Jour 23: Le fils de la Lune et du Soleil
Les aiguilles poursuivent leur course folle et inlassable, le bruit de leurs mouvements incessants emplissant la pièce d'une monotone symphonie, implacable... interminable. Et plus le temps passe, plus le calme laisse place à l'angoisse. Mon cœur se resserre à chaque nouvelle seconde, à chaque nouveau battement ; envoyant s'abattre le sang contre mes tempes, toujours plus violemment.
Je m'appelle Ricky Solace, et je suis en 6ème année à la Maison Poufsouffle de Poudlard, l'école de sorcellerie. Je suis le fils de William Solace et Nico Di Angelo, vivant actuellement en Californie. Et sinon... oui, je ne porte le nom que d'un seul de mes parents... Non pas que je l'ai choisi ! C'était la décision de mes pères. Le fait est que les Di Angelo ont compté dans le passé parmi les plus fidèles soutiens de « vous savez qui », et même si mon père a totalement changé, et pour le mieux, lorsqu'il a rencontré Will, il a toujours pâti de la réputation familiale. En comparaison, les Solace étaient eux une famille de sorciers extrêmement célèbre, réputée pour avoir donné de nombreux médecins de grand talent au monde de la magie. Ainsi, le choix était vite fait... et mes parents m'ont fait promettre de garder le secret au sujet des Di Angelo, pour « me protéger du regard et de la méchanceté de ce monde » comme ils le prétendaient. Je me doute bien qu'ils ne pensaient pas mal faire. Puis, même s'ils sont toujours restés très évasifs à chaque fois que je tentais d'aborder le sujet, je sais que mes parents ont dû énormément souffrir de l'aura qui entourait Nico, tout particulièrement une fois que le fils prodige de la famille Solace s'était mis en couple avec un Di Angelo... Ainsi, depuis mon arrivée à Poudlard pour mes 11 ans, j'ai toujours appris à dissimuler la vérité, en venant, au fil du temps, à craindre au quotidien des pans entiers de mon passé.
Mais c'est terminé, j'en ai assez de me cacher. Je veux enfin être moi-même... rien que pour une soirée.
Car, bien que de nombreux élèves soient rentrés chez eux pour les fêtes de fin d'année, de par la menace toujours plus grande des mangemorts et de Voldemort, nombre de parents n'étant pas enchantés à l'idée de laisser leurs enfants dans un château qu'ils n'estiment plus suffisamment sûr, je me prépare pourtant avec appréhension pour cette nuit du 23 décembre.
Durant son discours, je m'étais d'ailleurs surpris à jeter un furtif coup d'œil à la table des Gryffondors, pour venir inévitablement rencontrer deux yeux émeraude, me fixant d'un air à la fois malicieux et charmeur. Bien évidemment, j'avais baissé le regard, les joues en feu, ayant tenté en vain de lancer un regard noir à Cormac McLaggen, ce dernier souriant triomphalement de toutes ses dents.
En réalité, dès mon arrivée à Poudlard, McLaggen s'est toujours amusé à me taquiner, mais depuis que je suis rentré en sixième année, le Gryffondor s'est montré clairement plus insistant. Il n'empêche, aussi étrange et particulier que soit mon rapport avec Cormac, ça m'a fait également énormément évoluer et avancer dans la vie.
Je me rappellerai d'ailleurs toujours la première fois qu'Hermione Granger, une élève brillante de la maison rouge et or, était venue me voir à la bibliothèque, tandis que je révisais mes parchemins pour le cours de soins aux créatures magiques. Elle tenait à me mettre en garde sur McLaggen, m'incitant à sérieusement me méfier vis-à-vis de ses intentions à mon égard, ne se limitant, selon elle, sûrement pas à une « simple relation amicale ». Totalement pris de court, j'avais bien tenté de la rassurer, lui glissant discrètement entre deux allées que Cormac n'était, de toute façon, « sûrement pas intéressé par les gays ». Ainsi, Hermione avait alors été la première personne à apprendre pour mon homosexualité, et depuis, nous étions devenus des amis proches.
Pourtant, bien que sachant l'opinion de la Gryffondor sur le sujet, à force de repousser ses tentatives, j'avais fini par perdre de ma méfiance envers McLaggen, ne me montrant plus totalement insensible à ses petits gestes toujours plus attentionnés.
Je dois bien reconnaitre que Cormac sait se montrer pour le moins persistant... et convaincant.
En effet, quand ce n'étaient pas des roses, je retrouvais des chocolats, ou autres friandises dans tous les lieux où j'avais l'habitude de me rendre, des salles de cours à la bibliothèque, en passant par les couloirs et la salle commune, et jusque sur mon lit !
Ainsi, il y a déjà une semaine, lorsqu'il m'avait arrêté au détour d'un couloir, me barrant le passage de son bras, pour me demander pour la cent quatorzième fois d'être son cavalier pour le bal de Noël, j'avais finalement cédé... ajoutant « ne me fait pas regretter ma décision », tandis que je me soustrayais à son emprise, ignorant l'air triomphant arboré sur son visage. Pourtant, même si j'avais tout fait pour ne rien montrer de mes émotions à McLaggen, (ça lui aurait fait bien trop plaisir), j'étais en réalité totalement tétanisé, me rendant compte trop tard dans quoi je venais de m'engager :
J'avais accepté d'aller au bal de Noël avec Cormac McLaggen.
Et honnêtement, je ne savais pas ce qui m'effrayait le plus, le fait d'enfin assumer mon orientation sexuelle devant toute l'école... ou plutôt de me tromper au sujet de Cormac, sans oublier une Hermione virant bersek en me voyant au bras du Gryffondor.
De plus, et pour couronner le tout, McLaggen m'avait rattrapé le lendemain afin de savoir si j'avais quelque chose de prévu pour la nuit du réveillon à Poudlard. Bien évidemment, comme un idiot et n'ayant encore pas réfléchi sur le potentiel sens détourné de la question, je lui avais répondu que non, j'étais libre. Ne perdant pas la moindre seconde, le Gryffondor s'était aussitôt exclamé « Super ! On pourra le passer ensemble dans ce cas ! ». Puis, Cormac avait alors profité de mon désarroi pour repasser à l'offensive, saisissant furtivement mon menton avant de me susurrer « après tout... en tant que cavalier, j'ai des responsabilités et des devoirs » tout en m'adressant un clin d'œil. Ainsi, même si je survivais au bal, il faudrait encore que je puisse réchapper à la soirée du réveillon, seul et en tête à tête avec Cormac...
L'horloge sonne soudain, venant couper court au fil de mes pensées. Mon souffle s'immobilise alors aussitôt à la simple vue de l'heure indiquée :
20h50.
Faisant tout mon possible pour contenir le stress montant en moi et prêt à jaillir, je me retourne une dernière fois vers le miroir, scrutant mon reflet en quête du moindre défaut. Je porte un pantalon moulant d'un bleu aussi profond que la nuit, ainsi qu'une veste de costume et chemise blanches, resserrée au niveau du cou par un nœud papillon rose pâle. Le tout fait ressortir mon visage au teint légèrement hâlé, tandis que je mate une mèche blonde rebelle, la replaçant auprès de ses consœurs.
-Allez Ricky, ce n'est qu'une soirée... Tentais-je de me rassurer, mon front collé contre la porte du dortoir, mon souffle venant heurter le bois massif.
Rassemblant tout mon courage, je quitte finalement ma chambre, traversant la salle commune des Poufsouffle, sans surprise déserte... les élèves étant sûrement d'aures et déjà dans la Grande salle, attendant le début de la soirée.
Les minutes semblent s'écouler au ralenti, tandis que mes pas me conduisent au travers d'un dédale de couloirs, ces derniers n'ayant depuis longtemps plus aucun secret pour moi. Les allées sont tachetées d'une infinité de points minuscules, reflets des flocons de neige tombant dru au dehors, alors que l'air glacial de l'hiver écossais s'infiltre entre les vitraux, me faisant frissonner.
Une douce mélodie résonne au loin, envahissant progressivement les couloirs, me guidant toujours plus vers mon destin... Puis, tout à coup, je me stoppe, m'appuyant de la main droite contre un pilier, tentant du mieux que possible de calmer ma respiration, tandis que la gauche presse mon cœur, ce dernier s'emballant et frappant douloureusement contre ma cage thoracique. Car je le sais bien, au détour de ce dernier mur, c'est l'entrée de la Grande salle.
Un ultime virage, et je ne pourrai plus faire demi-tour.
-Non. Je ne peux pas reculer maintenant. Me reprenais-je finalement, tenant précieusement entre mes doigts le bijou d'or avant de soigneusement le replacer sous ma chemise, tout contre mon cœur.
-Ce soir, c'est aussi pour vous, papas, que j'y vais. Si vous avez pu assumer votre amour envers et contre tout, alors je ferai tout pour vous rendre fier, en m'assumant tel que je suis, peu importe le regard des autres.
Prenant une profonde inspiration, je me relève alors, lissant de mes doigts les rares plis s'étant formés sur mes vêtements, puis franchis les derniers pas me séparant du virage, quittant l'ombre froide du couloir pour la lumière chaleureuse des flambeaux.
D'abord ébloui, mes yeux s'adaptent rapidement à la lumière ambiante. Je me retrouve dans le hall d'entrée de la Grande salle, désert... à l'exception d'une figure se tenant nonchalamment contre un des piliers de la porte. En effet, Cormac McLaggen est là, vêtu d'un costume noir et blanc le mettant parfaitement en valeur, et laissant deviner sa musculature digne d'un joueur de Quidditch.
Soudainement, le jeune Gryffondor relève son regard en ma direction, me surprenant en train de le détailler. Souriant de toutes ses dents pour m'avoir pris en flagrant délit, Cormac se redresse aussitôt avant de s'avancer vers moi d'un pas assuré. Le visage très certainement en feu, je demeure immobile, préférant laisser le sorcier combler l'espace nous séparant. Triturant mes doigts et trouvant un intérêt formidable et momentané pour mes chaussures cirées, je suis d'ailleurs le premier surpris par la vitesse à laquelle Cormac me rejoint.
-Tu es là finalement. Déclare-t-il, de sa voix habituellement rieuse, me faisant sursauter par la même occasion.
-Il semblerait. Soufflais-je alors, haussant légèrement les épaules, redressant mon visage sans pour autant établir un contact visuel avec le jeune homme se tenant face à moi.
-Je croyais que tu ne viendrais pas... Lâche finalement Cormac, d'une voix bien différente et plus... sérieuse ? L'étonnement me faisant relever le regard, mes yeux azurs plongeant dans ceux émeraude de McLaggen.
-Pour être honnête... moi non plus je ne pensais pas venir. Avouais-je.
-Je suis heureux que tu aies accepté mon invitation.
-Tu veux dire ta cent quatorzième invitation ? Le taquinais-je, essayant de dissiper la gêne m'assaillant.
-Ricky... Tu... tu es vraiment magnifique ce soir. Je ne regrette vraiment pas d'avoir été aussi persévérant. Déclare sérieusement mon cavalier, m'offrant son bras gauche.
-Qui... qui me dit que tu es véritablement sincère avec moi ? Ne puis-je m'empêcher de demander au Gryffondor, la peur revenant au galop et laissant à nouveau s'insinuer le doute en moi. Qui... qui me dit que je ne suis pas qu'un passetemps ? Une conquête comme une autre à ajouter à ton tableau de chasse ?
-Alors... C'est ce que tu penses vraiment de moi ? Finit par prononcer Cormac, dans un murmure presque inaudible. Que je... joue avec toi ?
-Les autres disent... Commençais-je, avant que le jeune homme me faisant face ne viennent joindre ses mains aux miennes, les prenant en coupe.
-Qu'est-ce que te dit ton cœur ?
-Je...
Me voyant plus perdu que jamais, Cormac vient finalement séparer les quelques centimètres séparant son visage du mien, apposant avec une infinie douceur ses lèvres sur ma bouche, en une légère pression. Plusieurs secondes après que le Gryffondor se soit retiré, je rouvre alors lentement les yeux, fermés sous l'effet de la surprise, retrouvant le visage légèrement empourpré de mon cavalier, affichant un maigre sourire, auquel je réponds timidement.
-Laisse-moi te prouver qu'ils ont tort. Poursuit alors Cormac, caressant ma joue du bout de ses doigts. Accorde-moi une nuit... rien qu'une seule.
Ce soir-là, Ricky Solace Di Angelo est entré dans la Grande Salle au bras de Cormac McLaggen.
Ce soir-là, le jeune Poufsouffle a ouvert son cœur, acceptant enfin de connaitre le bonheur.
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Voici l'OS de RiderOfTheLight
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