X V I I
Καθέζεται μὲν δὴ ὁ θεὸς ἐν θρόνῳ χρυσοῦ πεποιημένος καὶ ἐλέφαντος· στέφανος δὲ ἐπίκειταί οἱ τῇ κεφαλῇ, μεμιμημένος ἐλαίας κλῶνας. Ἐν μὲν δὴ τῇ δεξιᾷ φέρει Νίκην ἐξ ἐλέφαντος καὶ ταύτην καὶ χρυσοῦ, ταινίαν τε ἔχουσαν, καὶ ἐπὶ τῇ κεφαλῇ στέφανον· τῇ δὲ ἀριστερᾷ τοῦ θεοῦ χειρὶ ἔνεστι σκῆπτρον μετάλλοις τοῖς πᾶσιν ἠνθισμένον. Ὁ δὲ ὄρνις ὁ ἐπὶ τῷ σκήπτρῳ καθήμενός, ἐστιν ὁ ἀετός. Χρυσοῦ δὲ καὶ τὰ ὑποδήματα τῷ θεῷ, καὶ ἱμάτιον ὡσαύτως ἐστί. Τῷ δὲ ἱματίῳ ζῴδιά τε καὶ τῶν ἀνθῶν τὰ κρίνα ἐστὶν ἐμπεποιημένα.
Le dieu est assis sur un trône d'or et d'ivoire ; il a sur la tête une couronne qui imite le branchage de l'olivier; il porte sur sa main droite une Nikê aussi d'or et d'ivoire, qui tient une bandelette et a une couronne sur la tête ; Zeus tient de l'autre main un sceptre travaillé avec goût, et émaillé de toutes sortes de métaux, l'oiseau qui repose sur ce sceptre est un aigle ; la chaussure du dieu est en or, ainsi que son vêtement, sur lequel on voit toutes sortes de figures et des fleurs de lys.
Pausanias, Description de la Grèce, V
Druig avait mis longtemps à comprendre. Longtemps à comprendre que la seule femme qu'il n'avait jamais aimée ne l'aimait pas en retour. Longtemps à comprendre qu'elle préférait sa liberté à lui. Presque soixante-dix ans. Soixante-dix ans de peine et de chagrin. Soixante-dix ans dont il commençait à sortir en se persuadant qu'elle ne reviendrait pas.
Ils étaient partis de Babylone seulement quelques semaines après cette nuit-là. Cette nuit où Epona avait décidé de partir si abruptement.
La dernière vision qu'il avait eu de la jeune femme était le matin de son réveil. Il avait tenu sa main inanimée pendant des heures, avant que Makkari ne vienne le rejoindre. La peau blême de la blonde semblait terne entre ses doigts, presque terreuse. Ajak avait guéri ses plaies externes, mais les multiples hémorragies internes mettraient du temps à se refermer selon la Guérisseuse. Ajak ne savait dans quel état se réveillerait Epona si elle se réveillait un jour. La blonde respirait à peine et le manque de souffle sur son visage était une des choses les plus horrible que Druig avait pu voir de sa vie. Assister à la mort de la personne qu'on aimait le plus au monde était surement l'une des épreuves les plus difficiles qu'il avait pu expérimenter.
Epona était devenue une extension de lui-même. Il passait continuellement son temps dans son esprit à tenter de trouver une faille dans ses défenses et même s'il avait promis à Epona de ne jamais plus lire ses pensées, c'était plus fort que lui. Pendant des années, il avait attendu que la blonde s'endorme à côté de lui pour apaiser ses souffrances et ses douleurs. Il ne rentrait jamais profondément dans ses pensées mais en savait suffisamment pour savoir que la blonde souffrait continuellement. Les émotions d'Epona étaient souvent trop fortes pour y résister, c'était là son pouvoir. Les émotions agissaient comme un émetteur, un conducteur qui permettait de rentrer dans les pensées. Le fil qui permettait de démêler la bobine.
Ce jour-là quand ils avaient été attaqués par le Déviant, Druig avait enfin touché un fil nouveau qu'il n'avait plus connu depuis longtemps dans l'esprit de la blonde.
De la joie. De l'amour.
Son esprit s'était lié à celui de la blonde sans vraiment réfléchir et il avait lui aussi ressenti cette émotion avec trop de force. Une émotion qui l'avait rendu négligent. Phastos les avait pourtant prévenus que des Déviants approchaient dans la région. Les autres Eternels étaient en état d'alerte et se préparaient à une attaque imminente. L'amour et la joie étaient de bien mauvaises conseillères. Ce lien mental inconnu avec Epona l'avait distrait et il n'avait pas vu l'attaque venir. Il n'avait pas eu le temps de se décrocher de son esprit.
Il avait senti chaque moment pendant l'attaque du Déviant.
Il avait senti le choc.
Il avait senti la douleur.
Il avait senti son envie de rester consciente pour le protéger.
Il avait senti son pouvoir.
Puis son lien avec la blonde avait été brutalement coupé. Cela avait été si soudain qu'il l'avait cru morte sur le coup.
Il avait couru de toutes ses forces, seulement pour voir Ikaris s'envoler avec le corps d'Epona et Ajak lui promettant qu'elle allait la sauver. Makkari et lui avaient marché vers la cité en silence, la Coureuse montant derrière lui sur un cheval pour ne pas le laisser seul. Ils étaient tous les deux silencieux, trop hébétés pour parler. En arrivant à Babylone, le brun avait senti que l'esprit de tous les Eternels étaient en ébullition.
Il n'arrivait plus à penser par lui-même.
Il ne sentait plus rien autour de lui. Seul des acouphènes de douleur et de choc résonnaient encore à ses oreilles.
Même les humains avaient senti qu'une de leur déesse avait été blessée. Ils avaient brulés de la menthe dans des grands braseros et organisaient des prières collectives. Cela donnait au brun envie de vomir. Parmi les psalmodies des humains et leurs lamentations, Druig ne voyait que le silence des pensées d'Epona et c'était insupportable.
Il avait observé Ajak soigner la blonde pendant des heures, ses mains diffusant son pouvoir doré jusqu'à ce qu'elle aille se reposer pour recommencer le lendemain. Reconstituer des vaisseaux sanguins et des tissus était plus long et facétieux qu'il ne le pensait et la Guérisseuse avait pris trois jours pour refermer la plaie béante de la blonde. Trois jours d'angoisse où le brun ne dormit pas, se rongeant les sangs chaque jour. Mais la blonde ne se réveillait pas et son esprit ressemblait à un puit sans fond. Il restait le plus souvent en silence, près d'elle à l'observer dormir. Son sommeil était entrecoupé de faibles respirations et ses lèvres entrouvertes frémissaient de temps en temps. Il ne lui avait jamais dit qu'il l'aimait et elle était maintenant entre la vie et la mort. La vie était injuste. Surtout sur cette planète. Il ne savait pas si elle l'entendait et Ajak n'en avait aucune idée. C'étaient surtout les pensées d'Ajak qui embrouillaient le brun. Elle était inquiète et ne savait pas comment réagir.
Quand le matin du quatrième jour, les plaies externes de la blonde se refermèrent et que sa peau se reconstitua entièrement, Ajak était venue s'asseoir près de Druig et avait pris sa main. Elle n'avait rien dit et avait seulement soupiré lourdement en essuyant une larme qui dévalait la joue du Télépathe.
- Tu devrais te reposer, avait dit la Guérisseuse, sa vie est entre les mains d'Arishem maintenant. Il n'y a plus rien à faire à part attendre.
- Comment je pourrais me reposer en sachant qu'elle ne pourrait jamais se relever ?
- Elle ne va pas se relever tout de suite. Demande à Makkari de te remplacer si tu veux mais il faut que tu dormes.
Le brun avait rechigné mais avait fini par accepter la proposition d'Ajak quand la brune avait insisté. Il avait pris une nuit de repos. Il avait embrassé la main de la blonde comme chaque soir avant d'aller se coucher. Le lendemain, la blonde se réveillait et partait sans un aurevoir.
Il s'était réveillé en sursaut ce soir-là. Il avait rêvé de hauts murs rouges d'une forteresse impénétrable et d'Epona qui le regardait fixement sans dire un mot, ses yeux bruns reflétant une colère qu'il n'avait jamais vu chez la blonde. Son premier réflexe avait été de voir si l'esprit d'Epona s'était réveillé. Quand il s'était trouvé devant les mêmes hauts murs rouges de son rêve, il avait paniqué. Il avait rabattu ses draps et avait couru voir l'état de la blonde, entrainant les autres Eternels sur son passage.
Tout ce qu'il avait pu voir d'Epona ce soir-là était le regard figé d'Ikaris qui les empêchait de passer et l'esprit de la blonde qui s'éloignait de lui.
Il avait pris longtemps cela comme un état de choc de la blonde. Elle venait de manquer de mourir. Elle voulait se retrouver seule. Elle aimait tellement la nature qu'elle profiterait pendant quelques semaines du calme de la terre et elle reviendrait les voir. Le voir.
Mais elle n'était jamais revenue. Et Ajak et Ikaris fermaient leur esprit à chaque fois qu'il entrait dans une pièce. Cela l'avait d'abord énervé mais il faisait comme si de rien n'était. Il trouverait bien un moment où ils baisseraient leur garde.
Cela n'était jamais arrivé.
Le temps était passé. Les semaines, les mois, les années. Ils étaient arrivés en Grèce quelques années auparavant. Ils avaient regardé des poètes devenir célèbres, des écoles de philosophie se créer. Ils avaient assisté à des compétitions sportives aussi.
Et celles des jeux d'Olympie étaient les meilleures auxquelles ils aient pu assister. Les plaies de son cœur avaient petit à petit cicatrisé. Sans se refermer tout à fait. Ils avaient rigolé pendant le voyage, pariant sur leur champion préféré. Le nom de la cité ne leur était pas étranger et cela les avait faits sourire. Olympie, Olympia, leur planète d'origine. La ressemblance était étrange mais aucun des Eternels n'avait remis en doute leur destination. Les coïncidences arrivaient parfois.
C'était Ajak qui avait choisi où ils se rendaient et quand Sersi avait demandé pourquoi, Ajak avait simplement sourit. L'Eternelle originelle avait changé depuis le départ d'Epona. Elle semblait plus renfermée et guettait avec plus d'attention qu'auparavant les messagers. Ikaris aussi avait changé, semblant plus sur la retenue qu'avant auprès de Sersi. Druig sentait son hésitation contenue mais n'avait rien dit. Il ne savait pas ce qu'Epona avait dit ce soir-là à Ajak et Ikaris mais elle n'avait pas voulu le partager avec lui de toute évidence. La rancœur avait remplacé l'attente dans son cœur depuis de nombreuses années maintenant et le sujet d'Epona était devenu presque tabou entre les Eternels.
Un son tonitruant le ramena à l'instant présent. Une trompette venait d'annoncer la nouvelle épreuve d'olympisme qui allait se dérouler dans quelques minutes. Une épreuve de lutte ou de course, le Télépathe ne savait plus. Les parieurs s'approchaient du stade et échangeaient des pièces sur le potentiel gagnant. Druig observa rapidement les pensées des humains rassemblés. Tout ce qu'il y lut fut de la cupidité et il grimaça.
Il suivit Makkari qui s'engageait dans le marché d'Olympie et s'éloigna des épreuves sportives. Il observa les carrioles bringuebalantes de fruits qui s'avançaient sur le marché. Il savait qu'Epona adorait les marchés mais il ne s'était jamais demandé pourquoi. Généralement, ces endroits sentaient mauvais ou trop d'odeurs se mêlaient entre elles et l'agitation perpétuelle donnait à Druig mal à la tête. Mais Epona y trouvait une forme d'apaisement ce qui était étrange.
Le soleil était assez haut dans le ciel en ce milieu de matinée et Druig voyait Makkari profiter de la chaleur de ce début de printemps. La Coureuse penchait la tête vers le ciel et les rayons du soleil se reflétaient sur sa peau mate. Ils avaient marché toute la matinée à travers la foule des humains venus assister aux Jeux et avaient déambulés entre les différentes échoppes du marché. Les deux Eternels avaient acheté leur déjeuner et le mangeaient en marchant. Makkari avait volé quelques bouts de pain au Télépathe et ils s'étaient chamaillés gaiement en signant.
Les effluves de cuisine, d'épices et de fleurs se répandaient sur la place du marché et Druig aperçut un stand qui vendait des marguerites. Il sentit son cœur se serrer douloureusement et se mordit l'intérieur de la joue. Son humeur changea brutalement et il dépassa précipitamment le marchand de fleurs en ne jetant pas un seul regard aux marguerites. Il devait arrêter de penser à elle.
- Tout va bien ? Signa Makkari d'un air inquiet et Druig s'en voulut de ne pas arriver à passer un bon moment avec la Coureuse.
- Tout va bien, signa-t-il en retour et la brune posa sa tête sur son épaule.
- Si tu préfères rentrer... Commença à signer la Coureuse.
- Non. On vient d'arriver et je sais que cela te fait plaisir d'être ici.
Makkari hocha la tête mais Druig vit qu'elle n'avait pas l'air convaincu. La brune lui attrapa soudainement la manche et le traina derrière elle vers une fontaine en marge de l'agitation du marché. La Coureuse s'assit sur la margelle et observa le Télépathe en silence. Elle finit par soupirer et par tapoter la margelle à son côté pour que le brun s'assoit à côté d'elle.
- Tu devrais parler à Ajak de ce qui te préoccupe, commença à signer Makkari avant que Druig ne la coupe en levant les yeux au ciel.
- Nous avons déjà eu cette conversation.
- Alors tu sais très bien ce que j'en pense, répliqua la Coureuse en haussant les sourcils.
Les deux Eternels se toisèrent en silence avant que Druig ne capitule en penchant sa tête vers ses chaussures.
- Je ne vais pas aller voir Ajak pour une chose aussi futile.
- Tu penses vraiment que c'est futile ? Utiliser ton pouvoir dans chaque nouvelle ville où nous allons pour essayer de la retrouver, tu trouves que c'est futile ? On dirait une obsession bizarre... Commenta Makkari en jouant avec un caillou du bout de sa chaussure.
- Ce n'est pas bizarre. Je te dis qu'il y a quelque chose qui cloche avec son départ précipité de Babylone. Elle ne m'aurait jamais laissé comme ça sans rien dire.
Makkari laissa reposer ses mains sur ses genoux et observa les remous de la fontaine. Les rayons du soleil jouaient avec les gouttelettes d'eau et formaient des arcs en ciel. La Coureuse avait la mâchoire serrée et Druig la connaissait assez pour savoir quand elle était contrariée. Cela ne manqua pas et Makkari reprit rapidement ses signes.
- En même temps, si elle avait voulu te quitter sans te le dire elle ne s'y serait pas pris autrement...
Druig soupira lourdement. Ce n'était pas la première fois qu'il avait ce genre de discussion avec Makkari. La brune était son amie et ne voulait que son bonheur, il le savait mais il avait aussi la certitude qu'Epona ne serait jamais partie sans explication.
- Je ne suis pas le seul à penser que le départ d'Epona est étrange, continua le Télépathe, regarde Phastos il sait que quelque chose ne va pas.
- Peut-être mais Phastos est passé à autre chose depuis longtemps.
Les signes de la Coureuse étaient secs et rapides et sa bouche se déformait comme pour prouver son énervement. En jetant un rapide regard dans l'esprit de Makkari, Druig y lut de l'agacement et une forme de colère qui lui fit serrer la mâchoire.
- Je n'ai pas envie de me disputer avec toi, Makkari.
- J'essaye juste de t'aider, abdiqua la Coureuse en voyant l'air buté de son ami.
Le Télépathe se releva, ayant pour projet de revenir voir les autres Eternels quand Sprite apparut brusquement à côté d'eux. Druig manqua de trébucher sur elle et se rendit compte que ce n'était qu'une illusion quand son pied passa à travers la jambe de Sprite.
Malgré son air bougon habituel, l'illusion de la rousse arborait un air joyeux inhabituel. Elle s'agitait d'un pied sur l'autre et ses mains bougeaient de manière incontrôlable.
- Les gars, il faut que vous voyiez cela, c'est génial !
Makkari jeta un regard surpris au Télépathe et les deux Eternels finirent par suivre l'illusion jusqu'à un immense temple plus loin sur l'esplanade. L'illusion se dissipa quand ils arrivèrent en bas des marches menant au temple et ils virent la vraie Sprite leur faire des signes du haut du temple. Quand ils arrivèrent en haut des marches, Druig vit que tous les Eternels étaient présents. Thena posait sa tête sur l'épaule de Gilgamesh en souriant, et Sersi et Ikaris se tenaient la main. Le brun sentait qu'une certaine émotion s'échappait du groupe et plus particulièrement de Phastos qui semblait au bord des larmes.
Il releva la tête.
Une statue immense se dressait devant eux. Tout d'ivoire et d'or vêtu, Zeus était assis sur un trône, une couronne de laurier posée sur la tête et tenant Niké dans sa main droite. Druig regarda tout d'abord Niké et se dit qu'elle ressemblait vraiment à Makkari. Puis il regarda le visage de Zeus et tomba nez à nez avec Phastos. Le visage d'ivoire était tellement ressemblant que le brun eut un petit rire nerveux en regardant la statue.
Epona était passée par là récemment. Elle leur laissait un message.
Le brun sentit un petit sourire éclairer ses lèvres.
Le chapitre 17 est arrivé !
Cela me fait plaisir de voir que mon histoire vous plait, je vois le nombre de lectures augmenter tous les jours et cela me touche beaucoup donc merci à vous ! <3
Et bonne fin des Jeux Olympiques 2024 aussi !
Et bonne nouvelle : à partir de maintenant, je publierai un chapitre par jour !
Bonne soirée à vous tous et toutes et à demain ! ;)
a.k.a MadBloodd
[Première publication : 15 avril 2022]
[Republication : 12 aout 2024]
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