Désir vagabond
Nous sommes passés par d'innombrables salles, plus ou moins semblables les unes aux autres, en courant. Comme si quelque chose nous poursuivait, comme si le temps voulait nous rattraper. Et j'avais peur de ce que je voyais pas pas derrière moi, de cette chose qu'on appelait plus communément, le passé.
Tout n'était qu'imagé mais j'avais comme l'impression que si je ne suivais pas ce fou de Wilkerson dans cette impulsion si soudaine j'allais me faire engloutir par mes pensées et mes peurs les plus sombres et ne jamais plus en sortir.
Était-ce étrange de m'inquiéter de ça plutôt que ce que qui m'attendait prochainement ? Parce qu'au fond foncer droit devant soi sans s'arrêter accompagnée d'un homme que je connaissais si peu n'était pas non plus ce qu'il y avait de plus sûr.
Alors que pensais sans faire attention à ce qui m'entourait, me laissant guider sans crainte – on aurait pu me jeter d'un toit que je ne m'en serais même pas aperçu – on me força à m'arrêter. J'aurais bien pu continuer comme ça encore longtemps.
Enfin je repris mes esprits pour de nouveau me perdre mais cette fois-ci dans l'immensité d'un ciel étoilé. Je ne savais pas où je me trouvais exactement mais peu m'importait, je me trouvais totalement absorbée par ce que je voyais.
— Ça par contre ça ne semble pas vous laissez indifférente... entendis-je de la part de celui qui se trouvait à mes côtés, gâchant entièrement ce moment par ses paroles.
— Ce n'est pas comparable, répondis-je sèchement.
Je l'entendis soupirer. S'il en avait marre il n'avait qu'à s'en aller, ça ne me dérangeait pas le moins du monde.
Je me contentais de regarder les étoiles sans faire attention à lui. Mais je me demandais bien pourquoi il m'avait emmené ici.
— Pourquoi tant de haine ? Qu'ai-je fait de mal ? continua cet idiot de Wilkerson, alors que le son de sa voix ne faisait que m'agacer d'autant plus à chaque syllabe qui sortait de sa bouche – bien trop parfaite d'ailleurs, tant et si bien qu'elle en avait en réalité des imperfections à trop la regarder.
— Rien, je n'ai simplement pas envie de m'embarquer dans un plan foireux. Des hommes comme vous j'en ai connu, trop d'ailleurs, qui soit dit en passant n'ont jamais été à la hauteur de mes espérances, répondis-je sans même jeter un regard vers lui.
— Vous avez peur d'être déçue ?
— Non, je sais d'avance que je le serais déjà si jamais me prenait l'envie – totalement stupide – de m'engager là-dedans.
— Personne ne vous demande de vous engager dans quoi que ce soit, mais sachez aussi que je ferais tout pour vous faire changer d'avis... ajouta-t-il un sourire carnassier sur les lèvres, comme s'il était un prédateur et moi sa proie.
— Vous perdez votre temps.
Il se mit à rire, un rire à faire froid dans le dos. Mon regard se porta sur lui, interrogateur, peut-être même un peu inquiet.
— Ça tombe bien, j'ai du temps à perdre, lança-t-il d'une façon étrangement sérieuse.
— Eh bien moi pas, répliquai-je accoudée au rebord en pierres anciennes du balcon sur lequel nous étions.
Il s'apprêtait à rétorquer quelque chose mais quelqu'un d'autre que moi lui coupa la parole, l'empêchant de parler.
— Je vois que tu t'amuses toujours autant... commenta une femme qui sortait de je ne sais où. Elle n'était pas tombée du ciel quand même ? Étrangement son visage ne m'était pas inconnu. Peut-être l'avais-je déjà croisé au travail, ou bien n'était-ce qu'une simple impression de déjà vu.
— Oui, et tu n'étais pas invitée je te rappelle, souligna monsieur Wilkerson.
— Effectivement, mais il faut bien que quelqu'un te surveille, tu es tellement imprévisible, fit-elle remarquer.
— Je n'ai pas besoin de toi et de tes remarques, ici tu es chez moi, sur ma propriété et j'exige que tu partes sur le champ.
— Tu ne disais pas ça il y a 2 ans... continua-t-elle lui tournant autour comme un vautour, telle une lionne affamée après sa proie.
Je me sentais un peu de trop, je ne pensais qu'à une chose : m'éclipser en douce pour ne rien avoir à faire là dedans.
Mais alors que je marchais direction la porte de sortie monsieur Wilkerson m'interpela :
— Vous, vous ne bougez pas d'ici ! m'ordonna-t-il, autoritaire, me faisant sursauter.
Il vint jusqu'à moi, je le regardai avec des yeux ronds comme des billes, un peu perdue. Il me força à m'asseoir sur ce qui semblait être un lit et m'intima de rester là le temps qu'il fasse déguerpir « l'autre cinglée » comme il disait. Alors sagement je regardai la scène entre lui et cette femme qui me semblait familière.
Après quelques minutes à se chamailler pour rien il finit par la mettre à la porte, non sans difficulté.
Il vint s'excuser auprès de moi l'air penaud. Je ne savais pas si je devais rester silencieuse ou combler ce vide immense.
— Ai-je droit à quelques explications ? demandai-je finalement d'une petite voix.
— Mon ex-femme... elle se croit tout permis, comme par exemple débarquer chez moi à l'improviste et me faire une scène, expliqua-t-il sans vraiment donner de détails.
Mais à ces mots je lâchais un « oh » en venant de me rappeler où j'avais vu cette femme. C'était a fois où j'étais dans le bureau de monsieur Wilkerson et que les choses avaient légèrement dérapé. J'avais cru que c'était sa femme mais en fin de compte non... Je ne dirais pas que cela allait changer beaucoup de choses, mais cela enlevait tout de même un poids de savoir qu'il était libre et non marié. Non pas que je veuille tenter quelque chose avec lui, simplement cela me mettait un peu moins mal à l'aise.
— Une fois alors que je rentrais chez moi et que je m'apprêtais à regagner ma chambre, je l'ai retrouvé là allongée dans mon lit à moitié nue, c 'est pour vous dire à quel point il m'est difficile de me débarrasser d'elle. Ah ça j'aurais du le voir dès le début que si je m'engageais je risquais de retrouver une grosse sangsue à mes trousses ! Mais bien souvent on est trop aveugle pour voir l'évidence... continua-t-il alors que je ne lui avait rien demandé.
Pourquoi me racontait-il tout ça ? Voyait-il en moi une personne de confiance à qui il pouvait parler ? Où n'était-ce là qu'une façon combler le vide comme il aurait parler à n'importe qui d'autre ? À me poser ces questions on pourrait croire que je voudrais qu'il ait un quelconque intérêt pour moi, comme si je voulais avoir de l'importance à ses yeux. Quelle idiote ! Tout ce que voulait cet homme c'était m'avoir dans son lit.
M'avoir dans son lit, dans ses bras, mon corps brûlant sous ses mains délicieusement chaudes, et sa bouche qui s'amuserait à coups de langue... Je secouai vivement la tête, comme si tout allait disparaître de mon esprit. Mais ce fut bien pire, ce fut son regard étonné qui croisa mon regard affolé. Fallait-il les mots ? Fallait-il résister à nouveau ? Fallait-il que je m'éclipse ? Aurai-je dû partir bien plut tôt ?
Pourquoi déjà cette attirance affolante ? Ne pouvait-il pas n'y avoir qu'un dégoût ?
— Vous êtes affreusement belle... murmura-t-il alors qu'il se trouvait à seulement quelques centimètres de moi. Il s'était rapproché tel un félin dans un silence terrifiant et je n'avais même pas pris conscience de la chose.
Je ne savais plus quel sentiment était le plus fort en moi, la peur ou le désir ? La peur de succomber à ce désir grandissant aux notes alléchantes des murmures de la créature masculine qui bientôt allait me manger toute crue ? Mais ce désir si puissant encore jamais éprouvé auparavant qui prenait place dans mes entrailles, au bas de mon ventre d'une chaleur envoutante...
— Non ! criai-je alors en me levant brusquement.
Monsieur Wilkerson se leva à son tour l'air tout aussi perdu que moi. Il voulait parler, je le voyais bien, mais tout comme moi il ne trouvait pas les mots. Il me regarda longuement, intensément, sans bouger. Son regard étant sombre, très sombre, magnifiquement intense. Je n'avais qu'une envie, me pendre à son cou et me laisser faire, tomber avec lui sans crainte mais...
J'ai de nouveau pris la porte avant de courir une nouvelle fois à travers les couloirs immenses de sa demeure. Pourtant cette fois il ne me poursuivit pas, sans doute était-il trop étonné par l'expression de mes gestes.
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