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Chapitre 23 - Family Tree

Pour une capitale, Centrale était une ville de taille plutôt modeste. Tout juste une bourgade, en fait. Rien à voir avec Paris, dont elle aurait tout au plus rentré dans un arrondissement. D'après Bub, moins de quinze mille Saints y avaient leur résidence permanente. Même Pribam, la capitale de Svata Zeme, la devançait en termes de population comme de superficie.

Il y régnait d'ailleurs une atmosphère bien particulière, à l'opposé de l'agitation permanente et oppressante des rues parisiennes, ou de celle des allées tortueuses et pavées de Pribam, pleines de gens pressés et de chariots qui traçaient leur chemin à travers la foule, à grand renfort de cris et de coups de fouet. Rien de tout cela dans la capitale de la colonie Elysienne. Pour commencer, les véhicules terrestres à propulsion n'y étaient pas autorisés, si bien que la plupart des voies de circulation étaient réservées aux piétons. Quelques grands axes marquaient des rues ouvertes à des moyens de locomotion lents et aux transports en commun. Les marchandises voyageaient par les airs, au moyen des drones de livraison appelés communément "abeilles". Leur vrombissement constant remplissait le ciel et jouait comme un bruit de fond sur lequel venaient s'ajouter les chants d'oiseaux et les conversations des passants.

Attablée à la terrasse de sa cantine préférée, sous l'ombre d'un majestueux platane qui masquait le ciel vert chartreuse, Miracle gardait les yeux fermés et profitait de ce paisible concert. Elle venait ici autant pour le cadre que pour la cuisine. Une notification de Bub lui indiqua que sa commande était prête au passe-plat. Elle se leva, récupéra son plateau et lança un merci au hasard. De Margot, la cuisinière qui donnait son nom à l'établissement, elle n'avait jamais vu que les mains. Personne ne gérait la salle ou la terrasse et les clients se servaient et débarrassaient eux-mêmes. Les quelques indélicats qui dérogeaient à la règle se voyaient infliger une pénalité de 200 crédits par assiette laissée en plan, alors autant dire que le concept marchait plutôt bien. Miracle regagna son siège et attaqua le gaspacho, dont l'arôme acide de tomate lui fit frétiller les papilles. Elle avait aussi commandé une épaisse part de quiche aux poireaux bien crémeuse tout juste sortie du four, et en dessert une coupe de sorbet aux fruits rouges accompagné de brisures de meringue. Le menu complet lui coûtait un peu moins de 800 crédits, ce qui était très raisonnable.

Ces quelques semaines de repos à Centrale lui faisaient le plus grand bien. Après la fin de la formation, en attendant que les plans qu'elle avait échafaudés ne se mettent en place, elle avait décidé de s'accorder ce répit bien nécessaire. Elle avait loué une chambre à la semaine dans une pension pour les Saints de passage à la capitale, une sorte d'hôtel pour séjour longue durée. Enfin isolée et à l'abri des indiscrétions, elle en avait profité pour réaliser une séance de régression sous instance. Les souvenirs qui lui étaient revenus en valaient la peine et le risque, mais l'expérience avait achevé de la mettre sur les rotules. Au bout du troisième jour, elle s'était fait violence pour sortir explorer Centrale. La promenade lui avait procuré le plus grand bien et elle s'y était astreinte quotidiennement. Ses forces recouvrées, elle avait contacté Albert et l'avait convaincu de lui retirer son plâtre. Ses nombreuses blessures et fractures guérissaient lentement mais sûrement, et son moral avec.

Trois semaines avaient passé depuis la fin de la formation et son élévation au statut de Sainte. Son compte affichait encore un peu moins de 50 000 ¢, une fraction du million qu'elle avait reçu lors de sa béatification, car la majeure partie de la somme avait déjà été allouée à son nouveau projet de vie. Bientôt, ses finances ne lui permettraient plus d'entretenir ce train de vie et la parenthèse enchantée prendrait fin. C'était mieux ainsi.

Mais pas aujourd'hui. Cette journée servirait en fait de point d'orgue à ce retour au calme inespéré. À la pensée de ce qui l'attendait, son estomac se serra d'anticipation, mais un grand sourire lui étira les lèvres. Oui, ce serait vraiment l'apogée de ce moment hors du temps. D'ailleurs, ils ne devraient plus tarder.

Elle termina tant bien que mal sa coupe glacée, débarrassa son plateau et marcha d'un pas indolent vers le coin de la place où se trouvait l'arrêt du bus à hydrogène. Elle le vit arriver de loin, sur l'avenue principale bordée de voies vertes. La rampe d'accès se déploya, les portes s'ouvrirent et Nadia poussa le fauteuil roulant sur le trottoir.

« Cette ville est complètement dingue ! s'exclama Grégoire la tête levée vers les façades végétalisées.

— Vous êtes à la bourre, remarqua Miracle pour cacher son plaisir de revoir ses camarades.

— Désolée, répondit Nadia. Le chauffeur nous a laissés à la périphérie et j'ai mis du temps à trouver le bon bus.

— C'est rien, je vous charrie. Contente de vous voir tous les deux. Comment tu te sens, Grégoire ? »

Le rouquin lui jeta un regard embarrassé et rougit comme une pivoine.

« Je vais vous laisser discuter, interrompit Nadia. Je vous retrouve tout à l'heure.

— Merci. Tu viens Grégoire, on va se promener. »

L'intéressé hocha la tête sans ouvrir les lèvres. Alors que Nadia partait de son côté, Miracle et Grégoire s'éloignèrent de l'avenue et empruntèrent une des nombreuses allées du parc. Le silence s'installa et aucun des deux ne décrocha un mot de tout le trajet. Arrivés à un coin isolé où des rires d'enfants résonnaient au loin par-dessus le ronronnement des abeilles de livraison, Miracle avisa un banc et s'y installa. Grégoire plaça son fauteuil juste à côté.

Ils écoutèrent les bruits de la ville pendant plusieurs minutes.

« J'ai presque envie de tout annuler, fit soudain Grégoire.

— Pourquoi tu dis ça ?

— Je ne voudrais pas que tu fasses ça par pitié pour moi.

— Non ! C'est pas du tout le cas, je t'assure.

— Tu me le jures ?

— Juré craché. »

Elle accompagna les mots du geste. Il lui sourit enfin. Pourtant, ses yeux gardaient un éclat triste.

« Qu'est-ce qu'il y a ? Tu n'es pas heureux ?

— Si. Si, bien sûr. C'est juste que... ça représente beaucoup pour moi, un engagement pareil.

— Hé, c'est la même chose pour moi. Tu crois que je prends ça à la légère ? »

Il avala péniblement sa salive, comme si une grosse pierre lui obstruait la gorge.

« Je ne t'ai jamais dit pourquoi j'en suis arrivé à Elysion, comment j'en suis arrivé à vouloir en finir avec ma vie sur Terre. »

Elle secoua la tête et le laissa continuer.

« Mon handicap, mes jambes... c'est le résultat d'une erreur médicale. Ma naissance ne s'est pas déroulée dans des conditions idéales. Je n'ai jamais su les détails. Pour résumer, ma mère a accouché dans une ambulance. Il y a eu des complications, un souci avec une artère. C'est ce qui a causé la perte de mes jambes. Mes parents n'ont jamais accepté que je n'aie pas reçu les soins appropriés. Ils sont partis en croisade contre l'hôpital, contre les ambulanciers. Ils se sont dévoués corps et âme à ce combat. Et pendant ce temps, ils ne pouvaient pas s'empêcher de détourner le regard quand ils voyaient leur fils en fauteuil roulant. La bataille juridique a duré des années. Je galérais déjà pour me faire accepter à l'école, mes parents me traînaient à des audiences et des expertises, ils m'exhibaient comme un symbole de leur honte. Au bout de dix ans, ils ont gagné. Des millions. Vraiment, on était pleins aux as. On s'est acheté une maison grande comme un château avec tous les équipements médicaux pour moi, deux voitures adaptées pour mon fauteuil, des infirmiers privés venaient me donner les soins.

On avait gagné. Sauf qu'à se battre avec tant d'acharnement, on était devenu des étrangers. Mes parents faisaient chambre à part. Je prenais mes repas tout seul, je passais des journées entières à ne parler à personne d'autre que le chauffeur qui me déposait à l'école et celui qui me ramenait à la maison. L'école spécialisée où j'allais mettait le paquet sur le suivi individuel, je suivais un emploi du temps adapté avec des séances de kiné, du coup je n'avais presque rien en commun avec les autres élèves. J'aurais pu me contenter de la solitude, seulement comme partout il y avait deux ou trois abrutis qui m'ont vite repéré comme une cible facile. Un handicapé dont les parents sont pétés de thunes, c'est le client idéal pour les racketteurs. Parfois je payais, parfois je me faisais frapper. Parfois les deux. Je crois qu'une part de moi était contente de me débarrasser de ce pognon.

Un jour, ma mère m'a pris la main dans le sac. Littéralement. Elle a détourné les yeux et a fait semblant de ne rien voir. À cette époque, les disputes avec mon père étaient devenues si violentes que je les entendais depuis ma suite à l'autre bout de la maison. Je bourrais les coussins sur ma tête pour espérer m'endormir. Une nuit, j'ai entendu un coup de feu. Je me suis mis dans mon fauteuil et j'ai rejoint la cuisine. Mon père se tenait là devant moi, un pistolet à la main. Il le braquait sur moi. Ses yeux baignaient dans l'alcool, il chialait comme un poivrot. Il a pointé le canon vers moi. Sa main tremblait. Il avait le doigt sur la détente, j'ai cru qu'il allait tirer et j'étais prêt. Je voulais qu'il mette fin à toute cette mascarade, il l'a lu dans mon regard. Mais non, il n'a pas pu. Il a secoué la tête, a fermé les yeux très fort, a posé le flingue contre sa tempe et a tiré. J'ai retrouvé ma mère dans leur chambre, abattue d'une balle dans le crâne.

J'avais treize ans.

Pendant les deux années qui ont suivi, je n'ai pas arrêté de me demander pourquoi. Pourquoi cet enfoiré de salaud n'a pas eu les couilles de me descendre ? Pourquoi ce lâche a préféré me laisser tout seul pour gérer la merde qu'il avait semée ? J'étais sous tutelle mais libre de mes mouvements. Je vivais dans mon grand château avec du personnel qui s'occupait de moi. Je passais mes journées et mes nuits sur mon terminal, à regarder n'importe quoi et à attendre que ma vie se termine. Petit à petit, je me suis intéressé aux moyens d'en finir, d'accomplir par moi-même ce que mon père n'avait pas eu le cran de faire. C'est comme ça que j'ai trouvé Elysion. Tu connais la suite. »

Miracle imaginait sans peine. Elle prit conscience du courage qu'il avait fallu à Grégoire pour aller vers Elysion. Elle ne comprenait pas encore d'où il avait tiré la force de commencer une nouvelle existence dans cet autre monde. Elle-même n'en aurait sans doute pas été capable.

« C'est fini, maintenant, conclut-elle en lui prenant la main. Et pour ce que ça vaut, je suis heureuse que ton père ne t'ait pas flingué. Qu'on ait la chance d'être ensemble aujourd'hui.

— Tu le penses ? fit-il les yeux pleins de larmes.

— Évidemment, gros bêta. »

Il s'étreignirent et laissèrent couler les sentiments sur leurs joues.

« Si tu racontes aux autres que tu m'as fait chialer, je nierai en bloc. » rit Miracle sur l'épaule de l'adolescent.

Libérés d'un poids, ils reprirent leur promenade et Miracle profita de cet après-midi pour montrer à Grégoire les coins qu'elle aimait le plus dans la capitale. Ils passèrent devant la statue de bronze érigée au milieu de la Grand Place, un anhumain aux traits de panthère et au corps robuste figé dans une posture droite et fière. La plaque gravée indiquait :

En mémoire d'Outh'anè
Premier Guide de la colonie d'Elysion
Architecte et bâtisseur de Centrale

« Il a l'air carrément badass, remarqua Grégoire

— Je comprends mieux pourquoi les anhumains sont si bien acceptés en Elysion.

— Ils sont là depuis le début, en fait. Tu crois qu'ils sont de ce monde, à l'origine ?

— Je suis certaine que non. » répondit-elle avec un clin d'œil espiègle.

Leur déambulation les mena à travers des rues commerçantes, puis vers le Grand Bazar tenu par le département de la Revalorisation. Ils y parcoururent les étalages sans rien y acheter, puis s'installèrent à une terrasse pour prendre un café et un rafraîchissement. Miracle consulta Bub et s'aperçut de l'heure. Il était temps d'y aller. Fort heureusement, le bureau des actes civils se situait tout proche.

La bâtisse n'avait rien d'impressionnant ni d'exceptionnel par rapport aux autres constructions de l'avenue. Une plaque marquait l'entrée du bureau officiel. Une IA répondit à la sonnette et leur ouvrit la porte. Ils pénétrèrent sous une arche voûtée flanquée d'ouvertures. Aucun signe d'agitation, car la plupart des démarches administratives s'effectuaient en direct, par l'intermédiaire des terminaux. La procédure ne s'effectuait en physique que lorsque les intéressés ressentaient le besoin d'une cérémonie formelle. Pour Grégoire et Miracle, ce besoin était apparu comme une évidence.

L'IA leur signala le chemin par une ligne lumineuse au sol qui fila tout droit vers le fond de l'allée. Ils s'avancèrent et un large portail s'ouvrit pour leur laisser le passage. À l'intérieur de la salle de cérémonie baignée de lumières multicolores, des bancs s'alignaient, vides, sauf les deux du premier rang. Black Nadia et Albert se levèrent et sourirent aux deux arrivants qui remontaient l'allée centrale. Grégoire serra la main de Miracle. Elle le regarda et lui sourit pour lui donner du courage. Arrivés devant le bureau, ils furent accueillis par un homme mûr en tenue officielle qui les invita à s'installer. Miracle prit place sur un fauteuil et Grégoire avança à ses côtés.

« Pouvons-nous commencer ? demanda le représentant.

— Attendez ! » retentit une voix artificielle depuis l'entrée.

Tout le monde se retourna pour constater que M. Truffe se tenait dans le pas de la porte, visiblement essoufflé et le poil hirsute.

« M. Truffe s'excuse de son retard, carillonna sa voix de synthèse. Malgré mes nombreuses notifications, il n'a pas réussi à... Reformulation. M. Truffe est ravi d'arriver à temps pour la cérémonie.

— Bien, enchaîna le bureaucrate avec un sourire affable. Puisque tout le monde est présent, commençons. Je me nomme Saint Réginald Berthoux et j'agis en tant que représentant de la communauté d'Elysion. Je vais à présent procéder à la vérification de vos identités. »

Miracle et Grégoire tendirent leurs terminaux et apposèrent leur pouce à tour de rôle sur celui du célébrant.

« Parfait. Nous sommes réunis aujourd'hui pour unir Miracle et Grégoire devant la communauté. si quelqu'un s'oppose à cette procédure, qu'il le fasse savoir dès maintenant. »

Un long silence fit écho à ces paroles.

« Saint Grégoire, continua l'officiant, confirmez-vous être mineur sans parents proches ? »

L'adolescent hocha la tête.

« Miracle, confirmez-vous votre intention d'assumer auprès de Grégoire le rôle de personne référente ?

— Oui, déclara Miracle d'une voix ferme qui résonna dans la salle.

— Confirmez-vous tous deux n'avoir eu aucun contact durant la période de rétractation d'une durée de quinze jours jusqu'à aujourd'hui.

— Oui, firent-ils en chœur.

— À l'issue de ce délai de réflexion, maintenez-vous votre intention de former une seule entité familiale au regard des lois et de la société d'Elysion ? »

De nouveau, leur réponse vint de concert. Sur le banc de l'assistance, Nadia essuya une larme. Albert et M. Truffe rayonnaient de joie et ne perdaient rien de la cérémonie.

« En quelle qualité souhaitez-vous vous lier ?

— En tant que grande sœur...

— Petit frère, compléta Grégoire.

— Quel sera votre nom de famille ?

— Le mien, rétorqua Miracle.

— Saint Grégoire, consentez-vous à abandonner votre ancien nom de famille au profit de celui de Sainte Miracle.

— Je suis d'accord. »

Le célébrant prit un air encore plus sévère et fixa les deux individus.

« Voici donc ce que nous proposons. À partir d'aujourd'hui, vous porterez le nom de Saint Grégoire N'Kanté et dépendrez de Miracle N'Kanté, votre sœur adulte qui s'engage à assurer votre bien-être, votre éducation et votre protection. Cette décision vous convient-elle ?

— J'y consens, déclara l'adolescent, la voix brisée.

— Moi aussi, parvint à articuler Miracle, contaminée par l'émotion du rouquin.

— Dans ce cas, articula Saint Réginald, en ma qualité de représentant de la communauté d'Elysion, je déclare ceci vrai et valide, et je vous félicite pour ce nouveau départ. »

Miracle se jeta au cou de Grégoire et le serra dans ses bras, folle de bonheur. Il lui rendit son étreinte et lui murmura quelques mots entre deux sanglots :

« Tu vas être la plus géniale des grandes sœurs. »

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