| DAY 5 | BETRAYAL
Un cinquième jour... Que je peine encore à classer. Angst ? Beaucoup de Hurt avec deux pourcents de Comfort ?
En tout cas, vous l'aurez compris avec un thème tel que « trahison », j'aurais pu faire du crack ou du angst... J'ai choisi le moins drôle. Pour cause, aujourd'hui préparez vous à plonger dans la relation houleuse, passée et présente, d'un de nos duos préférés j'ai nommé : FukuMori (ou Old Soukoku) ! L'univers est celui du canon, avec ces deux là pas besoin d'aller chercher bien loin pour des histoires sordides qui nous font grincer les dents. Mais c'est comme ça qu'on les aime ~
C'est donc ma version de ce que fait Yukichi de ses soirées quand il n'est pas dans son jardin à admirer des chats.
Encore une fois, quelques fautes sauvages peuvent vous agresser, lisez à vos risques et périls 👀
Si d'aventure vous décidez toujours de tenter le coup... Et bien il ne me reste plus qu'à vous souhaiter une bonne lecture !
-舞*'¨¯¨'*漫-
Le ciel se teintait d'une lueur orangée. Les hauts immeubles de Yokohama gâchaient le spectacle de l'astre du jour descendant progressivement vers la terre pour s'y enfoncer et disparaître, mais de toute manière ce n'était pas vraiment le soleil que Fukuzawa contemplait.
Debout devant les grandes vitres de son bureau, mains croisées derrière le dos dans une position qui reflétait sans qu'il ne s'en doute celle d'un autre homme à l'autre bout de la cité, le directeur de l'Agence profitait de la vue. Il aimait admirer sa ville tant aimée alors qu'elle se parait doucement de mille lumières, plus active que jamais quand la nuit commençait à jeter son sombre manteau sur le toit des gratte-ciels.
Il n'était pas si vieux, malgré ce que ses détectives aimaient à penser. Dans leurs yeux, encore innocents pour certains, évidemment qu'il paraissait un dinosaure, mais il était à peine arrivé à la moitié de sa vie si on considérait la durée moyenne d'une existence humaine.
Néanmoins, Fukuzawa se savait l'un des derniers témoins de l'ancienne Yokohama. Par témoin il entendait quelqu'un en capacité intellectuelle de comprendre et interagir avec le monde les entourant lorsque la ville était encore déchirée par les conflits entre gangs et autres joyeusetés illégales se terminant en bain de sang le plus souvent. Une vingtaine d'années auparavant, quand il avait rencontré et recueilli Ranpo, jamais il n'aurait pu ne serait-ce qu'imaginer qu'il se retrouverait assis à ce bureau -son bureau !, une tasse de thé fumante au côté, admirant le travail de toute une vie. Il n'avait jamais regretté ce choix de fonder l'Agence des Détectives Armés, de se soustraire à ce monde violent de la nuit pour évoluer dans celui du jour.
Mais parfois, certains soirs, quand il se sentait trop seul, que ses draps étaient trop froids et que les cris des hommes dont il avait déchiré la chair du tranchant de sa lame résonnaient à ses oreilles, il repensait à ce qui aurait pu être. A ce qui avait été.
A une époque, il avait vécu de tuer, dans une ville dont les rues se tâchaient perpétuellement de sang et de vomi chaque nuit passant, où ceux qui n'étaient pas assez forts pour se faire respecter finissaient inévitablement étendus sans vie dans une ruelle sombre. Corps anonymes défigurés parmi tant d'autres. C'était là, dans une de ces allées étroites, qu'il avait rencontré Natsume, étrange personnage insaisissable, détonnant de manière rafraîchissante dans ce paysage terne aux couleurs désespérément sanglantes. Inexplicablement vierge de toutes ces cicatrices que laissaient les massacres quotidiens s'opérant dans les entrailles de Yokohama, avec de grandes idées un peu utopiques plein la tête, presque tout droit sorti d'un roman, personne n'avait jamais su d'où exactement l'excentrique individu pouvait bien venir et où il s'en allait à chaque fois qu'il quittait les quartiers dangereux.
Arrivant toujours là et quand on ne l'attendait pas, étonnamment discret malgré son sens de la mode assez remarquable, l'homme avait rapidement gagné l'amitié et la confiance de celui qui se faisait jadis appeler "le loup argenté".
L'actuel patron de l'Agence avait beaucoup appris de Natsume, aussi quand, devenant fatigué de cette vie ingrate et épuisante, celui qu'il se retrouvait inconsciemment à considérer comme un mentor lui avait proposé de prendre part à un de ses plans qui consistait à protéger quelqu'un qui pourrait bien changer à jamais la face de Yokohama, Fukuzawa avait haussé les épaules et saisi son sabre.
Il n'oublierait jamais l'odeur de cette clinique clandestine, mélange de sang séché, d'antiseptique, et de ce parfum qui hantait encore parfois ses rêves.
Ôgai Mori avait toujours eu un amour démesuré pour l'eau de Cologne, ce n'était pas une surprise qu'il l'affectionne à présent avec cet espèce d'air distingué qu'il semblait essayer de se donner, mais à l'époque voir ce pseudo-médecin (avait-il seulement obtenu un certificat ou prêté serment ?) qui prenait à peine le temps de se raser la barbe et ne se préoccupait plus depuis longtemps de se couper les cheveux libérer quelques secondes chaque matin pour s'asperger de parfum avait de quoi faire rire.
Il avait fallu moins de deux heures en sa compagnie pour que Fukuzawa ne se sente à deux doigts de démissionner ou d'en finir avec l'homme qu'il était censé aider. Mais malgré lui, il n'avait jamais pu se résoudre à tout lâcher. Parce que Natsume était peut-être difficile à cerner, mais pas dénué de discernement et qu'il avait confiance en son jugement, surtout, mais aussi parce que peu importait à quel point Mori l'insupportait, peu importait leurs différends, leurs différences, le médecin clandestin était intelligent.
Et il avait raison sur un point : ensemble, rien ne pouvait les arrêter.
Alors ensemble ils étaient restés. Et ensemble ils avaient commencé à se faire un nom, à transformer lentement mais sûrement, en commençant par s'attaquer aux racines, cette ville alors pourrie, corrompue et loin de paisible qu'était Yokohama. La seule chose qu'ils avaient jadis en commun, et peut-être la seule chose qu'ils puissent encore se vanter de voir de la même manière au présent, était bien leur attachement à cet endroit dans lequel ils étaient tous deux nés, avaient vécu, s'étaient forgés, et voulaient à présent modeler à leur image.
Pouvant être impitoyable, mais aussi clément. Rude dans certains quartiers, agréable dans d'autres. Dangereux par certains aspects mais sur un plan général endroit à peu près sûr.
Ces années de sa vie, Fukuzawa s'en souvenait clairement. Ce n'étaient certainement pas les plus belles, mais elles restaient solidement ancrées dans sa mémoire comme la première fois où il s'était senti utile, où il avait regardé les mains tâchées de sang qui étaient les siennes et pensé qu'il pouvait en tirer quelque chose. C'était aussi la première, et dernière fois, où il s'était senti désiré en croisant le regard d'un autre être humain.
Encore aujourd'hui, il se demandait si ce qu'ils avaient expérimenté était vraiment de l'amour. Il en doutait assez fortement. Cette relation dont ils n'avaient jamais vraiment parlé à voix haute s'était construite après des mois et des mois de conflit, de tension, de respect silencieux, d'acclimatation. Ils avaient juste craqué, un soir, sous la lune, et essayé peut-être de s'apprivoiser l'un l'autre à l'aide d'autre chose que des mots. Comme voulant désespérément se faire comprendre, faire entendre son point de vue et sa voix à cet autre homme estimé mais en même temps méprisé, qui malgré tout constituait une pièce essentielle de cet immense jeu d'échec qu'étaient leurs vies.
Il ne s'était jamais senti plus vivant que sous les doigts de Mori. Mais Fukuzawa ne regrettait pas, même vingt ans après, de s'être tourné vers la lumière, d'avoir quitté cette clinique clandestine et ce parfum d'eau de Cologne.
Ils étaient tous les deux trop intelligents, trop accoutumés à la ville, trop lucides sur le chemin qu'ils empruntaient, pour avoir ne serait-ce qu'un instant pensé que ces moments d'oubli, ces tentatives désespérées de faire rester l'autre encore un peu, auraient pu durer.
Il n'empêchait que ça avait fait mal. Dégainer sa lame contre Mori avait été douloureux. La trahison du médecin clandestin qui s'était décidé à rejoindre la Mafia, bien qu'inévitable, l'avait quand même fait souffrir. Sûrement autant que sa propre trahison, s'alliant avec le gouvernement, avait dû blesser celui qui était à présent le Parrain de l'Organisation la plus puissante de Yokohama.
Ce devait en être ainsi, car même après tout ce temps, il n'y avait rien qu'ils aimaient autant que leur ville.
Fukuzawa, à présent totalement plongé dans l'obscurité, seulement éclairé par les néons de l'enseigne accrochée à l'immeuble en face du sien, soupira lourdement. Il avait fait sa part pour la journée, il était temps de retourner à son lit vide.
Il laissait Yokohama entre les mains de son meilleur ennemi, au moins pour la nuit.
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