
Béton, bleus et chrysanthèmes
Louise faisait la plante verte devant la salle depuis le début de la pause. Elle avait laisser passer devant elle tous ses compagnons d'infortune. Elle avait même fait partir Lisa et Claire vers la salle de mathématiques.
Quand Matteo ouvrit la porte il dû lui faire face. En comptant les carreaux au sol il passa devant elle en vitesse. Elle le suivit sans rien faire jusqu'aux escaliers. Matteo fixa le sol gris mais il ne vit pas le pied qui se tendit devant lui.
Son sac l'emporta dans une chute interminable à la rencontre du béton.
Et ce fut ainsi qu'il se retrouva dans la cours devant tout les élevez hilares.
Quelques secondes plus tard, Sam et sa bande étaient penchés au dessus de lui. Matteo se roula en boule sur le ciment et se protégea la tête avec son sac.
Comme à son habitude il prit une grande inspiration et bloqua ses poumons. "T'es mort la tapette!" entendit-il sortir de la bouche de Sam. Il savait ce qu'il se passait au dessus de lui. Son tortionnaire souriait une dernière fois à sa garce de petite amie, cette très chère Louise avant de regarder ses amis. Et il sentit les premiers coups. Alors il vida son esprit et s'enfuit mentalement dans son passé.
Il se rappela la première fois qu'il rencontra Émilie, le docteur de la tête comme disait son papa à cette époque. Matteo n'était pas sot, il savait déjà que sa tête était malade. Un enfant même chez les moyens n'est pas sensé savoir lire, c'est la maitresse qui lui avait dit. Mais la maitresse elle disant aussi qu'il devrait sauté la grande section. " Sauter ? Comme à saute-mouton ? " " Non bien sur que non c'est une image Matteo lui répondit-elle. " Matteo alla donc chez les CE1 directement avec le seul détour de voir Émilie chaque mercredi après-midi.
Et c'est comme cela qu'il se retrouva dans la même classe que ses trois amis. Madame Sanchez, leur institutrice, le plaça à côté d'Emma dès le premier jour. Elle venait de chez les grands de maternelle et comme lui elle venait de jouer à saute-mouton.
Les adultes étaient si contents de le voir travailler parce que pour la première fois de sa vie il écouta en cours. Fini le chahut et les bavardages. Emma lui avait dit " plus on est grand plus on est sage". Louise déjà lui ordonnait plutôt " Écrase-toi ou je t'explose" Mais il y avait encore Sacha pour veiller sur lui.
Quand Matteo était arrivé à l'école primaire comme pour son entrée en sixième, son papa avait dit à son frère " Sacha veille sur ton petit frère ! C'est encore un petit et là-bas nous ne serons pas là".
Mais aujourd'hui dans la cours bétonnée de son collège haïs, il n'y avait plus son grand frère. Il sentit des mains le soulever et ouvrant les yeux il vit Charlotte et Emma l'emporter vers l'infirmerie. Thomas et des garçons qu'il ne reconnut pas faisait comme un mur entre le frêle enfant et ses bourreaux.
- Ce sont ses potes du rugby, expliqua Charlotte. Sam ne t' embêtera plus, promis !
- Je peux marcher, murmura-t-il.
Ses amies ne le lâchèrent pas pour autant et il chancela jusqu'à la porte de l'infirmerie.
Remerciant les filles, il leur fit promettre de féliciter Thomas de son courage.
- Dites lui merci de ma part ! s'exclama Matteo en toquant à la porte.
Une fois à l'intérieur, il traversa la chambre et entra dans le bureau. Son esprit lui fit remarquer que les draps avaient changer de couleurs depuis la semaine dernière.
- Matteo ! Encore ! S'étonna l'infirmière. Que s'est-il passé ?
- Je suis tombé dans les escaliers et ils me sont tombés dessus, raconta-t-il à contre cœur.
- Qu'est-ce qu'il ont cette année ! Soupira-t-elle. C'est la ... Ho! La onzième fois que tu viens ici depuis la rentrée. Onze en sept semaines de cours, s'étonna l'infirmière.
- Je sais madame, soupira l'enfant.
- J'appelle tes parents déclara-t-elle en commençant à le soigner.
Installé sur le lit, Matteo l'entendit parler à sa mère. Il savait déjà que cette dernière était folle d'inquiétude. C'était comme en CM2 quand Sacha était au collège. Il contempla le tableau en face de lui. Entourées de toutes ces affiches des campagnes du ministère de la santé, de jolies chrysanthèmes reposaient dans leur vase en porcelaine. Une peinture à l'huile assez récentes.
Matteo s'endormit en pensant à la dernière fois qu'il avait vu ses fleurs. Malgré sa douleur lancinante au crâne les images lui revinrent. L'église. Le cimetière. Maman qui pleurait et Papa qui restait fier. Mais il avait fini par pleurer quand même. Matteo n'avait jamais vu des larmes sur les joues de son père et il ne les revit plus jamais. Il donnait la main à Sacha sans comprendre. Son frère avait beau avoir trois ans de plus, il ne comprenait pas non plus. Pour les deux enfants, c'était juste une réunion de personnes aimant le noir, au milieu d'un cimetière. Une bien triste journée où des inconnus firent descendre dans un trou une boite en bois. Matteo fut pousser en avant par la main osseuse de sa grand mère. Alors il fit comme les autres. Il laissa tombé une rose rouge dans le noir sous ses pieds. Il sombrait dans le sommeil oubliant ses larmes.
Ces satanées fleurs, il les avait vus l'année passée, à la Toussaint, sur la tombe de Marie. Sa grande sœur.
Contrairement à Sacha, Matteo ne se rappelait pas d'elle. Il ne l'avait pas vu a l'hôpital, il était trop petit quand elle était encore à la maison. La seule chose qu'il sait c'est que Marie était partie trop tôt. Comme sa maman quand elle le réveilla au alentour de dix heure trente.
Madame Martin sortit son fils de ce lieu maudit et le laissa seul à la maison, en sécurité.
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