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    Aujourd'hui ma mère m'a encore regardé avec ces yeux, noisette et triste. Elle est toujours triste ma mère. Quand il pleut, quand je tousse, quand le chat s'enfuit. N'empêche je le comprend le chat, il fait toujours moche chez moi, même quand il fait beau. Et mon lit est trop dur et trop mou, et le chauffage est pas assez élevé et pas assez bas. En même temps on s'ennuie ici.

    Ça fait 2 ans que je suis prisonnier de mon lit, deux ans que ma mère m'apporte mes cachets tous les matins. Elle refuse que je quitte mes draps, mais ça fait si longtemps que je n'ai pas couru dehors. Et le cerisier en bas, celui dont je m'amusais à reconstituer ses fleurs une fois les pétales tombées au printemps. Quand j'étais petit, le monde était grand, et moi j'étais petit.

    Parfois j'observe les gens vivre par la fenêtre. J'aime bien leur inventer une vie, qu'ils n'auront sûrement jamais le courage d'aller chercher. Ces gens tout gris, qui ne lèvent même pas la tête pour voir l'étendu du ciel ou les fleurs du cerisier.

    Parfois aussi, je me sent de trop. Comme ce cerisier trop grand et trop déformé. Qui n'est pas au bon endroit, parce que ici, ce n'est pas un parc à cerisier. C'est aussi peut être pour ça que personne ne le regarde, parce que ce n'est ni l'endroit ni le moment. Et personne ne regarde par ma fenêtre, parce qu'ils n'ont pas le temps, et que je suis ce cerisier.

    Mais parfois encore, des nuques se plient et des gens y pensent. Comme ce garçon, aux cheveux chocolat qui a les yeux dans le vague depuis deux minutes. Il a l'air d'avoir peur de la mort, mais ses joues semblent douces comme le pétale d'une fleur de cerisier.

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