu'ils se retrouvaient dans un petit bar pas loin de chez Maxime. Ce dernier arrivait trempé jusqu'à l'os et ouvrait la porte du bar pour se réfugier à l'intérieur. Son regard se porta vers le comptoir, où il vit la lumière bleue dessiner la silhouette de Sidjil, assit sur un tabouret. Le bruit de la porte avait du l'avertir, car le grand brun se retourna et la vision qui frappa Maxime laissa son cœur tomber plus bas que terre. Le visage de Sidjil, autrefois animé par la bonne humeur et l'amour qu'il portait à ses proches, se retrouvait encore plus vide que la dernière fois. Assombri par les poches sous ses yeux, le regard vitreux, un sourire crispé qui traduisait son inconfort. Ce n'était pas son visage, pas celui qui avait fait tomber Maxime, pas celui qui le rassurait quand il était au fond du trou, pas celui qu'il embrassait pour faire rire leurs amis.
-Hey, comment tu te sens ?
-Hey... Oh tu sais... comme une merde.
-Sid... Tu peux pas rester comme ça, raconte moi ce qu'il se passe dans ta tête.
-Je te l'ai déjà dis. C'est une bataille entre mes pensées. Je sais plus quoi penser, je crois que je deviens fou.
-Mais avec quelles pensées tu te bats, Sid ?
-Je peux pas t'en parler, Max. Sinon, toi comment tu vas ?
Maxime était sidéré. Il n'y arriverait pas, il ne pourrait jamais l'aider, si il ne voulait pas lui faire part de ses pensées troublantes. Il ne reconnaissait plus la personne en face de lui. Tous ses mots semblaient calculés et pourtant vides de sens, et de sentiment. C'en était un peu trop pour le cœur de Maxime, qui coupa court à ses réponses sur sa vie pour annoncer qu'il allait fumer une cigarette.
Sa clope avait un mauvais goût. Peut-être parce qu'il pleuvait, ou peut-être parce qu'il était dégoûté de réaliser où en était sa relation avec Sidjil. Ses rêves de confessions amoureuses mignonnes et toutes aussi irréalistes les unes que les autres se dissipaient et avaient maintenant l'air d'un lointain songe stupide et insensé. Maxime savait ce qu'il devait faire, c'était de mettre ses sentiments de côté et s'occuper de la situation tel un ami le ferait. Alors c'était avec un petit sourire et des idées de sorties pour remonter le moral de Sidjil qu'il ouvrit à nouveau la porte pour le retrouver. Mais d'un coup d'œil, il réalisa que le grand brun avait disparu. La note avait été payée. Il était parti, sans un mot, et sans que Maxime ne s'en rende compte.
Deux semaines sans nouvelles. Maxime n'osait pas renvoyer de message, ne voulant pas forcer si le grand brun ne voulait plus de lui. Mais il était si dur à cerner, et il manquait tellement à Maxime que ce dernier l'appela, un soir de balade dans un parc, sans savoir pourquoi.
-Allo ?
-Allo, Sid ? Euh... Tu fais quoi ?
-Qu'est-ce qu'il y a, Max ?
-Je sais pas, je me disais, tu veux pas me rejoindre au parc ?
-Max, il est deux heures du mat.
-Ah, euh, oui. Je sais pas, je voulais te voir, tu me manques.
-...
-Mais t'inquiète, c'est pas grave, j'allais bientôt rentrer de toute façon, je-
-J'arrive, bouge pas.
Maxime, encore une fois sidéré, ne comprenait plus rien. Est-ce que c'était si simple que ça, de lui parler ? Fallait-il juste l'appeler lorsqu'il en avait besoin ? Il contemplait des petites fleurs bleues et blanches qui brillaient à la lueur de la lune. Il s'était assis sur un banc, entre deux arbres, et le parc était vide si ce n'était pour lui. Sidjil pointa le bout de son nez et Maxime sentit son cœur se serrer comme à chaque fois qu'il le voyait ces derniers temps. Sans un mot, le plus grand s'assit aux côtés de Maxime. Ce dernier ne le quittait pas des yeux, remarquant à peine le silence qui les entourait tellement il entendait son cœur battre fort.
-Max ? T'es là ? Me fixe pas comme ça.
-Hein ?
Maxime reprit ses esprits et comprit qu'il s'était un peu laissé emporté dans sa contemplation du visage de Sidjil. Il décida de tenter le tout pour le tout, revenant à leurs anciennes habitudes, et prononça ses mots avec un clin d'œil.
-En même temps, tu me connais. J'ai du mal à résister à ta beauté.
Son audace eut le mérite d'arracher un rire franc à Sidjil, ce qui réanima une partie du cerveau de Maxime. L'espace d'un instant, il avait retrouvé son Sidjil, celui qui riait à ses blagues et qui surenchérissait. Le corps de Maxime semblait se paralyser sous la main du plus grand sur sa cuisse, et il peinait à montrer son indifférence à Sidjil. Mais alors qu'il s'apprêtait à rire à son tour, il remarqua que sa main était fermement accrochée à sa cuisse, et que son pouce caressait sa peau à travers son jean.
Il jeta un regard furtif à Sidjil, qui le regardait déjà intensément. Il était si proche de lui qu'il pouvait sentir son souffle chaud sur son visage. Son regard le transperçait d'une force telle que Maxime sentait qu'il frôlait le vide à chaque seconde qui passait.
-J'peux t'embrasser ?
Ce n'était pas ce qu'il attendait, même en prenant en compte ses sentiments, mais Maxime n'allait pas refuser une telle offre. Mais l'hésitation était tout de même considérable. Il avait peur. Peur d'être encore une expérience pour un ami curieux. Il ne comptait plus le nombre d'amitiés qui s'étaient terminées sur une nuit ensembles puis le fameux « on reste amis ? » juste après, ce qui voulait dire que tout était fini, évidemment. Et si c'était la raison du mal-être de Sidjil ? S'il était en train de découvrir son attirance pour les hommes ?
Il hocha doucement la tête et laissa le visage de Sidjil se rapprocher du sien. Puis, à l'aide d'une main sur sa joue, il l'attira dans un baiser tendre et timide. Ce fut l'effet de la chute libre pour Maxime, qui sentait son cœur tambouriner sa poitrine si fort qu'il en tremblait. Il avait l'impression que tous ses sens se réveillaient, et qu'il vivait jusqu'à maintenant pour vivre ce moment. Avec un rythme assez lent, ils s'embrassaient plus fermement, Maxime laissant la langue de Sidjil explorer sa bouche.
C'était bien mieux que tout ce qu'il avait imaginé, plus chaud, plus tendre, plus réconfortant. Maxime s'accrochait aux lèvres de Sidjil comme si sa vie en dépendait, et ce dernier avait l'air d'apprécier.
Tout se passa très vite à partir de là. Dans la hâte de passer à l'acte, ils rentraient vite chez Maxime, main dans la main, s'arrêtant pour s'embrasser encore. Leur nuit de découverte l'un de l'autre ne fut pas très longue car ils furent vite épuisés. Dans leurs mouvements maladroits, on pouvait trouver de la tendresse et des promesses. Maxime était heureux de retrouver un Sidjil heureux lui aussi. Alors il se pliait en quatre pour satisfaire son ami, ne se stoppant dans ses gestes que pour reprendre son souffle et le regarder prendre du plaisir. Le temps d'une nuit, ses doutes sur leur amitié n'existaient plus et Maxime s'endormait dans les bras de Sidjil, la tête pleine d'espoir et d'amour à donner.
Mais ce ne fut tout de même pas une surprise lorsqu'il se réveilla le lendemain dans un lit désert. Le temps de quelques secondes, il se remémora les événements de la veille et s'autorisa un petit sourire. Puis, une fois qu'il remarqua le petit mot posé sur sa table de nuit, il ne pu s'empêcher de fondre en larmes. D'abord, ce fut des petites larmes qui trouvaient leur chemin le long de ses joues. Puis, au fur et à mesure, ses larmes devinrent des sanglots puissants et étouffants. Il s'y attendait, il savait que ça n'allait pas se passer comme prévu, la vie n'était pas si simple.
« Merci pour cette nuit, t'es vraiment un super meilleur ami »
Le post-it ne comportait que quelques mots, simples mais efficaces. Et ce fut assez pour Maxime pour qu'il ose espérer oublier un jour le prénom de Sidjil.
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