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[O&P] 6. Thé et citron

- Cinquième année - 

18 décembre 1993

-Comment tu te sens ?

-Je vais vomir.

-Ce n'est pas très séduisant, comme parfum.

-Je ne veux pas être séduisant. Je veux faire machine arrière et refuser. Pourquoi j'ai accepté ça ?

Le gémissement de Simon fit rire Cédric de bon cœur et il allongea une main pour ébouriffer ses cheveux, oubliant qu'ils étaient couverts du bonnet orange que Simon enfonça sur sa tête avant qu'il ne valse.

-Hé ! Fais attention, j'ai passé ma matinée à le rafistoler !

-Et si tu en achetais un autre au lieu de le rafistoler ? cingla Emily.

Elle avait pris quelques mètres d'avance sur le chemin givré qui les amenait à Pré-au-Lard. Victoria elle, avait grimpé sur un talus couvert de poudreuse et en prit une belle poignée entre ses gants pour la lancer en l'air. Portée par vent, toute la neige tomba sur Emily qui poussa un cri indigné et foudroya son amie du regard.

-Vic' !

-Désolée ! C'était ça, ou une boule de neige sur Simon.

-Non ! refusa immédiatement Cédric. Pas de boule de neige !

Victoria se fendit d'un sourire malicieux et Simon repensa avec un grand déplaisir à l'après-midi de novembre où elle s'était cachée derrière un arbre en revenant de Botanique avec à ses pieds une dizaine de boule de neige prête à s'écraser sur le visage de Simon. Le pire dans tout ça ? Il n'avait même pas eu le temps de se venger : Cédric était intervenu pour faire cesser l'attaque et Victoria en avait été si frustrée qu'elle lui avait réservé les trois boules qui restaient.

Docile, Victoria descendit du talus et revint d'un bond sur le chemin. Simon espéra qu'elle riperait sur le verglas et tomberait lourdement, mais même là la jeune fille avait le pied agile et prit quelques mètres d'avance en trottinant. Emily, handicapée par des petites chaussures très jolies mais peu pratique, finit par s'arrimer à son bras pour ne pas glisser.

-Cinq mornilles qu'elles se cassent la figure avant d'arriver au village, lança Simon à Cédric.

-Je ne parie pas contre mes amies. Et arrête de détourner le sujet. Pourquoi tu as accepté ce rendez-vous avec Octavia si tu ne veux pas y aller ?

Simon grimaça devant la question et le regard inflexible de Cédric à côté de lui. Malgré ses piques, il n'en menait pas large sur la piste et évitait soigneusement toutes les plaques de verglas visibles sur le chemin. Dans le reflet de l'une d'entre elle, il crut revoir la scène qui s'était déroulée une semaine plus tôt : Octavia et lui, attablés à la bibliothèque sur une traduction de rune qui leur échappait à tous les deux, jusqu'à ce que la voix innocente de la jeune fille fuse :

-Tu fais quelque chose samedi prochain, à Pré-au-Lard ?

-Non, avait-il répondu sans réfléchir. Rien de particulier ...

-On pourrait aller boire un café ensemble alors ?

Il en avait renversé son encrier sur leur traduction laborieusement obtenue. Ça aussi, il le revoyait avec netteté sur la plaque de verglas, comme l'air abasourdi et courroucé d'Octavia. Très honnêtement, il était certain que c'était pour rattraper cette bévue qu'il avait accepté. Mais la réponse arracha un long soupir à Cédric. Il replaça son bonnet aux couleurs de Poufsouffle sur ses cheveux bruns et Simon ne put s'empêcher d'être parcouru d'une pointe de jalousie. Pourquoi râlait-on unanimement contre la couleur orange de son bonnet et pas contre celle d'un moutarde peu flatteur de Cédric ? Il devait se rendre à l'évidence : tout passait sur le beau, l'élégant, charismatique Cédric Diggory.

-Tu ne pourrais pas essayer de le voir comme une véritable opportunité ? proposa son ami d'une voix qui se voulait calme et sensée. Réfléchis Simon. Tu t'entends très bien avec Octavia. Elle passe presque tout son temps libre avec toi – et crois-moi ça ne fait pas plaisir à la gente masculine Poudlarienne. Henry Sterling est venu me parler la semaine dernière pour me demander ce que tu faisais à Octavia pour avoir son attention.

Simon sentit son visage s'embraser devant le sous-entendu des propos. Ils entraient tous en masse dans leur quinzième année, dans l'adolescence, dans l'émulation des hormones et cela se ressentait chez certains de ses camarades. Dans leur dortoir, Charles avait trouvé sous le lit d'Erwin Summers un certain nombre de magasine de charme, ce à quoi Erwin avait répliqué que la boite de mouchoir de Charles s'était bien vite vidée depuis la veille. Henry Sterling, de Serdaigle, se vantait depuis l'été d'avoir perdu son pucelage avec une fille plus âgée et Emily avait réservé la gifle de sa vie à Kenneth Towler de Gryffondor après qu'il ait tenté de lui mettre une main aux fesses. Les discussions sur les filles dans les groupes de garçons s'intensifiaient et Simon découvrait presque malgré lui l'étendue des dimensions qui régissaient les relations entre les deux sexes. Ce n'était pas qu'une histoire de sentiment, mais – avant tout pour certain – une histoire de physique.

Sincèrement, Simon avait tenté de suivre les conversations, de comprendre ce qui provoquait le rire de ses camarades ou pourquoi soudainement les filles semblaient être réduits pour eux à certains attributs. Mais tout avait fini par le dépasser et il avait été rassuré d'être suivi par Cédric sur ce point. Jamais son ami se réduirait la gente féminine ou l'amour à une dimension physique. Simon quant à lui était encore au-dessus de toutes ses inspirations : il voyait assez les couples se faire et se défaire à Poudlard, Caroline pleurer après une rupture ou Gillian Fawley changer de crush toutes les semaines pour comprendre que les sentiments d'un adolescent étaient éphémères. Alors au moment où tout ses camarades semblaient obséder par le fait d'expérimenter, Simon s'en gardait bien. Il découlait de ces courtes histoires des tensions, des histoires, des rancœurs et il préférait rester en dehors de ce marasme et d'entrelacs de raideur le plus longtemps que possible. Quitte à être le dernier garçon de sa promotion à avoir embrassé une fille.

Alors ce café avec Octavia. Les sous-entendus de Henry Sterling. Tout cela semblait tellement éloigné de ce qu'il était, de ses aspirations ... Cédric profita de son mutisme pour poursuivre :

-Va boire ce café et tu verras bien comment ça se passe. Tu l'aimes bien Octavia, non ?

-Oui, je l'aime bien, admit Simon en toute sincérité. Mais pas au point de ...

-Qu'est-ce que tu en sais ? Tu n'essaies même pas !

-Pourquoi j'essaierais ? râla-t-il en levant les bras au ciel. Pour que ça soit fini dans deux semaines et qu'on ne se parle plus jamais ? Justement, je l'aime bien et j'aimerais continuer de parler avec elle !

Cédric plaqua sa paume contre son front avec un air désespéré qui arracha un grognement à Simon. Quelques mètres devant, Emily venait de glisser sur une plaque de verglas et s'était rattrapée in extremis à Victoria. Aucune des deux ne chutèrent, constata Simon avec dépit.

-Qu'est-ce que tu en sais que ça finira dans deux semaines ? répliqua Cédric. Qu'est-ce que tu en sais que finalement tu ne seras pas content d'être avec elle ? Tu crois savoir, Simon mais la vérité c'est que tu ne sais rien ! Arrête de te brider, mets son cerveau en pause un petit peu !

-Celui d'Erwin est constamment en pause. C'est peut-être pour ça qu'il a essayé de faire boire un philtre d'amour à Emily l'année dernière. Tu veux que je devienne comme ça ?

-Et arrête d'avoir réponse à tout, aussi ! Sinon j'appelle Victoria ! Bon sang je crois que c'est la seule dans ce bas monde à pouvoir te faire un peu taire !

-Victoria, c'est que quand ça t'arrange !

Il dut le crier un peu trop fort car la jeune fille se tourna de moitié vers eux, intriguée. Elle avait noué une écharpe jaune et noire autour de son cou et niché son nez dedans, mais Simon percevait son sourire dans la façon dont ses pommettes s'étaient élevées, réduisant des yeux en amandes qui étincelaient. Elle finit par comprendre que personne ne l'avait appelé et pivota de nouveau vers Emily accrochée à son bras. Pourtant, elle devait faire une bonne demi-tête de plus que Victoria – et toujours quelques centimètres de plus que Simon – mais des deux c'était la brune qui était le roc de la blonde.

-C'est vrai, admit Cédric avec un sourire. Je continue de détester que vous vous disputiez parce que je trouve que vous vous faites du mal pour rien et que vous êtes très injustes l'un envers l'autre et que ça ne correspond pas à vos sentiments réels ...

-Oh ! Doucement, le grand conciliateur.

-Arrête de fanfaronner et rappelle-toi un peu de la Chambre des Secrets.

Simon soupira devant cet argument que Cédric ressortait systématiquement dès qu'il s'agissait de sa relation avec Victoria. Comment il avait paniqué un an plus tôt, comment il n'avait plus lâché Victoria depuis, quitte à subir ses piques et sa présence à longueur de journée. Comment cette situation avait perduré cette année alors que le monstre avait été tuée – et d'après les rumeurs, Harry Potter était encore dans le coup. Et sinon, il avait une scolarité normale depuis son arrivée, ce garçon ? Avec un frisson de dégoût, il se souvint du match de Quidditch d'ouverture – Poufsouffle contre Gryffondor. Des Détraqueurs avait envahi l'espace et pour son âme heureusement qu'il s'était retrouvé non loin de Chourave et son patronus en forme de grenouille qui l'avait protégé du pouvoir maléfique de la créature. Les joueurs sur le terrain avaient eu moins de chance : Cédric, assez insensible à leur pouvoir, avait réussi à attraper le Vif d'Or mais Harry Potter avait chuté de son balai, Judy Summerby avait piqué sur le sol pour leur échapper, en larme et Victoria s'était retrouvée pétrifiée près de ses buts, incapable de bouger. Et devant la dizaine de Détraqueurs qui avait envahi l'espace avant l'intervention de Dumbledore, Simon ne pouvait lui ne vouloir. Même caché derrière la lumière éclatante de la grenouille de Chourave, il avait senti son cœur et son âme chaviré. Alors le pauvre Harry, qu'avait-t-il bien pu voir ... ? Simon pressa les paupières et chassa l'idée de son esprit.

Cédric se méprit sur son silence et se fendit d'un sourire satisfait.

-On ne s'inquiète pas pour quelqu'un qu'on déteste, chantonna-t-il doucement.

-On parlait d'Octavia, non ? rétorqua Simon, agacé.

-Oh, tu préfères qu'on retourne sur Octavia ? A ta guise !

Piégé, Simon se résigna et Cédric savoura son triomphe en écartant largement les bras. Une légère neige tombait et le sol s'égalisait soudainement pour laisser place aux routes de Pré-au-Lard. L'ambiance au village lui sembla se tendre et Simon se retrouva oppressée par les affiches du Ministère de la magie. Ses pas ralentirent d'eux même devant Zonko, dont la vitrine était couverte du visage émacié de Sirius Black. En dessous de ses traits bruts, porteur d'une certaine beauté déchue, un petit texte rappelait que l'homme avait froidement assassiné treize moldus en plus d'avoir réduit en pièce un sorcier. Des serres glacées se refermèrent sur le cœur de Simon et il se détourna vite, dégoûté. Les filles s'étaient engouffrées dans la boutique mais Cédric avait un pied sur une marche et le considérai, un sourire penaud aux lèvres.

-Bon. Qu'est-ce que je dis aux filles ? Que tu dois voir de la famille ?

-Hum ..., ça ne passera pas pour Victoria, évalua Simon, défaitiste. Dis-leur simplement que je vais faire le plein de fourniture, ça devrait aller.

-Prends-moi une plume au passage, je te rembourserais. Et vraiment, Simon ...

-Je sais, soupira-t-il. Je vais essayer. On se retrouve dans une heure aux Trois Balais ?

-Simon ... Arrête. Tu es injuste avec elle. Laisse-lui une chance. Une vraie.

Simon sentit son cœur se serrer alors que son ami l'abandonnait pour rentrer chez Zonko, le laissant seul sur le seuil avec les yeux furieux de Sirius Black comme seule compagnie. Et comme c'était une compagnie fort désagréable qui réduisait son ventre à un amas d'émotion indistinctes, Simon se dépêcha de quitter la place et s'enfonça dans le village. Il croisa Susan qui sortait de Honeydukes avec Justin Finch-Fletchley avec au creux du coude un paquet aux milles couleurs qui tranchaient avec sa cape noire. Caroline, Simon le savait, avait renoncé à la sortie pour travailler ses ASPICs qui arrivaient mais elle avait pris le temps de le renseigner sur l'endroit où il avait rendez-vous. « Oh tu vas chez Madame Pieddodu ? Andrew m'y a emmené la dernière fois, le café est vraiment succulent et c'est vraiment plus raffiné que les Trois Balais ! ». Simon n'avait jamais entendu parler de cet établissement depuis qu'il avait posé le pied dans le village deux ans plus tôt, mais l'idée que le mollusque qui collait aux basques de sa sœur l'apprécie ne lui disait rien de bon. Caroline sortait avec Andrew depuis un an, un an où il la suivait partout, trainant au bout de sa main ou portant ses livres avec des yeux plein d'étoile devant la belle jeune fille. Octavia ressemblait à Caroline, réalisa Simon avec un frisson. Elles étaient belles toutes les deux, stars de leur Maison toutes les deux, viser l'excellence toutes les deux. Sans doute que son subconscient avait fait le rapprochement et qu'il ne souhaitait absolument pas être un Andrew.

Avec un soupir, Simon poursuivit sa route dans les routes sinueuses de Pré-au-Lard, ses maisons bancales qui tenaient comme par magie et ses colombages qui lui donnait des airs de ville hors du temps. Il finit par trouver le minuscule salon de thé à la vitrine tout embuée et entra en faisant teinter la petite cloche au-dessus de lui. Octavia était installée sur une petite table ronde collée contre la fenêtre. Avant de la rejoindre, Simon resta une seconde sur le seuil pour étudier son environnement et décréta en une seconde qu'il le détestait. L'air était humide, âpre, sentait beaucoup trop le thé et il y faisait beaucoup trop chaud. Et alors qu'il retirait son écharpe, il avait beaucoup trop conscience des fanfreluches rose poudré sur les poutres saillantes qui garnissait la petite pièce étouffante, des rideaux couleur pastel et de la présence d'un certain nombre de couple sur les petites tables rondes. Suffoqué, Simon se dépêcha de se glisser en face d'Octavia, secrètement ravie qu'elle ait choisi une place près de la fenêtre. Elle lui adressa un grand sourire.

-J'avoue, j'avais un doute sur ta venue.

-Sans te mentir, j'avais un doute aussi.

Octavia inclina la tête avec un sourire tordu. Ses cheveux étaient soigneusement attachés en chignon soigné enrubanné de bleu et elle avait toqué son uniforme de Poudlard contre un chemisier élégant et une jupe couleur nuit fluide qui couvrait ses genoux. Ses ongles courts et sobres, soignés, pianotèrent la table pendant que Simon se débarrassait de sa cape et de son bonnet. Elle dressa un sourcil quand il posa celui-ci sur la table.

-Couleur ... originale.

-Hideuse ? traduisit Simon, amusé. Tu peux le dire, j'ai l'habitude. Même Susan veut le brûler.

-Et je suppose que cette opposition est la raison exacte pour laquelle tu y tiens tant ?

Elle était douée, devait admettre Simon devant l'aplomb avec lequel elle avait déclamé sa conclusion. Elle avait bien cernée sa personnalité basée sur la contradiction et la volonté de se différencier. C'était une hypothèse possible en effet et même plausible, mais sinon, pour une fois la fine Octavia était loin du compte. Les doigts de Simon effleurèrent le pompon peluchonneux orange. Il ne s'expliquait pas son attachement à son bonnet. Il savait juste qu'il l'avait mis une fois sur sa tête à l'âge de quatre ans et qu'il ne l'avait jamais quitté depuis. Ses parents lui en avaient acheté d'autres, Susan et Victoria l'avait caché dans le village, et Caroline dans une dispute avant menacé de le jeter, il n'en avait pas démordu. C'était son bonnet. C'était presque devenu une légende, Simon et son bonnet orange hideux. Une partie de son identité. Il rechignait à s'en séparer.

Et oui, le petit plus, c'était qu'il faisait l'unanimité contre lui.

Une femme forte au chignon noir et bas l'empêcha de répondre en se glissant avec difficulté vers eux. Le salon était si petit que l'espace entre les tables était réduit et Simon se réjouit secrètement qu'il ne soit qu'à moitié plein. La seconde table n'était à cinquante centimètre, à savoir rien.

-Je vous sers quelque chose les enfants ?

-Un thé au citron, s'il vous plait, commanda Octavia avec un charmant sourire. Et toi tu bois du café, il me semble ... ?

Simon hocha la tête. Un des rares points communs qu'il avait avec Victoria : la détestation de la boisson nationale anglaise. Il aurait voulu sourire à la patronne, mais sa mâchoire était crispée, les muscles de ses joues atrophiés. Il continuait de jouer machinalement avec son bonnet, raide comme un piquet sur sa chaise. Octavia attendit que leurs boissons soient servies (dans un silence dont il sentit seul tout l'embarras) et d'avoir soigneusement sucré son thé avant d'asséner sans même le regarder :

-Tu as perdu ta langue ?

-Quoi ? Non, non, je ... réfléchissais.

Sans doute la pire excuse du monde pour justifier un silence au milieu d'un café et Octavia et son petit sourire de coin n'étaient visiblement pas dupes. Simon se fustigea silencieusement et but une gorgée de café pour se donner le temps de réellement réfléchir. Par les chaussettes de Merlin, c'est vrai qu'il est bon, dut-t-il admettre en reposant sa tasse, pas plus avancé. C'était une situation à la fois inconfortable et inexplicable. Il parlait parfaitement avec elle à la bibliothèque ou en cours alors pourquoi serait-ce différent dans un café ?

-Et à quoi donc ? interrogea finalement Octavia avec un petit sourire.

-A Sirius Black.

C'était la première chose qui lui était passée par l'esprit et il sentit ses doigts se tendre sur son bonnet. Derrière Octavia, englouti derrière les rideaux, étaient visible une petite affiche du Ministère où le visage furieux du Ministère s'animait. La jeune fille suivit son regard et remarqua à son tour l'affiche. Elle poussa un profond soupir.

-Incroyable qu'ils ne l'aient pas encore attrapé, quand on y pense ... Tu te souviens d'Halloween ?

-Quel Halloween ? Ils se passe toujours quelque chose à Halloween dans cette école.

Mais il était vrai que cette fois-là avait été particulièrement sinistre. Il finissait un devoir avec Emily – ou plutôt regardait Emily finir son devoir – quand Chourave était entrée en trombe dans la pièce pour demander à sa préfète de réunir tous les élèves avec leurs affaires de nuit et de les amener dans la Grande Salle. Il avait fallu qu'il courre chercher Cédric, occupé à un entrainement de Quidditch, pour qu'il puisse aider Emily et c'était Victoria qui avait mis la main sur Susan, isolée dans une salle de travail. Ils avaient laissé les préfets s'occuper de leur Maison et eux s'étaient occupé ensemble face au murmure persistant de la présence du fameux Sirius Black dans l'école. Simon avait dormi avec sa sœur dans ses bras pour la rassurer, avec en visuel à côté de lui une Victoria qui n'avait pas fermé l'œil de la nuit. Et quelque part dans ses prunelles rendues grises par l'éclat de la lune, Simon avait de nouveau vu briller les étincelles du 5 Novembre.

Octavia essuya un petit rire et enroula ses doigts autour de la hanse de sa tasse.

-C'est vrai. Je pense que le pire quand même, c'était le troll dans le cachot, ça a foutu une panique monstre ... (Elle s'apprêtait à boire une gorgée de son thé avant de se raviser et de demander : ) Tu n'as pas de nouvelles ? De Sirius Black ?

-Pourquoi j'en aurais ? s'étonna Simon.

Octavia haussa les sourcils.

-Parce que ton père est au Magenmagot, que ta tante est Cheffe de la Justice Magique et que ta mère est son adjointe ?

-Mais comment tu sais tout ça ?

Lui-même ignorait totalement ce que faisait les parents d'Octavia. En tout cas, ils ne faisaient pas parti du cercle Ministériel : l'institution organisait un banquet à chaque noël et ça avait permis à Simon de retenir quelques grands noms accompagnés de visages et de statuts, mais rien qui lui rappelait les McLairds. Octavia se fendit d'un petit sourire satisfait.

-Parce que je m'y intéresse. J'aimerais bien travailler dans les relations magiques internationales alors il faut parfaitement connaître le monde ... Je lis les pages politiques de La Gazette tous les jours.

-Tu sais déjà ce que tu veux faire ? Avant même d'avoir passé tes BUSE ?

-Pas toi, monsieur Justice-Magique ?

Simon grimaça devant le ton ironique d'Octavia. Moins il songeait à son avenir, mieux il se portait parce que justement tout le destinait au Ministère et à la voix des Bones. Déjà parce qu'il n'était pas complétement dépourvu des idéaux familiaux en terme de justice. Ensuite parce que même quand le niveau s'élevait, il restait l'un des meilleurs élèves de sa promotion, simplement dépassé par un Cédric plus polyvalent et plus travailleur. Ses parents s'enthousiasmaient déjà, rassuré par ce carnet de note qui lui ouvrait leurs portes et Simon craignait de devoir leur révéler qu'il ne prendrait pas leur voie. De les décevoir. De ne pas être leur digne fils, contrairement à Caroline qui avait travaillé toute sa vie dans ce but. Alors il répondit à Octavia ce qu'il se répétait depuis maintenant un an pour se rassurer.

-Je ne sais pas trop. Peut-être Auror ?

-Justice et habilité magique, résuma Octavia avec un fin sourire. Oui, j'ai envie de dire que ça tombe sous le sens.

-Pas vraiment, il faut être en bonne forme physique pour être Auror et un sens de l'autorité et de l'obéissance que je n'ai pas du tout, objecta Simon. Mais je vais déjà passer les BUSE, on verra le reste ensuite. Et toi ? finit-t-il par ajouter quand il se rendit compte que sa réponse était suivie d'un silence. Pourquoi les relations internationales ?

Il la laissa parler de la réflexion qui avait abouti à cette idée, comment elle avait été fascinée par les voyages de son grand-père diplomate. Et alors qu'elle parlait de sa famille, Simon remarqua pour la première fois un accent écossais sous la langue parfaite d'Octavia. Il savait qu'elle habitait Glasgow mais rien dans son attitude ne trahissait un particularisme flagrant. Son camarade de chambre, Charles, était Gallois et le faisait savoir avec un drapeau accroché à côté de son lit tout comme Victoria revendiquait ses origines moldus avec toutes ses pièces de théâtres et ses photos de Terre-en-Landes figées pour l'éternité. Mais tout sensibilité écossaise semblait effacée chez Octavia. Il finit par en trouver la raison dans les explications de la jeune fille : depuis la démission de Lorcan McLairds, un (arrière ?) grand-oncle Ministre de la magie dans les années vingt, la famille, autrefois sans doute la plus puissante d'Ecosse, connaissait un certain déclin. Excentriques et excentrés dans leur Ecosse alors que les familles les plus prestigieuses de la communauté magique vivaient à Londres – ou du moins en Angleterre – ils devaient sans doute veiller à lisser leur portrait afin de mieux entrer dans le club. D'où, sans doute, l'absence totale d'accent d'Octavia.

-On ne t'a jamais appris le gaélique alors ? comprit Simon, presque déçu. C'est dommage, c'est assez beau de parler une autre langue ...

-Et à quoi m'aurait servi le gaélique ? protesta-t-elle. On ne le parle qu'en Ecosse, je n'ai pas besoin d'une langue qu'on ne parle qu'en Ecosse ! Et vraiment, j'ai plus fréquenté des anglais que des écossais ... En revanche j'ai pris quelques cours de français, j'ai des ancêtres qui viennent de l'autre côté de la Manche, c'est culturel chez moi. Pour tout te dire, je me sens presque plus française qu'écossaise. Et britannique avant tout.

-C'est triste.

Octavia parut vexée par sa conclusion et Simon s'empressa de se justifier :

-Non mais je veux dire ... Moi je me sens proche de la terre où je suis né. J'aime ma ville, ce qu'elle représente, je suis fier de dire que je viens du Gloucestershire. Je dois même avoir quelques gouttes de sang gallois à force d'être frontalier à eux : ce n'est pas pour rien qu'ils sont roux dans la famille.

La remarque arracha un petit rire à Octavia. Simon remarqua que ses doigts s'étaient enfin détachés de son bonnet, que pour la première fois qu'il était entré dans le salon de thé il ne sentait pas oppressé par l'ambiance. C'était comme si avec ces mots, il avait ramené un petit peu du Gloucestershire ici, de sa fraicheur amené le Severn qui le traversait de part en part avant de se jeter dans le canal de Bristol.

-Enfin, mon pays ça fait vraiment parti de mon identité, c'est une partie de moi, acheva-t-il d'une voix plus sûre. Alors je ne dis pas qu'on est défini par l'endroit où on est mais ... ça peut devenir un pilier. Une base, un socle. En tout cas, ça l'est pour moi.

Octavia le contempla longuement, dans un silence qui n'avait plus rien de gênant. Sa tasse de thé était finie et posée soigneusement sur le côté : elle n'en avait pas besoin pour s'occuper les mains. En revanche elle tournait sur son doigt sa bague de saphir, pressant son pouce sur la pierre dans un geste laconique.

-Je crois que c'est la première fois que tu me dis quelque chose d'aussi personnel.

Et cela provoquait une flamme contrôlée de triomphe dans son regard. Ce fut la première chose que Simon remarqua mais en réalité elle semblait sincèrement touchée par la confidence, sincèrement intrigué par ce pan de sa personnalité que seul sa famille (et Victoria) connaissait. Elle s'apprêtait à ajouter quelque chose quand Madame Pieddodu passa de nouveau devant eux, déplaçant même la table vide derrière eux en s'immiçant dans l'espace.

-Vous revoulez quelque chose les enfants ?

-Je veux bien un autre thé.

-Non merci, je vais y aller ...

Leurs réponses opposées se télescopèrent et ils échangèrent un regard écarquillé et embarrassant à souhait. Gênée elle-même par le silence qui s'en suivit, la patronne du salon s'éclipsa pour faire le thé d'Octavia.

-Déjà ? s'étonna celle-ci, sidérée. Mais tu n'es là que depuis une demi-heure !

-J'ai dit à Cédric que je passerais quand même un peu de temps avec lui ...

-Tu as toute l'après-midi pour ça, non ?

-Oui mais avec les Détraqueurs et Sirius Black qui rôdent je pense qu'on ne rentrera pas tard ....

Octavia le considéra froidement et ses mots s'étouffèrent dans sa gorge. Il avait douloureusement conscience de sa maladresse mais il ne savait absolument pas comment réagir face à ce genre de situation, face à elle, face au flou concernant ses attentes, face à la façon dont elle entrait dans son intimité sans qu'il n'arrive à la repousser. Elle finit par se laisser aller contre sa chaise et croisa ses bras sur sa poitrine.

-Bon. Qu'est-ce qui ne va pas chez moi ?

-Pardon ?

-Tu veux fuir depuis que tu es entré ici, ça crève les yeux. Sans doute parce que contrairement à l'école, ça a tous les aspects d'un rancard.

-Ça l'était ?

Il devait savoir. Il devait savoir pour être certain, certain de ce qu'Octavia attendait de lui : de l'amitié, ou plus. Une fois qu'il aurait déterminé ça, il pourrait se pencher sur ce que lui voulait. Octavia se mordit brièvement la lèvre inférieure avant de se constituer de nouveau un masque d'impassibilité.

-Peut-être.

-Octavia ...

-Bon très bien, céda-t-elle en détournant le regard. Oui, ça l'était. Maintenant réponds à ma question avant que je ne sois davantage humiliée.

L'humiliation en question se manifestait par une couleur rosée sur ses pommettes, inhabituelle pour sa peau d'albâtre parfaite qui ne daignait subir la moindre imperfection. Les mains de Simon se crispèrent de nouveau sur son bonnet qu'il avait glissé sur ses genoux. Il l'étudia, son beau visage, ses beaux yeux bruns velouté, sa mâchoire volontaire contractée. Cette mâchoire, c'était peut-être son seul défaut physique : elle était très carrée, assez large sur un visage très fin aux traits ciselés. Il eut l'impression d'entendre la voix de Cédric lui chuchoter : « laisse-lui une chance ».

Il se sonda intérieurement et fut surpris de ne pas se sentir plus paniqué que cela. En réalité, il était peiné par la situation qu'il provoquait, par ce regard presque furieux qu'Octavia braquait sur la fenêtre embuée. Il n'y avait qu'une demi-heure qu'il était assis, c'était vrai, mais il avait apprécié sa demi-heure. Octavia avait réussi à lui faire oublier qu'il était dans un salon de thé à l'atmosphère moite et à la décoration niaise. Il s'était révélé à elle avec une facilité étrangement déconcertante. Mais c'était justement ce qui l'avait arrêté, se rendait-il compte avec une certaine ambivalence. Il tira nerveusement sur son col, suffoqué.

-Ce n'est pas toi, finit-t-il par entonner avec toute la douceur dont il était capable. C'est juste ... Cet endroit, je te jure Octavia, je vais étouffer.

Les yeux de jeune fille papillonnèrent et elle arracha son regard à la fenêtre pour embraser la petite salle du regard. Elle parut la découvrir, comprendre d'une analyse tout ce qui pouvait déplaire et gêner Simon et elle finit par hocher résolument la tête.

-Je vois. Si on sort, tu attends un peu avant de rejoindre Cédric ?

Sa voix restait un peu froide et gardait des traces d'énervement mais Simon songea vaguement que lui et sa précipitation l'avaient mérité.

-Ça marche.

Les lèvres d'Octavia se retroussèrent en un petit sourire et elle se leva dignement pour se draper sa cape – bleu marine, pas celle de Poudlard. Son écharpe en revanche était celle de Serdaigle et elle avait visiblement renoncé au bonnet pour ne pas gâcher sa coiffure. Simon se dépêcha de se rhabiller à son tour et ils abandonnèrent sans vergogne leur paiement et la tasse de thé au citron intacte sur la table. Simon eut tout juste le temps d'enfoncer son bonnet sur sa tête quand ils sortirent du salon. Il inspira profondément et l'air glacial de février emplit délicieusement ses poumons. Il était le genre de personne qui préférait le froid à la chaleur. L'odeur de feu de bois et d'hiver remplaça celle âpre du thé et l'étau qui enserrait ses tempes se desserra.

-Mieux ? s'enquit Octavia avec une certaine ironie.

-Beaucoup. Si tu veux savoir une autre chose personnelle sur moi, c'est que j'ai horreur du thé.

Un timide sourire se dessina sur les lèvres d'Octavia et elle détourna les yeux pour les river sur la route de pavé qui s'étendait devant eux.

-Je note.

Elle enfonça ses mains dans ses poches et s'avança sur le chemin, Simon à ses côtés. Au lieu de retourner sur la grand-rue, ils s'éloignèrent et s'enfoncèrent entre les maisons bancales et les chemins sinueux. La neige tombait de plus en plus drue et Simon entraina la jeune fille dans une ruelle protégée par les toits des maisons qui se touchaient presque. Octavia retira la neige qui était tombée dans ses cheveux et sur ses épaules. Ses joues restaient roses mais cette fois c'était le froid qui en était en cause. Ils arrivèrent au bout de la ruelle, là où les murs se resserraient si fort qu'ils étaient forcés de se frôler.

-Bon, ça ne s'est pas passé comme je le songeais, avoua Octavia avec un rire étranglé. J'envisageais ça ... je n'en sais rien, plus romantique ?

Plus romantique. L'idée embrasa son visage et il le leva vers le ciel pour l'offrir aux quelques flocons qui passaient par la fente étroite entre les toits. Laisse-lui une chance. Une vraie, lui souffla Cédric. Simon ferma les yeux l'espace de deux pas pour remettre de la place dans ses pensées. Henry Sterling est venu me parler la semaine dernière pour me demander ce que tu faisais à Octavia pour avoir son attention.

Honnêtement, il ne comprenait pas non plus.

-Alors euh ...

Il ne savait pas quoi dire. Comment aborder la chose. Il lui sembla que sa langue se plombait dans sa bouche, devenait pâteuse, débordait de sa mâchoire. A s'en demander s'il n'était pas victime d'un sortilège et il jeta un regard suspicieux aux mains d'Octavia, enfoncées dans les poches de sa cape. Ses yeux glissèrent sur son visage où un petit sourire amusé était apparu.

-Je pense que c'était limpide, non ?

-Mais pourquoi ? Je veux dire ... Franchement, Poudlard a les yeux rivés sur toi et toi entre les Cédric Diggory, Henry Sterling et les Roger Davies tu arrives à les poser sur un moustique ?

Cette fois, Octavia éclata d'un franc rire. C'était assez rare pour que Simon en soit décontenancé. Elevée comme une grande dame du monde, Octavia McLairds n'éclatait jamais de rire. Elle s'esclaffait doucement, dans une hilarité contrôlée et agréable mais rire à gorge déployée, c'était rare.

-Oh par Merlin, un moustique ? C'est vraiment comme ça que tu te vois ?

-Tu m'as bien regardé ? rétorqua Simon.

-A dire vrai, oui.

Elle prit une profonde inspiration pour calmer son rire avant de franchement tourner le regard vers lui, comme pour prouver ses dires. Ses yeux étaient légèrement luisants après son hilarité, ses pommettes toujours d'un rose soutenu et ses traits incroyablement détendus. Une mèche brune s'était échappée de son chignon et ondulait sur son front avec nonchalance. Elle était plus naturelle que jamais.

-Je t'ai parfaitement regardé, Simon Bones. Et crois-moi, tu n'es pas un moustique.

Elle s'arrêta au milieu de la ruelle déserte avant que l'étroitesse soit telle qu'ils ne soient obligés de marcher l'un derrière l'autre. Cette fois, ils étaient parfaitement couverts de la neige que Simon voyait tomber en doux flocons un peu plus loin, rendus visibles par la froide lumière d'hiver. Il avait toujours trouvé ce phénomène fascinant en cette saison, particulièrement en tant de neige : même quand tout était sombre, le soleil bas, faible ou couvert, tout semblait éclater.

Octavia continuait de le fixer, un petit sourire jouant sur ses lèvres entre incertitude et insolence. Son parfum sucré, un peu lourd, lui parvenait par effluves et forçait Simon à bloquer sa respiration.

-Tu es l'un des gars les plus intelligents que j'ai rencontré. Je dirais même brillant, mais ce côté ça va avec un égo incroyable et une tendance à la vantardise.

-Sympa. Tu parles presque comme Victoria, là.

-Peut-être, mais contrairement à elle, ça ne me dérange pas. Je n'aime pas la modestie ni les faux-semblants. Et ...

Elle se trémoussa, l'air soudainement un peu embarrassée. Son regard se baissa sur le bout de ses chaussures qui dépassait de sa cape. De belle facture, en daim d'une agréable couleur caramel, mais la neige avait commencé à la gâter. Ses yeux y restèrent une demi seconde le temps de constater les dégâts avant de se river de nouveau sur Simon. Cette fois, le sourire s'était effacé de son visage.

-Et j'aime qu'on accepte la même chose chez moi. Que je puisse dire que je suis jolie et intelligente sans paraître présomptueuse, qu'on n'ait pas peur de me complimenter ou de me dire la vérité. J'aime la franchise et j'ai l'impression que personne n'est franc avec moi ...

-Honnêtement, Octavia ... C'est parce que j'ai l'impression que tu n'es franche avec personne.

Elle haussa les sourcils et sous ses yeux, Simon vit le masque se recomposer sur son visage. Il pointa un index sous son nez qui la fit loucher.

-Exactement pour ça. Tu ne laisses jamais rien paraître, tu veux paraître parfaite. Si personne n'a rien à te dire, c'est qu'il n'a rien à dire – à part un petit peu d'arrogance et encore même ça tu essaies de l'atténuer. Et je me doute que c'est ce qu'on t'a appris mais ... Comment tu veux qu'on soit franche fasse à une statue ?

-Toi, tu sais parler aux filles, persiffla Octavia, les sourcils froncés.

-Absolument pas. C'est même la dernière chose que je sais faire. En revanche, je pense savoir te parler à toi.

C'était au moins ce qui lui avait dit cette demi-heure chez Madame Pieddodu et tous les moments qu'ils avaient passés en classe ou à la bibliothèque. Il savait lui parler et pire que tout, il aimait lui parler, débattre avec elle, la rationalité qu'elle intégrait dans chacun de ses raisonnements. Octavia leva dignement les yeux au ciel mais laissa échapper un petit sourire qui fissura de nouveau son masque. Elle l'observa de nouveau quelques secondes avant que quelque chose ne se fige dans le fond de ses prunelles. Ses lèvres s'entrouvrirent avant qu'elles ne les pincent puis regarde des deux côtés de la ruelle. Quand elle fut assurée qu'ils étaient seuls, elle avança d'un pas et réduisit drastiquement l'espace qui les séparait. Heurté par son parfum, Simon vit à peine qu'elle avait arraché ses mains à ses poches pour les porter à son visage et le prendre en coupe. Ce ne fut que lorsqu'il sentit ses paumes chaudes contre ses mâchoires glaciales. Il tenta de réprimer sans succès un mouvement de recul mais son talon trouva le mur de pierre derrière lui.

-Qu'est-ce que tu fais ?

-Une expérience. Ne panique pas et laisse-toi faire.

Son souffle s'abattit sur ses lèvres et son haleine citronnée cassa la sucrosité de son parfum. Elle était aussi grande que lui, à quelques centimètres près et le regardait droit dans les yeux. Elle ne le toisait pas, ni ne le surplombait. Ses prunelles étincelaient mais il y avait toujours au fond d'elle quelque chose de plus figé, déterminé sans que cela n'agresse Simon. Certes, il avait l'impression que son cœur s'était arrêté de battre dans sa poitrine et que sa langue resterait collée à son palais pour toujours et pourtant, quelque chose en lui l'inciter à incliner le visage, à offrir ses lèvres à Octavia. Lui laisser une chance. Tenter l'expérience. Tenter. C'était incroyable qu'il soit tenté comme ça par ses lèvres, ce petit sourire isolent qui lui posait une question muette. Toutes ses résolutions, tout ce qu'il avait décidé valsa dans son esprit. Oui, ça lui plaisait bien d'expérimenter.

Autant le faire avec une fille qu'il savait apprécier.

Alors sur un coup de tête, il combla de lui-même les quelques centimètres qui les séparait et posa timidement ses lèvres sur les siennes. Les mains d'Octavia s'appuyèrent contre ses joues, l'entrainèrent un peu plus, mais il recula au moment même où sa bouche s'entrouvrait. Loin d'être décontenancée, Octavia dressa un sourcil et un sourire amusé s'étira sur ses lèvres. Elle ne retira pas ses mains, gardant le visage de Simon soigneusement coincé.

-Alors ? souffla-t-elle, diffusant une odeur de citronnée sur Simon. C'est si terrible ?

Simon ne sut réellement que répondre. La vérité, c'était qu'il n'était pas sûr d'avoir ressenti grand-chose d'extraordinaire mais songea que malgré la volonté de franchise d'Octavia, c'était la dernière réponse à donner.

-Non. Non, loin d'être terrible.

Le sourire s'agrandit sur les lèvres d'Octavia et atteignit ses yeux pour enfin réchauffer ce qui s'était figé dans ses iris. Elles avaient à présent l'aspect du chocolat velouté que Victoria engloutissait les soirs d'hiver comme celui-ci. Elle balaya sa joue de son pouce avant de se pencher vers lui et de l'embrasser – l'embrasser réellement, pas juste poser ses lèvres sur les siennes. Le baiser dérouta davantage Simon qui tenta d'analyser ses mouvements, de les reproduire sans savoir s'il s'y prenait bien ou mal, sans réfléchir à s'il appréciait cela ou non. C'était réellement une expérience hors du corps où sa logique avait pris le pas sur l'affect, où il avait l'impression d'être plus spectateur qu'acteur. C'était comme s'il était entré sous l'eau et que le monde extérieur lui parvenait par échos et brouillement. Quand elle s'écarta avec un petit sourire satisfait, la seule sensation que choisit de retenir Simon fut qu'elle avait réussi à lui laisser le goût du thé sur ses lèvres et que ce n'était pas agréable.

-Je confirme que tu sais me parler, admit-t-elle en baissant enfin les mains pour libérer le visage de Simon.

Elle ne le fit que pour glisser sa main dans la sienne et Simon s'efforça de ne pas se dégager. D'ordinaire, il n'était pas du genre à apprécier les contacts physiques qui n'étaient pas ceux de sa mère ou de Susan – l'unique personne dans ce bas-monde avec laquelle il pouvait être qualifié de tendre. Emily parvenait année après année à se glisser dans la bulle de Simon, à pouvoir glisser son bras sous le sien, le prendre par les épaules – et de plus en plus, que ce soit réciproque, avec plaisir. Victoria était un cas particulier : beaucoup de contact, mais toujours ou presque des coups, plus ou moins rudes. Mais tenir la main, c'était presque aussi nouveau qu'embrasser et de nouveau, Simon eut la vision d'un Andrew trainé au bout du bras de Caroline. Il contempla leurs doigts entrelacés et souleva sa main de quelques centimètres, tirant celle d'Octavia avec.

-Ça veut dire qu'on ...

-Sort ensemble, compléta Octavia, toujours souriante. Si ça te va.

Là encore, Simon ne voyait qu'une réponse acceptable. Se laisser une chance. Expérimenter. Tu l'aimes bien, essaie, force ta nature ! Alors il sourit et hocha doucement la tête. Octavia leva le visage en se mordant la lèvre inférieure, comme si elle se retenait d'éclater de rire ou d'exploser de joie.

-Par le chaudron de Merlin, je sors avec Simon Bones ! Qu'on avertisse immédiatement Emily Fawley !

-Non ! protesta immédiatement Simon en lâchant sa main. Ah non, mais tu veux ma mort ?!

-Non, juste la voir rager sous mes yeux, voir son visage être déformée par l'amertume et la fureur, voir ses yeux vouloir me brûler sauf qu'elle sera impuissante ...

-Je comprends mieux pourquoi tu as posé les yeux sur moi, maugréa Simon, presque vexée.

Octavia éclata de nouveau de rire et se dépêcha de rassurer Simon d'un baiser sur la joue, doux, spontané, apaisant.

-Mais non, voyons ! Emily, c'est juste la cerise sur le gâteau. J'ai tellement hâte de voir sa tête !

Pas lui. Non, lui était plutôt horrifié à l'idée parce qu'Octavia se délecterait peut-être du spectacle mais lui aurait le droit aux coulisses, avec tout son stress, ses cris et sa dramaturgie. Non, Emily serait effectivement furieuse à l'idée qu'il sorte avec sa rivale et Simon s'étonnait que cette donnée ne se soit jamais mêlée à ses réflexions. Puis après la réaction d'Emily, il songea à celle de Victoria. Deux étaient possibles : soit, par amertume après les piques qu'Octavia avait pu lui glisser une fois ou deux, elle se braquait comme Emily, soit elle se moquait de lui jusqu'à la fin de ses jours. Il se sentit blêmir à l'idée. Oh Merlin, il était hors de question qu'il donne à Victoria une occasion si facile, si pérenne, si accessible, d'amusement. Parce que derrière Victoria, il y avait tout le village de Terre-en-Landes – Alexandre en tête, mais aussi Ethan, Chloé, Tracy ... Il se souvenait du pari en cours d'Ethan et Chloé sur les âges où chacun embrasserait pour la première fois et que la jeune fille qui avait parié treize ans avait déjà perdu et ne manquait pas de lui faire payer dès qu'il revenait. Ethan avait parié dix-huit – et il lui ferait payer son échec aussi sûrement que Chloé.

Non, vraiment, c'était dans ces moments où il se réjouissait d'avoir Cédric en meilleur ami. Mais Cédric, aussi grand et généreux soit-il, ne compensait pas le reste.

-Ecoute, entonna-t-il résolument. Est-ce que ça te dérangerait qu'on garde ça pour nous pendant ...

Quelques mois. Non, quelques années. Pour toujours serait même préférable. Mais au vu du visage figé d'Octavia, c'était encore une mauvaise réponse.

-... quelques semaines, juste le temps qu'on s'habitue ... et que je prépare psychologiquement Emily. C'est ma meilleure amie, insista-t-il quand Octavia poussa un soupir irrité. Tu ne peux me demander de la braquer comme ça !

La bouche d'Octavia se pinça et elle leva les yeux au ciel, en pleine réflexion. Simon songea aux garçons avec lesquels elle avait pu sortir ses deux dernières années, souvent plus âgé qu'elle d'un ou deux ans, et avec lesquels elle s'affichait fièrement. Mais encore une fois, il était hors de question pour Simon d'être un Andrew. Expérimenter, oui, mais à sa manière et de préférence sans heurter Emily.

-Très bien, céda-t-elle dans un soupir. Je suppose qu'on peut s'accorder quelques jours ...

-Semaines. S'il te plait.

Octavia papillonna des yeux et assez étrangement, un sourire s'étira sur ses lèvres.

-Oh ... Ne me dis pas que je suis ta première ? La première que tu embrasses ?

Les joues de Simon s'empourprèrent assez brusquement et Octavia laissa échapper un petit rire qu'elle étouffa immédiatement en plaquant sa main devant sa bouche.

-Oh ce n'est pas drôle, pardon ... Juste ... C'est mignon ...

-Ah oui ? grinça Simon.

-Et surtout, ça ne s'est absolument pas vu, ajouta Octavia avec un long regard entendu. Mais d'accord ... Dans ces circonstances, on peut attendre un peu avant de rendre ça public ... Le temps que tu prépares Emily ...

-Il n'y a pas qu'Emily, Octavia ... Je veux ... Je ne sais pas, être sûr que ça ne dure pas deux semaines avant qu'on se quitte et qu'on ne se revoit plus jamais. Je t'aime vraiment bien.

Il avait parfaitement conscience qu'un « Je t'aime vraiment bien » était loin d'être la déclaration qu'attendait toutes les filles après avoir été embrassées. Il était même certain que certaines d'entre elles auraient été mortifiées. Mais pas Octavia. Pourquoi ? Parce que Simon sentait que concernant les sentiments, elle était comme lui : sceptique, prudente, analytique. Ils n'étaient pas en train de parler d'amour, mais d'expérience et c'était une approche qui rassurait Simon. Octavia hocha résolument la tête et son sourire se teinta d'une certaine tendresse. De nouveau, elle s'avança vers lui et Simon suivit son mouvement pour l'embrasser. C'était simple, comme sensation : pas l'incendie décrit par Erwin Summers quand il avait embrassé Emily ou un échange de salive écœurante qu'avait justement décris celle-ci pour le même baiser. C'était sa peau contre la sienne, chaleur contre chaleur. Pas de quoi paniquer.

-Moi aussi je t'aime bien, souffla-t-elle en s'écartant. Alors promis, on va faire en sorte que ça marche ... 

***

Je crois que pour le coup c'était quelque chose d'attendu ! 

Alors je sais que je suis devenue irrégulière sur ce bonus, mais j'ai plein de parties d'écrites un peu dispersées donc je pense que je vais revenir à mon plan de base : un poste assez aléatoire ! Mais vous avez mérité celle-là ! 

 La prochaine partie est à moitié écrite et se passe le même jour que celle-ci : vous avez une idée de quoi il s'agit? 

En encore une fois, n'hésitez pas à me proposer des idées ! A plus tout le monde <3

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