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La rouge, la bleu turquoise ou la bleu océan ?

Je passe encore une fois devant ma glace, faisant défiler ma garde-robe. Je suis indécise. Liz et moi sommes allées faire du shopping hier après les cours, pourtant je ne trouve rien à me mettre. Désespérée, je m'écroule sur mon lit et envoie des signaux de détresse à mon amie.

@RienN'estJamaisFini : Liiiiz... J'ai absolument besoin de ton aide.

@RienN'estJamaisFini : J'arrive pas à me décider...

La sonnette retentit et je me lève pour aller ouvrir.

@BlondassePétasse : Je suis devant ta porte

@RienN'estJamaisFini : T'es tellement imprévisible !

La porte ouverte laisse apparaître Lisa Souté-Malder, des mèches blondes s'échappant de son chignon vite-fait, les joues rosies par sa course, vêtue d'un magnifique tailleur fuchsia, les pieds engoncés dans des bottines blanches. Elle me sourit de toutes ses dents.

— Voyons voir... dit-elle en me tirant par la main.

Nous traversons la cuisine, le salon puis montons les escaliers et arrivons dans ma chambre. Là, elle file dans mon dressing, sa jupe virevoltant au rythme de ses pas.
Je l'entends farfouiller, puis elle revient, les bras chargés, la pile de vêtements lui cachant la vue. Elle trébuche sur mon tapis, manque de s'étaler par terre jusqu'à ce que je tilte et réalise qu'elle a besoin d'aide. Nous posons les habits sur mon lit et Liz se passe un doigt expert sur les lèvres.

— Éliminons les tenues du bleu clair à l'électrique, marmonne-t-elle. Cela ne ferait pas ressortir tes yeux.

Disant cela, elle forme deux tas distincts : un avec les tenues possibles et l'autre les mauvaises.

— Ensuite, dit-elle en fronçant légèrement les sourcils, pas de noir. Ni de gris... Ni de blanc.

Le tas des affaires pouvant convenir réduit considérablement au fur et à mesure qu'elle change les robes, jeans, jupes et chemisiers d'endroit.

Elle avise une robe rouge et me la tend.

— Tiens, essaye, ordonne-t-elle.

Je m'éclipse pour me changer et le hoquet de Liz me fait sursauter quand je reviens et qu'elle aperçoit l'ensemble.

— Non, non et non ! glapit-elle d'un air horrifié en transférant toutes les tenues rouges du côté "indésirable".

Elle continue son tri et moi je continue de ne rien comprendre. Je m'enfonce un peu plus à chaque habit qui ne va pas, craignant de ne pas en trouver un qui me convienne.
Enfin, elle tombe sur une tenue d'un vert tendre, un haut laissant voir mon nombril et un short en lin. Je l'essaye, ravie d'avoir trouvé le bon ensemble. Je passe devant le miroir, mais un truc cloche.

— C'est très beau, concède Lisa. Pourtant... il manque quelque chose.

Elle plisse les yeux, me regarde de tous les angles. Elle étudie le tissu, la forme qu'il prend, mon corps... Puis elle soupire.

— Ça ne met pas assez tes yeux en valeur, se désespère-t-elle. Tes cheveux paraissent presque ternes. C'est bête. C'était la dernière.

Elle fait la moue et je balbutie :

— Tu es sûre que cela ne pourrait pas convenir ?

— Si, acquiesce-t-elle, mais ça ne serait pas assez suffisant. Pas assez... marquant.

Je passe en revue les vêtements éparpillés au sol. Un océan de couleur. Voilà ce que c'est. C'est joli. Pourtant, aucune tenue ne va. C'est impossible. Dans tant de choix !

Je m'affale sur mon lit aux côtés de Liz. Le silence nous entoure. J'envisage de dévoiler mes secrets à mon amie. J'ouvre la bouche, m'apprête à tout déballer. Jusqu'à ce que des pas sur les marches viennent le troubler. J'abandonne.

La porte s'ouvre dans un grincement sinistre. Ma mère nous trouve là, à désespérer.

— Mia, Liz ? demande-t-elle avec toute la candeur au monde. Que se passe-t-il ?

— Ah, je soupire, c'est cette soirée...

— Celle de ce soir ? m'incite-t-elle.

— Oui, me sauve Lisa. On ne trouve rien à lui mettre.

— Mmh, fait ma mère.

Ses sourcils roux arqués autour de ses grands yeux bleus me rappellent vaguement un ange. Son survet gris et son haut à bretelles m'amusent et ses cheveux roux et frisés séparés en deux couettes de chaque côté de sa tête lui donnent un air enfantin. Ma mère me redonne le sourire.

Elle entre et ferme le battant dans son dos, une expression amusée sur le visage.

— J'avais une robe de soirée, dans le temps... dit-elle, nostalgique.

Liz et moi nous relevons, à l'écoute. Nous glissons du lit et nous asseyons sur le tapis blanc, affûtées.

— Moulante, elle formait des querelles... s'amuse-t-elle.

— S'il vous plaît, Amélie, dites-nous en plus ! supplie mon amie.

— S'il te plaît, corrige ma mère. Voyons, chère Lisa, nous nous connaissons depuis si longtemps...

La jeune fille sourit, complimentée. Elle repart ensuite à la charge. Tant et si bien que ma génitrice nous fait signe de la suivre, un doigt sur les lèvres.

Arrivée dans sa chambre, elle extirpe une boite blanche du fond du placard et me la tend. Je l'attrape et Liz me guide jusqu'au lit.

Je la pose et prend une grande inspiration. Là-dedans se trouve peut-être ce qu'il me faut pour la soirée de Swimman. Nous nous réunissons autour du matelas -moi silencieuse comme une carpe et les deux autres me pressant d'ouvrir le compartiment.

— Sortez, s'il vous plaît, j'ordonne et elles s'exécutent.

J'ouvre la boite et là... Waouh. Magnifique.
La robe est moulante et violet pastel. Je l'enfile. Elle souligne la courbure de mes hanches et colle mes jambes pour s'arrêter au-dessus des genoux. Elle épouse ma poitrine, se noue derrière le cou, laisse mon dos dénudé.

Elle se marie à la perfection avec mes yeux, fait ressortir le teint clair de ma peau et de ma chevelure brun-roux.

J'ouvre la porte. Maman fait semblant de s'évanouir et Liz colle les paumes de ses mains sur ses joues, impressionnée.

Je crois que j'ai trouvé la bonne.