"C'est bizarre quand même..." me dit Sally en buvant une gorgée de café.

"Je sais. Mais je ne vois pas où j'aurai pu le rencontrer." affirmais-je.

Nous parlions de mon nouveau patron. Sally avait passé toute la soirée à me poser des questions à ce sujet, et ce matin elle continuait. Cela commençait légèrement à me taper sur le système.

"C'est vrai que tu ne sors pas beaucoup..." continua t-elle. Les seuls moments où j'aurai pu le rencontrer c'était dans la rue, ou à mon lieu de travail. En parlant de travail, il est quelle heure?

"Oh mon dieu! Si je ne pars pas tout de suite je vais finir par être en retard..." annonçais-je en me levant. Sally me regarda partir en vitesse, elle ne comprenait pas ce que j'avais avec l'heure, pour elle cinq minutes de retard c'était pas grand chose. Le problème était que je n'étais pas comme elle, je ne supportais d'arriver en retard. Et puis Sally était toujours graciée de toute manière, un sourire et elle était pardonnée.

"Bonne journée!" cria t-elle depuis la cuisine alors que je refermais la porte derrière moi. Qu'est-ce que j'aimerais être elle, au moins pendant une journée pour voir ce que ça fait.

***

Comme d'habitude je me suis installée à mon bureau. À peine suis-je arrivée qu'Emma s'approcha de moi. Qu'allait-elle me dire aujourd'hui? Quelle humiliation allait devoir supporter?

Elle posa une pile de paperasse sur mon bureau déjà rempli, faisant tomber une boite à crayon par terre. Génial... En plus elle n'allait certainement pas ramasser. En fait elle regarda les crayon par terre et se mit à sourire en marmonnant un "Oups...", je suis sûre qu'elle l'avait fait exprès.

"Voilà un peu de travail, je me suis dis que tu risquais de t'ennuyer... De toute façon je ne vois pas ce que tu pourrais faire d'autre..." dit-elle en tapotant la pile qu'elle venait de poser, non en fait qu'elle venait de lâcher sur mon bureau. Si le fait de tuer quelqu'un n'était pas puni par la loi je ne vois pas ce qui me retiendrais de commettre un meurtre. Elle serait la première personne sur la liste.

Elle s'apprêtait à regagner son bureau, malheureusement trop près du mien, quand elle se retourna.

"Non, en fait rien, ça ne vaut même pas la peine que je te parle." dit Emma d'une façon fort sympathique. Cette femme est un démon, pourquoi personne ne lui dit jamais rien à elle?

Je me suis alors mise à quatre pattes pour récupérer mes crayons. C'est à ce moment là que la porte s'est ouverte.

"Et là nos bureaux qui s'occupent surtout de la comptabilité, mais aussi de répondre aux appels et de revoir tout nos dossiers." expliqua quelqu'un. Il devait s'agir de Peter John j'avais reconnu sa voix. Mais à qui est-ce qu'il expliquait tout ça?

"Où est passée mademoiselle Rogers?" demanda soudain mon supérieur, en remarquant que je n'étais pas assise à mon bureau.

"Je suis là!" m'écriais-je en me relevant en vitesse, tellement vite que je m'étais cognée la tête. J'étais debout quelques crayons dans ma main, face monsieur John et... Grégory Wilkerson. Je savais qu'il devait passer dans tous les secteurs de l'entreprise mais je ne pensais pas qu'il passerait ici en premier.

"Qu'est-ce que vous faisiez? Vous êtes censée travailler." me dit Peter John d'un ton froid. En temps normal il n'aurait rien dit, mais là il était accompagné de notre patron...

"Elle devait sûrement imiter un chien!" se moqua Emma. Je suis devenue rouge de honte. Et bien sûr tout le monde se mit à rire de moi. Tout le monde? Non, monsieur Wilkerson avait un visage inexpressif. Il m'a regardé, comme tout le monde à vrai dire, mais il ne se moquait pas de moi. Mais son expression changea, il semblait alors étonné. Qu'y avait-il?

"Cessez de rire!"cria t-il alors que personne ne s'y attendais. Même moi j'ai sursauté. Mais que lui prenait-il? En tout cas plus personne ne disait rien, c'était devenu tellement calme. J'avais même l'impression que le monde s'était arrêté de tourné.

"Bien. Mademoiselle Rogers, c'est donc votre nom? Oh mais bien sûr! J'avoue que je ne pensais jamais vous revoir, vous êtes partie si vite l'autre fois..." dit-il en s'adressant à moi. Mais de quoi parlait-il? Je ne comprenais rien.

"Vous vous connaissez?" demanda monsieur John, surprit, comme tout le monde dans cette pièce.

"Effectivement, nous nous sommes rencontrés, une fois, à une soirée."répondit-il ne cessant de me regarder. Quoi c'était lui?

Maintenant tout s'éclairait, voilà pourquoi nous avions tous les deux l'impression de s'être déjà vu, c'est parce que c'était arrivé. Tout le monde, en restait bouche bée, surtout Emma. Pour une fois que quelqu'un l'avait cloué sur place... Je me suis alors mise à sourire, ça devait être la première fois au bureau, avant je n'avais aucune raison d'exprimer de joie.

"Je suis très heureuse de vous revoir. Et pardonnez-moi de m'être enfuie..." dis-je en prenant une certaine assurance. Je me sentais si bien. Pour une fois que je pouvais en mettre plein la vue à mes collègues, je n'allais pas manquer cette chance. Il se mit à me sourire aussi. Mais je me demandais si tout cela n'était pas suspect, qu'allaient s'imaginer les autres maintenant? Que j'avais eu une liaison avec notre patron? Mon sourire s'évanoui. Une certaine peur m'avait maintenant envahi.

"Bon, je vais vous laisser travailler." dit t-il en s'adressant à tout le monde. Il a fait demi-tour mais avant de sortir il s'arrêta.

"Oh et, j'organise une petite soirée chez-moi, samedi, pour officialiser le fait que je sois désormais votre supérieur, vous êtes tous invités. Mademoiselle Rogers, vous connaissez l'adresse..." annonça monsieur Wilkerson en lançant un dernier regard dans ma direction. "Oh et vous passerez dans mon bureau vers dix heures, j'ai à vous parler." continua t-il en s'adressant toujours à moi, puis quittant la pièce. Quoi? Il voulait me voir? Mais pourquoi?

Emma lança un regard d'incompréhension vers moi, non en fait il n'y avait pas qu'elle. J'ai baissé les yeux en me concentrant sur mon travail. Maintenant c'était certains, ils se posaient tous des questions. Génial, ça allait de mieux en mieux... Quand je vais raconter ça à Sally elle ne va jamais me croire!