Chapitre 4
Il avait passé l'entièreté du deuxième jour enfermé dans cette maison, déterminé à utiliser sa rage et son chagrin pour tout nettoyer. Il devait partir, il devait s'enfuir. Revenir, même pour cela, n'avait pas été une bonne idée. S'il avait ouvert cette enveloppe, s'il avait simplement lu, il ne serait jamais venu. Il aurait trouvé une excuse quelconque et Samuel se serait occupé de tout cela. Il serait resté chez lui, avec Lana et Martin et aurait continué de vivre dans le déni. Sauf que peu importait la tournure des événements, il aurait tout de même appris le mariage d'Hugo, un jour ou l'autre. Et la nouvelle l'aurait tout autant ravagé.
Il poussa un soupir exténué et jeta un coup d'œil par delà la baie vitrée qui donnait une vue imprenable sur le ciel grisâtre d'où se déversait une pluie torrentielle. Il se mordit la lèvre et soupira. Le vent tordait les palmiers à l'horizon et rugissait. Heureusement, il avait eut la présence d'esprit de récupérer quelques bouts de bois avant que la pluie ne fasse place au déluge. De ce fait, il n'aurait qu'à allumer un feu dans la cheminée. Il n'avait pas vraiment prévu de passer sa soirée ici, mais il serait trop dangereux de conduire par un tel temps. Ce pour quoi il avait prévenu ses parents, spécifiant qu'il passerait la soirée ici. Seul.
Il se servit deux autres verres d'eau supplémentaires et fit craquer sa nuque, fatigué. Il aurait dû penser à acheter à manger, mais il ne se voyait clairement pas braver la tempête. Il n'avait rien pour se sécher, aussi devrait-il faire l'impasse sur le dîner pour ce soir. Habitué à une météo plus stable en région centre, il aurait dû se renseigner le matin même.
Il fronça les sourcils en entendant des bruits de coups portés à sa porte. Rêvait-il ? Quelque chose avait-il heurté la porte ? Sa voiture ! Non, le vent n'était pas assez fort... Il l'espéra de tout cœur, mais préféra aller vérifier. En ouvrant, il eut la surprise de tomber sur Hugo, trempé jusqu'à l'os. Ce dernier le poussa et s'arrêta à quelques centimètres de lui, frissonnant.
— Mais... qu'est-ce que tu fais là ?! s'exclama Arthur en refermant rapidement la porte, s'écartant du châtain.
Hugo renifla et essuya l'eau qui ruisselait sur son visage avant de déposer un sac dans l'entrée, grelotant. Arthur suivit chacun de ses mouvements, curieux. Il était perturbé de le sentir aussi proche et il ne comprenait pas pourquoi ce dernier était revenu après qu'il l'ait mis dehors la veille.
— J'ai vu ta voiture et j'en ai déduis que tu ne pouvais pas partir à cause de la tempête, répondit Hugo en enlevant son manteau trempé, cherchant un peu de chaleur. Tes parents m'ont dit que tu n'avais rien prit pour manger alors je suis venu te nourrir. Et j'ai ramené un plaid, pour que tu passes la nuit au chaud.
Arthur aurait aimé qu'il prenne soin de lui en tant que petit ami et non parce qu'il était son meilleur ami. C'était blessant et contradictoire parce qu'il appréciait son attention autant qu'il la détestait.
— Tu aurais dû rester chez toi.
— Je ne pensais pas être trempé en quelques minutes, bougonna-t-il en gonflant ses joues tel un enfant capricieux.
Le brun se surpris à sourire, le trouvant toujours adorable. Et ce constat lui serra le cœur. Ne pouvait-il pas simplement oublier cet amour à sens unique ? Pourquoi le sort s'acharnait-il sur lui ?
— Enlève tes chaussures et va vers la cheminée, soupira Arthur, conscient qu'il ne pouvait pas le renvoyer chez lui après cet effort. Je vais l'allumer.
— Ok ! répondit Hugo avec un grand sourire, s'exécutant aussitôt.
Arthur leva les yeux au ciel, récupéra le sac et se rendit dans la cuisine où il le déposa sur le bar. Il l'ouvrit et fouilla dedans, appréciant de voir que son ancien ami avait fait cela avec minutie. Il n'avait pas simplement emmené de quoi se nourrir et se réchauffer, mais il avait également emporté du papier toilettes, du gel douche et des serviettes, des cochonneries et des bières. « Je suis venu te nourrir ». Il était surtout venu passer la soirée avec lui.
Il ne sût s'il devait en être agacé ou touché. Malgré son annonce catastrophique quant à sa sexualité, Hugo n'avait pas changé d'un poil. Et même s'il l'avait jeté hors de la maison hier après-midi, il revenait avec le sourire. Hugo avait toujours été comme cela avec lui. C'était peut-être ce qui l'avait fait craqué. Il chassa la peine qu'il ressentait et s'approcha du châtain qui s'employait à chiffonner du papier journal qu'Arthur avait posé près de la cheminée un peu plus tôt, avant de les enflammer à l'aide d'allumettes.
Le brun lui jeta une serviette sur la tête et déposa le plaid à côté de lui, préférant attendre qu'il se sèche avant de lui permettre de s'envelopper là-dedans.
— Tu me sèches les cheveux ? proposa Hugo avec un sourire.
— Tu peux le faire tout seul, riposta Arthur en attisant les flammes.
— Tu me le faisais avant, répondit le châtain en se frictionnant le cuir chevelu.
— C'était avant.
Du coin de l'œil, il vit la mine renfrognée de son ancien meilleur ami, mais ne dit mot. Il ne pouvait pas être sympathique parce qu'alors, il n'aurait plus aucune chance de le repousser. Il devait continuer d'entretenir une image distante pour se préserver. Un mariage, putain !
Il écarquilla les yeux quand Hugo commença à déboutonner son jean. Il s'écarta en se relevant et lui lança un regard outré.
— Qu'est-ce que tu fais, bordel ?
— Je suis trempé, Arthur, rétorqua Hugo en se dandinant pour enlever le jean qui n'avait malheureusement pas été protégé par son manteau.
— Putain, jura-t-il avant de tourner les talons.
Hugo allait le rendre chèvre. Soit il finirait par l'étrangler, soit il se jetterait sous un pont pour ne pas avoir à subir ce supplice. Le savoir aussi proche, le désirer ardemment, mais ne pas pouvoir le toucher ni être à ses côtés était une torture. Il préféra se retrancher dans la cuisine tout en observant ce qu'avait prit Hugo en terme de nourriture.
Il s'agissait surtout d'un assortiment de cochonneries en tout genre avec un peu de viande cru. Il ramena le tout sur la table du salon et jeta un coup d'œil au châtain qui s'emmitouflait dans le plaid, la serviette toujours posée sur le crâne. Il eut le temps de voir les mollets tendus de son ami et détourna le regard en soupirant. Il n'avait pas envie de se battre contre ses sentiments, son envie presque vorace de l'avoir pour lui tout seul, mais il le devait.
Comprenant que le salon était relativement froid à cause de l'absence de meuble, il tira la table jusqu'à la cheminée et obligea Hugo à se mettre derrière celle-ci même s'il devait pour cela s'éloigner légèrement du feu.
— Tu comptais squatter ? demanda-t-il en indiquant l'intégralité de la nourriture.
— J'ai couru sous la pluie pour toi, répondit-il avec un sourire en coin. Il me semble que mon vieil ami était quelqu'un de très ouvert, donc j'ai supposé qu'avec ton grand cœur, tu accepterais de rattraper le temps perdu. De toute façon, tu n'as rien d'autre à faire.
Il plissa les yeux dans sa direction, excédé. Effectivement, il n'avait pas le choix. Cependant, si Hugo connaissait la raison de son rejet, peut-être qu'il réfléchirait à deux fois avant de s'imposer. Il ouvrit un paquet de chips pour dissiper son irritation et plongea la main dedans avant de savourer le goût pimenté.
— Tu travailles dans quoi, maintenant ? commença-t-il son interrogatoire.
— Dans une boîte quelconque, répondit évasivement le brun.
— C'est à dire ? Tu fais quoi ?
— Des choses de grands, dit-il avec un petit sourire. Barbant, prenant et répétitif.
Hugo fronça les sourcils et bouda légèrement en comprenant qu'Arthur n'avait pas l'intention de s'épandre sur sa vie. Il ouvrit les bouteilles en verre de bière et en tendit une au brun qui l'accepta rapidement. Si l'alcool pouvait l'empêcher de ruminer des pensées inutiles, il sauterait dessus. Il but une grande gorgée et savoura la chaleur qui vint brûler sa gorge.
À cet instant, son smartphone sonna sur le bar. Il se leva automatiquement et s'accouda dessus, observant le correspondant. Il esquissa un sourire et prit le FaceTime, se tournant vers Hugo en montrant son smartphone.
— Je dois prendre cet appel.
Puis il prit la direction d'une chambre pour avoir un peu d'intimité. Il déposa la bière sur une commode et s'assit sur le lit en déverrouillant l'appareil. Aussitôt, l'image présenta un Martin relativement embêté face à une Lana surexcitée qui s'approchait d'un peu trop près de la caméra.
— Pap's ! s'écria l'enfant. Coucou ! Papa a bien voulut qu'on t'appelle.
— Coucou ma puce, dit-il.
— On t'entends mal, fit remarquer le rouquin en fronçant les sourcils.
— Il y a une tempête, spécifia Arthur en balayant ses cheveux avant de bâiller ostensiblement.
— On ne va pas t'embêter longtemps alors... comment ça se passe ?
— Tu rentres quand ? s'impatienta Lana.
— Dans six dodos, répondit-il avec un sourire. Ça se passe plutôt bien, mais c'est long et je suis seul pour tout faire.
— Sam ne t'aides pas ?
— Il travaille... je pense qu'il viendra me donner un coup de main demain. Et de ton côté ?
— Lana ne veut pas dormir, dit-il en faisant la moue.
— Il faut écouter ton papa, Lana, gronda-t-il en jetant un coup d'œil à l'heure.
21h16
Il n'avait pas du tout vu le temps passé. Il comprenait mieux pourquoi Hugo avait jugé qu'il passerait la nuit ici. Hugo... Il posa un regard voilé sur Martin et se mordilla l'intérieur des joues. Devait-il lui en parler ? À quoi bon ? Dans six jours, il serait de retour et il pourrait tout oublier.
— Mais je veux pas aller à l'école demain.
— Ne fais pas la difficile, Lana, dirent-ils en même temps.
Ils échangèrent un léger rire tandis que l'enfant croisait les bras, boudeuse.
— Ça va, Arthur ? demanda le rouquin qui devait avoir repéré la tristesse dans les yeux de son ami.
— Ouais... t'inquiète.
— Tu veux pas me lire une histoire, pap's ?
— Ton papa est là pour ça. Moi, je dois aller manger.
— T'as pas encore mangé ?! s'exclama-t-elle en posant une main devant sa bouche, choquée. Mais papa ! On aurait pas dû l'appeler.
Martin rigola et s'excusa platement devant sa fille avant de souhaiter une bonne soirée au brun. Arthur raccrocha et garda un petit sourire pendant quelques minutes avant de se décider à retourner dans le salon. Il éternua à cause de la poussière ambiante, récupéra sa boisson et ouvrit la porte. Sursautant, ses yeux noisettes tombèrent dans leur reflet à quelques centimètres de la porte. Hugo était adossé contre le mur, une expression indéchiffrable sur le visage.
— Putain... tu m'as fait peur.
— Désolé. C'était... ta fille ? demanda-t-il en cherchant une réponse dans son regard.
— Depuis quand t'écoute aux portes ? répliqua Arthur sèchement.
Il plissa les yeux, mais Hugo était sûrement l'une des seules personnes qui n'avait pas peur de l'ire dans son regard. Il le soutint et attendit une réponse en silence. Arthur soupira et le contourna sans répondre. Il prit place devant le feu et s'appuya contre le sol, buvant plusieurs gorgées de sa bière dans l'espoir que sa peine se tarisse.
— Tu as une fille ? Et... un mari ? Amant ? Copain ?
— Merde, Hugo ! s'énerva-t-il en le foudroyant du regard. T'es vraiment idiot, putain.
C'était blessant que son ami ne fasse aucun lien avec son refus de l'accompagner en tant que témoin à son mariage et sa révélation quant à sa sexualité. Ne pouvait-il pas faire semblant de comprendre qu'il avait des sentiments pour lui ?
— Arthur, c'est méchant ce que tu dis, rétorqua Hugo en prenant place à ses côtés, cherchant à capturer son regard. Je ne fais que m'intéresser à toi.
— Eh bien arrête !
— Pourquoi ?
Agacé, Arthur lui pressa les joues entre son index et son pouce, déformant sa bouche, avant de répondre avec énervement :
— Tu n'as que ce mot à la bouche, tu me fatigues. Occupe-toi de tes affaires. Je crois que t'as un mariage à célébrer.
— J'ai aussi du temps pour toi, répliqua-t-il sans couper le contact visuel.
— Non, c'est faux.
Ils se défièrent du regard dans un silence de mort avant qu'Arthur ne détourne le regard. Pourquoi cela faisait-il aussi mal ? C'était agaçant et énervant. Hugo ne pouvait-il pas se décaler ? Sa proximité le chamboulait.
— Je serais toujours là pour toi, tu le sais, non ? insista le châtain.
— Lâche-moi, Hugo.
— C'est ta fille, alors ?
Il grogna, soupira et jeta un regard blasé sur son ancien camarade. Il laissa la joie à son visage d'exprimer son irritation et répondit tout en s'enfilant une poignée de cacahuètes salées.
— Non.
— Elle t'appelle pap's.
Il se renfrogna et secoua la tête de gauche à droite, agacé.
— C'est la fille de Martin. Je la connais depuis sa naissance et elle ne veut pas m'appeler autrement.
— Martin ? C'est ton copain ? Pourquoi elle insiste autant ?
— Parce qu'elle a quatre ans et qu'elle ne veut rien entendre, riposta-t-il en terminant sa bière.
Il ferma les paupières et savoura la flamme qui dansait sous ses yeux et qui réchauffait son visage.
— Martin ?
— Putain, tu me les brises Hugo ! râla-t-il en rouvrant les yeux. C'est mon coloc.
— Il n'y a rien entre vous ?
— Pourquoi ça t'intéresses autant ?!
— Je veux juste comprendre ta vie.
— Pourquoi faire ? Je ne m'intéresse pas à la tienne.
— Tu devrais.
— Quel intérêt ? Est-ce que je veux savoir à quoi ressemble ta futur femme ? Non, rétorqua-t-il en plantant un regard farouche dans celui du châtain. Est-ce que je veux savoir comment vous vous êtes rencontrés ? Non. Est-ce que je veux savoir comment tu lui fais l'amour ? Non. Est-ce que je veux être ton témoin ? Non. Lâche-moi les basques, sérieux.
Il eut tout le loisir d'observer l'expression blessée d'Hugo, mais préféra ne pas s'y attarder. Se faire détester détruirait peut-être ses propres sentiments à défaut du mariage en perspective.
— Elle est grande, blonde et jolie. On s'est rencontrés un an après ton départ dans un bar. Et je lui fais l'amour comme n'importe quel homme...
— Je viens de te dire que je ne voulais pas savoir !
— Pourtant, tu as posé les questions.
— Et j'y ai personnellement répondu.
— C'est quoi ton problème ?!
— C'est toi, mon problème, répliqua Arthur en le foudroyant du regard.
Hugo le saisit au col et le rapprocha de son visage, aussi agacé que le brun.
— Si c'est le cas, frappe-moi ! Qu'on en finisse. Ou dis-moi pourquoi.
L'haleine épicée du châtain chatouilla ses narines, il sentit son estomac se contracter et fit du mieux qu'il le put pour ne pas fondre sur ces lèvres tellement appétissantes qui le tentaient depuis l'aube de ses quinze ans.
— Tu ne pourrais pas comprendre..., souffla-t-il en se reculant.
— Parce que tu ne m'explique pas.
Arthur saisit le poignet du châtain et retira sa main de son haut avant de se tourner vers la table, préférant se concentrer sur le repas devant lui.
— Mange Hugo.
— Arthur...
— Mange.
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New chapter !! 🤗
Vous m'avez fait beaucoup trop rire avec la pétition 😂 Alors juste pour ça - et peut-être parce que vous êtes des amours, je l'avoue - je concède a passer mon rythme de publication à tous les 2 jours. Ravis ? Pour les petits lecteurs fantômes qui votent - ou non 🥲 -, sachez que vous devrez remercier @BloodyFire05, @Klab74, @orrace57, @HelynePaclet, et @BideewMami pour ce petit cadeau 😂
Hugo, malgré l'irritation d'Arthur, revient à la charge, inlassablement. Comment tuer des sentiments quand on côtoie la personne aussi régulièrement ?
Des avis sur ce chapitre ?
Sur les personnages ??
Merci d'avoir lu ❤️
Je vais rentrer chez moi et faire un gros dodo tellement je suis out 😴
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