Sylvain était étendu lâchement sur son canapé, fixant la salle de bain d'un œil incertain, le trophée imprégné de champagne trônant sur la petite tablette au dessus de sa toilette. Il savait qu'il devrait la déposer ailleurs, qu'elle devrait être à la vue de tous, au soleil à quelque part, mais pour le moment, il le préférait enfermé dans ce petit endroit noir où le soleil peinait à rentrer. Il grogna doucement, serrant de ma mâchoire et du canapé à la fois.

Sa victoire, il ne la ressentait pas comme une vraie victoire, mais plutôt comme un titre qu'il devra traîner et assumer de porter le restant son existence. Le champion du GP. Celui qui avait détrôné le favoris, le pôle man, Depielo.

Sylvain fixait nerveusement sa coupe, le truc qu'il rebutait de fixer trop longtemps, mais il n'arrivait pas à tourner les yeux. Ce truc avait certainement de l'importance, une mémoire qu'il n'oublierait jamais, mais comment pouvait-il pleinement assumer cette course, cette course acharnée qu'il avait engendré avec un mec fou constamment dans son rétro? Il ne se sentait pas apte à cette course, ne se sentait pas digne tout court.

Le loup-garou grogna doucement, fermant les yeux. Il l'avait bien vu, peut avant la course, Depielo s'était enfilé un paquet de cachets, suivit d'une bouteille d'eau, aux côtés de Prime. Les deux démons ne s'étaient quand même pas drogué, si? Il avait repensé à cette séquence depuis maintenant deux semaines, depuis la fin de ce GP. Levy n'avait rien dit, enfin, il en avait parlé à Pierre, mais son acolyte n'avait fait qu'hausser les épaules en soupirant. [S'ils veulent se droguer, que veux-tu que ça nous fasses? Ils gaspillent leur chance, rien de plus.] Mais à bien y réfléchir, il avait déjà vu cette boite de cachets à quelque part, elle ne lui était pas si inconnue. Il devait juste retrouver où cette boîte bleu et blanche avait croisée son regard. Sylvain tourna une fois de plus ses yeux sur sa coupe bien trop lourd pour ses petits bras, pourtant musclées, qui avait dû la soulever là où elle était. Il avait beau être un loup, elle portait bien son poids.

Il se leva nonchalamment du canapé et ferma vigoureusement la porte de sa toilette dans un bruit retentissant. Il n'en avait rien à cirer, il ne voulait pas voir ce truc une fois de plus. Il ne voulait pas voir le trophée qu'il avait gagné contre un mec dopé. L'énervé qui l'avait collé aux fesses durant tout le GP, qui l'avait talonné et stressé en disparaissant constamment dans son champ mort. Le loup-garou maudissait la personne qui avait tapée son rétroviseur, il n'aurait peut-être pas autant stressé et chier physiquement ainsi!  Il avait beau être un alpha, Sylvain restait quelqu'un avec des émotions et voir Depielo zigzaguer à sa droite pour disparaître à sa gauche, il s'était désintégré mentalement.

Jamais il ne s'était sentit ainsi prit au piège.

Il enfila un jogging noir et un sweat bleu, avait récupéré ses chaussures et sortit à l'extérieur de son complexe afin de prendre l'air. Dehors, la lune commençait doucement à apparaître à l'horizon, laissant le soleil se reposer. L'aurore dorée disparaissait derrière les montagnes à l'horizon, laissant la nuit s'imprégner sur la petite ville. Il enfonça des écouteurs dans ses oreilles et décida de faire quelques bornes à la course, chose qu'il ne faisait jamais, mais mentalement, il avait besoin d'un détachement. Il avait besoin de penser à autre chose que cette fichu course de monoplaces. Surtout quand y repensant bien, Squeezie n'avait semblé pas plus surprit que cela à son tour, quand il lui en avait glissé un mot dans les loges privées, après. L'autre loup avait rigolé, tapant sur ses épaules comme seul réponse.

Levy avait peut-être préservé ses pneus, mais le démon s'était donné à fond sur le circuit. Les deux hommes s'entendaient bien, Sylvain ne pouvoir dire le contraire, P-O n'avait jamais eu l'intention de l'attaquer de son côté faible. Sauf que le Loup se sentait mal. Très mal. Étienne avaient toujours été proche dans cette course, toujours dans leur angle de rétroviseurs, gardant sa troisième position au chaud. Le loup-garou n'avait pas résisté à demander au moustachu ce qu'il avait vu durant la course. Sauf que sa réponse était là même que ceux auquel il avait discrètement demandé: qu'ils avaient fait une course démesurée qui avait su tenir le publique en haleine. Même Julien l'avait remercié.

Mais remercié de quoi?

Sylvain s'arrêta sur un petit sentier au abords d'un parc, reprenant doucement son souffle, les bras sur les hanches, la tête baissée. Pourquoi tout le monde le remerciait pour cette course, parcourant les deux pilotes de lauriers pour leur prestation? Le démon avait sourit, alors que lui, il s'était contenté de forcer un petit sourire mal à l'aise. Non, il n'avait rien à gagner de cette course. Depielo s'était drogué, ce qui lui avait peut-être fait reprendre sa première place, lorsqu'il avait inséré sa f4 dans ce ridicule trou de souris. Depielo lui avait laissé un chemin et Sylvain se demandait si ce n'était pas à cause des cachets bizarres qu'il avait prit. Prime avait d'ailleurs prit le bac en fin de course! Les preuves étaient là! Mais en y repensant plus profondément, il avait vu les deux démons prendre ces cachets à différents moments durant les cours et les entraînements, Prime avait même donné l'un de ceux-ci à P-O, avant leur quatrième cours théorique. Sylvain devait l'avouer, on voyait bien les faits et gestes des autres camarades du fond de la classe.

En reprenant le chemin en direction de son appartement, le brunet ne pu se demander pourquoi toute cette histoire le tourmentait. Après tout, ce n'était pas sa faute si le grand démon avait voulu se doper, se droguer avant le tournois! Ce n'était pas lui qui allait en avoir les conséquences. Mais, quels conséquences? À tout les moments que le loup-garou l'avait vu faire, personne n'avait tentée de l'arrêter et avait continuée leur besognes comme si de rien n'était. Instructeurs, mécanos, techniciens et même Denis avaient fermé les yeux devant ses gestes. Pourquoi semblait-il être le seul à en faire tout un plat?

En arrivant à son appartement, Sylvain ferma la porte à double tour et pénétra dans sa maudite salle de bain. Il enlevait son sweat, essayant d'éviter le regard sur sa coupe, mais elle était constamment dans son champ de vision. En simple boxer sur le carrelage froid, le loup-garou maugréa d'un grognement sourd, avant de prendre une bonne douche. Il aurait aimé la prendre froide pour se rafraîchir les idées, mais le brunet devait enlever toute la crasse qui s'était étendu sur lui après sa course. Il puait non de dieu! Le loup-garou se dépêcha de se savonner, sentant par derrière le rideau en toile que quelque chose le fixait. Il savait qu'une fois qu'il en sortirait, la coupe serait encore sur la petite tablette du haut, trônant fièrement toute la disgrâce qu'elle lui apportait, ce goût amer qu'il avait en bouche à chaque fois. Se dépêchant de finir, il enroula une serviette autour de sa taille et sans porter un seul regard à la coupe dorée, quitta la salle de bain en claquant la porte, une fois de plus. Levy se trottina jusqu'à sa chambre, évitant ainsi de glisser sur le plancher à cause de ses pieds nus. Il récupéra un bas de pyjamas dans l'un de ses tiroirs et l'enfila, laissant tomber la serviette sur le sol. Récupérant un t-shirt lambda, le loup-garou retourna ensuite à son salon. Sauf qu'en y pénétrant, cette fois, Pierre était dans sa cuisine, la tête enfuit dans son frigo. Sylvain eu un soubresaut, lâchant un juron, faisant ainsi dévier la tête de son acolyte en sa direction.

- Non de Dieu de sainte-merde, Pierre! Le loup-garou jura à l'autre loup, qui lui lança un grand sourire devant son visage apeuré. Prévient moi bordel plutôt que d'arriver à l'improviste!
- Quoi, sans invitation?
- Oui! Pense un peut à mon petit cœur!

Le grand loup se releva en rigolant, une bouteille de coca en main. Sylvain reprit sa respiration, repensant à son choix. Avait-il bien fait de donner le double des clés à son ami? Chabrier avait posé sa casquette sur la table, ainsi que son sac où trônait le « Saint-Cahier » de leur chaîne. Pierre voyageait ce cahier lignées partout où ils allaient, inscrivant la moindre idées intéressantes pour leur chaînes, ainsi que celles toutes détaillées et finalisées qui attendaient d'être filmées. Pour le grand loup, ce cahier valait plus que son VUS, voir même plus que sa maison, c'était toute son âme!

- Je t'ai envoyé je ne sais combien de textos pour te prévenir que je venais. Il décapsula sa bouteille. J'ai même essayé de t'appeler.
- Ah ouais?

Sylvain se dirigea où le salon, prenant son téléphone qu'il avait délaissé sur la petite table basse. Évidement, en voyant les nombreuses notifications de son ami, il ne put que grimacer de confirmation. Effectivement, le grand loup l'avait prévenu de sa visite, plusieurs fois. Le plus petit des deux s'excusa, sous les rires du plus grand et le duo s'attabla à la table pour parler boulot, surtout pour réfléchir à leur prochaine pub sponsorisée. Tous semblait drôle et innocent, bien dosé pour cette sponso, mais Sylvain écoutait d'une oreille silencieuse, les yeux rivés sur les notes de son ami. Pierre, après plus d'une heure à dérober pleins d'idées et ces dernières commandes farfelues, remarqua le regard vide de son ami. Il sourcilla, avant de lui poser une main sur son avant-bras, attirant le visage de Sylvain sur lui.

- Tu vas bien?
- Oui, j'ai manqué de sommeil, rien de grave. Le loup-garou mâcha, soupirant. Mais j'ai tout entendu, tu peux continuer.

Pierre le fixa, incertain de savoir s'il disait la vérité, mais enchaîna toutefois malgré son incertitude. Sylvain, lui, resta un moment à contempler le visage souriant de son acolyte. Pierre avait ce regard brillant de joie et d'étoiles quand ils discutaient des conneries qu'ils devaient faire pour les sponsos ou tout simplement les costumes qu'ils devraient porter. Son ami était si dévoué, Sylvain adorait le voir ainsi. Mais en voyant son regard pétillant, le plus petit eu du recul. Pourquoi n'avait-il pas se regard pétillant en fixant sa coupe? Ce trophée qu'il enfermait au coin parce qu'il était trop embêté de sa victoire. Pourquoi diable ne fixait-il pas ce bout dorée les yeux remplit d'étoiles comme Pierre fixait son cahier?

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