Quand Arthur entra à la taverne après une dure journée de labeur il découvrit tout le monde autour du meunier qui possédait le moulin au bas de sa rue.

— Je vous jure il a un septième sens comme on dit !

— On dit un sixième sens non ? intervint la boulangère.

— Mais non voyons tout le monde sait qu'on a six sens ! affirma le boucher.

Chacun se tut un instant, tentant de compter les différents sens, de sortir du tréfonds de leur mémoire ce qu'ils avaient appris à l'école voilà bien longtemps sur le sujet. Malheureusement les nains avec leur longévité oubliaient encore plus facilement que les humains leur enfance. Arthur lui-même qui n'avait jamais été bon à l'école, surtout pas pour compter, préféra détourner la conversation pour masquer sa honte devant son manque de connaissance :

— C'est qui qui aurait ce septième sens ?

— Un voyant ! Il a su prédire qu'il y aurait un accident au moulin. Il est épatant. Il vient de s'installer dans le quartier.

Cette annonce fit devenir le voyant très populaire dans les rues alentour. Il y avait toujours quelqu'un chez lui pour une consultation. Arthur lui trop occupé à ses abeilles n'avait pas encore eu le temps de s'y rendre. Pourtant il entendait tous ses voisins parler de lui et de ses visions. Cela l'intriguait. Un jour n'y tenant plu il se présenta à l'établissement timidement.

Le voyant qui lui ouvrit était un nain des plus normaux, un longue barbe, un costume raffiné, il l'examina d'un regard perçant :

— Vous êtes l'apiculteur, annonça-t-il.

Arthur en resta bouche bée.

— Oui. C'est votre septième sens qui vous l'a dit.

L'autre s'esclaffa.

— On peut dire ça oui. Venez !

Il le suivit dans une pièce sombre éclairé à la lueur des bougies.

— Vous en faites aussi si je ne me trop pas, dit-il.

Arthur bouche bée devant tout ce qu'il voyait hocha la tête. L'autre lui servit une pinte de bière. Il en fut étonné.

— Ce n'est pas comme ça que j'imaginais une séance de voyance.

— C'est ma méthode. J'ai besoin que vous soyez à l'aise. Comment va Nathan votre voisin le boulanger ? Il a retrouvé son chat ?

— Il en devrait pas tarder je l'ai croisé dans mon jardin tout à l'heure.

Ils burent quelques bières en bavardant des voisins. Puis le voyant lui prit les mains, prêt à délivrer ses prophéties.

— Je vois que vous allez vendre énormément de bougie et chandelle très prochainement. Si vous voulez mon avis augmentait votre production. Je vois aussi que vos abeilles sont en grand danger. Protégez-les !

Il lui lâcha les mains.

— Cela vous a-t-il était utile ?

— Oui. Oui beaucoup. Combien je vous dois ?

— 200 pièces. 150 aujourd'hui et les 50 prochaines quand mes prédictions ce seront réalisés. Si ce n'est pas le cas vous pourrez venir chercher vos 150 pièces.

Il donna la somme importante en ayant l'impression de faire une bonne affaire.

En effet l'hiver arriva rapidement et fut extrêmement rude. Il écoula de nombreuses chandelles dû à l'obscurité qui arrivait trop vite. Et ses abeilles coururent un vrai péril par ce froid intense qu'il put anticiper grâce au voyant. Il lui paya ses 50 pièces de plus et y retourna pour entendre de nouvelles prédictions.

— C'est bien que tu as eu tout ce stock de bougie, souligna la boulangère quand elle vint chercher un lot.

— C'est grâce au voyant. Il a vraiment un septième sens. Il a su me prédire qu'on en aurait besoin.

— Ah il a su prédire à Nathan que le chat reviendrait très vite et en effet.

Ils songèrent tous les deux à quel point le voisin était exceptionnel. Arthur avait déjà oublié qu'il avait informé lui-même avoir vu le chat de son voisin.