02. So let's love.
Nous revoilà pour le second OS de ce calendrier, écrit par WhenItalk ! Bonne lecture à tous~
Le soleil était déjà couché depuis un moment lorsque Jaemin éteignit enfin son ordinateur, clôturant ainsi cette journée déjà bien longue. Cela faisait presque deux semaines maintenant qu'il s'enfermait dans son bureau du matin au soir, n'en sortant que pour aller chercher un café ou de quoi grignoter. Chaque année c'était la même chose, lorsque l'hiver approchait, les fêtes de fin d'année sur ses talons, le jeune homme faisait tout son possible pour travailler autant qu'il le pouvait. C'était une période qu'il ne portait pas dans son cœur, pire il la haïssait plus que tout.
Ce n'était pas inhabituel qu'il soit confronté à une série de regards surpris et confus lorsqu'il faisait part du dégoût qui l'animait. Après tout, rares étaient ceux qui partageaient son avis, il fallait donc avouer que cela pouvait être déconcertant. L'ébène avait fini par s'y habitué, si au début il faisait tout ce qui était en son pouvoir pour alimenter les discussions de différents arguments censés, désormais, il se contentait d'hausser les épaules lorsque l'on lui faisait une remarque à ce sujet. Ça ne servait à rien d'expliquer ce qu'il pensait ou même ressentait, personne ne semblait le comprendre. Alors, au fil du temps, il s'était renfermé, continuant de se tuer à la tâche.
Seulement, il n'était pas bête et il savait pertinemment que cela ne pouvait pas durer une année de plus. Il y avait bien trop à faire pour une seule et même personne. C'est donc pourquoi il avait pris les devants et avait décidé de faire passer plusieurs entretiens. Pendant près d'une semaine, Jaemin avait accumulé les échecs, à tel point qu'il s'était même demandé s'il avait peut-être mis la barre trop haute. Il est vrai qu'il est quelqu'un de pointilleux et de sévère, mais de là à trop en demander ? Cette question l'avait rongé pendant plusieurs nuits jusqu'à ce qu'un matin, complètement épuisé et dépité il ne tombe sur le candidat parfait. Travailleur, énergique, souriant, et extrêmement compétent, Jeno était parfait pour ce poste, c'était indéniable. Alors, ça avait été sans l'ombre d'un doute que le plus jeune l'avait embauché.
Depuis, le noiraud arrivait à passer de meilleures journées. Il sortait encore très peu de son espace de travail, mais lorsqu'il rentrait chez lui, il se sentait plus léger, plus libre. D'ordinaire, le jeune patron aurait eu tendance à rester sur ses gardes et à surveiller le nouveau venu, mais pas cette fois, non. C'était étrange mais il sentait qu'il pouvait faire confiance à l'aîné. Ce fut donc, un rare sourire sur les lèvres qu'il se rendit vers le bureau du blond, dans le but de lui annoncer la fin de cette journée. Seulement, lorsqu'il arriva près du battant, préparé à y administrer quelques coups, une voix à l'intérieur de la pièce le coupa. C'était celle du plus vieux, qui semblait en pleine discussion téléphonique.
D'habitude, l'ébène aurait rebroussé chemin, mais pas cette fois-ci, non. Sa curiosité prenait le dessus, l'obligeant à venir coller son oreille contre la porte, en attente de la suite de la conversation. Le souffle court, de peur d'être surpris, il resta dans cette position pendant plusieurs minutes avant de s'éloigner, n'entendant plus rien. Quelque peu déçu, le jeune homme s'apprêtait à soupirer lorsque la poignée s'abaissa d'un seul coup, dévoilant très vite celui qu'il espionnait.
— Monsieur Na ? Tout va bien ? Questionna-t-il, pas le moins du monde énervé.
Complètement gêné d'avoir été pris sur le fait, il chercha une excuse, de quoi justifier sa présence, mais rien ne vint, absolument rien. Seules ses joues réagissaient, se parant d'un léger voile rouge.
— Vous semblez avoir chaud, est-ce que vous voulez de quoi vous rafraîchir ?
Rapidement, il acquiesça, simplement désireux de s'extirper de cette situation. Ainsi, le plus vieux rentra dans son bureau, invitant son patron à le suivre. Ce dernier ne broncha pas et le rejoignit, saisissant le verre d'eau qu'il lui tendait. Bien que ce n'était pas la première fois qu'il visitait les lieux, Jaemin devait avouer que le blondinet avait rendu l'endroit chaleureux. Dans les tons bruns et automnale, on avait presque envie de se mettre devant un bon feu de cheminée et de se reposer, pelotonné dans une couverture, à l'abris du vent
— Monsieur ? Intervint le plus vieux, le coupant brutalement dans ses pensées.
— Oui? Pardon, vous disiez ?
— Je vous demandais s'il serait possible que je prenne quelques jours de congé dans les prochaines semaines qui arrivent ? Avec les fêtes qui approchent, j'aimerai beaucoup revoir ma famille.
À l'entente de ces mots, le cœur du noiraud se serra légèrement dans sa poitrine. Lui qui chaque année passait ces quelques jours seul ne comprenait pas ce besoin, ni même cette envie que pouvait ressentir les autres. À ses yeux, il valait mieux se contenter de sa propre présence plutôt que de s'entourer de gens bavards et collants, encore plus à cette période de l'année.
— À vrai dire, débuta-t-il, le visage inexpressif, je ne sais pas si cela sera possible, nous avons encore beaucoup de travail qui nous attend.
— Je pourrais travailler à distance si cela est vraiment nécessaire ! Répliqua l'autre aussi rapidement que possible. Je ne compte pas vous fausser compagnie indéfiniment et puis vous serez sûrement occupé de votre côté aussi.
— Je ne fête pas Noël ou même le Nouvel An, donc ça ne risque pas d'arriver, lâcha-t-il d'une traite.
— Pourquoi donc ? Les sourcils du plus vieux étaient froncés à l'extrême, il semblait contrarié par cette réponse dénuée d'enthousiasme. Elles font partie de la plus belle période, vous ratez vraiment quelque chose.
— Je déteste l'hiver rien que pour cette période-là, donc croyez-moi lorsque je vous dis que je ne manque rien.
— Comment ça, vous n'aimez pas les fêtes de fin d'année ? Voyons, tout le monde les aime !
Un soupir s'échappa des lèvres de Jaemin alors qu'il tournait le dos à l'occupant de la pièce, faisant semblant d'admirer les bibelots sur son bureau.
— Et bien, pas moi.
— Je suis persuadé que vous finirez par les aimer, ce n'est qu'une question de temps.
— Qu'est-ce que vous- L'ébène n'eut pas le temps de finir sa phrase que l'aîné le coupa, le regard brillant accompagné d'un regard plein de malice.
— Je vous ferais aimer la période de fin d'année, comptez sur moi.
Et alors que le patron s'apprêtait à répliquer quelque chose pour se sortir tant bien que mal de cette situation embarrassante, il s'arrêta en plein milieu d'une réflexion. Il était prêt à refuser et à enterrer cette discussion, seulement, une petite voix lui soufflait que ce n'était pas la meilleure chose à faire. Alors, au pied du mur, il finit par accepter. Ainsi, le visage toujours habillé d'une expression indéchiffrable, il resta quelques secondes à se demander ce que cet engagement allait créer. Il n'avait aucune envie de se projeter, mais il fallait avouer qu'il était plein d'appréhension. Jeno avait beau avoir un sourire à en faire tomber plus d'un, le cadet préférait tout de même se méfier de lui sur cet aspect. On ne sait jamais véritablement ce que les autres nous cachent avant de les avoir poussé sous la lumière du jour.
Après de longues minutes pendant lesquelles le silence était à nouveau venu les bercer, il finit par se retirer, n'oubliant pas de signaler à son employé que sa journée était finie et que par conséquent il pouvait s'en aller.
À ce moment-là, Jaemin ne le savait pas encore, mais il s'embarquait dans ce qui s'annonçait être la plus belle expérience de sa vie. Ou du moins celle qui allait tout chambouler sur son passage.
☪︎⋆。˚
Plusieurs jours s'étaient écoulés depuis cette soirée-là. Jaemin et Jeno n'avaient plus abordé le sujet des fêtes, pour le plus grand bonheur de l'ébène, et ce même s'ils s'étaient croisés près d'une dizaine de fois dans la journée. Il avait été plus que ravi de faire la connaissance d'une nouvelle personne, de quelqu'un qui dénotait grandement de son cercle de connaissances habituel, et bon sang ce qu'un peu de fraîcheur lui faisait du bien. Pour une fois, il se sentait enfin lui-même, alors, même si c'était un peu égoïste, il espérait réellement que le blondinet oublierait sa promesse, ainsi il ne sera pas obligé de le détester comme tous les autres. Tout ce qu'il voulait, c'était arrêter de devoir s'éloigner des autres parce que son cœur ne cesse de saigner à la mention de ces festivités.
Seulement, lorsque près d'une semaine après leur discussion, le plus vieux arriva, la bouche en cœur, Jaemin sut qu'il avait parlé un peu trop vite. En effet, le blond une fois sorti de l'ascenseur, se hâta vers le bureau du cadet, les yeux pétillants d'une joie sans nom. Ce n'était pas la première fois qu'il était d'aussi bonne humeur en arrivant au travail, mais jamais il ne s'était directement dirigé vers le bureau de son patron, non. Un soupir d'anticipation s'échappa des lèvres du cadet tandis qu'il observait Jeno passer la foule d'employés. Une fois ce dernier arrivé à son niveau, il lui fit signe de le suivre à l'inférieur de la pièce tandis que lui partait s'asseoir sur son siège.
— J'ai eu une super bonne idée en me levant ce matin et il faut à tout prix que je vous la partage, déballa le plus vieux dès qu'il eut refermé la porte derrière lui.
— Bonjour à vous aussi, soupira le noiraud, les mains jointes sur ses genoux.
— Désolé, j'en oublie presque la politesse. Un petit sourire d'excuse apparut sur ses lèvres.
— Allez-y, dites-moi ce qui vous travaille d'aussi bon matin.
— Vous vous souvenez de la semaine dernière lorsque vous m'avez dit ne pas aimer les fêtes ?
Le bien être que ressentait le plus jeune s'évapora soudainement à ces quelques mots. Il aurait tant aimé faire marche arrière et effacer cette discussion, ça lui aurait évité bien des soucis. Incapable d'acquiescer, terrifié de l'idée que l'aîné avait, il resta figé, le dos droit, le regard planté sur le visage de son interlocuteur, les mains crispés. Il aurait adoré pouvoir dire qu'il retirait ses propos mais pour qui cela le ferait-il passer ? Il était hors de question qu'il se ridiculise, surtout pas devant Jeno. Alors, il attendit sagement que le blond poursuive.
— J'y ai pas mal réfléchi à vrai dire. J'ai mis plusieurs jours avant de savoir comment procéder pour que vous aussi, vous aimez les fêtes de fin d'année. Alors voilà, j'en suis venu à la conclusion qu'il suffit de remplacer les mauvais souvenirs que vous avez par des bons ! Et le tour sera joué.
Fier de lui, le blondinet souriait à s'en déchirer les mâchoires. Il semblait vraiment investi, Jaemin aurait presque pu être touché qu'il se donne autant de mal pour lui, seulement, il ne savait pas s'il avait réellement envie d'effacer ce qui le hantait tant et le faisait détester décembre autant. Certes, c'était négatif, mais ça l'avait forgé, ça l'avait rendu tel qu'il est aujourd'hui. Et même si parfois, cela lui faisait du mal, il ne savait pas s'il en serait à un tel épanouissement professionnel dans sa vie sans cette rencontre, sans cet incident.
Mitigé et ne sachant pas quoi répondre, l'ébène resta silencieux. Il n'avait pas envie de décevoir celui en face de lui, cela le tuerait de voir son adorable sourire disparaître, mais d'un autre côté, il n'était pas en mesure de faire semblant et de feindre un engouement qu'il ne ressentait pas. Jeno resta quelques secondes supplémentaires à fixer son patron, cherchant à comprendre ce qui le poussait à rester ainsi de marbre. Malheureusement, il avait beau fouiller ses prunelles, il ne découvrit rien. Petit à petit, ses sourcils se froncèrent, sa bouche arborant une moue. Il avait peur d'avoir dit une bêtise. Il avait beau avoir près de vingt-cinq ans, certains jours, il avait le sentiment d'être un enfant maladroit, et aujourd'hui en faisait bel et bien partie.
— Est-ce que j'ai dit quelque chose qu'il ne fallait pas ? Vous n'avez pas l'air plus emballé que ça.
— Non, bien sûr que non, sa voix était douce, contrastant avec les traits de son visage. C'est juste compliqué. Je ne sais pas si c'est une bonne idée de-
— N'en dîtes pas plus ! S'empressa de le couper Jeno. Juste acceptez, je vous en prie. Ca ne sera pas long et puis, ça ne vous engagera à rien. Je suis même prêt à retirer ma semaine de congé pour vous aider si nécessaire.
Pris au piège, le noiraud resta quelques secondes pantois, il réfléchissait à la meilleure manière de s'en sortir sans trop de dégâts. Seulement, il avait beau retourner le problème dans tous les sens, aucune issue ne semblait vouloir se présenter. Il n'avait pas envie d'accepter, mais d'un autre côté, il n'aurait pas à faire du mal au plus vieux. Sa lèvre inférieure prise entre ses dents, il se mit à penser à ce que sa vie ressemblerait s'il se débarrassait de cette haine. Et l'espace d'un instant, même si elle lui avait permis d'accomplir bien des choses, il fut séduit par ce que son esprit lui proposait. En l'espace de seulement quelques secondes, il était passé d'un refus presque catégorique à une remise en question des plus sérieuses. À tel point que même sans s'en rendre compte, il hocha doucement sa tête, donnant son aval à son vis-à-vis.
La réaction de ce dernier ne se fit pas attendre puisqu'il se mit à sourire à n'en plus pouvoir, n'oubliant pas de grandement remercier Jaemin. Peu après, le blondinet sortit de la pièce, déterminé à arriver à ses fins, laissant derrière lui un noiraud déconcerté et affreusement perdu. Il ne savait plus du tout quoi penser, ni même quoi faire. Un nouveau soupir s'échappa d'entre ses lèvres alors que sa tête alla se réfugier entre ses bras, encore une fois, il s'était mis dans de beaux draps, et ce sans s'en rendre compte.
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Quelques jours s'étaient encore coulés avant que Jeno ne vienne retrouver Jaemin. Ils s'étaient échangé quelques mots durant cette dernière semaine, mais rien de bien extraordinaire. Ce n'était seulement que des formalités, pour savoir comment ils allaient procéder. L'aîné avait donc fait part au noiraud ce qu'il avait imaginé, quelques sorties, tournées autour des fêtes, qui, il l'espérait le réconcilierait avec l'esprit de Noël. Le plus jeune n'avait donc que quelques rendez-vous, s'il pouvait appeler ça comme ça, à accorder à Jeno pour être débarrassé de toute cette histoire. Ce n'était pas cher payé à ses yeux. Et puis, comme l'avait dit le blond, ça ne l'engageait à rien..
C'est donc, en tentant de se rassurer, qu'il rejoignit son employé à l'accueil, une fois leur journée achevée. Le premier endroit où le blond voulait l'emmener n'était autre que la patinoire. Cela devait faire presque un siècle qu'il n'en avait plus fait, il avait donc peur de se ridiculiser. Les mains dans les poches de son long manteau, il attendit que le plus vieux n'arrive, son éternel sourire sur les lèvres.
Ils se saluèrent un peu gauchement, Jaemin étant quelque peu stressé et Jeno, un peu trop enthousiaste. Cela fit même rire l'ébène, il bafouillait tant il avait de choses à dire. C'était une facette de lui qu'il n'avait pas encore eu le temps d'apercevoir, et maintenait qu'il l'avait sous les yeux, il prenait presque plaisir à le taquiner dessus. C'était peut-être pas le meilleur comportement à avoir, mais cela le faisait sentir plus humain. Lui, qui avait l'impression d'être une ordure de première, était soulagé de savoir que le blond n'était pas qu'une copie conforme de la perfection. Ainsi, il sut qu'ils allaient passer une bonne soirée.
Tous deux installés dans la voiture du plus jeune, ils discutèrent de choses et d'autres, parfois un peu plus importantes, parfois un peu plus drôles. Contrairement à ce qu'on aurait pu croire, c'était loin d'être gênant, ce que Jamein appréciait tout particulièrement. Sortir avec son employé n'était pas quelque chose de commun, alors il était plus qu'heureux de constater que le courant continuait de bien passer une fois la porte des bureaux franchies.
Une fois la voiture garée, ils en descendirent et se dirigèrent vers l'établissement. Bien que la nuit était déjà tombée, il n'y avait pas beaucoup de monde, de quoi ravir les deux jeunes hommes qui souhaitaient passer un bon moment sans se soucier des gens autour d'eux. Ainsi, ils pourraient profiter sans avoir peur de rentrer dans qui que ce soit. Leurs patins tout juste enfilés, ils tentèrent tant bien que mal de monter sur la glace. Après de longues minutes pendant lesquelles le noiraud faillit trébucher à de nombreuses reprises, ils purent enfin commencer leur session.
Jeno ne perdit pas un instant avant de se lancer dans un tour de terrain, il semblait à l'aise, rapide et agile il ne tomba pas une seule fois, si bien que le cadet en fut grandement étonné. Il s'attendait à ce que lui aussi ait du mal à mettre un pied devant l'autre, qu'ils puissent rire ensemble de leur maladresse. Seulement, ce n'était pas le cas. Il lui faudrait donc contenir sa jalousie. Accroché au rebord comme à une moule à son rocher, il observa le blondinet patiner vers lui, un sourire éclatant sur les lèvres. Il semblait dans son élément, c'était comme s'il était né pour être ici.
— Impressionné ?
— Plutôt oui. Avoua-t-il doucement.
— J'en faisais beaucoup quand j'étais petit. Ça doit faire une éternité que je ne suis pas venu, ça m'avait manqué. Souri Jeno en venant à son tour s'accrocher à la rampe. Et vous, vous savez en faire ?
Un petit rire secoua les épaules du noiraud avant qu'il ne réponde.
— Absolument pas, c'est à peine si je vais savoir m'éloigner du bord.
— On va devoir y remédier dans ce cas. Il lui adressa un grand sourire avant de s'approcher de lui et de lui tendre ses mains. Allez-y, prenez-les.
Un peu réticent, et surtout craintif, Jaemin resta plusieurs secondes à passer des mains de son vis-à-vis à son visage, avant d'accepter, un peu à contrecœur. Après tout, il n'est pas venu juste pour avoir froid et regarder le plus vieux s'amuser.
— Maintenant, laissez-vous guidez et essayez de rester debout, pouffa le blond.
— Ça, c'est plus facile à dire qu'à faire, marmonna-t-il.
Doucement, l'aîné commença à reculer, emportant avec lui l'ébène qui semblait terrifié à l'idée de tomber. Ses yeux partaient dans tous les sens, observant l'arrivée du moindre obstacle. Seulement, rien ne vint, alors il commença à se détendre, se laissant guider par son vis-à-vis. Il essayait d'avancer une jambe après l'autre, mais il devait reconnaître que c'était plutôt compliqué, il n'avait strictement aucune idée de s'il devait lever ses pieds comme s'il marchait ou s'il fallait juste glisser sur la glace.
— Vous vous en sortez plutôt bien ! Vous voyez ce n'est pas si compliqué que ça.
Un grand sourire étira les lèvres du plus jeune, il se sentait enfin bien, le froid venant chatouiller le bout de son nez, ses doigts eux, restant au chaud dans les paumes de Jeno, ses cheveux virevoltant avec la petite brise, il appréciait réellement le moment. À tel point qu'il aurait presque envie de recommencer jusqu'à n'en plus pouvoir. Malheureusement, toute bonne chose ayant une fin, le blond finit par le lâcher, probablement dans l'idée qu'il continue tout seul. Complètement paniqué, il ne sut pas quoi faire, il avait à nouveau l'impression d'être au milieu d'un monde qu'il ne comprenait pas. En plein centre de la patinoire, il chercha le regard du plus vieux, sans succès, l'angoisse monta d'un cran, ses pensées se mélangèrent, jusqu'à ce qu'il ne finisse par tomber.
Désormais assis sur la glace, il observa ses mains éraflées suite à sa chute, ce n'était rien de trop grave, mais ça aurait pu être bien pire. il était déçu de lui-même, de ne pas être parvenu à continuer comme si de rien n'était.
— Merde, je suis désolé, est-ce que vous allez bien ?
L'aîné s'abaissa à son niveau avant de venir prendre ses poignets entre ses doigts et d'observer les dégâts. Jaemin le laissa faire silencieux, il se contenta d'hocher la tête pour répondre à sa question.
— Est-ce que ça va aller où vous souhaitez arrêter ?
— Je ne suis pas venu pour m'arrêter sur un échec, alors on continue.
L'expression de surprise qui habillait le visage du plus vieux se remplaça bien vite par un sourire éclatant. Il était plus qu'heureux de savoir que le cadet n'allait pas laisser tomber. Ainsi, il se releva, épousseta son pantalon et tendit ses mains, afin que le noiraud puisse se relever. Tous deux à nouveau souriant, ils balayèrent d'un revers de la main ce qui venait de se passer et se remirent en piste, patinant jusqu'à épuisement. Les heures s'écoulèrent à la vitesse de la lumière, à tel point qu'ils sortirent un tout petit peu avant la fermeture de l'établissement. Jaemin avait enchaîné les chutes, il était même certain d'être recouvert de bleus, mais à cet instant là, lorsque l'air frais de la soirée le frappa de plein fouet, il s'en fichait. C'était la première fois depuis un lustre qu'il s'était amusé, ça lui avait fait vraiment du bien.
Ce soir-là, lorsqu'il alla se coucher, l'ébène eut du mal à s'endormir. Son sourire de bonheur ne voulait pas quitter son visage, il n'arrêtait pas de ressasser ces quelques heures passées en compagnie de Jeno, ça n'avait pas été grand-chose mais dans son fort intérieur, il savait que ça avait bousculé bien des choses. Il n'avait aucune idée de ce que l'aîné prévoyait pour lui, mais il avait hâte, ou du moins, il était curieux de découvrir comment ces fameux rendez-vous allaient se dérouler.
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Ce fut deux soirs après leur rendez-vous à la patinoire que Jeno revint vers le cadet, lui demandant s'il était prêt pour leur deuxième sortie. Enthousiaste à cette nouvelle perspective, bien qu'il appréhendait un peu, il répondit par la positive, attrapant sa veste à la volée, dévalant juste après les escaliers à toute vitesse. Chaque fois que le jeune homme avait un moment de libre, il repensait aux quelques heures qu'il avait passé en compagnie du plus vieux, un léger sourire venant se glisser sur ses lèvres. Il espérait pouvoir garder un aussi bon souvenir de cette soirée .
Arrivé à l'accueil, Jaemin n'eut qu'à patienter quelques petites minutes avant que le blond n'arrive, magnifique dans une longue veste grise chinée, ouverte sur une chemise noire et un pantalon à pince gris foncé. Rares étaient les fois où il n'était pas somptueux, peu importe l'endroit où l'heure, il était toujours d'une beauté à couper le souffle.
Ils se saluèrent d'un chaleureux sourire pour ensuite quitter les lieux. Cette fois-ci, le plus vieux n'avait pas révélé l'endroit où ils se rendaient, il avait seulement dit qu'ils y allaient à pied. Après tout, les températures hivernales faisaient partie intégrante de la fin de l'année, il fallait donc apprendre à les apprécier, ou du moins à ne pas trop les détester. Ainsi, la fermeture éclair remontée jusqu'au menton, ils commencèrent à marcher le long des avenues, rigolant tantôt à une blague, tantôt acquiesçant à un commentaire ou l'autre. L'ambiance était légère et cela plaisait au noiraud, cela le changeait considérablement du lot de pensées lourdes qui l'assommaient sans cesse ces dernières semaines.
Cela ne faisait que quelques semaines que Jeno était entré dans la vie du cadet, et pourtant ce court laps de temps avait suffit à bien changer des choses. Certaines étaient plus légères que d'autres, mais néanmoins, le changement était bel et bien présent. Soudainement perdu dans ses pensées, l'ébène ne réalisa pas que le décor avait changé, ils ne se trouvaient plus du tout dans les rues de Séoul où seuls de grands bâtiments les accueillaient, mais dans une grande allée de petites cabanes en bois, décorées de guirlandes en tout genre.
— Un marché de Noël ? C'est là où vous m'emmenez ?
— Vous m'avez démasqué. Son doux rire se répandait dans l'air alors qu'il se tourna vers le plus jeune, un sourcil haussé. J'espère que ça ne vous pose pas de problèmes ? Je-
— Non, c'est parfait, le coupa l'autre précipitamment, un léger sourire pour le rassurer tant bien que mal.
À peine ses quelques mots furent-ils échappés que le silence revint aussitôt, mais cette fois-ci, bien plus tendu. Cela faisait tellement longtemps que Jaemin n'avait pas mis les pieds dans un marché de Noël que cela lui faisait bizarre. Des bribes de souvenirs se jouaient encore et encore dans sa tête, le hantant à chaque fois un peu plus. Il aurait aimé effacer les cris, les pleurs, les grains de sucre resté aux coins de ses lèvres et ainsi recommencer à zéro, mais c'était impossible. Quoi qu'il fasse, cette soirée-là lui revenait en pleine figure, chaque année c'était la même chose, la même douleur. Les yeux figés dans le vague, le noiraud tentait tant bien que mal de balayer ses résidus de souvenirs, il fallait qu'il se concentre sur le plus vieux. Après tout, il l'avait emmené ici pour l'aider en quelques sortes, il était donc hors de question qu'il gâche cette journée,
Seulement, c'était sans compter sur Jeno qui avait senti que quelque chose n'allait pas et qui comptait bien découvrir de quoi il s'agissait. Ce dernier, lança un coup d'œil à celui qui se trouvait à ses côtés, il voyait bien qu'il était plus crispé, plus distant également. Néanmoins, cela n'allait pas l'empêcher de le traîner partout et de lui faire goûter à tout un tas de spécialités. Ainsi, sans plus tarder, il lui attrapa le bras, l'air de rien et se mit à arpenter les différentes allées, profitant de la magie qui planait au-dessus d'eux malgré tout.
Petit à petit, la tension qui habitait Jamein s'envola, c'était étrange à quel point il ne suffisait de pas grand-chose pour qu'au contact du blond, il s'apaise. Les minutes s'étaient écoulées à la vitesse de la lumière, bien vite remplacées par des heures. Il y avait tellement de choses à voir et à goûter que le plus jeune cru défaillir lorsqu'il aperçut une autre allée, ça n'allait jamais se finir. Ce ne fut qu'une dizaine de minutes plus tard qu'ils décidèrent de faire une pause et d'aller s'asseoir sur un banc. Un paquet de churros entre eux dont ils dégustaient son contenu silencieusement. Le vent venait tout juste de se lever, emportant sur son chemin les nuages, dégageant ainsi le ciel et dévoilant les quelques étoiles qui parsemaient le ciel. Le cou presque tordu pour observer les astres, Jaemin réfléchissait.
Il se voyait, il y a quelques jours à peine, presque refuser la proposition du plus vieux. Et le voilà maintenant assis à côté de lui à s'amuser dans un lieu qu'il n'aurait même pas imaginé, comme quoi tout pouvait changer. Un léger rictus vint instinctivement se glisser sur ses lèvres alors qu'il continuait de songer à diverses choses. Seulement, ce plissement n'échappa à Jeno, qui le releva tout de suite.
— Qu'est-ce qui vous fait sourire autant ?
— Pas grand-chose. Je trouvais ça juste drôle la manière dont les choses ont évolué.
— Qu'est-ce que vous voulez dire par là ? Quelque peu confus, ses sourcils s'étaient froncés.
— Il y a quelques semaines à peine je ne pouvais pas voir quiconque osait parler de Noël, et aujourd'hui, et bien, me voilà dans un marché de Noël avec vous.
— Oh. Soulagé, il rit doucement avant que le silence ne vienne les bercer à nouveau. Dites, je peux vous poser une question ?
— Bien sûr.
— Pourquoi est-ce que vous détestez autant les fêtes de fin d'année ? Enfin, je ne veux pas vous forcer à quoi que ce soit mais-
— C'est bon, ne vous en faites pas. C'est juste que ça fait longtemps que je n'en ai pas parlé, alors ça risque d'être étrange.
— Je comprends, prenez le temps qu'il vous faut.
Le calme revint, bien différent des fois précédentes. Ce n'était pas lourd, ou même gênant. Il fallut plusieurs minutes à ajmein avant de se lancer d'une traite, le regard fixé sur l'horizon.
— C'était il y a deux ans. Je sortais avec un type que j'avais rencontré en allant boire un verre avec des amis. Tout se passait bien au début, enfin, de mon point de vue. Il adorait cette période, tout comme vous, d'ailleurs. Pour lui, il était impensable que je ne puisse pas l'aimer, alors il m'a partagé sa passion. Pendant des semaines j'avais préparé ces quelques jours, dans l'espoir de passer un bon moment avec lui. Seulement, un jour, en allant justement au marché de Noël, j'ai appris qu'il me trompait depuis presque un an et qu'il allait se marier avec elle. Je ne sais pas qui j'étais pour lui, mais je me suis senti sale, tellement sale. Un sourire amer apparut le temps d'une seconde sur ses lèvres avant d'être remplacé par un masque d'indifférence.
Bouche bée, ne s'attendant nullement à un tel aveu, Jeno ne sut pas immédiatement quoi répondre. Tout d'un coup il comprenait mieux pourquoi le noiraud se montrait aussi distant et était aussi absorbé par son travail ces temps-ci, il essayait juste de fuir le fantôme de son passé. Un sentiment de honte se glissa lentement sous sa peau, il s'en voulait d'avoir organisé tout ça, de l'avoir poussé à affronter ce qu'il cherchait tant à enfouir.
— Je suis désolé pour tout ce que vous avez eu à endurer, jamais je n'aurais pensé que quelque chose comme ça ait pu se passer...
— Ne vous excusez pas, ce n'est pas votre faute. Et par pitié arrêtez de me vouvoyez maintenant que vous savez ça je pense qu'on peut être moins formels. Qu'en dis-tu, Jeno ?
Incapable de cacher sa surprise, les joues du blond se parèrent d'un léger voile rose qui ne passa pas inaperçu aux yeux de son vis-à-vis. Ce dernier laissa même échapper un petit rire.
— J-Je, je pense que ça serait bien, oui... murmura-t-il. En tout cas je suis désolé si je vou-, t'ai mis mal à l'aise avec mon idée de "rendez-vous". Un sourire d'excuse barra ses lèvres alors qu'il mimait les guillemets.
— T'en fais pas, tu ne pouvais pas savoir. Et puis, je dois avouer que j'ai passé un bon moment.
— Je suis rassuré alors. Est-ce qu'on y retourne ? J'ai encore plein de choses à te faire découvrir.
-Allons-y, oui.
Les deux jeunes hommes se baladèrent encore près d'une heure avant de décider qu'il était temps pour eux d'y aller. Comme escompté, Jaemin avait passé une excellente soirée, et ce même si elle avait mal démarré. Il était content d'avoir parlé de ce qui le pesait tant au plus vieux, c'était comme si un poids s'était enlevé de ses épaules, il se sentait bien plus léger. S'il avait su qu'il se sentirait aussi bien, il n'aurait pas hésité à le faire bien plus tôt.
Le chemin du retour se passa dans le calme absolu. Au fond, ce n'était pas quelque chose de désagréable, ils profitaient tout simplement de la présence de l'autre, les mots n'étaient pas toujours nécessaires pendant ces instants-là. Ainsi, ils parcourent les rues seulement éclairées par les quelques lampadaires, en un rien de temps. Une fois arrivés devant le bâtiment qui abritait leurs bureaux, ils se firent face à face, s'échangeant un sourire éclatant. Ce n'était pas grand-chose et pourtant cela avait suffi pour que chacun comprenne que l'autre avait passé une bonne soirée.
Jaemin n'avait pas envie qu'elle se termine si vite, il avait encore envie de vivre plein de choses, mais il savait qu'il ne fallait pas trop en demander, alors il s'apprêtait à saluer le blond. Seulement, celui-ci ne sembla pas du même avis puisqu'il vint attraper son poignet, pour lui demander de rester encore quelques instants.
— Attends, s'il te plaît. Son regard était à la limite de l'implorer, alors, inquiet, il se laissa faire et se remit en face de l'aîné.
— Hm. Qu'est-ce qu'il y a ?
-J'ai quelque chose à te proposer. Enfin, c'est un peu étrange mais, ça n 'arrête pas de tourner dans ma tête.
—Je t'écoute.
— Tu te souviens quand je t'ai dit que je comptais bien remplacer tes mauvais souvenirs par des bons ? Un hochement de tête le poussa à continuer sur sa lancée. Eh bien, je compte bien remplacer les souvenirs que tu as avec ton ex.
— Attends, comment ça ? LA confusion se lisait sur son visage.
— Aimons-nous et cette histoire ne sera plus qu'un lointain souvenir.
Les yeux écarquillés sous la surprise, Jaemin dévisagea son interlocuteur, à la recherche de ce qu'il pouvait bien dire, sans succès. Le choc était bien trop présent, il lui fallait quelques secondes supplémentaires pour digérer l'information.
— Qu'est-ce que tu racontes ?
C'était insensé. Comment pouvait-il lui avouer ça, de cette manière là ?
— Je suis sérieux, regarde tout se passe bien pour le moment, alors pourquoi ne pas continuer ? Si ça se trouve on pourrait parcourir bien plus de chemin que ce que l'on avait imaginé au départ.
— Je sais pas Jeno, c'est précipité. Enfin, je veux dire, tu travailles pour moi et je ne sais pas grand-chose de toi. Qui me dit qu'on est vraiment fait l'un pour l'autre ?
— Rien ne t'oblige à accepter, je sais que c'est pas si évident que ça, mais laisse-moi ma chance. Je t'en prie, laisse-moi au moins continuer de te prouver que les fêtes de fin d'année en valent la peine.
— Jeno...
Une partie de lui avait vraiment envie d'accepter, mais une autre refusait, le bloquait totalement. Qu'était-il censé faire ? Lui dire qu'il était partant et attendre de voir comment ça évolue ? Et si ça se passait mal, comment allait-il s'en sortir ? Plus il réfléchissait, moins il savait ce qu'il devait dire.
Les mains tremblantes, il chercha à se calmer, à arrêter le remus ménage qui lui secouait l'esprit, et ce sans succès. L'envie d'hurler, ou même de s'enfuir lui vint en tête, mais il savait que ce n'était pas correct, alors il resta muet et raide.
— Jaemin ? Dis quelque chose je t'en prie...
— Tu me mets dans une position compliquée, vraiment compliquée. J'ai envie d'accepter, mais je suis terrifié.
— Je sais. Doucement il s'approcha, venant attraper une des mains glacées de l'ébène. Tes doutes et tes craintes sont parfaitement légitimes. Je veux juste que tu puisses te sentir aimé à nouveau. Je veux que tu puisses comprendre la valeur que tu as, pas celle que tu penses avoir, la vrai. C'est peut-être bête, mais j'aime penser à me dire que si j'ai été mis sur ton chemin c'est pour une bonne raison. Beaucoup de choses nous opposent, mais je suis persuadée que pleins d'autres nous relient. Alors, s'il te plaît, laisse moi une chance.
— D'accord.
Il n'avait pas eu besoin de plus pour que ces quelques mots s'échappent de la bouche de l'ébène. C'était à peine s'il s'était rendu compte de ce qu'il avait dit. À cet instant, il s'en fichait bien, son cœur essayait encore de se remettre des palpitations qui le secouaient. D'un seul coup, ses appréhensions s'étaient évaporées. Lui aussi avait l'impression d'avoir été destiné à faire sa rencontre.
Aucun d'eux ne pouvait savoir ce qui les attendait, peut-être que ça ne fonctionnerait pas, qu'ils resteraient simplement en contact. Mais pour ça, il leur fallait tenter l'aventure. Ce fut donc tout sourire qu'ils se regardèrent, scellant une promesse qui n'avait pas été prononcée à voix haute.
Tant qu'ils le pourraient, ils feraient en sorte que l'autre soit aussi heureux que possible.
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