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[LDP] 2. Remords

Je ne devais pas poster aujourd'hui mais la journée en plus d'être grise n'est pas très bonne (et au risque de paraître mauvaise langue, ce n'est pas les garçons sur l'individuel de biathlon qui vont me remonter le moral. Quoique? Naaan faut pas que j'espère je vais être déçue après). 

MAIS POSTER C'EST CHOUETTE 

(Le biathlon féminin aussi. Je suis vraiment abasourdie par leur insolente réussite, on m'aurait dit ça il y a deux ans je ne l'aurais pas cru) 

Comment allez-vous sinon? Dites-moi tout <3 

Ici ça avance. Après un coup d'arrêt les quelques travaux d'aménagement de ma maison ont repris (j'ai du parqueeet en haut et pas du lino tout moche), la petite Penny a un peu paniqué quand le gros berger australien de ma sœur est venu mais bon elle n'a pas fui donc j'estime que c'est une victoire. Je reçois mes amis de prépa pour la première fois ce week-end et je suis en joie (et aussi un peu stressée et aussi un peu vannée parce que ça fait trois WE de suite que j'ai des gens chez moi). 

ET SURTOUT je pars en Novuelle-Zélande visiter ma sœur avec mes parents dans deux semaines et CA c'est vraiment chouette. Pays des Hobbit et du rugby, me voilà ! 

Mais avant toute chose, on poursuit le bonus de Farhan et de son deuil. Vous êtes prêt.es pour cette partie ? On y va ! Bonne lecture ! 


-Moïra ! Moïra, regarde la cuillère ! Regarde, c'est le petit avion et pfiooouh ...

Farhan contempla, un sourire aux lèvres, Maya faire des bruits exagérés pour décrire les moteurs aériens et agiter la cuillère de compote dans l'air avant de l'enfourner dans la bouche entrouverte de Moïra. Perchée sur les genoux de Joséphine, celle-ci écarquilla les yeux lorsqu'elle réalisa la supercherie de sa tante et recracha le contenu de sa cuillère sur ses genoux. Joséphine comme Bérénice un peu plus loin s'esclaffèrent sous les yeux dépités de Maya.

-Elle doit me détester, décréta-t-elle en nettoyant sa robe d'un coup de baguette.

-C'est la pêche qu'elle déteste, rectifia Joséphine. J'ai essayé toute la semaine, ça ne passe pas. J'ai pensé que la faiseuse de miracle pourrait réussir là où j'ai échoué.

Maya adressa un regard dubitatif à Joséphine. La suite prouva néanmoins que la mère avait toujours raison : une fois la compote de pêche remplacée par la pomme, Moïra avala chaque cuillère avec un appétit qui enchanta Maya.

-Je pensais vraiment que c'était parce qu'elle ne m'aimait pas, avoua-t-elle, penaude. Après tout avec la guerre, je l'ai à peine vue ma petite nièce ...

-Notre petite nièce, enchérit Bérénice avec hauteur. Et arrête, elle a à peine changé depuis le début de l'été ... Juste un peu plus de cheveux. Les cheveux de tatie, ça !

-C'est vrai qu'ils bouclent, évalua Maya, les yeux plissés pour détailler l'enfant. Mais le reste c'est Joséphine !

C'était aussi l'avis de Farhan. S'il avait été incapable de voir dans les traits de Moïra autre chose que le visage presque universel de tous les bébés – si on exceptait sa houppe de cheveux noirs de jais qui tapissait son crâne dès la naissance – plus elle grandissait, plus Farhan voyait Joséphine en elle. Son nez se retroussait de semaine en semaine. Sa mâchoire se dessinait et alors lorsqu'on lui mettait sa purée sous le nez ... Cet air revêche et buté, Merlin. Farhan avait éclaté de rire la première fois qu'il s'était peint sur son visage. Celui-là même qui anima ses traits lorsque Maya lui montra le pot de compote vide. La crise de colère qui s'annonçait se pressentait tellement que Bérénice pouffa avant qu'un cri ne jaillisse des lèvres de Moïra :

-Ah oui, c'est Josie ... !

Joséphine voulut donner un coup à Bérénice et Farhan récupéra sa fille avant qu'elle ne soit blessé par la bataille entre les sœurs Abbot. Machinalement, il tâta les joues de l'enfant. La peau brûlante lui prouva ce qu'il pressentait depuis quelques heures.

-Elle fait une dent. C'est pour ça qu'elle aussi grognon ... Tiens, ma belle ...

Il lui tendit l'un de ses anneaux à mâcher et Moïra mordit immédiatement dedans à pleine gencive d'où jaillissaient deux petits monts immaculés. Occupée à baver sur son jouet, elle s'affaissa contre Farhan, plus sereine. Le regard empli de tendresse que Joséphine posa sur lui arracha un sourire comblé.

-Je n'en reviens pas que vous allez déjà en avoir un deuxième, souffla Maya, elle aussi attendrie par le spectacle.

-Moi non plus, enchérit Bérénice en lorgnant le ventre encore plat de Joséphine. Tu as déjà pondu deux fois plus que Lili, tu réalises ça ?

-Pondu, répéta Joséphine, outrée. Respecte mes heures de travail et de douleur à donner naissance à ma fille, s'il te plait. Crois-moi je ne me suis jamais donnée autant pour quelqu'un.

Bérénice ne remit pas la parole de son aînée en doute, mais son scepticisme tapissait ses prunelles noisette. Dans sa belle robe de sorcière mauve, les cheveux tirés en arrière dans un chignon sobre mais soigné, elle paraissait presque plus âgée que ses deux sœurs. Et en beaucoup de points, elle les avait précédés. Forte d'une situation financière stable après sa promotion au secrétariat de la Coopération Magique Internationale, elle avait acheté son propre appartement en plein Londres et pouvait se prévaloir d'un coffre plus rempli que ceux d'Ophélia et Joséphine réunies.

-Tu as dit aux parents que tu étais enceinte ? ajouta Bérénice, un sourcil dressé.

La mention, susurré avec soin, eut l'effet d'une bombe invisible dont le souffle glaça la pièce. La bouche de Maya fut agitée d'un tic nerveux et elle feignit d'être absorbée par le spectacle de Moïra bavant abandonnant sur son anneau. Farhan, quant à lui, s'efforça de contenir un visage neutre malgré les vagues de malaises qui déferlaient dans sa poitrine et que la mine attristée de Joséphine ne vint pas calmer. Elle tenta de la masquer en ramenant ses cheveux sur son visage.

-Non, pas encore. Je me suis arrêtée une semaine pour me reposer mais j'essaie quand même d'écrire quand je n'ai pas trop de nausées ...

-Très bien. Je crois que je vais y aller ce week-end, tu ne veux pas venir avec moi ? Ce sera fait au moins. Et prends Moïra avec toi ... maman réclame après sa petite-fille.

Et pourquoi ? Pour en faire sa nouvelle poupée grandeur nature ? Farhan se mordit la langue pour ne pas laisser échapper la remarque. Il savait qu'elle aurait été injuste dans un contexte où Teresa Abbot avait dû vivre dans la terreur ses derniers mois. Pourchassé pour avoir refusé de servir sous Thicknesse, son mari s'était enfui dans le nord, la laissant seule dans le désarroi que seules ses filles avaient pu briser. Des trois, Joséphine avait été la moins présente de toute. Farhan aurait aimé que ce soit parce que des restes de rancœur demeuraient ... mais c'était simplement parce qu'ils avaient dû affronter leurs propres dangers. Sans ça, elle aurait répondu à l'appel de détresse de sa mère sans hésiter.

-Je vais y réfléchir, assura Joséphine, mais le cœur n'y était clairement pas. Je suppose que papa doit être bien occupé avec tout ce qui se passe ...

-Il prête main forte au Bureau, oui. Ils ont dû mettre un paquet d'Auror de côté, il y a plein d'enquête internes sur leurs agissements pendant la guerre et ... (Cette fois, le regard de Maya fut planté sur elle sans le moindre sourire, et Bérénice se râcla la gorge). Enfin, lumière sera faite.

-Content de voir que cette fois ils veulent bien faire les choses.

Farhan s'en voulut d'avoir laissé échapper la pique dès que Joséphine tressaillit. La mâchoire contractée, elle attendit quelques secondes avant de se lever et de sortir sur le balcon, les doigts frémissants – sans sa grossesse, elle aurait certainement grillé une cigarette. Bérénice la suivit, non sans lancer un regard à Farhan où brillait un léger reproche. La porte claquait à peine derrière les sœurs que Maya éructait déjà :

-Berry, je te jure ce qu'elle peut forcer ! Elle s'attend quand même pas qu'au nom de la sainte félicité qui est censé tous nous animer on oublie tout, y compris ça ?!

-Je pense que ça commence à devenir pénible depuis quelques mois, évalua Farhan en réajustant sa fille sur ses genoux. Avec la guerre, la naissance des enfants ...

Comme si elle comprenait qu'on parlait d'elle, Moïra émit un long gazouillis qui arracha un sourire à Maya. Farhan se souvenait parfaitement où s'était effectué la fracture, le moment où Joséphine était passée de l'acceptation de son éloignement à devoir le subir. Lorsque Moïra était née, Bérénice était venue à Ste-Mangouste avec une demande faite du bout des lèvres : leurs parents souhaitaient visiter l'enfant. Farhan avait refusé sec que les fantômes du passé viennent gâcher ce moment. Alors qu'au fond de son cœur, son ressentiment envers le couple s'était anesthésié avec les années, il s'était réveillé avec force lorsqu'il avait songé que sans Aloyssius Abbot, peut-être que ses propres parents seraient là à ses côtés pour accueuillir l'enfant. Joséphine n'avait pas protesté : elle avait attendu quelques jours après leur retour pour présenter leur fille à ses parents, seule.

Accepterait-t-elle si docilement une seconde fois ? Après tout ce qu'il s'était passé ? Après avoir frôlé le pire ? Après la mort de Tonks qui leur avait appris à leurs cruels dépends que la vie ne tenait qu'à un fil ... ? Farhan ferma les yeux quand le coup vint lui transpercer la poitrine. Etourdi par la douleur soudaine, il entendit à peine Maya soupirer :

-Je comprends. Oui, je comprends que ce soit très inconfortable pour Jo, et qu'en soit je suppose que les Abbot ont le droit de connaître leurs petits-enfants ... Berry m'en parle peu, mais j'ai l'impression qu'ils sont très présents pour le fils d'Ophélia.

-Pour les deux, confirma Farhan en forçant ses paupières à se relever. Depuis sa séparation avec Cassius, ils les portent à bout de bras, sans contrepartie ... donc je suppose que ... ils ont appris leur leçon.

La conclusion répandait un goût de cendre sur ses papilles. Il aurait aimé avoir la moindre miette, la moindre petite excuse, le moindre faux-pas pour pouvoir continuer de détester les Abbot de tout son cœur ... mais ces dernières années, ils ne lui avaient pas donné le moindre grain à moudre. De leur soutien à Ophélia à la décision d'Aloyssius de se battre contre son gouvernement. Le rappel le frappa comme un cognard en pleine poitrine. Même lui s'était battu. Même lui avait eu tout le courage qui lui avait manqué. Vingt ans après avoir failli à tous ses devoirs, il venait de se racheter – et le reconnaître arracha le cœur de Farhan.

-Envers leurs filles, peut-être et on va leur reconnaître ça, trancha Maya avec fermeté. Mais ça ne nous donne aucune obligation envers eux. Ils se sont rachetés envers elle. Jamais ils ne pourront le faire envers nous. Ils nous ont arrachés notre enfance ensemble, Farhan. Ces souvenirs volés, personne ne pourra nous les rendre.

Farhan aurait voulu opiner avec force et pourtant quelque chose l'en empêcha. La suite de la phrase, le reste de sa réflexion, ce que Maya taisait. Oui, ils leur avaient arraché leur enfance ... pour sauvegarder celles de leurs filles. Oui, Aloyssius avait failli à tout ses devoirs vingt ans plus tôt mais pour préserver l'intégrité de sa famille. N'était-ce pas pour la même raison que Farhan avait failli à ses propres devoirs ? Envers la communauté pour laquelle il aurait dû se battre ? Envers Tonks, Tonks qui malgré les mêmes attaches au monde s'était élancée ... élancée ...

Son cœur manqua un battement, un terriblement battement, pour battre l'espace d'une fraction de seconde en harmonie avec celui d'Aloyssius Abbot.

-Farhan.

La voix de Maya le ramena à la réalité et il réalisa qu'il serrait avec un peu trop de force sa propre fille dans ses bras, qui s'était mise à gigotait nerveusement. Les yeux café de Maya étaient plantés sur elle. Avec son hijab beige élégamment entourée autour de son visage et sa peau mordorée, elle semblait avoir toute entière absorbée les teintes du désert.

-Ne t'en veux pas, tu as toutes les raisons d'être encore en colère et je suis sûre que Joséphine comprend. Elle est intelligente. Elle aussi a été en colère contre ses parents, même si elle a eu le temps d'oublier. Vraiment, ne culpabilise pas.

-Facile à dire ... murmura-t-il.

Il agita le genou, à la fois pour apaiser Moïra qui, lassée de son jouet, commençait à geindre et remuer, mais aussi pour faire passer la douleur qui affleurait dans sa poitrine. La culpabilité coulait dans ses veines à flux moins torrentiel, mais régulier, et certainement pas pour la raison invoquée par Maya.

-Fais vraiment ce que te dictes ta conscience, poursuivit sa sœur, avant de lâcher, la bouche plissée par le déplaisir : et si elle te dicte de leur pardonner ... pour Joséphine, pour tes enfants ... je ne t'en voudrais pas, d'accord ? Mais ne me demande pas d'en faire de même.

-Jamais, promit précipitamment Farhan. Et crois-moi, je n'en suis pas là, vraiment pas là ...

Il se souvenait encore du pincement au cœur et des heures de malaise et d'attentes impatientes les rares fois où Joséphine avait emporté leur fille chez ses parents. Malgré les années, malgré l'endormissement de ses ressentiments et le rachat progressif auprès de Joséphine, jamais il n'avait eu totalement confiance ni la conscience tranquille. S'il n'arrivait pas à dépasser ça, alors il ne savait pas comment il pourrait envisager de se retrouver face à eux. Ou de leurs confier non un mais deux enfants. Et quand ce serait plus ?

Ses réflexions furent interrompues par le grincement de sa porte : Bérénice et Joséphine revenaient dans la pièce. Le cœur de Farhan plongea dans sa poitrine lorsqu'il remarqua les yeux humides de Joséphine. Ça ne dura qu'une fraction de seconde. Lorsqu'elle planta ses yeux sur Farhan, ils brillaient, certes, mais d'un éclat déterminé.

-Je pense que je vais aller chez Noah, annonça-t-elle sans s'inquiéter du fait qu'ils étaient déjà en pleine conversation. Lui dire que je suis enceinte avant que je ne revienne travailler, pour qu'il se prépare psychologiquement à être plus présent ... tu viens avec moi ?

Farhan envisagea l'espace d'un instant de refuser : après tout, leurs deux sœurs étaient venues les visiter, et il avait peu pu profiter de Maya durant les longs mois où la guerre faisait rage et où chaque sortie était une mise en danger ... mais quelque chose au fond des prunelles de Joséphine enfonça ses protestations pêle-mêle dans sa gorge.

-Bien sûr ..., se ravisa-t-il. Maya, tu peux garder Moïra ?

-Hé ! protesta Bérénice alors que Maya souriait en prenant sa nièce sur les genoux de son père. Comment ça vous partez en nous laissant un bébé qui fait ses dents sur les bras ?

-A Maya, pas à toi. Mais tu peux rester dîner aussi si tu veux.

La proposition parut radoucir Bérénice, qui s'installa de bonne grâce sur une chaise. Un léger sourire ourla ses lèvres, teinté d'une espièglerie si peu coutumière sur le visage de la jeune fille qu'elle en ressembla de façon frappant à sa sœur aînée.

-Et quand vous reviendrez, Maya pourra nous parler de Shani ...

-Oh, Berry ! marmonna Maya, sur la défensive. Shani n'est pas un sujet de ragot !

-Bien sûr qu'il l'est, assura Joséphine avec un sourire malicieux, avant de caresser la joue de Maya. Et tu nous raconteras tout dès qu'on rentre ma belle, crois-moi.

Maya cligna des yeux, les bras resserrés sur Moïra comme pour en faire un bouclier.

-Jo ? J'avais déjà peur de toi à l'école mais depuis que tu es devenue journaliste tu es terrifiante.

-J'espère, j'aurais bien besoin de ça avec deux enfants de mon sang à gérer. A tout à l'heure !

Elle se drapa d'une légère veste verte émeraude et s'engouffra dans la cage d'escalier sans demander son reste. Farhan la suivit, non sans adresser un dernier salut à sa sœur – et un sourire d'excuse. Le dîner promettait d'être long pour elle ... Shani était un nom qui revenait comme un serpent de mer depuis un an dans leurs conversations. Maya avait rencontré cet étudiant en littérature arabe lorsqu'il était venu dîner chez son père, son directeur de thèse. Si au début, un peu traumatisée par sa relation avec Rayan, son ex-fiancé, elle avait joué la prudence et la nonchalance, Farhan sentait que les choses étaient en train de basculer ... il l'admettait, il avait hâte d'apprendre ce que Maya avait bien à leur dire sur Shani ...

Une fois passés la boutique déserte qui embaumait la menthe après que Farhan eut fait brûler un mélange d'herbe la veille, ils émergèrent dans l'avenue ensoleillée du Chemin de Traverse. Quelques personnes flânaient en cet fin d'après-midi dominicale et Farhan sourit en entendant les rires et le joyeux murmure des conversations. La terrasse d'Esmera Fortarôme était comble et le tumulte qui émanait du Chaudron Baveur était des meilleurs augures. Il était heureux que les attaques absurdes envers Tom aient cessé ... Il considérait qu'il était injuste de lui faire payer le fait d'avoir tenté de survivre. Il avait été témoin de la détresse du barman pendant la guerre : contrairement aux rumeurs, jamais il n'avait livré le moindre né-moldu ou jouer les espions pour les Mangemorts. Son seul tort avait été de leur avoir servi à boire ... mais la foule coupable de s'être tue s'était déchainée pour expier ses propres remords.

-Tu ne veux pas y aller en balai pour éviter les nausées ? proposa gentiment Farhan à Joséphine.

-Non, j'ai eu ma dose de haut-le-cœur ce matin, ça devrait aller.

Farhan lui décocha un regard devant le ton lointain, distrait et presque froid. Les mains plongées dans les poches de sa cape, Joséphine fixait l'horizon, les traits légèrement crispés, la mine songeuse. La gêne grignota les entrailles de Farhan. Sans attendre, il enlaça sa taille et plaqua un baiser sur sa tempe.

-Prends Moïra avec toi, quand tu iras voir tes parents avec Bérénice, proposa-t-il malgré sa profonde réticence. Ça ira ...

Joséphine parut regretter immédiatement le ricanement sceptique qui la secoua. Elle se passa une main sur le visage avant de caresser celui de Farhan. Son sourire tenait davantage du rictus.

-Les choses sont ce qu'elles sont, Farhan. Je m'y suis habituée.

Le mot qui transpirait dans l'attitude de Joséphine n'était pas « habituée ». C'était « résignée ». Elle ne tenta ni de s'apitoyer, ni de le décharger. Elle laissa simplement retomber sa main, retomba dans son mutisme et les guida jusqu'à la ruelle où ils avaient l'habitude de transplaner. Les entrailles réduites à un tas de nœud empli de plomb, Farhan la suivit et les emporta magiquement une fois à l'ombre.

***

-Jo !

Le cri de Julian les prit par surprise, si bien que Farhan sursauta sur le pas de la porte. Le professeur, en simple tee-shirt frappé de la silhouette des Beatles et en jean, avait mis le temps avant de leur ouvrir, si bien que Joséphine avait fini par tambouriner le battant. Son poing avait été d'ailleurs à deux doigts de finir dans le nez de Julian lorsque la porte avait fini par s'écarter ...

-Et Farhan, constata-t-il, surpris, avant de se tourner vers l'intérieur de l'appartement. Noah ! Ne me dis pas que tu as invité deux personnes en même temps ?

-Non, ce n'est pas lui, c'est moi qui m'invite, précisa Joséphine.

-Mais si on vous dérange, on peut ...

Mais Joséphine avait déjà contourné Julian pour entrer dans l'appartement et était déjà loin lorsque Farhan soupira :

-Ou on peut s'imposer, visiblement.

-Je crois que c'est le plan, évalua Julian, un brin penaud. Entre, je t'en prie ...

Farhan adressa un sourire crispé à Julian et emboita le pas à Joséphine dans l'appartement devenu si familier au fur et à mesure des années. Même si ses visites avaient été rares, voire interdites depuis la chute du Ministère ... La raison, Joséphine l'avait appris à demi-mot une fois la paix revenue et Farhan compléta la réponse lorsqu'il avança dans le salon. Noah trônait dans un fauteuil, un sourcil dressé à l'adresse de Joséphine. Et sur le sofa, deux invités les contemplaient, un peu perdu. Un garçon mince comme un jonc avec une houppe de cheveux blonds qui mériteraient d'être coupés, et une fille aux boucles brunes et avec au fond des yeux la méfiance de la bête traquée.

Victoria, devina Farhan, peiné. La née-moldue qu'ils avaient caché pendant quelques semaines, avant qu'une Rafle ne l'emporte.

-C'est quoi cette arnaque ? cingla immédiatement Noah en pointant Joséphine du doigt. Tu me laisses le journal sur les bras pendant une semaine alors que le travail double chaque jour et tu penses que tu vas venir boire tranquillement le thé chez moi ?

-Oh garde ton thé, Farhan le prépare mieux que toi ...

-Et ça vient m'insulter chez moi en prime ? s'indigna Noah, une main sœur le cœur. Miss Colibri, défends-moi !

Un sourire frémit sur les lèvres de Victoria.

-Je n'aime pas le thé, mais je n'ai aucune difficulté à imaginer que ce soit le cas. Encore on parlerait du thé de Julian, je ne dis pas mais tu es Américain, Noah. Je suis certaine qu'en comparaison c'est du jus de chaussette.

Avec difficulté, le garçon à ses côtés parvint à dissimuler son rire dans un toux, mais ça ne lui épargna pas le regard noir de Noah. En revanche, les prunelles de Joséphine étincelèrent et elle n'hésita pas avant de tendre la main à la jeune fille.

-Enchantée ma chère, Joséphine Abbot.

-Victoria, répondit-t-elle avec un faible sourire. Et on s'est déjà rencontré, en fait ... au mariage de Bill.

-Oh.

Farhan n'avait pas pu empêcher ses lèvres de s'activer. Encore moins le coup de s'abattre et de lui fracasser le cœur. Il venait brusquement de se souvenir pourquoi le visage du couple lui était familier ... L'image presque figée lui revenait ... lui, arrivant in extremis à la cérémonie après avoir déposé les chaussures de Joséphine au Terrier, s'asseyant au bout de sa rangée en repérant leurs deux visages en arrière-plan ... et au premier, le visage souriant de Tonks, cheveux blonds sur les épaules, alliance brillante à son doigt. Il avait peiné à répondre à ce sourire ... l'anneau d'or l'avait obnubilé.

Joséphine parut voir le spectre s'élever face à lui. Aussitôt, elle reprit la conversation en main et se tourna sur Victoria avec un sourire dont elle masquait à la perfection la crispation :

-Oh, je suis désolée ! Il faut dire que j'étais enceinte, je n'étais pas vraiment très lucide. Et par ailleurs puisqu'on en parle, la raison de ma présence ... je risque d'encore perdre en lucidité ces prochains mois ...

Le visage de Noah se décomposa entièrement fut un baume sur la poitrine de Farhan et la main que Joséphine glissa dans la sienne un apaisement encore plus grand. Le regard bleu du dessinateur se darda sur le ventre de sa rédactrice-en-cheffe avant de se lever de nouveau sur son visage.

-Non.

-Si.

-Non. Non, non.

-Je te jure que si.

-Tu ne vas pas me faire ça. Pas toi, pas maintenant.

-Tu es un homme fort Noah, je suis sûre que tu vas pouvoir gérer pendant mon congé maternité.

Il fallut la confirmation verbale pour que le visage de Julian se fende d'un immense sourire. Faisant barrage à un Noah qui continuait de fixer Joséphine, à moitié choqué, à moitié vexé, il s'avança pour la prendre dans ses bras.

-Toutes mes félicitations ! C'est une excellente nouvelle, je suis tellement content pour vous !

La sincérité dans la voix de Julian acheva de dissiper le spectre : à son tour, Farhan se laissa étreindre et un sourire jaillit sur ses lèvres sans qu'il le réalise. Ce bébé avait véritablement un pouvoir magique. C'était l'unique personne qui pouvait briser l'aura glacée que la mort de Tonks refermait sur lui.

-Ne la félicite pas, elle va me laisser tout seul alors qu'on passe à un numéro par jour ! éructa Noah, incrédule. Un numéro par jour, elle a pris cette décision puis elle tombe enceinte ! Tu n'aurais pas pu fermer un peu les cuisses le temps qu'on s'organise !

-Noah !

Le cri vint à la fois de Julian et de Victoria, qui en plus se permit de planter son coude dans les côtes. Le garçon, toujours sur le sofa, s'était contenté de s'empourprer et de détourner pudiquement le regard.

-Fais comme quand tu as appris que je partais en Bulgarie, fais semblant d'être content, chantonna Victoria avec un innocent sourire.

Elle le fixa sans ciller, jusqu'à ce que Noah marmonne dans sa barbe, roule des yeux, puis jettent les mains au ciel. Finalement, il finit par se trainer pour prendre Joséphine dans ses bras, lui donner deux tapes dans le dos puis s'écarta pour la contempler d'un air sévère.

-J'espère au moins que je suis parrain.

-Non, c'est Charlie.

-Ton ex ? C'est le summum du mauvais goût, la stagiaire.

-Je te jure que si tu continues je t'envoie la coupe de champagne que Julian va me servir à la figure.

-Et en plus ça réclame le champagne ! Enceinte ! Mère indigne ! (L'air consterné, il tapota sur le ventre de Joséphine avec condescendance). Ah la la petit enfant, tu n'es pas rendu ...

-Il y aura du champagne, mais pas pour Joséphine, trancha Julian avant de couler un regard pour Victoria. Enfin, si ça ne dérange pas Victoria et Simon ...

-Pas du tout, je prends tout ce qu'il y a à fêter.

L'affirmation était dite avec un sourire des plus avenant, le genre de sourire qui illuminait un visage et la pièce entière. Et pourtant Farhan le percevait, cet éclat froid et lointain au fond de son regard. Il était certain d'avoir l'ombre du même dans ses prunelles. La fête était du nectar mais dans ses occasions le vide que la guerre avait creusé en eux s'ouvrait comme un gouffre et avalait une partie du bonheur. Le fracas de la chute faisait frémir Farhan.

Julian s'effaça et revint avec des coupes et un verre de jus de citrouille devant lequel Joséphine plissa le nez. Elle ne l'engloutit pas moins avec un sourire quand on leur porta un toast. Une fois assuré que sa rédactrice-en-cheffe ne l'abandonnerait pas et enfin gagné la bonne nouvelle, Noah avait retrouvé le sourire. Farhan savoura le champagne, un peu étourdi par l'euphorie qui venait de s'éprendre du groupe. La petite Victoria ne cessait de sourire, quand bien même ils ne leurs étaient rien, et il comprit que la jeune fille avait trop souffert et avait soif de bonnes ondes. Elle partait en Bulgarie, comprit-t-il au détour d'une conversation – et les sourcils de Joséphine s'envolèrent sous sa frange.

-Jouer avec Krum ? devina-t-elle, visiblement impressionnée.

-Pas vraiment, je vais en réserve dans un premier temps. Je crois que j'ai perdu tout mon niveau cette année ...

Elle désigna son corps maigre d'un vague geste. Elle était tellement éloignée de la grande taille de Joséphine et des épaules larges de Charlie, les deux joueurs de Quidditch qu'avait côtoyé Farhan, qu'il avait toutes les peines du monde à la visualiser sur un terrain – encore moins au poste de gardienne. Les yeux de Joséphine brillèrent mais avant qu'elle ne puisse ouvrir la bouche, Noah lui coupa l'herbe sous le pied :

-Non, Jo, pas d'article ! (Il enroula un bras autour des épaules de Victoria). Elle prépare son départ, elle a autre chose à faire.

-Ne m'en parle pas, gémit Simon, une main sur le visage. On a des affaires partout, c'est terrible de tout rassembler ... (Il tourna les yeux vers Julian). D'ailleurs je n'ai pas oublié mon manuel d'entrelacement des enchantements ici ?

-Si, je te l'ai mis de côté. Attends ...

Farhan profita que Julian se lève pour en faire de même et que son départ passe inaperçu. Il avait simplement envie d'un verre d'eau et d'un peu de calme. C'était idiot, mais le simple fait de contempler la petite Victoria lui mettait les entrailles en vrac. Elle paraissait porter physiquement, dans la profondeur de son regard ou la légère crispation qui la prenait parfois sans raison, la guerre dans sa chaire. Et puis dans son esprit, elle était indissociable de Tonks, de cette Tonks blonde et souriante, les yeux humides d'émotion ou son sérieux mortel lorsqu'elle avait promis de faire payer à la guerre de les séparer. Et ça, c'était un pieu planté dans le cœur à chaque fois ... Le bébé était magique, mais il ne pouvait pas parer tous les coups.

-Mais où est-ce que je l'ai mis, j'étais sûr de ...

Julian entra dans la cuisine au moment où Farhan finissait son verre d'eau, l'air furieux contre lui-même. Il poussa un profond soupir lorsqu'il découvrit le grimoire à côté de la corbeille à fruit.

-Parfois je me demande où j'ai la tête ... (Il adressa un sourire penaud à Farhan). Pardon, je ne devrais pas dire ça ... quand je pense que maintenant vous allez avoir deux enfants à gérer ...

-Je vois ça comme une chance.

Il ne voyait pas d'autres réponses à donner à un Julian qui, à priori, serait privé de la chose. Par ailleurs, sa bouche s'affaissa légèrement, mais il parvint à maintenir un air aimable sur son visage.

-J'imagine, avec tout ce qu'on a traversé cette année ..., souffla-t-il en s'appuyant contre le plan de travail. Voir la vie refleurir, ça doit faire un peu de bien.

-Beaucoup de bien, confirma Farhan.

Mais Julian avait une expérience du deuil trop grande pour ne pas percevoir le « mais » tu en fin de phrase. Ils avaient pu en parler, lorsque La voix du chaudron était passé dans la clandestinité et qu'il était passé dans sa boutique s'assurer que Farhan était en accord avec les risques pris par Joséphine et Noah. Sa mère. Matthew Bones, son meilleur ami. Et pour toujours, la peur viscérale qu'un être aimé lui soit arrachée chevillée au corps.

-Tu penses toujours à ton amie, pas vrai ? demanda-t-il avec douceur. Comment elle s'appelait ?

-Tonks ...

Le nom roula sur sa langue avec une pointe d'amertume. Jamais il ne se ferait au « Nymphadora Lupin, née Tonks » gravée dans le marbre à tout jamais.

-Tonks, répéta Julian avec un triste sourire. Je crois que Victoria et Simon aussi la connaissait ... elle était dans l'Ordre du phénix, c'est ça ?

-Ils y étaient ? s'étonna Farhan.

-Ils ont fait des missions, mais se sont effacés quand Victoria a dû se cacher ... enfin, jusque la Bataille de Poudlard.

-Ils étaient là-bas ... ?

Julian hocha la tête. Farhan n'était pas assez fort face à la vague de honte et d'incompréhension qui vint le submerger. Quel âge avaient-ils ? Pas vingt ans. Pas vingt ans, et engagés dans l'Ordre du phénix. Pas vingt ans, et présents à la Bataille de Poudlard. Pas vingt ans, et des cicatrices à tout jamais gravée dans l'âme. Pas vingt ans, et un million de fois plus courageux qu'il l'avait été ...

-Farhan ? s'inquiéta Julian, les sourcils froncés. Je ne devrais pas demander si ça va, c'est évident que non mais ... ça va ?

Farhan mûrit sa réponse, encore secoué et reposa le verre d'eau avant qu'il ne lui échappe des mains. Il avait eu la sensation de faire un véritable bond en avant en apprenant la grossesse de Joséphine, d'enfin rentrer dans la lumière et voilà qu'une simple rencontre le faisait valser. Se remettre d'un choc, ce n'est pas linéaire, lui avait rappelé Charlie face à la tombe de Tonks. Certes non. Mais Farhan en avait assez de se relever pour se prendre les pieds dans le tapis et retomber aussi sec.

-C'est épuisant, murmura-t-il à Julian sans pouvoir s'en empêcher. Me remettre de Tonks c'est ... ça me bouffe toute mon énergie. Heureusement que le bébé m'a remis des batteries ...

-On peut dire qu'il arrive à point nommé, comprit Julian en penchant la tête sur le côté. Ça ne t'aide pas à y voir plus clair ? Je ne sais pas, ce bébé, même Moïra ... ça doit te donner une perspective. Une raison d'avancer, de croire en la vie.

Ses doigts pianotèrent sur le grimoire, agités par une soudaine nervosité.

-Je ne sais pas, pour moi ça avait été le plus difficile à aller chercher. Une raison d'avancer. Un objectif de vie qui m'aurait permis de ne pas rester bloquer dans un monde où c'était impossible de vivre dans Matthew.

-Non, tu as raison, ça a vraiment éclairé mon horizon, convint Farhan du bout des lèvres. Vraiment jusque là j'avais la sensation que Tonks me retenait comme un boulet et apprendre pour le bébé ça a vraiment rompu l'élastique ... ça m'a libéré, en quelque sorte.

-Alors qu'est-ce qui te préoccupe encore ? Tu as presque fait le plus dur ...

-Ça ne libère pas l'esprit. Les questionnements, les dilemmes, le ... « Et si ».

-Farhan ... là tu te tortures.

-Parce que tu vas me dire que ça ne t'a jamais traversé l'esprit ? Tu ne t'es jamais demandé si ta présence en Angleterre n'aurait rien changé pour Matthew ?

Le silence de Julian était éloquent. Depuis quelques années qu'ils se côtoyaient dans le sillage de Joséphine et Noah, Farhan avait appris à connaître le professeur. Avec un esprit habitué à carburer comme le sien, impossible que les « et si ? » ne l'aient pas paralysé lui aussi.

-Et encore toi c'est irrationnel, tu étais de l'autre côté de l'Atlantique, tu ne pouvais littéralement rien faire. Moi je pouvais. (Il déglutit pour faire passer la boule douloureuse qui était venue lui enserrer la gorge). D'accord, je ne serais jamais rentré dans l'Ordre. Charlie a raison sur ce point : il serait venu me voir avec la proposition que je l'aurais foutu aux orties, c'est une certitude. Mais la Bataille... s'il avait eu le temps de me prévenir pour la Bataille, si j'avais pu me battre auprès de Tonks ... Jo serait venue aussi, et si ...

-Il y aurait eu une orpheline de plus.

La voix, sèche et délibérative, n'émanait pas de Julian qui tourna comme Farhan le regard vers l'encadrement de porte. Simon s'y tenait, le visage empreint d'un mortel sérieux et les prunelles vertes luisaient d'une flamme qui contenait à la colère. Il leva les mains devant l'attention dont il faisait l'objet.

-Désolé te débarquer dans une conversation qui ne me concerne absolument pas – quoique ... Allez, disons à moitié ...

-Hum..., lâcha Julian en coulant un petit regard vers Farhan. Je te présente le petit frère de Matthew.

Farhan n'avait jamais vu de photo de Matthew et devait croire Julian sur parole. Et Merlin que c'était difficile tant l'écart d'âge était grand ... On lui avait raconté l'histoire. Matthew, le meilleur ami de Julian, avait été tué en compagnie de toute sa famille. Jamais, cela dit, on avait fait mention d'un survivant ... Estomaqué, Farhan contempla ce garçon, ce garçon de même pas vingt ans au long nez effronté et au regard brûlant, et l'idée morbide lui traversa l'esprit qu'il venait enfin d'avoir en face de lui quelqu'un capable de le surpasser en terme de perte, deuil et cicatrices. Et que lui, ça ne l'avait pas empêché de se battre.

-Oh ...

Un rictus retroussa les lèvres de Simon, que Julian vint effacer en cinglant sèchement :

-Simon, Farhan aussi a perdu ses parents et sa sœur pendant la première guerre. Un partout, balle au centre.

Au moins j'ai gardé Maya, voulut protester Farhan. Et il avait gagné Nolan et Fiona, ce dont il serait à jamais reconnaissant à l'univers. Mais c'était inutile de se lancer dans une surenchère aussi douloureuse qu'absurde. Simon le comprit en s'inclinant humblement devant Julian.

-Très bien monsieur l'arbitre. Je peux en venir à mon propos ?

-Je t'en prie, monsieur le génie, fais-nous grâce de ton immense savoir.

La bouche de Farhan frémit. C'était toujours un grand moment quand Julian se laisser aller au sarcasme. Sans se laisser décontenancer, Simon porta son attention sur Farhan et le léger sourire s'estompa immédiatement sur leurs lèvres.

-Ecoute, je l'avais déjà dit ... (Il s'éclaircit la gorge). Je l'avais dit à Tonks, quand on s'est croisé sur la salle-sur-demande ... je lui avais dit de reste à l'abri. Pour Teddy.

Il se frotta le poignet, visiblement heurté par la confidence. Il contempla sa main gauche comme si elle contenait des réponses qu'il cherchait depuis une éternité.

-Je ne sais pas toi, comment sont morts tes parents, comment tu l'as vécu et je ne te le demanderai pas. Mais personnellement, ils sont morts en héros, baguette à la main, luttant contre les Mangemorts et Tu-Sais-Qui ... comme Tonks. Chacun d'entre eux. Enfin bref, c'est ce qu'on a essayé de me répéter, quand je me suis enfin intéressé à eux ... que j'ai voulu comprendre ... « Ils sont morts en héros », « c'était pour que tu vives dans un monde meilleur », « ta mère n'aurait pas voulu partir d'une autre manière » ... et tu sais quoi ?

Les mots claquèrent comme un fouet dans la petite cuisine. Farhan sentait venir la chute. Il avait vu littéralement la scène, cette terrible scène où les Aurors étaient entrés pour arracher Shahrazade à ses parents. Il avait vu sa mère sortir sa baguette ... elle non plus n'aurait pas voulu partir d'une autre manière, il en était intimement persuadé. Et pourtant ...

-Ça ne m'a pas consolé, asséna Simon sans le regarder. Pas du tout. Vraiment on me répétait ça comme si ça allait atténuer le vide, compenser le fait qu'ils étaient tous partis en me laissant derrière tout seul ... mais pas du tout. Et parfois, ça m'a mis plus en colère qu'autre chose. (Il glissa un bref regard sur Julian). Je suis désolée, je maintiens que Matthew est mort plus stupidement qu'héroïquement. S'il n'avait pas joué au Gryffondor, peut-être que Spencer serait en vie ...

« Si ». Ce fameux mot qui empoisonnait l'existence et qui empêchait Farhan de totalement se libérer du deuil. Simon lui aussi était encore entravé. Julian parut accuser le coup de la déclaration et ne chercha pas à enchérir.

-C'est ce que j'ai essayé de dire à Tonks, poursuivit Simon, l'air abattu. Je lui ai dit, je lui ai demandé de rester pour Teddy. Je m'en suis félicité, quand je me suis retrouvé plongé au cœur de bataille et que des tours j'ai pu voir quel enfer c'était ... ce n'était pas sa baguette qui aurait pu basculer la balance. Et je te dis ça, alors qu'elle se battait aux côtés de Victoria. Elles étaient ensemble quand ...

Farhan remercia silencieusement Simon ne pas poursuivre et de simplement laisser la phrase mourir entre eux. Ajouter la petite Victoria, toute frêle et au regard hanté, au tableau de la mort de Tonks lui nouait les entrailles plus qu'autre chose.

-Donc elle est morte pour rien.

-Tu ne meurs jamais pour rien quand c'est pour tes convictions, réfuta immédiatement Simon. Tu ne meurs jamais pour rien quand c'est dans un tel contexte, quand tu décides de venir pour une cause tellement plus haute que toi ... non, elle n'est pas morte pour rien. Mais ce n'est pas au bout de sa baguette que se trouvait le point final de cette guerre. Encore moins au bout de la tienne ... Crois-moi. En venant, tu aurais plus de chance de mourir et de laisser ta fille orpheline que de sauver Tonks.

-Ecoute-le Farhan, l'enjoignit Julian dans un souffle. Il a raison, renverse le problème. Pense moins à Tonks et si tu avais pu la sauver ... pense à ce qui serait arriver à Moïra si tu étais mort avec elle.

Farhan n'avait jamais songé à renverser les perspectives. La mort de Tonks avait tant planté ses griffes dans son cœur qu'il n'avait vu la chose que sous une seule dimension. Tonks, son sourire et ses cheveux roses avaient vampirisé l'essentiel de sa douleur ... sa petite Moïra en revanche, celle pour laquelle il s'était tenu éloigné de la guerre, qu'il avait voulu protéger à tout prix, l'exacte raison pour laquelle il ne serait jamais entré dans l'Ordre du phénix, s'était effacé de l'équation. Présenter comme ça, la perspective vint lui broyer l'estomac avec la force d'un cognard.

C'était vraiment qu'il avait souhaité de toutes ses forces depuis trois mois ? Que Moïra finisse orpheline, sans père ou sans mère ou les deux ? Qu'elle grandisse seule avec leur souvenir pour seul réconfort ? Et quel réconfort ? Simon a raison ... ça ne console pas. C'est vide de sens.

-Ta présence n'aurait rien changer pour Tonks, ni pour l'issue de la bataille ..., acheva Simon avec une conviction débordante. En revanche, ton absence a tout changé pour ta fille. Je ne comprends même pas pourquoi je dois te convaincre, tu sais ce que c'est non ? Quand on est orphelin, on a un trou dans le cœur. Toute sa vie. Et ça peu importe si tes parents sont morts pour te protéger ...

-Non, tu n'as pas à me convaincre sur ce point, assura Farhan avec fermeté. C'est juste ... disons que j'ai le loisir de l'ignorer. Mon père adoptif a été plutôt doué pour combler le trou.

-Tu as de la chance. Moi ils l'ont laissé béant et ont allumé un contre-feu à la place.

-Et tu as beaucoup trop traîné avec Lysandra, ajouta Julian avec un long regard pour Simon.

-Hé, j'aime mes parents ! se défendit-t-il. Mais on ne va pas se mentir, sur ce dossier il n'y a eu qu'une seule personne qui a eu raison.

-Ça mon cher Simon, c'est parce qu'on ne m'a pas laissé faire quand tu avais quatre ans. Sinon crois-moi tu aurais bouffé du « bébé-Botruc ». D'ailleurs je ne vois pas ce qui m'empêche de commencer dès aujourd'hui.

-S'il te plait, non.

Farhan était trop plongé dans ses réflexions pour comprendre réellement les tenants et les aboutissants de la conversation. Il en saisit cependant assez pour se promettre d'aller à Belfast, à la fois annoncer à Nolan qu'il allait de nouveau être grand-père mais aussi le remercier d'avoir été un père si formidable pour lui.

-Parfois, on a besoin que des évidences soient dites, reprit Julian avec douceur. Cette bataille, Farhan ... ça a été un massacre. Tu aurais pu figurer parmi les victimes, toi ou Jo. Ce n'est pas le cas aujourd'hui et maintenant tu vas avoir un deuxième enfant. La vie se déroule et promet d'être belle ... ne l'empoisonne pas avec des chimères. Parce que c'est une chimère, Farhan. Tu n'aurais pas pu la sauver.

Et pour faire bonne mesure, il posa aussi une main sur l'épaule de Simon qui sursauta, surpris.

-Et toi, tu n'aurais pas pu l'empêcher de se mêler à la Bataille. Je ne l'ai jamais rencontré, cette fille mais ... ça avait l'air d'être une sacrée battante.

-Une sacrée, confirma Farhan, la gorge serrée. Têtue comme tout quand elle avait décidé quelque chose ... Si c'était la voie qu'elle s'était tracée, rien ne pouvait la détourner. Rien.

Rien. Pas Simon qui se posait en avatar de Teddy. Pas son mari qui avait tenté de la laisser en arrière. Pas Farhan s'il s'était tenu à ses côtés. C'était clair. Tonks aurait pris les coups à sa place plutôt que de les laisser l'atteindre. Elle se serait battue pour dix plutôt que de le laisser ne serait-ce que lever la baguette. Par ailleurs elle non plus ne l'avait pas prévenu de ce qui se jouait. Contrairement à Charlie elle ne pouvait pas s'en justifier ... mais Farhan voyait émerger ces arguments depuis l'au-delà.

Je ne voulais pas te mettre face à ce choix.

Tu as Moïra, tu dois rester en vie pour ta fille. La voir grandir.

Jo ne s'en remettrait jamais si tu ne revenais pas. Elle coulerait.

Tu dois être là pour mon fils, lui raconter qui j'étais.

J'étais faite pour mettre fin aux guerres ; toi tu es fait pour rebâtir le monde.

Ce n'était pas un réconfort. Pourtant à chaque phrase qui s'alignaient dans son esprit, la respiration de Farhan s'apaisait. La boule dans sa gorge reflua, fut ravalée et réduite à un point, toujours brûlant et logé dans son cœur, mais qui était moins pénible à porter.

-C'est là que ça doit être agréable de croire en Allah ou en Dieu, songea Farhan avec un certain dépit. Et de se dire simplement que c'était un plan qu'Il avait décidé et que personne ne pouvait contrer ...

-Parfois pas besoin de croire en Dieu pour se persuader que parfois ... les choses sont simplement celles qu'elles doivent être.

Comment un garçon aussi jeune pouvait dégager une telle sérénité sur ce genre de question ? s'étonna Farhan, impressionné par le calme avec lequel il déclama ça. Il poussa même le vice à sourire, amusé.

-Crois-moi, croire au destin, c'est la seule façon que j'ai eu de comprendre pourquoi je suis tombé amoureux de Victoria Bennett.

-C'est beau, tu prépares déjà tes vœux de mariage ..., se moqua gentiment Julian.

-Ah, ah. Ça se voit que tu ne nous as pas connu quand on était petit.

-Elle t'a cassé une cheville, c'est ça ? Ou elle visait le ballon ? Allons-nous enfin savoir quelle version est la bonne ?

-La mienne, Julian, toujours la mienne. Tu la vois avec Noah, non ? Arrêtez de croire que c'est un petit ange incapable du moindre méfait, c'est un leurre. Tout le monde se fait avoir mais enfin toi, Julian, t'es assez intelligent pour la percer à jour, non ?

-Bones ? appela Victoria depuis le salon. Est-ce que t'es en train de cracher sur moi, là ?

-Pas du tout !

Victoria ne fut pas dupe pour deux noises : quand Simon émergea de la cuisine, les deux mains levées en signe de stricte innocence, elle était là pour l'accueuillir, non d'un coup, mais d'un baiser qu'elle planta sans gêne sur ses lèvres après s'être dressée sur la pointe de ses pieds. L'image était si attendrissante que Farhan et Julian en sortir de la cuisine et ne prit fin qu'avec les sifflements moqueurs de Noah. Victoria rompit l'étreinte pour flanquer une tape sur son épaule, furibonde.

-Hé ! Quand tu te faisais des mamours avec Julian sur le canapé pendant que je lisais ...

-Ts ts, le livre était ton excuse que tu levais pour qu'on ne te voit pas te moquer.

-Au moins tu ne me voyais pas ! prétendit Victoria avec hauteur.

-Quelle délicatesse dont je n'aurais jamais fait preuve, lança Joséphine avec un sourire carnassier. Tu avais une perle et tu oses t'en plaindre ?

Noah plissa les yeux et désigna de l'index le lien invisible qui unissait Joséphine et Victoria.

-Je n'aime pas cette coalition.

-Dommage, je commence à l'aimer.

-Moi aussi, admit Victoria avec un sourire espiègle.

Noah secoua la tête, consterné et s'enfonça dans son fauteuil pour échapper à l'action commune de Victoria et de Joséphine, qui le considéraient toutes deux avec des yeux étincelants de malice.

-Une qui part en congé maternité, l'autre de l'autre côté de l'Europe ? résuma Noah. Mais ce n'est plus un crève-cœur, ce sont des vacances qui se dessinent !

-Oh un crève-cœur, carrément ? Ma pauvre Dancing queen !

Avec un immense éclat de rire, Victoria se jeta sur ses genoux et entoura son cou de ses bras, minaudant au visage d'un Noah dont les genoux était devenu d'un écarlate des plus flatteurs. Simon et Julian eurent beau échanger un regard blasé face à ce tableau, Farhan, lui, sourit. D'un pas léger, il se rapprocha de Joséphine, caressa sa taille d'une main et son ventre de l'autre. Toujours plat, mais empli de promesse et qui à lui seul, tirait Farhan vers le haut. Joséphine esquissa un sourire. Elle tourna la tête et parvint à atteindre sa mâchoire d'un baiser.

-Comment ça va ? demanda-t-elle dans un murmure.

-Mieux. Beaucoup mieux.

Le passage dans la cuisine venait littéralement de lui remettre la tête à l'endroit. Le nom de Tonks était toujours là, marqué au fer rouge ... mais Simon avait réussi : celui de Moïra s'était élevé à sa hauteur. Et à présent avec l'enfant à naître qui pataugeait au sein de Joséphine ... l'équation était trop déséquilibrée pour que la mort puisse l'emporter. Il fallait le temps que tout se rééquilibre en lui ... mais avec cette perspective, il ne doutait pas y parvenir.

-Tant mieux, souffla Joséphine, rassurée. Maintenant si tu veux bien m'excuser ... (Un sourire d'enfant terrible s'étira sur ses lèvres). Il faut absolument que j'en sache plus sur cette histoire de dancing queen ! 

*** 

Alooooors votre verdict? 

Heureux.ses de retrouver, ne serait-ce que brièvement, Victoria et Simon? Et Noah et Julian? 

Bon je vous laisse vite je dois aller acheter à manger pour notre repas de St-Valentin et acheter ma valise pour la Nouvelle-Zélande (et mon copain me chantonne "dépêche-toooi tu vas être en retard pour le biathlon sinoooon" Et il ose ajouter "de toute façon je ne sais pas pourquoi tu regardes, c'est Johanes qui va gagner devant un quadruplé Norvégien) mais on se retrouve vite pour la 3e partie (quand elle sera finie) et pour les bonus suivants ! 

Bonne St-Valentin pour les amoureux.ses, et n'oubliez le Simoria Day demain doublé de l'anniversaire de notre inestimable Annabethfan <3 

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