Chapitre 8
***Loïc***
Henriette me cachait encore quelque chose. Et je n'aimais pas ça, venant d'elle. Elle était capable des pires bêtises, sans moi. Hier, elle m'avait dit qu'elle ne prendrait pas la mer aujourd'hui. Heureusement, car elle n'avait pas de bateau ni d'équipage. Mais elle cachait quelque chose de mauvais. Je l'avais donc suivie, après notre entretien quotidien, pour voir où elle allait. Mais Henriette était rentrée chez elle. Je savais qu'elle préparait de l'action, je la connaissais trop bien pour en douter. Chaque fois qu'elle était désespérée, une idée lui venait toujours en tête et, vu son caractère obstiné, elle ne la lâcherait pas.
J'enviais un peu ses qualités qui étaient parfois des défauts. Mon amie savait prendre une décision et elle ne la regrettait jamais. Elle savait où elle allait et le mensonge était son terrain. Pour tout ça, je l'admirais. Même si quelques fois, son caractère m'énervait. Et c'était de cette manière que j'étais tombé amoureux d'elle. Oui, ce doux sentiment me ralliait à Henriette et de ce fait, je ne pouvais pas la laisser faire n'importe quoi. J'avais peur pour elle. Même si je savais que mon amie se défendait plutôt bien.
Le lendemain matin, très tôt j'espionnai la demeure de ses parents, pour voir si Henriette allait sortir. Elle n'en fit rien. Par contre, juste après dîner (Ndla : en ces temps-là, on dînait à midi, et on soupait vers dix-huit heures), elle sortit bien avant l'heure de notre rendez-vous. Henriette enfourcha son cheval, Orage, et se dirigea vers la ville, empruntant la forêt. Comme j'étais à pieds, je pris un raccourci que moi seul connaissait. J'arrivai avant elle à Saint Malo et l'attendis à la sortie du bois. A ma grande surprise, elle ne passa pas sur le port, où elle avait l'habitude d'aller. Henriette n'entra pas dans la ville même et se contenta de la longer au trot.
Je n'avais aucune idée de l'endroit où elle se dirigeait. Ou peut-être que... Non. Elle ne ferait pas ça. Je suivis mon amie, refoulant mes craintes. Mais c'était trop tard. J'avais raison, elle allait dans une taverne.
Je ne voulais pas en voir plus. Henriette buvait.
***Henriette***
Je sortis de la maison, heureuse que Hérault eut accepté mon offre. Le seul problème fut trouver de l'argent. Je compris que j'avais besoin de Loïc pour cette affaire, et que je ne pourrais pas la lui cacher plus longtemps sans avoir besoin de son aide.
Je me rendis à notre point de rendez-vous, allègre que mon plan marchasse aussi bien pour l'instant. Mon meilleur ami était là... mais pas avec un grand sourire.
— Bonjour, Loïc ! le saluai-je.
— B'jour.
Il n'avait pas pour habitude de faire cette tête. Je m'inquiétai. Mais comme j'étais censée être le maître ici, je l'ignorai et voulus annoncer ma bonne nouvelle.
— Ecoute, Loïc, j'ai une excellente nouvelle. Nous allons avoir un bateau !
Il redressa la tête, soudainement, comme si ce que j'avais dit était farfelu.
— Mais... Comment vas-tu t'en procurer un ?! s'étonna-t-il.
— J'ai parlé au capitaine Hérault. Il m'a assuré qu'il pourrait m'en fournir un.
— Et l'équipage ?!
— A nous de le trouver.
— Et l'armateur ?
— Hérault nous le fournira aussi.
— Et comment vas-tu le payer ?!
Petit point crucial dans toutes les affaires de notre temps : l'argent.
— Là, il va falloir en trouver. Hérault veut bien nous financer tout ce dont nous avons besoin, mais il veut un remboursement. J'ai pensé que nous pourrions faire quelques petits boulots, cette année, pour payer notre dette. Qu'en penses-tu ?
***Loïc***
Elle voulait réellement partir. Elle voulait vraiment quitter la terre. Elle voulait naviguer. Et elle me demandait de la suivre.
J'avais toujours rêvé, moi-aussi, de monter sur un énorme galion, de le commander. Bien sûr, tout le monde en rêvait. Mais ce que je désirais plus encore, c'était le mariage avec Henriette. Oui, je l'aimais comme un fou et le mariage me semblait une belle chose. Mais elle ne partageait pas les mêmes idées que moi. Elle ne voyait pas plus loin que le bout de son nez. Henriette ne voyait pas que je l'aimais, que je la chérissais plus que ma sœur. Elle voulait partir. Les seules personnes que j'aimais voulaient partir.
Je sus que je ne pourrais pas retenir Henriette sur terre, encore moins en faire une mère respectable. Elle avait besoin de liberté à cause de son enfance où elle avait été enfermée chez elle, privée d'amour. C'était à cause de ça qu'elle n'aimait personne, qu'elle ne m'aimait pas. Elle n'avait jamais su ce qu'était l'amour. On ne lui avait pas fait découvrir la tendresse, la gentillesse. Henriette ne connaissait pas cette sensation d'être adorée, chérie, elle ne connaissait pas ces mots. Sa famille n'avait eu que faire de lui montrer un peu d'amour, de l'aimer. C'était à cause d'eux qu'elle voulait partir. Rien ne la retenait. Aucune personne, nulle part, ne l'attendait.
— Loïc ? Qu'en penses-tu ? répéta-t-elle.
Elle s'inquiétait de ma mine. Il était vrai que je devais avoir l'air chagriné. J'avais pris ma décision.
— J'en pense que c'est une très bonne idée, répondis-je finalement.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro