Chapitre 9
- « Tu as eu un rendez-vous avec Adrien Agreste et tu ne m'as rien dit?! » S'écrie Alya à l'autre bout du fil.
Assise dans mon siège de bureau, je tente vainement de décharger la frustration causée par le petit-déjeuner de ce matin avec le blondinet.
-« Oui mais ce n'était pas grand chose, surtout que ça a tourné au vinaigre. »
Tikki, écoutant d'une oreille attentive mes impressions, me regarde tristement, le visage collé à ma main libre. J'en profite pour caresser ses petites antennes, reconnaissante pour son aide de ces dernières heures.
-« Sérieusement? C'est possible ça? Je veux que tu me racontes tout! »
-« Tu n'es pas supposée avoir cours en ce moment? » Je remarque en constatant l'heure avancée sur l'écran de mon ordinateur.
Un léger rire s'échappe du téléphone.
-« Crois-moi ma vieille, entre un cours sur l'histoire de l'information et le récit incroyable d'un rendez-vous raté, mon choix est vite fait! »
Je ne peux que partager son avis, la couture du pantalon que je dois rafistoler me semble moins attrayant que de me plaindre.
-« Tout se déroulait parfaitement, je l'ai emmené sur le toit de l'immeuble pour éviter d'être embêtés par des collègues. Je suis passée chez mes parents pour récupérer des viennoiseries, tout était parfait! Trop parfait! »
-« Ne me dis pas qu'il a fait une indigestion devant toi mais si c'est le cas, dis-moi que tu as fait des photos pour me le prouver. »
L'imagination d'Alya me surprendra toujours mais je me serai bien passée de l'image d'Adrien en train de recracher la tarte que mon père a cuisinée.
-« Non pas du tout. D'un coup, il s'est énervé sans raison et m'a demandé des comptes, comme si je lui cachais quelque chose. »
-« Bizarre, ça ne ressemble pas au Adrien qu'on connait. »
J'acquiesce, oubliant un moment qu'elle ne peut pas me voir.
-« C'est ça! Il n'a pas cessé de soupirer après, comme si je l'ennuyais! Et ce n'est pas tout! Avant de partir, il était dans l'ascenseur et moi dans le couloir, il m'a dit "Désolant", comme pour parler de ce rendez-vous! »
-« "Désolant"? » Répète-t-elle.
Bon d'accord, ça ressemblait plus à un « DésolAH!» qu'autre chose mais je ne vois pas ce qu'il pouvait bien dire d'autre.
-« Mais, rassure-moi Mari, tu viens quand même demain soir? »
J'ai eu le temps d'y réfléchir durant toute la journée mais si j'arrive à la soirée en même temps qu'Alya, je ne serai pas forcée d'être en contact avec Adrien. Ce serait idiot de m'empêcher de passer une nuit tranquille avec mes amis pour un stupide rendez-vous raté. Après tout, je ne comprends même pas pourquoi je devrai me prendre la tête.
-« Je viens, je viens. Sinon je devine que tu viendrais me tirer par les pieds jusqu'au manoir. »
-« Bingo. »
Le ton évident de ma meilleure amie m'arrache un rire sincère.
-« Au fait, comment ça va de ton côté? » J'enchaîne, curieuse.
- « Moi? Oh, on va dire que l'année file à grande allure mais ça roule comme sur des roulettes! De plus, comme Chat Noir est de retour en ville, mon forum n'a pas cessé d'être inondé par les buggers. »
Il est vrai que je n'ai pas consulté le Ladyblog depuis notre dernier combat.
-« Ils sont si fans de Chat Noir que ça? »
Non pas que je doute de la popularité de mon partenaire mais quand il a soudainement disparu, peu de gens s'en sont inquiétés. Ce qui est dommage quand j'y repense.
-« Disons que Chat Noir a la fâcheuse manie de se promener sur les toits pendant la nuit alors certains fans s'amusent à sortir pour le prendre en photo. »
Cela correspond bien à l'image que je me fais de Chat Noir. Se balader sur les toits semble être devenu une activité à part pour lui. Je ne vais pas m'en plaindre, s'il en profite pour patrouiller alors je peux pleinement profiter de mon sommeil. Soudain, au beau milieu de mon appel, je reçois un SMS de la part d'Alya.
-« Qu'est-ce que c'est? »
-« Oh rien, juste une petite sélection des meilleurs clichés. »
-« Alya, ce n'est pas parce que le rendez-vous s'est mal fini que je vais jeter mon dévolu sur un autre garçon. »
Même si je dois avouer que je me retiens de regarder les photos tout de suite.
-« Mais rien ne t'empêche de faire du lèche vitrine. Considère ça comme un petit coup de pouce de ma part. Ah, je crois qu'un de mes profs vient vers moi, je te laisse. Bye chérie! »
-« Bye bye! »
Alya raccroche la première. J'attends une dizaine de secondes, les yeux fixés sur l'écran d'appel sur lequel clignote une icône en forme d'enveloppe fermée. Allez, ça ne coûte rien de jeter un coup d'œil à ces photos. Vu la pénombre, certains clichés sont assez sombres mais on reconnait sans problème la silhouette de Chat Noir, tantôt s'élançant à l'aide de son bâton, tantôt accroupit sur un rebord. Le point commun de toutes ces images prises à l'aide de smartphones sont la lueur verte fluo émanant de ses yeux. On aurait presque l'impression qu'il regarde en direction de l'objectif à chacune des prises.
-« Marinette, regarde l'heure, on rentre? » M'interrompt Tikki, joyeuse.
Je réfléchis quelques secondes, le regard tourné vers l'extérieur. Le soleil décline progressivement, j'en viens à me demander si je ne croiserai pas Chat Noir ce soir.
-« Ça fait un moment que je n'ai pas patrouillé. Tikki transforme-moi! »
Le kwami disparaît dans ma boucle d'oreille et me change en Ladybug. Je ne m'aperçois que tardivement de mon imprudence. Si quelqu'un était passé dans le couloir à ce moment-là, j'aurai pu dire adieu à ma couverture. Bref, j'ouvre la fenêtre, et m'envole à l'aide de mon yo-yo, fendant les airs à haute vitesse.
-« Maman! » S'exclame un petit garçon aux cheveux bruns sur le trottoir.« C'est Ladybug! »
Il me pointe du doigt et sautille lorsqu'il s'aperçoit que je le fixe. Amusée, je me surprends à redescendre sur la terre ferme, à quelques pas de l'enfant.
-« Bonsoir! » Je les salue en tendant la main au bambin.
Celui-ci piétine le sol, surexcité à l'idée de me voir. Sa mère semble gênée, elle peine à savoir ce qu'elle doit me dire.
-« Tu es géniale Ladybug! »
Le petit attrape ma main et la serre doucement. Je l'en remercie chaleureusement et leur souhaite une bonne fin de soirée avant de repartir. Mon cœur bat à tout rompre. Je n'ai plus vraiment l'habitude de parler aux citoyens. Bien que je les protège contre les dérives du Papillon, j'oublie souvent que ces gens vivent dans un danger perpétuel et qu'ils ne jurent que par mon nom et celui de Chat Noir pour les sauver. Je me hisse au-dessus d'un gratte-ciel, m'offrant une vue imprenable sur la capitale.
-« Je devrai songer à rentrer plus souvent en Ladybug. »
Je me demande même pourquoi je ne l'ai pas fait plus tôt! Autant que mes super pouvoirs me servent en dehors des combats. Soudain, mon yo-yo émet une sonnerie, je l'ouvre et m'aperçois que le Ladyblog vient de publier une série de photos de moi en train de saluer le petit garçon. Une drôle de sensation m'envahit.
-« Wow, ils ne perdent pas de temps ces paparazzis...»
Il y en a sous tous les angles. Certains ont ajouté des filtres Instagram pour me rendre plus lumineuse...Est-ce que je peux me vexer? Enfin, ce n'est rien à côté de ce type qui vient de poster une photo de moi avec un filtre chien de Snapchat. Et de celui qui a pris une photo de moi en train de regarder les photos de moi à l'instant...D'accord, je m'en vais!
Je lance mon yo-yo plus loin et m'élance dans le vide, veillant à éviter la collision avec les autres bâtiments. Il vaudrait mieux que je me détransforme quelques rues à côté de ma destination. Certes, nous sommes des centaines à vivre dans ces immeubles mais j'aimerais éviter que des gens viennent photographier mon quartier. Alors que je choisis précautionneusement une ruelle à l'écart et redevient Marinette, mon téléphone personnel vibre à son tour.
Chat Noir:« Que celui qui a mis ce filtre chien meure dans d'atroce souffrance. »
Je ne parviens pas à réprimer le sourire que son message me provoque. Je me doutais qu'il suivait ce site.
Ladybug:« En effet, il faut croire que je ne suis pas aussi photogénique que toi dans la nuit. »
Le téléphone accroché dans une main, je sors de ma cachette et me dirige vers mon immeuble, à cinq minutes d'ici.
Chat Noir:« Envie d'une séance photo de groupe ce soir? »
C'est du Chat Noir tout craché. Malgré le fait que ça me ferait du bien de me vider la tête ce soir, je n'ai pas forcément envie de le faire en tant que Ladybug. D'autant plus si des clichés de mon partenaire et moi sont publiés sur le Ladyblog. Je ne voudrais pas qu'il devienne jaloux ou se fasse des idées sur mes sentiments.
C'est à cet instant précis que je me rends compte qu'Adrien et moi sommes en dispute...Avec mes deux identités différentes.
-« C'est un désastre... » Je me plains, manquant de me faire bousculer par un inconnu par manque d'attention.
Je gravis les marches me séparant de mon studio et pénètre à l'intérieur. Tikki s'échappe de ma bourse et s'envole vers mon lit. Elle doit être très fatiguée. Sans elle, je ne me serai jamais levée à l'heure pour me rendre à la boulangerie, sans oublier qu'elle a du me canaliser pendant que je paniquais dans le métro et devant l'immeuble. Je ne pense pas que les autres Ladybug l'aie mise dans de telles situations. Je m'avance vers la cuisine et ouvre une armoire dans laquelle se trouve une boite remplie de cookies. Je verse le contenu dans une assiette en porcelaine que j'apporte à mon kwami, couchée à mon chevet.
-« Repose-toi bien ce soir, je te laisse dormir. » Je chuchote à son oreille.
Ah, c'est vrai, je n'ai toujours pas fait les courses. Je vais devoir manger dehors une fois de plus. Hors de question que j'embarque mon kwami avec moi, j'attrape mon sac en forme de bourse bleu et m'empresse de rejoindre la chaussée.
Un des avantages de vivre à proximité du Trocadero, c'est d'avoir une multitude de brasserie dans les environs. Pizza? Sushis? Crêpes salées? Mon cœur balance. Hamburger! Quoique, le KFC est beaucoup moins loin que le Burger King. Je déambule dans le quartier d'un pas lent. Il est loin le temps où il me suffisait d'attendre ma mère scander mon nom pour m'offrir un repas équilibré. J'aurais du apprendre à cuisiner avant de déménager dans ce studio. Adrien a de la chance lui, il a un chef étoilé qui lui prépare tout ce dont il a envie.
Mais pourquoi je pense à lui tout à coup? Je me remémore les fois où je lui rendais visite et qu'il commandait tout ce que je désirais à manger. Lui ne prenait toujours que du camembert qu'il abandonnait au coin de la table. Il faut dire que je ne terminais jamais mes plats, c'est lui qui s'en chargeait. Au bout de la rue, je m'arrête et me range sur le côté, chassant tant bien que mal l'image d'Adrien de ma tête.
-« Moi qui pensais qu'il n'y avait pas un chat dans cette rue. »
Je sursaute, croisant au tournant d'une ruelle les yeux verts luisant de Chat Noir. Les bras le long du corps, je tâche de calmer les battements effrénés de mon cœur puis marche quelques pas et m'insère dans cette ruelle peu accueillante. Seul un lampadaire accroché me permet de me repérer dans l'obscurité.
-« Chat Noir? »
Il se courbe en avant, un bras replié sur son torse.
-« Lui-même. »
-« Mais qu'est-ce que tu fais aux alentours de chez moi? »
- « Je te rappelle que Paris est aussi chez moi, tout comme toutes les rues qui la composent. Là, tu marches sur mon territoire mais je suis gentil, je te laisse vagabonder. »
Quel idiot, je lève les yeux au ciel, recouvert de nuages masquant les étoiles. Mon ventre grogne, instaurant un silence gênant entre nous deux. Silence qu'il brise par un rire moqueur.
-« Bon bah pendant que tu te joues de mon appétit, je m'en vais ratisser les rues de ton territoire! »
Alors que je me tourne avec la ferme intention d'entrer dans le premier commerce sur mon chemin, Chat Noir dépose une griffe sur mon épaule. Je m'arrête au coin de la rue.
-« Attends. »
La journée est donc loin d'être terminée? J'abandonne l'idée de me débarrasser de l'entrave du super héros vêtu de cuir noir super moulant.
-« Tu sais, je me suis bien amusé l'autre soir. Je me disais...Ça te dirait qu'on se refasse ça? A moins que tu aies encore du travail. »
Mh...Passer une soirée avec Chat Noir? Il ne devrait pas être avec sa petite amie vu que tout le monde ici semble être pris de ce syndrome appelé amour? Mieux vaut éviter de lui sortir ça. Après tout, ce n'est pas une si mauvaise idée. Je pivote pour affronter ses deux paires d'yeux verts.
-« Je suis libre. »
Puis je me souviens que Tikki dort paisiblement dans ma chambre. Je n'imagine pas sa tête si elle me voit débarquer avec Chat Noir sous le coude.
-« Par contre », j'ajoute d'une voix plus aiguë qu'à l'accoutumée, « ma colocataire est là donc si on pouvait aller dans un autre endroit. »
Chat Noir dépose son index sur ses lèvres et son pouce sous son menton, feignant de réfléchir.
-« Pas de problème, j'ai une petite idée d'où je pourrais t'emmener. Si madame veut bien se donner la peine. »
Suivant ses mots, le blond aux yeux verts m'intime de monter sur son dos et d'accrocher mes bras à son cou. Je m'exécute pendant qu'il agrippe son bâton et l'allonge pour s'envoler. Je manque de crier au nombre de mètres franchis en un temps record.
-« N'hésite pas à t'accrocher à cette musculature parfaitement tracée! »
C'est le seul moment où j'ai réellement hésité à sauter. Je me contente d'admirer la vue depuis les airs, à défaut des fameux abdominaux de ce type. Oh mon Dieu et si un de ces paparazzis me prenait en plein air avec Chat Noir? Je vais finir sur le Ladyblog! Et Alya ne me lâchera plus jamais! Je suis tellement paniquée que je ne remarque même pas que Chat Noir amorce la descente sur la terrasse d'un bar situé au premier étage d'un commerce. Celle-ci est faiblement éclairée et peu fréquentée. Cependant, des bruits de conversation s'échappent de l'intérieur.
-« Tu viens souvent ici? » Je demande, curieuse d'en connaître plus sur les habitudes de mon partenaire.
-« Possible, les barmans ne posent pas trop de questions et je suis à l'abris des paparazzis ici. »
Alors lui aussi fuit ces types étranges aux smartphones aiguisés. Nous nous installons non loin d'un halo provoqué par les lampadaires, à une table entourée de deux fauteuils assez grands pour trois personnes. L'endroit est suffisamment éclairé pour m'assurer que je ne suis pas accompagnée d'un psychopathe mais pas assez pour me rendre compte que c'est bien cet idiot de Chat Noir.
-« Je reviens. Si besoin, tu cries. »
Je ne manque pas d'attraper la perche tendue.
-« Et si ça fait vingt minutes que j'ai envie de crier? »
-« Miaouch...N'oublie pas que le destin de ton ventre est entre mes griffes. »
Je pousse un léger rire, le regardant s'éloigner pour le bar. Une main dans mon sac, je m'empare de mon téléphone et envoie un message à l'attention de Tikki sur mon répondeur. J'en profite également pour vérifier que mon visage ne se retrouve pas sur le Ladyblog. Fort heureusement, les « buggers » sont trop occupés utiliser divers logiciel pour modifier mon apparence. Comment ça mes cheveux seraient mieux en brun? Et j'aime bien mes yeux bleus moi!
-« Ne fronce pas les sourcils comme ça, tu vas vieillir avant l'heure. » Plaisante le super héros armé de deux cocktails et d'une assiette de nachos couverts d'une sauce cheddar.
Je déglutis face aux odeurs de nourriture emplissant mes narines. Sagement assise dans le fauteuil, je me décale légèrement vers ma droite pour permettre à Chat Noir de s'installer. Il est le premier à entamer le plat mais je suis sur ses talons.
-« Mon esh'tomac te remerchie de ch'e chauvetage. » Je parviens à dire avant d'avaler ma première bouchée.
Mon manque de classe attire le regard amusé de mon partenaire. Le mien se tourne vers le verre ballon rempli d'un liquide blanc décoré d'un parasol coloré.
-« C'est à quoi? » Je l'interroge en le montrant de l'index.
Chat Noir me présente mon verre tandis que son autre main soulève le sien. Je glisse mon majeur et mon annulaire à la base du socle et le récupère.
-« Ça s'appelle un Seychelles, c'est à base de coco et d'ananas. Ne t'en fais pas, loin de moi l'idée de t'alcooliser. »
Dans un premier temps méfiante, je trempe mes lèvres dans mon verre et apprécie finalement les saveurs du mélange. Mes impressions n'échappent pas à mon copain d'un soir.
-« J'ai toujours le flair pour savoir ce qui va plaire aux filles. » Se vante-t-il en avalant une gorgée à son tour.
Cette phrase m'intrigue, Chat Noir a toujours l'air si...charmeur, je ne peux m'empêcher de l'imaginer en train de draguer des filles dans la rue et de les inviter dans des bars comme...comme en ce moment.
-« Ça t'arrive si souvent que ça? »
Son visage change du tout au tout, remarquant brusquement son sous-entendu. Il tousse pour reprendre une allure plus assurée.
-« Non, loin de là! C'est juste que je me disais que si, un soir, j'invitais une fille ici, je lui proposerai ce cocktail là. »
Une de ses griffes disparaît dans sa tignasse blonde désorganisée, je souris à l'idée de l'avoir mis dans l'embarras par une simple question. A croire qu'il cherche à garder une image convenable dans mon esprit.
-« Tu as passé une bonne journée? » Demande-t-il d'un coup.
J'ingère le contenu de ma bouchée avant de répondre.
-« Ca aurait pu être pire. Rah...J'ai l'impression de répéter toujours la même chose, il n'y a pas une journée sans qu'un détail vienne perturber ma bonne humeur. »
Les oreilles de Chat Noir s'abaissent.
-« Je ne parle pas de toi bien sûr. C'est gentil de ta part de t'occuper des demoiselles en détresse. »
Mise à part Alya, il est le seul avec qui je me permets de décharger toute la rage enfouie en moi. Il ne sait pas à quel point je lui en suis reconnaissante.
-« C'est un plaisir pour moi. »
Alors que nous partageons ce plat hautement calorique, notre conversation dévie sur nos travaux respectifs. J'apprends que Chat Noir a de plus en plus de responsabilité dans son emploi mais qu'il a hâte de le quitter pour finir des études scientifiques. Il me confie aussi que s'il se balade autant la nuit c'est parce qu'il a un emploi du temps trop chargé et que ça lui permet de se libérer un peu de ces obligations. De mon côté, je lui divulgue mon envie de devenir styliste indépendante, d'avoir mon petit cabinet où je recevrai des commandes de grandes stars, je leur fournirai mes créations apposées de mon propre logo.
-« Tu devrais persévérer chez les Agreste et te faire un nom! » M'encourage Chat Noir presque aussi optimiste que moi.
Voir tant d'engouement me met du baume au cœur et appuie mes impressions sur lui. Il a raison, un peu de patience et je finirai bien par y arriver!
-« Et ce jour-là », je poursuis en avalant une nouvelle gorgée de mon cocktail, « Chloé sonnera à mon bureau et je lui dirai « Désolée, je n'ai pas de temps à perdre avec une pseudo starlette dans votre genre! » avant de raccrocher et de compter mes billets. »
-« Le contraire m'aurait étonné. »
Nous rions en chœur et terminons le plat de nachos. Je m'affale sur le fauteuil, le ventre plein à craquer. La soirée est si agréable en sa compagnie que je n'ose pas jeter un regard à mon téléphone pour consulter l'heure.
-« Il faudrait qu'on se fasse ça plus souvent. » Je baille en étirant mes jambes fatiguées de cette longue journée.
Ma remarque provoque un sourire de mon vis-à-vis. Il se recule à son tour, allongé sur le côté pour me faire face, la tête maintenue par sa main accoudée au sommet du fauteuil.
-« Je ne dis pas non, si je n'ai pas d'autres chats à fouetter. »
Je tire la langue. Il me fixe droit dans les yeux, je me demande bien à quoi il peut penser en ce moment. Il semble avoir apprécié la soirée tout autant que moi.
-« Est-ce que tu sais ronronner? » Je demande du tac au tac.
Ses oreilles en cuir noir se tendent vers le ciel. Il perd toute contenance devant ma simple question.
-« Hum...Eh bien...»
Bon, il n'y a qu'une seule manière de le savoir. Ma main prend la direction de ses cheveux et s'enfouissent dans sa masse. Je retrouve une sensation familière, je suis presque happée par l'envie de tirer doucement ses mèches mais me ravise aussitôt. Chat Noir ferme les yeux, appréciant à vue d'œil l'attention que je lui porte. Amusée, je sépare la distance qui nous sépare et me rapproche pour écouter les bruits s'échappant de sa gorge. Allez, ronronne!
-« Tu vas ronronner oui? » Je m'acharne en insérant ma deuxième main à la base de sa nuque.
Un faible bruit pouvant s'apparenter à un moteur émane de ses lèvres, je m'en satisferai pour le moment mais je veux l'entendre ronronner comme un chat.
-« Si je ne te connaissais pas depuis quatre ans, je te considérerai comme une timbrée. » Souffle Chat Noir en soulevant ses paupières à moitié.
-« Je ne t'ai pas entendu te plaindre quand j'ai commencé. » Je rétorque en donnant une pichenette à son grelot.
Il n'a apparemment rien à ajouter. Aussi proche, le bruit de sa respiration parvient à mes oreilles, je calque mes inspirations sur les siennes sans m'en apercevoir. Dans la pénombre, ses yeux verts luisent, comme sur les clichés d'Alya. Contrairement à ceux-ci, je suis certaines qu'ils regardent vers l'objectif. Ma main gauche demeure à la base de ses cheveux, immobile. L'autre flotte dans l'air, n'ayant su se poser après avoir secoué sa petite cloche.
« Rien ne t'empêche de faire du lèche vitrine » disait Alya. Je dois bien avouer que je louche un peu trop sur les promotions là. Je ferai mieux de reporter mon attention sur mon cocktail posé sur la table. Je l'entends, il m'appelle « Eh Marinette, je suis là, viens me boire! » mais je ne sais pas pourquoi je suis incapable de retirer ma main de sa...nuque chaude et...Je ne sais pas si c'est l'éclairage ou la possibilité que je sois en train de mourir cérébralement mais je le trouve plutôt attirant ainsi.
-« Marinette, je crois que tu devrais cligner des yeux de temps en temps. »
-« Toi c'est ta bouche que tu devrais apprendre à fermer. »
Il soulève un sourcil devant tant de violence mais ne bouge pas pour autant.
- « D'accord. »
Ma main en suspend décide finalement de se poser sur l'épaule de Chat Noir. Il ne réplique pas, comme s'il attendait que l'inévitable se produise. Les bruits de circulation me paraissent désormais bien loin de notre petite cachette. Mon autre main remonte doucement pour caresser ses cheveux et cette fois non pas pour lui provoquer un ronronnement mais par pure envie.
Ce n'est que tardivement que je remarque la griffe posée au bas de mon dos. L'a-t-il déposée il y a longtemps ou vient-il de le faire? Une chose est sûre c'est que les minutes défilent sans que je me sente en pleine disposition de mes moyens. Là, décelant mon trouble dans mon regard, Chat Noir esquisse un petit sourire. Le détail de trop. Ma main serrant davantage la racine de ses cheveux, je me penche et réduit la distance qui nous sépare. Nos lèvres se rencontrent, d'abord chastement, comme si nous n'avions jamais embrassé qui que ce soit auparavant. Je me sens emportée dans un élan sans savoir s'il s'agit du mien ou du sien. Ma seconde main se loge dans le creux de son cou pour me donner plus d'emprise sur son visage. Quant à lui, sa griffe remonte brusquement sur mon épaule et me tire davantage contre lui. Nos yeux sont fermés mais je sais très exactement où je me trouve.
Au moment où nous séparons nos bouches pour nous reconnecter à la réalité, je suis prise d'un réflexe et emprisonne sa lèvre inférieure avec mes dents. Je la tire soigneusement et encre mon regard dans le sien. Cet instant ne dure que de faibles secondes, il se brise lorsque Chat Noir dépose sa griffe gauche sur ma joue et la remonte jusqu'à mon oreille. Libre, il soulève légèrement la tête pour imiter mon geste, provoquant en moi une chaleur insoutenable. Nous nous embrassons à nouveau, unissant nos langues, se cherchant encore et encore. Ses soupirs m'entraînent et je devine aisément que c'est le cas pour les miens. Nous faisons durer ce moment encore et encore jusqu'à nous épuiser dans nos mouvements.
Une main plaquée sur son épaule, je dépose ma tête sur sa jumelle, brisant le contact visuel qui avait perduré durant nos échanges. Ma première pensée ne va étrangement pas vers Adrien mais plutôt vers Tikki, à qui je vais devoir justifier ce léger dérapage.
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