Chapitre 19
A/N : J'ai oublié de le dire jusqu'à présent, mais dans cette histoire je vais interpréter le personnage de Dazai selon mes propres ressentis, comme dans toutes les fanfictions que j'écris en somme ... ne soyez pas étonnés si quelques éléments divergent de votre point de vue! Dazai est un personnage suffisamment complexe pour que chacun ait sa propre vision des choses, même si j'essaye de coller au mieux à l'original, comme d'habitude. Bonne lecture à vous!
Malgré la pénombre qui régnait dans l'appartement, dont le silence pesant était seulement troublé par les quelques voitures qui passaient dans la rue en contrebas, Dazai pu sans peine apercevoir la forme allongée sur le lit ouvrir finalement les yeux.
Après presque trois jours passée inconsciente, Nora venait enfin de reprendre connaissance. Toujours vêtue de sa robe d'hôpital, cachée par les épaisses couvertures qui étaient posées sur son corps, fronçant les sourcils avant d'ouvrir finalement les paupières, révélant des iris aux couleurs mornes, qui fixèrent le plafond un long moment, sans bouger.
Comme s'ils cherchaient à savoir dans quel monde ils se trouvaient, désormais.
Lorsqu'une voix familière parvint à ses oreilles, la blonde su tout de suite où elle se trouvait. Elle était toujours ici bas, avec ses douleurs et sa peine.
-... tu te rends compte de ce que tu as fais?
Nora tourna lentement son visage en direction de la voix, et ne fut pas surprise de tomber sur la silhouette tendue de Dazai, à son chevet, son précieux scalpel dans une main. Cependant, elle ne trouva aucune réponse à la question qu'on venait de lui poser.
Elle se contenta de le regarder en silence, le regard vide.
-Sans parler du fait que tu as porté atteinte à la réputation de la Mafia, pas que je m'en soucie énormément de toute manière, tu as bien failli y passer définitivement. Qu'est-ce qu'il t'est passé par la tête, au juste?
Il parlait d'une voix étrangement calme, mais Nora savait parfaitement qu'il était furieux. La rage qui brûlait dans son seul œil visible était un bon indice. Et, en plus de cela, elle le connaissait assez pour savoir à quoi il pensait dans ces conditions.
Car, lorsqu'il essayait lui-même de mettre fin à ses jours, elle était dans le même état d'esprit. Elle voulait alors hurler, lui crier qu'il n'avait pas à faire cela, car certaines personnes tenaient à lui comme à n'importe qui d'autre, et qu'elle serait détruite s'il venait réellement à aller au bout de sa volonté.
Mais, parallèlement, elle savait que, lorsque la douce mélodie de la mort commençait à jouer de plus en plus fort, celle-ci avait la capacité de couvrir même les voix de ceux que l'on aime plus que tout au monde.
C'est ce qui lui était arrivé, lorsqu'elle avait quitté cette ruelle et avait erré dans la ville sans réel but. Lorsqu'elle était rentrée dans ce bar, lorsqu'elle avait avalé de l'alcool jusqu'à ce que les bons souvenirs se confondent parfaitement avec les mauvais.
Jusqu'à ce qu'elle oublie tout. Elle avait accepté son sort, et l'avait même accueilli comme une délivrance.
Mais, alors qu'elle se réveillait dans ce lit, qu'elle reconnaissait après une intense réflexion, encore désorientée, elle savait que tout était revenu à la case départ. Il allait falloir qu'elle reprenne le court de sa vie, qu'elle revienne dans ce monde où elle pouvait à tout instant perdre ce qui lui était cher.
Il allait falloir qu'elle recommence à vivre. A noyer sa peine dans le travail et l'alcool, à moindre dose certes, à attendre avec terreur et une certaine pointe d'impatience malsaine, presque à la limite du masochisme, la prochaine fois où tout partirait en fumée.
Méritait-elle réellement de rester en vie, après tout ce qu'elle avait fait? Ce n'était pas pour rien qu'elle se répugnait à soigner les vivants, et se contentait de comprendre la raison derrière la mort des corps qu'elle disséquait.
Comment quelqu'un qui ne connait pas la valeur d'une vie pourrait-elle prétendre sauver celles des autres?
Voyant que ses paroles et remontrances n'avaient aucune sorte d'effet sur la blonde, qui continuait de le fixer de ses yeux vides sans réellement le voir, dans cette pièce seulement éclairée par la lumière ténue de l'applique du couloir derrière lui, Dazai bascula sa tête en arrière, se mordit les lèvres, et sa main resserra doucement sa prise sur la lame parfaitement aiguisée qu'elle tenait.
Lorsqu'il reposa ses yeux sur Nora, celle-ci s'était redressée, et était désormais assise sur son lit, les bras posés sur ses genoux et le dos voûté, le regard perdu dans la contemplation de ses draps froissés.
Que voyait-elle de ses yeux, qui était invisible aux siens? Peut-être du regret, de la douleur, des souvenirs bons ou mauvais?
Même après tout ce temps, il restait entre eux une part de secrets non avoués qui, lorsqu'ils étaient ramenés sur le devant de la scène, lui faisait douloureusement se souvenir qu'il n'avait encore jamais entièrement réussi à comprendre la raison derrière ce regard si spécial qu'avait Nora la plupart du temps.
Mélange d'espoir et de désespoir.
Après un long silence, au cours duquel personne ne bougea, il se décida finalement à parler de nouveau.
-Pourquoi est-ce que tu les as tous tués?
Nora sentit, la sortant de sa torpeur lassée, quelque chose remuer en elle à ces quelques mots. Elle comprit presque immédiatement à quoi Dazai faisait référence.
Parmi les trois personnes qui l'avait agressée, aucune n'avait survécu, et les trois corps étaient à présent réduis à l'état de bouillie immonde et difforme. D'ordinaire, elle savait que garder au moins un otage vivant était indispensable à la compréhension et à l'enquête qui suivrait.
Mais, cette fois-ci, elle avait tout foiré. Peut-être que ce fiasco était en partie à blâmer sur la fatigue et le mal-être sous-jacent qu'elle ressentait depuis son empoisonnement, mais pas que.
-Je voulais garder l'une d'entre elles vivante, au départ... dit-elle finalement d'une voix cassée, pas plus haute qu'un murmure, regardant ses mains tremblantes. Mais... Elle m'a dit quelque chose qui a tout précipité. Je suis tellement inutile, même pas foutue de contrôler mes propres impulsions... Tu parles d'une cadre de la Mafia...
Dazai ne fut qu'à moitié étonné lorsqu'il vit que le corps de Nora s'était mis à trembler légèrement, secoué par des sanglots silencieux. Il ne pouvait pas voir son visage, enfoui dans ses mains fébriles comme pour cacher ses pleurs au monde autour d'elle.
Ce monde qui l'avait abandonnée à son triste sort. Comme lui. Comme tant d'autres dont il ne connaissait même pas le nom, dont il ne soupçonnait même pas l'existence.
-Qu'est-ce qu'elle t'as dit?
Il attendit patiemment que la blonde trouve le courage de répondre, et surtout de le faire sans que sa voix ne révèle à quel point elle était brisée.
-Que quelqu'un du passé cherchait à se venger de moi, et que ceux que j'aimais à présent risquaient de mourir par ma faute. J'ai perdu le contrôle de mes mouvements lorsque je l'ai entendue-
Elle n'eut pas la force de continuer, peut-être trop honteuse pour ce faire, alors que l'objet de ses paroles non-dites se trouvait justement là, à quelques mètres d'elle.
Un autre moment de silence passa, qui fut cette fois-ci troublé par le froissement des vêtements et le raclement d'une chaise sur le sol, ainsi que le tintement d'un objet métallique déposé sur la table de chevet. Puis, l'instant suivant, la jeune femme sentit le matelas sur lequel elle était assise s'enfoncer légèrement.
Elle pouvait désormais sentir la présence de Dazai, plus proche que jamais, lui prouvant qu'il était toujours bien vivant. Qu'il était encore là, à ses côtés, pour Dieu seul savait combien de temps encore.
Quelques heures, quelques jours, quelques années. Elle ne savait pas.
Cette réalisation la poussa à sortir ses jambes de sous ses couvertures, et d'instinct à se jeter littéralement sur le brun, s'agrippant à lui comme si sa vie toute entière en dépendait.
Ce qui était tout sauf une simple image.
Elle passa ses bras autour de la taille de Dazai, vêtu de sa chemise blanche et pantalon noir habituels, et vint enfouir son visage dans son cou, les larmes silencieuses continuant de couler le long de ses joues, venant se perdre dans le tissu de plus en plus humide de la chemise que le jeune homme portait.
Ce fut à cet instant, comme à quelques reprises dans le passé, qu'il remarqua que Nora n'était rien de plus qu'une jeune adulte de dix-huit ans. Un corps si fort et en même temps si faible, contrastant avec l'esprit robuste qu'elle possédait.
Mais, comme tout le monde, il arrivait aussi à la blonde de s'effondrer, de craquer. De pleurer. De maudire cette vie si cruelle qui ne l'épargnait pas, qui l'avait forcée à devenir forte contre son gré. Qui l'avait obligée à jouer un rôle dont elle ne voulait pas.
Comme lui, exactement comme lui.
Sans ajouter quoi que ce soit, Dazai rendit doucement l'étreinte désespérée, déposant son visage dans les cheveux blonds de la jeune femme, respirant avec soulagement l'étincelle de vie qui émanait de cette dernière.
Elle était toujours en vie. Elle était toujours là, il pouvait sentir la chaleur de son être contre sa peau, sentir les larmes sur son épaule et la respiration chaotique dans son cou. Les tremblements de son corps, les mains serrées autour de son torse.
-Je ne vais nulle part, dit-il finalement à voix basse, ses bras étroitement serrés autour de Nora. Aussi longtemps que tu seras là, je n'irai nulle part. Parce que c'est toi qui m'a tendu la main en première, tu t'en souviens? Alors que j'étais sur le point d'abandonner, tu étais là pour moi.
Tu étais là pour un inconnu aussi pourri que moi, ne parvint-il pas à dire tout haut.
-Tu t'en souviens, Nora?
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