[08-09/08/2022]
Ça fait un moment que je ne t’ai pas écrit. Ce n’est pas pourtant que je t’ai oublié. On n’oublie jamais vraiment ce qui a été important. On doit accepter son absence. Faire son deuil avant de pouvoir avancer, intégrer les souvenirs dans le passé. Parler à mon illusion de toi me fait douloureusement du bien. Alors me revoici.
Ici, je peux te confier ce que je n’ai pas osé t'exprimer. Maintenant, je peux analyser les choses que je ne comprenais pas à l’époque.
Je voulais tellement de choses, des choses tellement inaccessibles, tellement normales. Ton ambition visait l’espace, je rêvais d'une petite maison en banlieue, deux enfants et demi pour suivre les statistiques, et un chien dans le jardin. C’est un peu idiot, quand on y repense, hein ? Comment ai-je pu me mentir à ce point… nos projets ineptes, des châteaux de cartes effondrés. De mon seul côté.
Tu as atteint les étoiles, il me semble. C’est approprié, mon soleil. Je pense que tu as accompli tes rêves, au moins en partie. Pour être sûr, je pourrais poser la question à des connaissances communes. Je préfère mes bouteilles à la mer. Comment se passe ton travail ? As-tu les deux enfants et demi qui crient dans le jardin en été ? Après avoir cherché l’originalité dans ta jeunesse, as-tu compris à quel point il faudrait s'en éloigner ? As-tu parfois la nostalgie du ravin et des projets sans lendemain ? Des promesses alcoolisées et de cet horizon où tout était encore possible ? Ou improbable.
Les circonstances ont vendu mes illusions de famille, remplacé mon mirage de normalité. J’ai obtenu ce qu'on appelle une carrière. Je ne suis pas à plaindre. Je n’ai jamais été à plaindre. Parfois, je voudrais quand même être consolé. Être consolé de toi.
Tu étais ma plus belle erreur. Tu es devenu ma plus belle douleur. Si je t’ai nié si longtemps, était-ce pour t’effacer ? Ou pour conserver une partie de toi ? L’obsession de l’oubli m’a conduit pendant une décennie à plier mon comportement suivant un souvenir révolu. À accomplir, exprimer, accepter le contraire de ce que j’avais fait, dit, toléré avec toi.
Aucun de ces chemins ne m'a sorti des ornières. Quelle voie serait la mienne ? Peut-être faut-il faire l’école buissonnière ? Aucune route n'est tracée devant moi, il y a tellement de directions. À nouveau, l’horizon est plein de possibles. Ou d’improbables. Sans boussole, je me suis arrêté si longtemps. Je ne sais pas encore quelle raison me fera avancer à nouveau, me donnera envie de me lever le matin. Quoiqu’il faudrait encore que je puisse dormir pour me réveiller. Ces rêves incessants m'épuisent.
Mon soleil, de quelle façon t’intégrer dans le paysage sans plus te prêter attention ? Quel chemin poursuivre pour ne plus être aveuglé par mes ombres ? Tant de possibilités et d'improbabilités.
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