Mission 29 : vis ma vie de...
Une semaine se passe, et tout le monde est embarqué dans le train de la quotidienneté. Mais ce train n'a pas la même saveur que la vie hors des murs de Corporate. C'est un train tout confort, avec animations et café à volonté. Cathy prend du plaisir dans son travail, même si les tâches se ressemblent, il se passe toujours quelque chose d'inattendu.
Mais à sa déception, aucune de ces choses n'a fait apparaitre Al. Se retenant de le harceler par message, car il a surement une vie après le travail, la jeune femme prend sur elle et s'occupe dès qu'elle y pense.
Le vendredi, Cathy reçoit un message, avec pièce jointe. Habituée, elle prend une profonde inspiration avant d'ouvrir la photo. Cette fois, c'est Mister Meh, tout seul, avec un nouveau costard bleu marine, et des mini-lunettes sur la truffe. Elle ne peut s'empêcher de lâcher un "Moooooh" en le voyant, même s'il manque quelqu'un sur la photo à son goût...
Cathy est très loin de se douter qu'un esprit espiègle joue avec sa frustration.
Il en sera ainsi durant les 2 semaines qui suivent. Quelques échanges par messages avec Al, très bateau et des photos de Meh sans lui dessus, nourrissant insidieusement une attente inconsciente et grandissante de le revoir.
Cathy se demande s'il ne travaille pas aussi le Week-end tant il a l'air occupé. Elle apprendra par Luan, qui a toujours les oreilles partout, que durant le mois de Mai, beaucoup d'employés profitent des ponts pour poser des congés : il y a beaucoup de remplacement à faire, sans parler des inventaires.
Ceci explique cela.
Heureusement, durant ce temps, Cathy a profité de ses collègues : Luan l'a invité au concert d'un groupe local d'Epic Métal un samedi, et en semaine l'équipe profite des fins de journées pour boire des bières au Orter et papoter. Tout cela l'aide à ne pas trop penser à Al.
Plusieurs fois en fin de journée elle croise Carl au parc. C'est toujours agréable de discuter avec lui. Au hasard d'une discussion, ce dernier à l'air de bien s'y connaitre en art contemporain et en photo. Un jour, afin qu'il puisse se rendre à un shooting, elle lui propose de s'occuper de son chien un dimanche et tout se passe bien : Cerbère est adorable. En remerciement il insiste pour qu'elle accepte le fameux café : Cathy finit par dire oui, reste à savoir quand.
Mika se sent de mieux en mieux en présence de Cathy. Même si des pincements au cœur, quand elle rit, lui rappellent telle des aiguilles à quel point il l'apprécie. Il la trouve toujours aussi cool et jolie. Le souvenir de leur baiser d'adieu le tourmente parfois et l'élastique à son poignet lui permet de ne pas transformer cette nostalgie en rancœur.
Les nuits, Cathy se glisse dans son lit avec moins d'appréhension qu'avant. Si Ethan revient, il lui suffit de penser à Al, se dit-elle. Même si cela n'empêche pas son fantôme d'apparaitre comme une ombre dans sa vie, à chaque petit moment d'angoisse, comme apercevoir sa silhouette dans le tramway qu'elle vient de rater, ou encore le voir furtivement dans un endroit où il lui reste des souvenirs avec lui.
Mais le pressentiment qu'il n'attend que le bon moment pour revenir grandit, comme le sourire de ce cauchemar qui s'élargit de plus en plus à chaque fois qu'elle le revoit.
₍⑅ᐢ..ᐢ₎
Vincent entre sans sommation dans la suite luxueuse de Mister Meh.
— Daniel ?!
Lance-t-il dans la grande pièce vide donnant sur la ville. L'ange lui apparait alors, sortant d'une pièce voisine. Son tablier rose est tâché par la teinture noire qu'il était en train de préparer tranquillement, avant qu'on ne le fasse sursauter.
— Un problème ? Répond l'intéressé dans un sourire.
— C'est quoi ce mail ?!
Vincent n'est pas furieux, mais plutôt très anxieux.
— Tu n'aimes pas mon idée ? Daniel affiche une petite moue triste.
— J'aurais aimé que tu m'en parles avant...
Daniel hausse les épaules pour exprimer un "oups" qui n'est clairement pas innocent. Son collègue se pince l'arête du nez.
— Imagine... commence Daniel en s'approchant de lui doucement, le bazar que ça va être. Je pensais que cette petite surprise t'émoustillerait.
— Je... Vincent réalise soudain que son ami a raison, j'aurais aimé participer à cette idée. Là, j'ai peu de temps pour organiser un service efficace dédié à ton nouvel évènement.
— Justement, je me suis dit que tout préparer à la hâte te ferait plaisir.
Vincent inspire profondément, puis sourit en coin : décidément, tout le monde le connaît un peu trop bien ici. Puis la réalité revient frapper à la porte de ses pensées :
— J'aurai mes enfants avec moi : avec la grève prévue l'école sera fermée, et je ne trouve pas de nounou.
Daniel fait quelques pas vers lui avec un sourire rassurant :
— Prends les avec toi, je te trouverai la nounou parfaite dans le cadre de l'événement.
— Si tu penses à Al c'est non : il a beaucoup de choses à faire.
Daniel se met à rire, ce n'est pas son intention, même si l'idée n'est pas idiote en soit car les enfants l'adorent et Al n'a aucun effet d'attraction sur eux. Vincent laisse un soupir s'échapper de ses lèvres.
— Bien, je te fais confiance, il passe une main dans ses cheveux, dis-moi juste : comment tu as eu cette idée ?
Attendant l'explication Vincent croise les bras, et voit soudain le regard de son ami exprimer une profonde espièglerie.
₍⑅ᐢ..ᐢ₎
Comme tous les employés, les archivistes reçoivent un email "Corporate - Général" envoyé par le Hapinness Manager. Mika est le premier à cliquer dessus.
Au fur et à mesure de sa lecture, ses sourcils expriment diverses émotions : d'abord méfiance, puis stupéfaction, et enfin un énorme doute. Ce genre d'événement est une première dans l'entreprise, et aucun manager n'a été mis au courant au préalable.
Puis, Luan le lit à voix haute pour en faire profiter Cathy qui est dans un carton, littéralement.
"Chers employés ;
C'est avec un immense plaisir que je vous annonce un nouvel événement d'ampleur au sein de Corporate ! Demain, vous aurez l'incroyable opportunité de découvrir le métier de quelqu'un d'autre pendant une journée entière !
Les affectations ont été tirées au sort par ma main innocente. Demain matin vous recevrez vos instructions pour rejoindre votre nouveau poste de la journée.
La plupart des managers et responsables de service resteront à leur poste afin de guider les recrues d'un jour.
À bientôt ; Votre HM préféré."
Luan lève lentement les yeux vers Mika qui en fait de même, se partageant ainsi leurs craintes respectives. Cathy se redresse dans son carton, des confettis plein la tête, avec un large sourire : découvrir de nouvelles choses semble lui faire moins peur qu'à ses collègues.
₍⑅ᐢ..ᐢ₎
— C'est une putain de blague ?! Hurle Mika en se levant de son bureau.
Karim croise les bras et le toise de haut : il a l'air aussi ravi que lui de la tournure des événements.
— Tirage au sort mon cul... dit Mika en serrant les dents.
Le manager des archives perd son calme, il a beau toucher son poignet rien à faire : cette fois trop de colère bouillonne en lui.
— Tu vas remettre en question la "main innocente" du Hapinness Manager espèce de sac à peignoir obèse ? se moque son rival.
Une gomme vole à toute vitesse en direction de Karim qui l'évite, Mika surenchérit :
— Ferme là espèce de bouffeur de pelle !
— Avaleur de pare-brise ! il lui renvoi la gomme.
Le ton monte entre les deux hommes :
— Catachrèses du dimanche !
— J'ai défoncé ta petite Cathy sur le ring !
Il n'en faut pas plus pour que Mika bondisse sur son bureau, et se jette sur son ennemi tel un fauve enragé.
₍⑅ᐢ..ᐢ₎
Une tension est palpable dans le bureau de Vincent. Face à lui Martine ne cesse de soupirer et lever les yeux au ciel : la voilà dans l'espace de son pire ennemi.
La comptabilité n'aime pas le service SAV interne qui demande toujours plus de moyens pour réparer les dégâts des autres, et toujours au dernier moment, ce qui fausse les comptes à quelques jours des fins de mois : un enfer pour l'ordre pur et parfait qu'essaient d'instaurer les comptables.
A côté se tient Luan, l'air d'attendre qu'il se passe quelque chose : les bras croisés sur sa poitrine, elle ne regarde rien de particulier. Depuis qu'elle a effleuré les doigts de Vincent, et vu son sourire de père aimant, la stagiaire a beaucoup de mal à le regarder en face.
Lui, par contre, ne se prive pas de fixer les deux femmes avec son regard froid d'acier.
-Bien. Je vais vous expliquer en quoi consiste votre travail d'aujourd'hui, il pointe du doigt une pile de feuilles haute comme son bras. Ceci est la liste des plaintes de vendredi. Vous allez me trier ça par catégorie.
Martine souffle, Luan hoche la tête. Soudain, déboulant d'une pièce attenante, les jumeaux Lelouarn débarquent telle une tornade qui fait basculer la pile : les feuilles s'éparpillent.
Vincent est partagé entre agacement, et excitation en voyant les fiches s'envoler dans toute la pièce. Luan n'en rate pas une miette, quand il porte la main à sa cravate pour la desserrer un peu, elle le trouve terriblement sexy.
— Tu es venu avec tes gosses ?! Se plaint Martine, ça va être infernal !
— Je devais avoir une nounou ce matin mais...
Il s'arrête quand il voit Luan tendre les mains et choper les enfants sous ses bras pendant qu'ils couraient autour du bureau.
— C'est bon, je vais le faire. Je m'y connais en tornade enfantine, fit Luan en souriant aux gamins qui ont cessé de hurler.
Elle les repose au sol, se met à genoux à leur hauteur et lève l'index :
— Votre papa il a besoin de calme, ok ? Si vous me suivez, et êtes sage, il devra vous donner une glace ce soir.
— Une glace vanille ? Demande Julien, Luan hoche la tête.
— Moi j'aime pas les glaces ! Ça fait froid aux dents ! Boude Amélia.
— Dans mon bureau j'ai un distributeur automatique aléatoire de Cookie.
Les enfants se taisent et leurs yeux pétillent. Vincent regarde Luan comme s'il la découvrait pour la première fois : elle paraît bien plus mature que Martine à ses côtés, qui pourtant doit avoir 10 ans de plus.
— Monsieur, ça vous embête si je les emmène s'amuser ailleurs ? Comme ça vous serez au calme pour trier avec Martine.
C'est à contre-cœur que Luan fait cette proposition, elle aimerait rester et le voir ranger, mais s'occuper des enfants lui paraît naturellement plus important que son fantasme ridicule.
Vincent met du temps à répondre, réalisant que Mlle Peng est certes jeune, mais c'est une femme capable de s'occuper d'enfants. Une idée qui le trouble quelque peu.
D'un hochement de tête il lui donne carte blanche.
₍⑅ᐢ..ᐢ₎
Karim et Mika se crêpent allègrement le chignon en s'arrosant mutuellement d'insultes plus improbables les unes que les autres. S'égosillant à hurler l'un plus fort que l'autre, jusqu'à ce qu'ils cessent subitement tous les deux quand une main se pose sur l'une de leurs épaules.
Daniel les sépare doucement avec le sourire.
— Eh bien, c'est comme ça qu'on travaille aux archives ? Demande Daniel avec un air taquin.
Mika a perdu sa langue et Karim n'ose rien dire, de peur de finir dans le coffre à jouets. Le manager secoue la tête et soupire :
— J'ai créé cet événement pour souder notre grande famille, se découvrir les uns et les autres, son regard plonge dans celui de Mika qui se sent soudain fébrile, vous n'aimeriez pas gâcher un tel moment avec vos chamailleries non ?
Ils déglutissent à l'unisson, et Daniel retire sa main des épaules.
— Bien. En tout cas Karim et moi sommes ici pour découvrir ce que font nos incroyables archivistes, Daniel affiche un sourire effrayant, n'est-ce pas Karim ?
Son regard glisse sur l'autre homme qui hoche la tête frénétiquement, l'ange le terrifie. Mika quant à lui ne réalise pas qu'il va passer une journée entière avec Daniel. Son cœur hésite entre affolement et palpitations, pour au final se dire que c'est un peu la même chose.
₍⑅ᐢ..ᐢ₎
Cathy attend depuis un bon moment maintenant dans la cafétéria. L'email lui indiquait d'y être à partir de 9h30 mais il n'y a personne. Ses cent pas la portent jusqu'à l'immense baie vitrée. En contrebas, la ville s'éveille mollement dans un ballet de voitures prises dans des bouchons, de rares piétons qui vont chercher leur pain, ou qui promènent leur chien.
Machinalement, elle prend son téléphone pour s'occuper en attendant qu'on vienne la chercher. Relisant pour la dixième fois les échanges avec Al, elle ne peut que s'avouer qu'il lui manque en sentant un petit pincement au cœur. Son pouce scroll inlassablement jusqu'à la dernière photo où il apparaît. Ça remonte à trois semaines.
Elle regarde la photo et se perd dans ses pensées quand soudain la peau de sa nuque frissonne.
Il est là.
Juste derrière elle, et son parfum l'enivre déjà. La jeune femme se sent rougir en comprenant qu'il regarde son écran par-dessus son épaule.
— Tu l'as aimé ? dit-il en parlant de la photo.
Sa voix glisse dans son oreille comme une caresse et emplit sa poitrine d'une chaleur douce. Son cerveau à l'impression de goûter à un merveilleux moelleux au chocolat pour neurones. Cela fait trop longtemps qu'elle ne l'a pas entendu.
Cathy hoche la tête et n'ose pas se retourner, une voix intérieure lui hurle de le faire, de se jeter à son cou, de le serrer fort contre elle, d'emplir ses poumons de son odeur.
Sa main serre son portable au point de faire blanchir ses phalanges.
— Les autres aussi ? il penche la tête sur le côté.
Al est inquiet : c'était l'idée de Daniel de ne pas envoyer d'image de lui durant tout ce temps, et lui n'a pas saisit l'intérêt. Elle ne dit rien : il a peur de l'avoir déçue.
Cathy n'ose pas lui dire qu'il manquait quelque chose sur les photos de ces trois dernières semaines... Qu'il lui a manqué tout court, énormément, réalise t-elle à l'instant.
Elle prend une grande inspiration et se retourne pour lui afficher un grand sourire malgré ses oreilles pivoines. L'homme porte son habituelle tenue de travail, avec ses super-lunettes.
— Mister Meh est vraiment adorable ! Je comprends qu'il soit le visage de l'entreprise, elle prend un air intrigué, c'est le PDG ?
— En quelque sorte... On peut dire ça comme ça : c'est une doublure.
Cathy se met à rire : la réponse est à la fois suffisante, mais peu convaincante.
— Tu... Tu vas bien ? ça fait longtemps, demande-t-elle.
— Oui, derrière ses lunettes ses yeux luisent, je suis content de te voir.
Cathy sent que son cerveau menace d'appuyer sur le bouton rouge et enchaine avec une voix trahissant son souffle court :
— Je suis contente de te voir moi aussi, les sms c'est bien mais, se voir c'est plus sympa, elle se racle la gorge. J'attends qu'on vienne me chercher pour le "Vis ma vie". J'imagine que si je suis à la cantine c'est pour tester le travail des "Carottes Kamikaze".
Al sourit.
— Non : tu viens avec moi.
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Vous en pensez quoi de cet événement "Vis ma vie" ? Vous vous attendez à quoi ? ^^
Daniel est-il un bon entremetteur ? Pourquoi s'est-il rendu aux archives ?
Cathy va t-elle finir par péter un câble un jour ? (réponse dans xx chapitre :p)
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