Des Arbres Et Des Cellules
Alors, ça y est, vous avez constaté ma mort.
Pouf.
Disparue, la personne que vous connaissiez.
Disparus, les jours heureux.
Disparues, les promenades dans les bois, les feuilles craquant sous nos pas, nos discussions métaphysiques, nos envolées lyriques, interrompues par une quinte de toux impromptue.
Disparus, les chocolats chauds devant la cheminée, affalés sur le canapé.
Disparus, les rendez-vous au restaurant, les mercredis après-midi, les duels silencieux de regards, les récits palpitants de nos vies respectives, en terrasse, en train de se débattre avec le parasol bleu, celui qui ne voulait jamais s'ouvrir.
Disparue, l'amie, la confidente de la nuit, l'épaule pour pleurer, la fille méritante dont les parents pouvaient être fiers.
Disparu, mon éclat de rire.
Disparu, mon sourire.
Disparus, mon âme, mes rêves, mes espoirs, mes peines, mes joies.
Si mon corps sera physiquement présent, moi, je ne serais plus là.
Mais, vous verrez, vous me retrouverez. Au Paradis, en Enfer, dans une prochaine vie, bref, là où vous voulez, selon votre croyance.
Ou vous m'oublierez.
Comment ?! Mais on ne t'oubliera jamais, pas même une seule seconde ! Allez-vous vous récrier.
Vraiment, vous croyez ? Avez-vous pensé aujourd'hui à la tante Sylvie, morte il y a treize ans ? À mon grand-père, Papi Jojo, qui était fou de vielles autos ? À notre voisine de palier, Mme Martin, morte électrocutée le jour de son emménagement ?
Non, bien sûr que non.
Ce n'est pas de la mauvaise volonté de votre part, c'est juste que l'être humain ne peut pas se rappeler continuellement de tout.
Vous ne vous souvenez certainement pas de la dernière fois que vous avez porté des chaussettes blanches, du code que vous aviez utilisé pour votre première boîte mail, de la personne à qui vous avez parlé du prix des maillots de bain, lors des vacances d'été, ni de quand est né Joseph Staline (vous l'avez su pour le contrôle, mais vous ne vous en rappelez plus).
C'est à croire que pour assimiler de nouvelles choses, on doit oublier - même momentanément- quelque chose.
Donc, après ma mort, vous serez tristes (du moins, égoïstement, je l'espère) un an, deux ans, dix ans... Mais il arrivera bien un jour où vous n'y penserez qu'occasionnellement.
Lorsque vous rirez, ou lorsque vous serez enfin heureux, de préférence.
Ma mort vous reviendra de plein fouet.
Comme une gifle.
Et vous vous fustigerez d'avoir été, l'espace d'un instant, heureux, vivants, sans moi.
Vous culpabiliserez, et vous vous remettrez à y penser, en vous faisant toujours plus mal.
Mais, dans un futur plus ou moins proche, nous nous retrouverons.
Je m'explique.
Je pense que la mort n'a rien de définitif.
Même en étant athée, on peut considérer qu'il subsistera au moins notre souvenir dans le cœur des personnes qui nous ont été chères (bien que ce souvenir ne soit pas pérenne).
Même en étant athée et en ayant perdu foi en l'humanité, on peut considérer que notre nom sera enregistré à la mairie, ou apparaîtra dans la rubrique nécrologique du journal.
Même en étant athée, en ayant perdu foi en l'humanité et en étant orphelin et ermite, on peut considérer que notre enveloppe charnelle fera la joie d'asticots et autres bébêtes nécrophages.
Qui se feront elles-mêmes ingurgiter par des animaux plus gros.
Jusqu'à remonter au sommet de la pyramide alimentaire, dans l'estomac du seul animal capable de couper des arbres pour fabriquer du papier, sur lequel il écrit " Sauvez les arbres ! Non à la déforestation !" , j'ai nommé...
L'être humain !
Donc, dans une certaine mesure, l'Homme est un peu cannibale.
Je sais, c'est moche.
Mais c'est ainsi que se perpétue la vie.
Grâce à la mort.
Qui ne meurt pas n'est pas vivant. Et qui n'est pas vivant ne meurt pas.
Pourquoi meurt-on ?
Je pense que nous mourrons à cause du temps.
Le temps n'a d'emprise que sur le vivant.
Et comment se symbolise le temps ?
Par le mouvement.
Quasiment tout ce qui bouge est vivant. Toutes proportions gardées, bien sûr.
Un arbre ne se développe pas à la même vitesse qu'un champignon.
Et les cellules meurent plus vite que les êtres qu'elle composent.
On n'y pense jamais, à ces êtres microscopiques qui se sacrifient tous les jours pour que nous survivions à un lever de Soleil de plus.
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Une minute de silence pour toutes ces pauvres cellules sacrifiées sur l'autel de notre survie !
Je suis vraiment désolée de publier aussi tard. Je n'ai aucune excuse. Allez-y, lynchez-moi !
Sinon, vous pouvez aussi me dire ce qui va, ce qui ne va pas etc.
Vos conseils me seront précieux et je suis ouverte à toutes les suggestions !
À la prochaine !
( Promis, la partie suivante sera publiée avant 2018 !)
Édit, juin 2018
Bon. Comme vous pouvez le voir, ne n'ai pas respecté ma promesse, et je m'en excuse profondément.
J'ai surestimé mes chances face à mon monstre interne, Procrastination. Je me suis fait vaincre pitoyablement, sans une quelconque résistance, aussi minime soit-elle.
Mais, dans un dernier sursaut de volonté, juste avant de succomber, j'ai retrouvé assez de force pour saisir mon stylo et écrire quelques lignes tremblantes.
Donc, quasiment un an après le premier mot, cette lettre est enfin achevée !
Il en a fallu du temps !
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