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Chapitre 1.1 : Sous la congère


Cyl avançait péniblement dans l'épaisse poudreuse qui recouvrait toute la forêt de Mirabois de son épais manteau blanc. Depuis trois jours déjà, la prêtresse marchait dans la neige et le froid, touchant du doigt les limites de sa patience. À l'instant même où elle avait posé sa botte fourrée hors du pallier de la chaleureuse maison close où elle avait passé la nuit, elle su que le voyage ne serait pas une partie de plaisir. De fait, elle détestait le froid, la neige, l'hiver, en somme, tout ce qui était en dessous de la température d'une bonne auberge chaleureuse.

La voilà qui se trouvait pourtant au milieu du trou le plus perdu et le plus glacial de toute l'Amaërys.

De part en part, la forêt se dressait, insondable, froide et aussi inhospitalière que la grotte d'un troll. L'humeur de Cyl qui dépendait en grande partie de l'état de son confort jonglait donc entre une profonde apathie et des accès d'exaspération intenses. Son unique compagnon de voyage n'aidait en rien à améliorer la situation, bien au contraire. En effet, Fenned, l'oiseau messager de sa Déesse prenait un malin plaisir à lui rappeler sa condition et retourner le couteau dans la plaie.

Après un énième soupir, elle réajusta les fourrures qui pesaient lourdement sur ses épaules, puis leva le nez pour contempler les étoiles brillant dans le ciel clair et dégagé. Devant elle, Atiñabe, l'Étoile Phare orientée à l'est dont la capitale de Deln tirait son nom, scintillait d'une douce lumière rassurante. Le visage de Cyl s'éclaira un court instant d'un sourire fin. Au moins, la prêtresse n'avait pas dévié de son cap. Encore une bonne vingtaine de lieues et elle devrait être rendue au temple d'été. « Soit... » elle fit rapidement le calcul. « Trois ou quatre jours de marche, dans le froid, la neige et mes bottes mouillées ». Son sourire s'effaça aussi rapidement qu'il était apparu.

Quelle plaie.

Dire qu'il y avait dix jours seulement, elle dormait paisiblement dans un lit douillet au tissu épais qui jouxtait une salle de bain à l'immense baignoire remplie d'une eau chaude et parfumée...

Elle repensa avec tendresse à la douce et chaleureuse nuit passée dans les bras de Sissif, une prostituée d'Anthaar aux seins ronds comme des petites pommes et à la peau aussi laiteuse que tiède. Si elle en chérissait le souvenir, Cyl n'avait pourtant pas hésité une seule seconde à partir en laissant derrière-elle cette amante d'une nuit lorsque le messager de sa Déesse s'était présenté à sa fenêtre. Son devoir de prêtresse primait avant tout, même sur l'amour.

Oh certes, si sa présence au temple n'avait pas été requise, elle serait restée pour aider Sissif à se sortir du bordel où elle était retenue prisonnière.

Et elle aurait peut-être même vécu avec la jeune femme quelques temps, qui sait ?

Un faible pincement étreignit le cœur de Cyl. Non, tout au fond d'elle, elle savait pertinemment qu'elle n'aurait pas pu vivre avec la jeune prostituée. Elle était trop douce, trop calme.

Si Cyl avait été un peu plus honnête avec elle-même, elle aurait même rajouté que Sissif était trop faible. Trop faible pour survivre à la vie de débauche et d'incertitude que menait la prêtresse. Trop faible même pour survivre à l'extérieur, dans le grand monde. Jamais elle ne réussirait à se sortir du bordel dont elle était la captive, car elle n'en avait tout simplement pas la force. Finalement, vivre là-bas était peut-être la meilleure chose qui pouvait arriver à Sissif : Elle était nourrie, logée et bien traitée. Prisonnière certes, mais prisonnière dans une prison dorée qui lui donnait bien plus que ce dont une paysanne banale n'aurait jamais pu rêver.

Cyl secoua la tête, tant pour chasser ses quelques restes de remords que les flocons tombés sur ses lourdes mèches brunes, puis laissa un mince sourire fleurir sur ses lèvres. Elle, elle aimait ceux qui se savaient forts mais qui étaient assez intelligents pour ne pas en abuser. Elle aimait les courageux qui sauvaient les autres par pur altruisme et non par cupidité. Les avides de voyages et de découvertes. Elle savait ces hommes et ces femmes – Cyl était ouverte à toutes propositions – rares et donc d'autant plus précieux.

Tout en évitant un ruisseau gelé par l'hiver, elle se mit à rêver de ses précédents amants et amantes. Il y avait tout d'abord eu une elfe d'Alastary, aussi noble que courageuse qui l'avait sauvée d'une bande de trolls alors qu'elle chassait au cœur même des Terres Sombres. Leur histoire avait été intense et tumultueuse mais profondément instructive sur biens des plans. S'en était suivie son aventure avec un bel humain du nom de Redern Vif'feuille, un voleur sulfureux et relativement dangereux mais qui avait toujours été bon avec elle - et très doué au lit, ce qui ne gâchait rien. Avec lui, elle avait soulagé la bourse de bien des nobles et remplie celle de bien des miséreux.

Puis elle avait rencontré Miren le marin, avait vécu une courte histoire avec Rin'Marymée la tenancière d'auberge avant d'aller courir la lande avec Naalah la danseuse et vivre un temps dans sa troupe, pour ensuite partir aiguiser ses talents de musicienne au bras de Vendyr le troubadour... De nombreux noms et de nombreuses histoires.

Mais celui qui restait et resterait à jamais son plus grand amour était certainement Arden, un elfe sombre. L'être le plus beau et le plus téméraire qu'elle ait jamais rencontré.

Cyl repoussa d'une main une branche de pin qui lui bloquait le passage et sortit son flacon d'hydromel de l'une des poches de son long manteau. Elle leva la flasque à hauteur de visage et murmura doucement « À vous, mes amours. Puisse votre souvenir m'aider à poursuivre mon chemin. » puis elle but une grande rasade du liquide ambré.

- Crâââ !

Le cri râpeux du corbeau manqua de faire avaler de travers sa gorgée à la prêtresse qui partit dans une grande quinte de toux. Une fois sûre de ne pas s'étouffer, elle posa un regard furieux sur Fenned. Celui-ci s'était posé à quelques mètres d'elle sur un petit talus de neige.

- Fenned, espèce de vieille carcasse remplumée ! jura Cyl tout en essuyant l'hydromel qui avait coulé sur son menton et ses fourrures. Mais qu'est-ce qui t'as pris, par les bourses molles de la Dernière Ombre ?

La réponse mentale de la Bête Divine résonna dans sa tête.

- Un loup, stupide-humaine-longue-vie.

La prêtresse se retourna aussitôt pour balayer la forêt d'un regard alarmé. Elle en profita pour dégainer son stylet dissimulé dans sa botte.

- Un loup ? Où ça ? s'exclama-t'elle en observant minutieusement les bosquets épais, tous ses sens en alerte.

Elle se maudit de ne pas avoir été plus vigilante. Un loup, cela voulait souvent dire que la meute n'était pas loin, et une meute, c'était des ennuis en perspective. Surtout à Mirabois, où la nature régnait en unique maîtresse des lieux et où l'animal n'avait pas encore appris à craindre l'homme. Le corbeau baissa la tête et lâcha un croassement moqueur. Il sautilla sur place, faisant voleter des petits morceaux de neige.

- Sous mes serres, humaine-aussi-aveugle-qu'une-chauve-souris.

La prêtresse jeta un coup d'œil incrédule au tas de neige, semblables à des milliers d'autres qui se trouvait sous les pattes de Fenned puis grogna :

- Tu te moques de moi ?

Le corbeau albinos secoua ses ailes d'un blanc aussi étincelant que l'astre brillant au-dessus de leur tête.

- Comment oserais-je me moquer de toi, ô-Cyl-la-grande-prêtresse-aveugle ?

Soit. Il était décidé à se payer sa tête. Cyl roula des yeux puis croisa les bras sur sa poitrine.

- Ton humour est excellent, je meurs de rire. Maintenant dépêche-toi, nous avons encore une longue route devant nous.

Le corbeau lâcha un coassement sec et passa son bec dans ses plumes, feignant d'ignorer la prêtresse. Celle-ci réfléchit un instant, puis décida que la ruse était la meilleure réponse qu'elle pouvait lui servir et fit donc mine de repartir. Mais l'oiseau ne bougea pas d'un pouce. Cyl stoppa ses pas, marquant son impatience par un tapotement nerveux du pied sur la neige duveteuse. Puis elle reprit à nouveau son chemin, priant intérieurement pour qu'il se mette enfin à la suivre. En vain, l'oiseau ne bougea pas plus que la première fois. La prêtresse se retourna et planta son regard dans celui, vermillon, du volatile. Soit, si la ruse ne marchait pas, on pouvait toujours opter pour la supplique. Elle plaqua un sourire mielleux sur ses lèvres :

- S'il te plaît, il faut que l'on se dépêche, murmura-t'elle d'un ton caressant. Itte'Naere nous attend...

L'oiseau pencha la tête sur le côté, un peu à la manière des chiens qui cherchent à comprendre une parole, mais n'esquissa pas le moindre mouvement.

- Il va mourir si tu ne fais rien, insista-t'il.

- Il n'y a rien là dessous, c'est simplement une congère, Fenned, répondit la prêtresse.

Le corbeau coassa.

- Humaine-aussi-aveugle-qu'une-chauve-souris ! Aveugle ! Aveugle !

Elle maugréa :

- Fenned, nous n'avons pas le temps ! Et même si tout cela était vrai, qu'est-ce que tu en as à faire du sort d'un maudit loup ?

- Crââ ! Stupide ! Il va mourir et tout sera de ta faute !

La patience de Cyl, déjà rudement mise à l'épreuve depuis le début de son voyage, vola en éclats. Elle se débarrassa de son lourd sac de voyage qui retomba à même la neige en un bruit mat, et s'avança vers le corbeau d'un pas énervé, le doigt tant tendu qu'accusateur vers son petit poitrail étincelant.

- Ecoute-moi bien, espèce de tête de bois ! Je n'ai pas le temps pour tes bêtises : notre maîtresse a réclamé ma présence au temple de toute urgence, et tu es le premier à me l'avoir annoncé – ou plutôt à me l'avoir croassé dans les oreilles à une heure indue de la nuit. Alors dépêche-toi de reprendre la route, ou je te jure, par Mihil'Ban, Mydir et toute l'Élémentale qui va avec, que je t'attrape et que te fais cuire vivant dans le chaudron des cuisines une fois arrivés au temple !

Le corbeau s'envola aussi sec et d'un battement d'ailes saccadé, vint virevolter au-dessus de la tête de Cyl tout en poussant ses cris râpeux.

- Stupide, stupiiiide ! Utilise ton don, Cyl-la-pressée ou tu passeras à côté de quelque chose ! railla le corbeau en piquant le crâne de la prêtresse de son bec.

Cyl lâcha un cri exténué, puis réfléchit un court instant : Argumenter avec Fenned ne servait à rien, et elle le savait. Autant essayer d'attraper une anguille à mains nues, c'était impossible. L'oiseau était plus buté qu'un jeune poulain non débourré et peut-être même plus encore qu'un nain. Non, il fallait se résoudre à l'évidence et accepter que le corbeau n'en démordrait pas : Le moyen le plus rapide pour reprendre la route était encore de vérifier ce qui se trouvait sous cette maudite congère. Une fois la chose faite et la bête-divine calmée, tout se passerait pour le mieux. Oui, c'était certain. Cyl capitula aussi rapidement que sa colère avait éclaté, puis épaules basses, elle leva le bras pour que l'oiseau vienne s'y poser. Elle lui jeta un regard suspicieux.

- Si je le fais, tu me jures que si il n'y a rien là-dessous tu reprendras la route sans faire d'histoire ?

Le corbeau lâcha un croassement approbateur puis reporta son attention sur le talus qui se tenait devant eux. La prêtresse plissa les yeux tout en détaillant rapidement la Bête Divine. Ses petites serres, elles aussi toutes blanches, étaient plantées dans l'épaisse fourrure de son manteau. Ses plumes lustrées miroitaient dans la lumière lunaire, le rendant presque phosphorescent. Quand à ses deux yeux rouges , ils brillaient d'un regard insondable à l'intelligence désarmante, fixés avec obstination sur la congère. Qui pouvait bien savoir ce qu'il se passait dans la tête de cette étrange créature ? Après tout, les Bêtes Divines étaient, et la création directe, et les plus proches serviteurs du dieu qu'elles servaient. Leur moitié d'âme, leur complément. Nés pour eux et eux seuls, mourants en même tant que leur maître. Leurs pensées devaient sûrement être aussi mystérieuses et inextricables que ces derniers. Fenned lui jeta un bref coup d'œil.

- Dépêche-toi.

Cyl lâcha un grognement et leva son bras libre vers le tas de neige. Désormais, deux options se présentaient à elle : Soit elle allait directement voir ce qui se cachait sous le talus en creusant la neige de ses mains, soit elle utilisait sa magie. Dans la mesure où le corbeau lui avait dit qu'un loup sauvage se tenait là-dessous, la décision fut rapidement prise :

- He'nebiel y sanrn o saabi, récita-t'elle.

Soit en langue commune « révèle-moi ce qui m'est invisible. »

Cyl était consciente que le sort allait lui demander une quantité d'énergie non négligeable qui risquait d'allonger la durée de leur voyage jusqu'au temple, mais elle savait également que Fenned, butté comme il l'était, ne bougerait pas d'une patte tant qu'elle ne vérifierait pas ce qu'il y avait sous le tas de glace. Et c'était totalement inconcevable : sa Déesse ne lui pardonnerait jamais si la prêtresse abandonnait la Bête-Divine pour reprendre sa route et elle ne se le pardonnerait pas non plus. Tout en se chargeant en énergie, sa paume pris une teinte d'un bleu profond, puis créa une volute de fumée de la même couleur. La magie s'échappa comme un colibri vif et coloré pour s'enfoncer jusqu'au talus en un bruit de cristaux qui se brisent.

Elle jeta un regard ahuri au corbeau sur son épaule, le souffle coupé par la surprise. L'oiseau prit son envol pour aller se percher sur la branche dégarnie d'un large chêne juste à côté du talus.

- Il n'y a plus beaucoup de temps, Cyl-la-dernière-chance.

La prêtresse lâcha un hoquet estomaqué et se rua pour creuser à mains nues la neige sous le regard appréciateur de Fenned.

Car sous la neige, pas de loup, mais un homme agonisant.

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