Je fais défiler la liste de chanson sur le portable d'Anya cherchant ce qui pourrait le plus exaspérer mes nouveaux voisins. Je n'ai aucune idée de ce qui me pousse à vouloir les emmerder de la sorte, je ne les connaît pas après tout.

Rock, hard rock, metal, death-metal, punk-rock... Soudain, je trouve exactement le morceau qui pourrait importuner mes voisins qui semblent un peu coincés : du Marilyn Manson.

https://youtu.be/XkKulSH2nNc

Des fois, j'ai l'impression que je dois m'enfuir,

Que je dois m'échapper de la souffrance que tu as mis dans mon cœur.

L'amour que nous partageons ne semble aller nulle part,

J'ai perdu mes lumières,

Je tourne et me retourne, je ne peux pas dormir la nuit.

Une fois, j'ai couru vers toi,

Maintenant je m'éloignerai plutôt de toi.

Cet amour infecté que tu m'as donné,

Je te donne tout ce qu'un garçon peut te donner.

Prends mes larmes et ce n'est pas tout !

Amour souillé...

Maintenant, je sais que je dois m'enfuir,

Que je dois m'échapper,

Tu ne veux plus réellement de moi.

Pour que les choses aillent bien,

Tu as besoin de quelqu'un pour te serrer fort.

Tu penses que l'amour c'est prier,

Mais je suis désolé, je ne prie pas comme ça. **

Ca ne manque pas. Déjà, j'aperçois le visage antipathique du père de Meredith par dessus le grillage. Allongée sur un transat, Anya lui fait un grand coucou.

- ETEIGNEZ MOI CA ! hurle-t-il.

Je me charge de faire "non" de la tête. Je ne suis pas dans le cas de me laisser faire. Notre ancienne voisine était une vieille dame, elle n'approuvait pas vraiment tout ce qu'on faisait, mais elle s'est toujours montrée gentille et compréhensive avec nous, attribuant nos extravagances à "la nouvelle génération". Lui, il est moins vieux qu'elle mais en plus d'être sacrément coincé, il à l'air de vouloir nous empêcher de faire ce qu'on veut dans notre propre maison. Merde, il a peur qu'on le contamine ou quoi ?

- ARRETEZ IMMEDIATEMENT ! vocifère-t-il à nouveau.

Si il croit que je vais me laisser faire et accepter de recevoir des ordres d'un homme que je ne connaît même pas et qui, de surcroit, est nouveau par ici, il se trompe totalement. Pour bien le lui faire comprendre, je lui montre mon majeur en souriant.

Rouge de colère, il quitte la clôture, vaincu.

Je me retourne et voit sur son transat Anya, pliée de rire.

- Pourquoi tu te marres toi ? demandais-je.

- J'en sais rien !

Je soupire, c'est du Anya tout craché ça.

Je sens alors qu'on m'observe. J'ai toujours eu un "don" pour sentir ce genre de chose. Je ressens comme une brûlure quand le regard de quelqu'un se pose moi. Et là quelqu'un me regarde j'en suis certaine. Je recommence à lancer des regards tout autour de moi, rien. Je lève alors les yeux. Depuis la fenêtre du premier étage de la maison voisine, Meredith nous regarde de derrière ses rideaux. Je la fixe à mon tour. Confuse de s'être fait remarquée, elle ne sait plus où se mettre. Tentant alors le tout pour le tout, je lui fait signe d'ouvrir sa fenêtre. Elle hésite, regarde autour d'elle comme si elle cherchait quelqu'un puis décide finalement de l'ouvrir. Elle passe la tête par l'ouverture et je lui crie :

- Hé Meredith ! Tu veux venir avec nous ?

Elle ouvre la bouche pour me répondre, mais elle n'en a même pas le temps. Un bras l'attrape par les cheveux et la tire en arrière. Bientôt, c'est de nouveau le visage de son père qui apparaît à la fenêtre et qui hurle :

- JE VOUS INTERDIT DE VOUS APPROCHER D'ELLE !

Il reclaque la fenêtre et tire le rideau. Bouchée-bée, je reste immobile et n'ai même pas entendu Anya se lever et venir se placer juste derrière moi.

- Qu'est ce que c'est que ce mec ? fait-elle remarquer. C'est bon, on va pas lui bouffer sa gamine.

- Je crois que mon nouveau voisin est un peu strict...

- Un peu ? Mais c'est carrément un tyran ce gars ! s'offusque Anya. Merde, t'as pas vu comment il l'a chopé par les cheveux ?

- Si, si...

- Bah alors ? T'es pas réactive, qu'est ce qu'il t'arrive ?

- Rien... Je pensais, dis-je. A mon avis, il a juste peur que si elle devient amie avec nous, elle commence à nous ressembler.

- Et alors ? C'est pas une raison ! Qu'il la laisse faire ce qu'elle veut un peu ! Elle a quand même pas trois ans !

Je hausse les épaules et part m'asseoir dans l'herbe. Les mains sur les hanches, Anya continue son plaidoyer :

- Quand même ! A la place de sa gamine, ça ferait longtemps que je lui aurait foutu mon poing dans la gueule ! Mais je pense qu'elle est trop sage et bien élevée pour ça. T'as vu comment elle est fringuée ? J'avais le même genre de trucs en maternelle quand c'était ma mère qui m'habillait... Je pense que ses parents lui laissent clairement rien faire, et ça m'amène jamais rien de bon. Mais au fait, elle est où sa mère ?

Je hausse à nouveau les épaules.

- Qu'est ce que j'en sais ? dis-je.

- Elle doit surement être dans la maison à faire un truc du style la vaisselle où le ménage si son mari se comporte avec elle comme il le fait avec sa fille... remarque-t-elle. J'aimerai pas être née dans ce genre de famille, putain...

- Elle a surement pas choisi ses parents, ajoutais-je. Si elle avait pu, elle aurait sans doute pas pris ceux-là.

Notre réflexion est interrompue par un bruit provenant de l'entrée de ma maison. Tendant le cou, j'aperçoit ma mère qui rentre du travail. Nous voyant à l'extérieur, elle sors et vient nous rejoindre.

- Salut Anya ! Contente de te voir, et joyeux anniversaire ! dit-elle.

- Merci beaucoup, répondit l'intéressée.

- J'ai croisé notre nouveau voisin, Mr. Clerk...

- Ah ? dis-je poliment.

- Si je ne me trompe pas, vous avez déjà fait connaissance, poursuit ma mère.

- Vite fait, répondis-je.

- Lilith, il m'a dit ce qui s'est passé.

Sentant l'orage venir, voir même une petite tempête, je risque :

- Et... T'en penses quoi ?

- J'en pense que vous avez très bien fait ! continue avec un sourire ma mère. Cet homme c'est typiquement le genre de personne que je ne supporte pas. Il a le droit d'être coincé, c'est son problème, mais qu'il vienne pas imposer aux autres d'être pareil !

Je regarde ma mère, les yeux écarquillés. Jamais, ô grand jamais, je n'aurai cru qu'elle allait dire ça. C'est ce que j'adore chez elle : elle est totalement imprévisible. Elle peut toujours essayer de le cacher à grand coups de comportement d'adulte, je sais bien ce qu'il en est. Elle est mon père n'ont jamais vraiment grandi, il n'ont jamais réussi à abandonner ce petit côté révolté. Je dois dire que ça leur va plutôt bien.

** Musique : "Tainted Love" de Marilyn Manson.

Je sais que tout le monde n'apprécie pas Marilyn Manson, et ce pour des raisons que je comprend très bien. Néanmoins, j'aime beaucoup certaines de ses chansons.

Bonjour, bonsoir !

J'ai réussi à publier un second chapitre pour cette semaine ! Un vrai petit exploit quand on y réfléchit (et qu'on me connaît un peu).

J'espère que ça vous aura plu,

A très bientôt,

Raven.