Je suis amnésique

   Jimin était accroupi sur son lit, la main sur le mur de sa chambre. Il était peint en bleu nuit, mais maintenant de nouvelles écritures étaient venues l'embellir (ou le souiller ; tout dépend du point de vue). Le garçon avait pris soin de choisir un beau pinceau tout neuf qu'il avait réservé pour l'occasion, et un pot de peinture blanche. Alors il avait gravé ces quelques mots : Je suis amnésique.

   Ça semblait simple, pourtant. Jimin savait que ça ne l'était pas. Am-né-si-que. Il lui avait fallu du temps pour parvenir à prononcer ce mot sans tomber en sanglots à chaque syllabe. Parce que parfois, derrière quelques lettres, se cachent de nombreuses douleurs et de nombreux souvenirs. Et ce mot là lui rappelait seulement à quel point sa vie était devenue fade.

   Jimin se détacha du mur, à présent nostalgique, et attrapa son précieux carnet posé sur la table de nuit. Dedans, il y marquait toutes ces pensées, touchant de près ou de loin à l'accident. C'est ce que lui avait conseillé le psychologue : garder une trace écrite de ce qu'il traversait et mettre des mots sur les quelques bribes de souvenirs qu'il arrivait à retrouver. Ça t'aidera à avancer. Le garçon ne pouvait s'empêcher de penser : C'est drôle ça, qui t'as dit que je voulais avancer ? La seule chose dont je suis sûr à présent, c'est que je n'attend plus rien de la vie. Elle m'a déjà bien assez donné. Son subconscient lui criait : Non, bien assez enlevé.

   Le seul moyen qu'il lui restait pour se souvenir restait les témoignages. Les médecins lui avaient tout raconté : il avait eu un grave accident de voiture, un soir de pluie. Ce n'était pas lui qui était au volant, et le conducteur n'était pas sobre. Et puis il y a eu ce virage. Boum ; la vie d'un innocent, gâchée. Parfois, il suffit d'une seconde.

   Il ne se souvenait plus de la relation qu'il entretenait avec ce fameux garçon. Peu importait, maintenant. Ce dont il était sûr à présent, c'est qu'il le haïssait du plus profond de son coeur. Lui qui l'avait privé de ses jambes, lui qui l'avait privé d'une si belle vie.