20 - hanté
Zayn tirait une latte de nicotine sur un nouveau cylindre qu'il venait de mettre au bout de sa bouche, bien coincée entre ses lèvres. Il avait les bras posés sur le rebord de sa fenêtre grande ouverte malgré le froid qu'il faisait dehors et la fine pluie qui commençait à s'abattre. Il s'en foutait totalement alors que sa maman pleurait, quelques pièces à côté. Il inspira un grand coup, libérant ses poumons de la surcharge qu'il contenait dedans. Il avait mal à la gorge et se demandait quand il éternuerait ou tousserait enfin. Il avait envie d'être malade mais il était tellement habitué à être dehors que plus rien ne l'atteignait. Il n'était presque jamais tombé malade de toute sa vie.
Zayn leva les yeux vers le ciel, parlant mentalement avec ses sœurs et son père. Il leur envoyait des messages d'amour comme de haine, de regrets comme de remords, plein de douceur comme d'amertume. Il les détestait alors que son cœur les aimait toujours. Il les détestait d'être partit sans lui mais il les aimait parce qu'ils avaient fait partit pendant un bon bout de temps dans sa vie et que la tragédie qu'ils avaient tous vécus les avait d'abord touché eux avant de s'abattre sur lui et sa maman.
Zayn ne savait pas vraiment qui était les plus à plaindre entre ceux qui restaient et ceux qui partaient. Il ne savait pas et il se creusait les méninges pour savoir. Ceux qui partaient avaient eu mal pendant que ceux qui restaient devaient avoir mal après l'incident. Il n'en avait pas la moindre idée ; avoir mal sur le coup ou tout le long après ? Il se demandait ce qu'aurait fait sa maman si lui aussi était mort. Il n'avait même pas envie de savoir malgré qu'il se pose la question ; il préférait oublier. Il aurait aimé tout oublier et devenir amnésique mais ce n'était pas ce qui était arrivé.
Zayn se souvenait du choc de sa tête contre le plafond du véhicule alors qu'il se retournait, se retrouvant sur le toit pour faire ensuite plusieurs tonneaux et prendre feu. Il avait l'impression que la scène devait sortir d'un film d'action, pourtant, c'était bien la réalité et il avait failli y écoper. Il avait entendu ses trois sœurs criées en même temps ainsi qu'un étouffement de la part de son père et suite au choc, ces oreilles s'étaient bouchées et il n'entendait presque plus rien. Il avait été bloqué par la ceinture. Il avait jeté un regard sur sa gauche et avait vu son père, du sang coulant de son crâne et les yeux grands ouverts ; c'était déjà finit pour lui ; il était mort sur le coup.
Mais ce n'était pas encore la plus horrible chose que le métis avait eu le droit de voir ce jour-là. C'était l'arrière de la voiture qui avait prit feu en première avant que les flammes ne se propagent jusqu'à l'avant, décimant tout sur son passage. Il avait vu ses sœurs se débattre contre les flammes et leurs membres bloquées, du sang coulait de leur boîte crânienne alors que l'une après l'autre, jusqu'à la dernière, elles s'éteignirent sous les yeux du jeune homme, criant et gémissant. Il n'avait rien pu faire et fut sortit de la voiture avant que les flammes ne le brûlent tout entier. Il avait extirpé juste à temps et avait vu tous les membres de sa famille –sauf sa maman- mourir les uns après les autres sous ses yeux.
Zayn était hanté par ses démons et il revoyait souvent la scène. Il avait déjà mal bien avant l'accident de voiture, sur une des bretelles de la nationale. Ils étaient censés rentrer à la maison, où madame Malik préparait le repas et les attendait patiemment. Elle avait même dressé la table et il ne lui restait plus qu'une assiette à déposer, qu'elle avait gardée dans les mains, quand on l'appela pour lui annoncer la nouvelle. La vaisselle lui échappa des mains et se brisa sur le sol, comme si c'était son cœur.
Malgré que l'anglo-pakistanais avait survécu et que sa maman l'avait prit dans ses bras en pleurant comme jamais elle n'avait pleuré de toute sa vie ; il avait encore les images des flammes brûlant ces deux sœurs devant les yeux. Sa maman ne s'en était jamais remise alors qu'elle aurait du continuer pour lui, du moins c'était ce que pensait le jeune homme. Mais elle était encore extrêmement fragile et même s'il était adulte, il se voyait mal la quitter alors qu'elle avait peur qu'il lui arrive quelque chose à lui aussi –malgré qu'il ait survécu.
Ce que Zayn ne savait pas, c'était que sa maman avait peur pour lui constamment. Elle ne le lui disait pas mais elle avait tout le temps peur parce que même s'il avait survécu une fois –et c'était un miracle- cela n'arriverait pas une nouvelle fois. Elle le sentait au plus profond d'elle-même et si elle en avait la force, elle le protégerait du monde entier mais elle était incapable, surtout dans l'état dans lequel elle était. Elle n'avait plus qu'un enfant sur quatre et cela la détruisait de l'intérieur.
Zayn passa sa main dans ses cheveux alors que sa clope était presque entièrement consumée. Il revoyait les flammes en train de jaillir partout, crépité dans ses oreilles et engloutissant ses trois sœurs en même temps. Il était à la place du passager, celle qu'on surnommait du mort et pourtant, des cinq personnes dans la voiture, il était le seul qui en était sortit vivant ; un miracle. Il poussa un long soupire et balança le cylindre d'un geste de colère, par la fenêtre en pestant mentalement contre lui-même. Il s'était encore une fois perdu dans ses pensées et avait oublié sa clope.
Zayn leva les yeux vers le ciel, jetant un dernier coup d'œil pour la journée alors que son cœur se comprimait dans sa poitrine. Il n'avait plus mal, il ne ressentait plus rien. C'était presque s'il ne ressentait plus aucune douleur physique. Il était totalement vide, comme son cœur qui essayait désespérément de faire recouvrir à sa maman le sourire alors qu'elle était bien enfoncée très loin dans la dépression et qu'elle était vraiment loin de s'en sortir. Il entendit le vibreur de son cellulaire, posé sur sa table de nuit. Il se retourna et alla jusqu'à l'objet, le prenant dans ses mains et découvrant un message d'un numéro inconnu de son répertoire.
Inconnu : Salut, c'est Liam.
« Parfois il vaudrait mieux se taire plutôt que de parler à tord ou à travers parce que chaque mot ont une répercussion. »
***
Musique ; Love Me - The 1975
NDA ; Bonjour ! Comment allez-vous ?
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro