Chapitre 4
Il vient me chercher. Comme chaque jour depuis quelques temps. Et. Depuis quelques temps. Il me faisait visiter la ville. A sa façon. A notre façon. Il m'emmenait où jamais je n'étais allé. Des chemins silencieux. Au milieux de la civilisation. Des rues bondées. Loin du centre. Des places immenses. Où chacun vivait sa vie. Où chacun prenait soin des autres.
Il me fit découvrir des paysages aux odeurs. Aux sensations. Aux bruits si différents. Et toujours. Nous finissions au même endroit. Avec les même boissons. Mes mains courrait sur le bois de notre table. Si bien que j'en connaissais toutes les aspérités.
De même. Après plusieurs mois passé ensemble. Je reconnaissais toutes les nuances. Toutes les variations de la voix de Woojin. Ténor. Lorsqu'il était heureux. Excité. Surpris. Basse. Lorsqu'il était en colère. Endormie. Boudeur.
Et il y avait cette mélodie. Ce ton qu'il utilisait lorsqu'il fredonnait. Lorsqu'il chantait.
Il le faisait rarement. Exclusivement quand nous étions seuls. C'était des moments privilégiés. Unique. Magique. Sa voix effaçait tout. Les douleurs. Les colères. Les regrets. Il ne restait que lui. L'odeur du café. Et la chaleur de nos entres-vus.
Après tant de temps passer à discuter. A rigoler. A écouter le monde ensemble. Ces rencontres m'étaient de moins en moins indifférentes.
J'y pensais plus le reste de la journée. Le soir. Cela me rappelait les premiers jours. Lorsque je ne connaissais rien de lui. Lorsque je découvrais sa voix. Lorsque j'étais incapable de reconnaitre ses pas. Son odeur. Je me remémorais toutes ces questions que je m'étais posé. Toutes ces questions qui ont aujourd'hui des réponses. Ou qui sont toujours insolubles.
Je me rendais compte que je voulais plus. Bien plus.
Je voulais savoir le goût de sa bouche. Je voulais apprendre la saveur de sa peau. Je voulais connaître chacun de ses muscles. Chacune de ses courbes. Je voulais sentir sa chaleur. Son odeur. Son coeur. Battre sous mes doigts. Je voulais le voir. Imprimer son visage. Son corps. dans ma rétine accidenté.
Et je voulais qu'il fasse de même. J'espérais qu'il veuille les mêmes choses. Qu'il ait les mêmes rêves. Les mêmes pensées.
Pourtant. Jamais je ne lui faisais part de ces songes nocturnes. Jamais je ne faisais un geste de plus. Un mouvement qui l'aurait mis sur la voie.
Peut-être savais-je que je n'avais aucune chance. Peut-être me refusais-je d'espérer. Peut-être n'étais-je pas assez fort. Assez construit. Assez résistant pour encaisser son refus. Son mépris. Ses insultes. N'étais-je pas assez fort pour briser cette amitié.
Cependant. Hannah m'accompagnait dans cette traversée prieuse. Et elle faisait souffler un vent optimiste dans nos voiles.
« Il doit être très attaché pour venir te chercher tout les jours. »
C'est ce qu'on appelle être ami.
« Dommage que tu ne vois pas son regard. »
Tu ne sais pas ce que je ferais pour le voir.
« Il a l'air de tenir à toi. »
Cela fait pourtant peu de temps qu'on se connait.
« J'espère qu'il n'est pas aussi aveugle que toi. »
Très drôle.
« Je veux un beau frère moi. »
Dans tes rêves.
« Quand est ce que tu nous le présente. »
Je m'étouffais avec ma salive. Jamais. Ou du moins pas comme je le voudrais.
Je soupirais face à une énième réflexion. Je l'aimais. J'aimais ma soeur. Elle est ses blagues. Elle est ses rires. Elle est ses pas de danse. Ses sauts de chats. Elle est ses discutions. Ses débats qui ne finissaient jamais. Je l'aimais vraiment. Mais ce jour là je souhaitais seulement me poser. Dormir. Pouvoir reprendre des forces avant de sortir. Avant qu'il vienne me chercher.
Alors je restais allongé sur le lit. L'entendant réviser. Tout en me faisant espérer. Peu à peu ses mouvements me berçaient. Et le sommeil m'enveloppait.
Une sieste lourde. Sans rêve. Une sieste qui finit en sursaut. A cause d'un bruit de bois. Des martèlements répétés. Et pourtant discrets.
On toquait.
Je grognais en guise de réponse. Encore endormie. Un grincement. La porte. Elle s'ouvrit avec hésitation. Mais personne n'avançait. Je tournais la tête. Attentif aux sons. Aux odeurs. À la présence. Silencieux. Sentant le café. La ville. C'était lui. C'était Woojin. Je jurais.
Il s'excusait. Expliquant la situation. Dénonçant ma soeur.
Je l'insultais dans ma barbe. Chassant les dernières poussières de sommeil.
« Veux tu que je repasse plus tard. »
Je secouais la tête. Lui indiquait approximativement un fauteuil. Puis cherchais de quoi m'habiller. Je pouvais sentir son regard sur moi. Tout comme je pouvais sentir mon visage s'échauffer. Je tentais de la repousser. De ne pas faire attention à cette sensation qui s'infiltrait sous ma peau. Qui s'accentuait à chaque trébuchement. Qui augmentait à chaque seconde de plus.
La honte. La gêne. L'angoisse aussi peut-être.
Mais il détournait l'attention. Me lançait sur mes habitudes. Mes besoins. Mes capacités. S'intéressait à mon indépendance. Et je ne pouvais que sourire. Fière. Heureux de pouvoir lui partager cela. Heureux qu'il soit finalement là.
Nous restions quelques minutes. Quelques heures. Je lui montrais comment je vivais. Comment je cuisinais. Comment je me débrouillais. Je lui indiquais comment je rangeais pour m'y retrouver. Comment je me repérais dans l'espace. Comment je m'arrangerais pour rien casser.
Nous finimes sur le lit. L'un allongé. L'autre scrutant la pièce. Complimentant. Argumentant. Mais nuançant.
« Il manque tout de même de la décoration. Une plante. Un poster. Des photos. Quelques chose qui rappelle l'hôte de ces lieux. »
Je le contrais. Amusé. Défis ses arguments. Lui fis part de l'inutilité de sa proposition.
« Tu peux toujours les toucher. Savoir qu'elles sont là. »
Puis j'eus une idée. Idiote. Comme sa proposition. Cependant je ne pus que m'y attacher. Je ne pus que me l'imaginer.
Lui. M'aidant à la réaliser. Passant quelques après midi ici. Content d'y être. Content de me voir. Content de ce qu'on aurait créer. Simple. Inutile. Mais important. Pour lui. Pour moi. Pour nous.
C'était risqué. Peut-être un peu rapide. Mais j'en eus envie. Beaucoup.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro