Céleste
Dieu et Fanatisme
"Mes frères, aujourd'hui est un grand jour. Aujourd'hui, nous allons montrer aux elfes la puissance de Son bras. Aujourd'hui, ces longues oreilles aux croyances impies vont être purifiés. Tous devront reconnaître Sa puissance, et nous considérer comme Ses élus. Ils ont essayé de nous chasser, nous, Ses émissaires alors que nous voulions leur montrer la voie du salut. Aujourd'hui, nous ne sommes plus pardon mais vengeance. Mes frères, je vous souhaite bonne chance dans votre mission sainte. Qu'Il daigne vouloir vous accompagner."
Le Haut-Saint, un petit homme ventripotent plaça sa main sur sa poitrine, s'inclina, puis descendit les marches de l'estrade avec difficulté. Il s'éclipsa, invisible au milieu de ses gardes du corps, alors que nous étions menés dans la citadelle. Hier, toutes les Capes Bleues d'Ithnawaith avaient été convoquées. Le Roi Aldïss venait de promulguer des lois pour nous expulser du pays, soi-disant à cause de nos idées dangereuses. Nous nous trouvions à une heure de route de Rolmen, la capitale du pays. Le Haut-Saint nous avait dit que tous nos frères là-bas avaient été exterminés par la Garde. Terrassé par ces nouvelles, il avait déclaré une guerre sainte contre ces hérétiques de non-humains. Nous leur avions tendus la main, pour qu'elle nous soit mordu violemment. Je tremblais de rage rien qu'à y penser. Un homme vêtus de noir, imposant, me coupa dans mes réflexions. Sans un mot, il tendit la main vers la grande table qui trônait au milieu de la salle. Je m'en approchai, ému par ce grand moment. Je pris un des étranges harnais qui étaient posés dessus, l'enfila avant de rejoindre mon groupe.
Enfin je pouvais me battre pour ce en quoi je croyais. L'ordre m'avait élevé, alors que je trainais dans les bas-quartiers de Mildi l'Ancienne. On m'avait enseigné la Sainte Voie, la croyance en Lui et en Lui seul. Achaerek, Madkhel, Mortämg, ces dieux païens n'étaient que des usurpateurs, des esprits essayant de lui voler ce qui lui revenait de droit.
Le Haut-Saint nous avait dit que tirer sur la petite corde en-dessous de notre aisselle montrerait à tous ceux qui étaient autour de nous Sa puissance. Je n'avais qu'une hâte, rejoindre mon poste pour remplir ma mission. Ce soir, la ville toute entière serait convertie...
Pourquoi ne suis-je pas triste d'être mort ? Car j'ai accompli ma mission. Rolmen est en ruines, pulvérisée par notre foi. Notre sacrifice était nécessaire pour que tous sachent sa puissance. Cent frères pour convertir une ville, n'est-ce pas magnifique. Il m'ouvrira les portes du royaume céleste, pour moi et ceux qui sont morts par ma main ce soir...
Honneur et Sang
Je levai ma hache au ciel, poussant un terrible rugissement de fureur. Mes frères et mes soeurs, ma tribue, scandaient un hymne guerrier qui vantait la gloire et le fer, l'honneur et la guerre. Ce chant m'ennivrait, la fièvre du combat montait en moi, liqueur ô combien dangereuse. Je regardai mon adversaire, un autre homme de stature imposante du nom d'Acanar. Il avait osé regarder ma femme de son sale air lubrique, ce sans-honneur. J'avais déjà provoqué des duels pour moins que ça mais cet idiot à oser lui toucher le bras, devant mes yeux ! Qu'Ashardassi lui enfonce des charbons dans ses orbites et lui arrache sa langue perfide ! Après l'avoir éloigné de ma possession d'un violent coup, je l'avais sommé d'accepter mon duel à mort, sous peine de passer dans le Monde Inférieure plus tôt encore. Comme le veut l'usage, tout notre clan s'était rassemblé, avant de nous encercler tous les deux. Deux hommes entraient, un ressortait.
Acanar essaya de me fendre le crâne, mouvement bien trop lent pour seulement m'inquiéter. Ma force, mon expérience, tout en moi le dépassait. Les imberbes du sud se rappelaient encore de mes raids dix ans après, le sang avait tâché ma hache avant sa naissance et lui, ce blanc-bec, osait me provoquer ouvertement. J'allais lui montrer pourquoi je dirigeais la tribu. Je tournoyai et le fer de mon arme siffla vers ses côtes. Sa parade détourna le coup mais la seule force de mes bras le repoussa. Enchaînant les frappes rapides, je le fis reculer pas à pas. Incapable de riposter, il se contentait de contrer mes attaques ou d'esquiver d'un bond sur le côté. Ma respiration se fit peu à peu haletante. Ce fourbe chien m'épuisait sans que je ne puisse rien y faire. Peu à peu, il prit l'avantage sur moi. Epuisé, rongé par la vieillesse, je ne pus bientôt plus lui rendre ses attaques. Il eut le premier sang, m'entaillant profondément la jambe. Je tombai à genoux, vaincu. Il s'était montré malin, profitant de sa rapidité pour m'épuiser. Les chants s'arrêtèrent, tous retenait leur souffle. Saisissant mon arme, je la pris contre moi, mes yeux fixés dans les siens. Quand le coup s'abattit, je ne reculai pas...
Pourquoi craindrais-je la mort ? J'ai vécu une vie de fer, de sang, de carnage. J'ai vaincu les tempêtes, bridé les farouches chevaux des steppes, défendu ma tribu. J'ai eu trois fils, trois guerriers d'acier me rendant fier chaque jour. Mourir lors d'un duel est une belle mort, bien plus que de mourir dans son lit comme un lâche du Sud. Je sais que les portes dorées du Monde Supérieur s'ouvriront pour moi, m'offrant les royaumes célestes...
Plume et Poésie
Je m'étire sur ma chaise, enfin satisfait de ce que j'ai écrit. Ce concours n'aura pas été facile, ça je peux l'assurer. Après plusieurs essais, je pense enfin avoir fini. Avec tous les problèmes de temps que j'ai eu, c'est un exploit je trouve. Alors que je pense à publier mon récit, une idée me vient. Et moi, quel est mon avis dans tout cela ? J'ai parlé d'homme croyant en un Dieu tout-puissant et j'ai raconté le combat de guerriers pour qui le sang est la clé du Paradis. Mais pour moi, où sont ces portes ?
Nulle part et partout. Dans le coeur de personnes valeureuses, prêtes à se battre pour changer ce qui doit l'être. Je ne crois pas en un être au-dessus de nous, mais j'aimerai que l'on me promette que nous attend un avenir meilleur. J'aimerai savoir que les hommes vont s'aimer, sans prendre en compte les différences. Que la violence ne sera jamais une solution, tout comme le rejet. Je veux que le monde change et ne plus avoir peur que notre société tombe dans la paranoïa. Ne plus avoir peur qu'un jour on chasse tous ceux qui sont différents. Car ce jour là, je ne serai ni Charlie, ni Paris mais plutôt Homme.
Je pense qu'il ne faut pas espérer un paradis doré, où se reposer après avoir souffert toute notre vie. Je crois qu'il faut profiter de la vie comme d'une belle amante d'un été, sans fin. Faire ce qu'on pense devoir faire, pour ne jamais regretter le passé. Aimer, danser, rêver à longueur de journée. Je pense qu'il faut s'affranchir de l'autorité et faire ce que l'on pense être juste, car c'est à nous de choisir quels sont nos devoirs et non pas les autres.
Tu dis que je suis grande gueule, que je ne fais rien malgré mes bravades ? C'est vrai, je ne fais qu'écrire ce que je pense, je ne tue pas des gens au noms de mes idées. Est-ce une faiblesse ? Je ne sais pas...
Je me contente d'enlaçer la belle Céleste, sous les étoiles de la nuit.
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