Chapitre 6 - 1/2
« Résiste à mes balles de Cupidon, je te jetterai un sort. Bang bang, en plein cœur. »
paroles de Strix Addams
Le temps passait mais il aurait été une erreur de croire qu'il détruisait ou réparait à son passage. Le temps ne serait jamais qu'un outil, une mesure. Et une excuse toute trouvée pour justifier ses propres fautes. Strix était responsable, et elle n'accuserait jamais le temps pour l'orage qu'elle s'apprêtait à récolter. Après tout, semer le vent offrait toujours la certitude d'une tempête cultivée.
Elle avait des plans. Plan A, plan B, tout jusqu'au plan Z s'il le fallait. Et cela commençait ici, au Convent.
Autour de la table, affluée à lire des rapports, la femme aux vêtements sombres était une recrue avec un certain statut. Oh, bien sûr, elle n'avait pas le niveau d'un Siège. Pas encore. Mais elle dépassait déjà de loin ses petits camarades guerriers du 4ème Siège. Raison pour laquelle elle se trouvait ici, dans une salle de réunion, et non en entrainement avec ses collègues. Avoir été acceptée dans le Convent était déjà en soit assez exceptionnel, puisque les places y étaient limitées, en particulier dans certaines branches. Alors intégrer la section du 4ème Siège, les exécuteurs de la Justice des sorciers, non pas en tant que soldat mais en tant que Sorcelière...
Hélios Kirke, 4ème Siège, abordait des sujets plus ou moins intéressant pour Strix. Des conflits entre les sorcières et d'autres espèces, des nouveau-nés sorciers à exécuter et des condamnés dont il fallait se débarrasser. Au Conseil il y avait une chose que l'on appréciait : que les prisons soient presque vides.
— Aussi, le renseignement du 5ème Siège nous a fait part d'un retour inquiétant.
Une photo apparue. Celle d'une sorcière. Strix pensa y voir un instant Hella avant de voir plus précisément son regard. Hella était bien plus malicieuse. Ici, la femme possédait des cheveux blonds coupés en carré.
Strix eu un regard pour son portable. Hella ne lui avait pas encore envoyé de message aujourd'hui, et cela l'ennuyait beaucoup. Certes, elle ne répondait jamais à son amie, se contentant de lire égoïstement ces messages, rassurée de voir qu'Hella s'inquiétait encore pour elle. Elle aurait tant voulu pouvoir l'appeler, mais elle ne le pouvait pas. Pas maintenant.
— Agnès de Chantraine serait-elle... ? commença l'un des quatre Sorceliers.
— Oui, il semble qu'elle ait quitté ses forêts des Alpes pour venir ici. Pour le moment nous n'avons rien à faire mais si les espions du 5ème Siège nous informent de quoique ce soit, préparons-nous.
Il existait une liste tenue à jour par les Sièges. Une liste assez peu connue qui répertoriait les plus dangereux sorciers du monde. Il ne s'agissait pas de la liste des sorciers criminels recherchés, mais bien d'individus surpuissants ne faisant pas partie des Sièges. Le premier de la liste était un sorcier bien connu. Jalil Katz, l'ancien 1er Siège. Et Agnès de Chantraine se situait parmi les dix premiers noms de la liste contenant une cinquante identités, bien que les premiers n'étaient pas forcément les plus dangereux. En temps normal, le Conseil gardait un regard attentif sur les moindre faits et gestes de ces individus. Mais apparemment cela ne dérangeait personne d'avoir perdu la trace de Jalil Katz. Maintenant qu'une deuxième personne appartenant à la liste commençait à bouger, il y avait de quoi froncer les sourcils.
Hélios leva la réunion, mais attira l'attention de Strix d'un signe de la main.
Une fois seuls, il présenta un dossier. Strix y observa les quelques clichés, comprenant alors que l'histoire allait bien plus loin qu'Agnès. D'autres de ces sorciers sortaient de l'ombre.
Hélios était un charmeur, ne se cachant pas d'apprécier son don naturel pour faire tomber le cœur d'innocentes personnes. Mais bien au-delà de ça, il était surtout très sérieux dans sa fonction. En tant que 4ème Siège, il était le bras armée de la Justice Sorcelière. Une Justice exécutrice dans laquelle Strix avait obtenu le prestigieux rôle de Sorcelière. Les Sorceliers étaient le rang le plus élevé après celui du Siège. Ils étaient sept pour chaque branche du Convent. Ils représentaient la force militaire de la sorcellerie, l'arme de la Justice.
En s'intéressant au dossier, elle comprit qu'on évaluait sa loyauté en tant que sorcière au sein du Convent et de ses Sièges. Hélios, bien loin d'être stupide, l'observait. Elle referma le dossier.
— Strix, que peux-tu me dire à ce sujet ?
— Absolument rien.
— Il s'agit de ta mère. Elle aussi semble s'adonner à des activités malgré les bannissements pesant sur elle.
Le dossier contenait un compte-rendu entier sur sa mère. Le problème ne s'arrêtait pas simplement à Agnès ou Jalil, mais bien à la liste en elle-même.
— Je n'ai pas revu ma mère depuis son bannissement.
— Elle devait cessé la sorcellerie et demeurer recluse du monde.
Sa mère n'était pas la définition de la bonne sorcière, bien au contraire. Et Strix resterait la première à l'affirmer.
— Non, vous n'avez pas compris, se vexa faussement Strix. Vous l'avez banni lorsque j'avais sept ans. Et depuis, je ne l'ai jamais revu. Donc, je ne peux pas vous renseigner. Maintenant, si les sorciers de la Liste commencent à faire des choses qu'ils ne devraient pas, vous devriez vous intéresser aux perturbations spirituelles, magiques, voire cosmiques. Les plus puissants les ressentent souvent mieux que les autres sorciers, les incitant à réaliser des choses sans réfléchir. Un peu comme des animaux paniqués qui fuiraient avant même que le tsunami n'arrive.
Elle quitta la salle de réunion, rendant son dossier à Hélios. Après avoir traversé divers couloirs et s'être assurée que personne ne la surveillait, Strix s'approcha des jardins du Convent. De nombreuses sorcières s'y aventuraient pour entretenir les jardins de plantes essentielles à l'usage de potions et autres rituels. On y contrôlait la météo, on y manipulait la terre mais jamais personne ne forçait la plante à pousser. Une plante naissant seule, sans magie introduite par la sorcellerie, serait bien plus efficace puisque pure.
Strix alla vers les petits bois, s'asseyant près d'un arbre qui la cacherait de tous. Sa main au sol, elle obligea une racine à sortir de terre pour venir s'enrouler autour d'elle, de son poignet. La partie la plus difficile se produisit lorsqu'elle sortit sa dague, se coupant le poignet, et par la même occasion une veine.
Tranchée, la veine attendit dans la douleur que la racine, fine, s'unisse à elle.
Aussitôt, le contact fut établie. Strix ferma les yeux, laissant son corps se reposer tandis que son esprit se retrouvait dans ces grottes obscures qui abritaient la Nécromancienne.
La sorcière s'occupait de rituels, Strix venant d'apparaitre en pleine élaboration de l'un d'entre eux. Un vautour vint l'accueillir de son cri peu agréable, attirant sa mère. Elle sortit de sa transe.
— Oh, voyez qui daigne rendre visite à sa maman.
— Le Convent t'a vu sortir, Katrina. Je t'avais dit de rester discrète ! Si Hélios commence à se méfier de moi...
— Mais non voyons, la coupa la nécromancienne. Tout le monde sait que tu me détestes. Tout le monde déteste les nécromanciens après tout, alors même que vous êtes tous là à ramper à nos pieds pour nous réclamer de l'aide.
Jouer la victime était une habitude de Katrina, et de nombreux nécromanciens qui accusaient leur bannissement et leur ermitage comme la conséquence d'une discrimination inexistante parmi les sorciers. Ils oubliaient facilement les raisons principales de leurs condamnations, à savoir les débuts d'invasion zombies concernant Katrina. Entre autre. Elle avait fait bien pire que créer une armée de zombies prête à venir dévorer le Convent.
Tous les nécromanciens n'étaient pas bannis, après tout.
— Est-ce que ça avance ?
— Il me faudra encore un peu de temps. Mais je peux t'assurer que tout se finira dans les temps. Et de ton côté ?
— Bientôt. Il ne me reste plus qu'un baiser.
Une partie qu'elle n'apprécierait pas.
Elle laissa sa mère travailler, retournant dans son corps pour se réveiller. Elle arracha la racine, sa blessure guérissant par un simple coup de baguette magique. Le plan avançait. Il était temps de le mettre en marche.
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