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Chapitre 6 - Conseil

Miracle remua sous sa couette. De longs poils lui chatouillaient le nez et son sommier lui semblait inhabituellement dur. Il faisait un noir d'encre.

« Bub, je suis réveillée, marmonna-t-elle. Lumière, s'te plaît. »

Qu'est-ce qui avait pris à sa mère, de lui mettre une couverture à franges ? Et il fallait vraiment changer ce matelas. Elle avait le dos en compote.

« Bub, il est quelle heure ? Lumière ! »

Cette saleté de console avait encore buggé, ou quoi ?

Elle tenta de se redresser, mais tout son corps la lançait. Une horrible sensation de brûlure lui déchira la peau des bras et du visage. Les souvenirs lui revinrent, comme un torrent de souffrance. Le monstre, la fuite, le terrier sous l'arbre, la caverne, la falaise, la rivière déchaînée, le puits. L'humidité, la fatigue, la terreur, les écorchures, la pluie, la neige, le froid. Ça n'était pas un cauchemar. Elle constata avec horreur que ses avant-bras étaient bandés jusqu'au bout des doigts. Mais alors, où est-ce qu'elle ...

Un loquet de fer se souleva, et une porte en bois grinça sur des gonds rouillés. Dans le faible rai de lumière, la silhouette d'un homme entra, un bougeoir à la main. Son visage dans la lueur vacillante de la chandelle, où des ombres dansaient, était inconnu.

La jeune fille paniqua et tenta de se lever, pour fuir. Mais tout son corps se tordit de douleur.

« Calme-toi, fit l'étranger d'une voix douce. Je suis un ami. »

Miracle crut déceler un accent bizarre dans l'élocution de l'individu. Il s'approcha et tira un tabouret de bois près du lit, puis posa sa bougie sur une table de chevet. Son visage marqué de profondes rides était encadré d'une longue chevelure blanche aux mèches revêches. Il arborait un léger sourire qui paraissait assez peu naturel sur son faciès, qu'on aurait juré davantage prompt à la sévérité. Pourtant, ce visage inspira confiance à Miracle et calma un peu son appréhension.

« Qui est Bub ? s'enquit l'intrus d'une voix douce et rocailleuse.

– Mon IA.

– Moniyah ?

– Non, mon IA. Comme ton IA, quoi.

– Toniyah ?

– Vous êtes teubé ou quoi ?

– Pardon, s'excusa le vieil homme. Je ne parle pas très bien ta langue.

– Vous êtes qui ? Je suis où ? paniqua Miracle.

– Calme-toi, fit son tortionnaire, les mains levées en signe d'apaisement. Il faut te reposer, pour l'instant.

– Où sont mes parents ?

– Désiré est reparti hier. Jenovefa est restée jusqu'à ce soir, mais elle avait des affaires urgentes à régler. Elle reviendra bientôt.

– Vous connaissez mon père et ma mère ?

– Plutôt bien, oui. Nous sommes... comment dire ? Des amis de longue date.

Vous parlez tchèque ? s'étonna la jeune fille.

C'est ma langue natale. Mais nous aurons le temps de discuter de toutes ces choses quand tu seras guérie. Pour l'heure, tu dois te reposer. Tes blessures sont graves. Attends un instant. »

L'homme se leva péniblement. Il sortit de la chambre d'une démarche légèrement boiteuse. Miracle se sentait toujours aussi inquiète au sujet de sa situation, mais au moins ce vieux connaissait le nom de ses parents. Elle espérait malgré tout ne pas s'être fait enlever par un violeur sadique. De toute façon, elle ne se sentait pas en état de prendre ses jambes à son cou. Le type revint avant qu'elle n'ait le temps de conjecturer davantage.

Il déposa un bol fumant entre les mains bandées de la jeune fille. Le contenant en terre cuite laissait échapper un fumet étrange, dont l'odeur mentholée un peu agressive se mariait à autre chose de sucré. Impossible d'en voir la couleur, dans la pénombre.

« Ça t'aidera à aller mieux, commenta le vieil homme face à l'hésitation de l'adolescente.

– Vous vous appelez comment ? fit Miracle en soufflant à la surface du liquide.

– Ici, tout le monde me nomme Mistr Havel z Kmene Skal. Mais tu peux m'appeler Havel.

– Maître Havel de la Tribu de ... , tenta-t-elle de traduire.

– Du Rocher. Allez, bois. »

La jeune fille obtempéra, porta la coupe à ses lèvres et avala le liquide chaud. La mixture lui dégagea le nez et descendit telle une coulée de lave dans son estomac. Miracle se porta les mains au ventre et se recroquevilla dans les draps.

Havel avait déjà récupéré, d'un geste rapide et précis, le bol et ce qu'il restait de liquide bouillant.

« Je te promets que ça te fera du bien. Tes engelures doivent encore cicatriser. Tu as moins mal, maintenant ?

Je crois. Je suis fatiguée.

C'est normal, il y a un léger calmant dans le breuvage. Dors. »

La jeune fille fut frappée par une vague de fatigue qui l'emportait vers l'inconscience. Elle se laissa border dans la peau de bête par les mains bienveillantes de Havel, et ferma les yeux.

***

Un rayon de soleil perça par la fenêtre et vint agresser la rétine de la jeune fille endormie. Miracle grogna et enfouit sa tête sous l'épaisse couverture.

« Réveille-toi, mon cœur. Il fait jour. »

Quand elle reconnut la voix de sa mère, Miracle se redressa d'un bond. Elle regretta immédiatement son geste, car la douleur fusa à travers tous ses nerfs et inonda son cerveau d'un océan de souffrance. Jenovefa se précipita pour prendre sa fille dans ses bras.

« Oh Broucek, mon cœur, tu nous as fait si peur !

– Où est papa ? s'écria l'adolescente alarmée.

– Il s'assure que ta piste n'a pas été suivie. Ne t'en fais pas.

– Mais il est en danger. La chose qui m'a... » Elle éclata en sanglots contre la poitrine de sa maman. « Elle m'a dit... qu'elle tuerait toute ma famille.

– Ne t'inquiète pas pour ton père. Il en a vu d'autres.

– Mais ...

– Ne discute pas, interrompit fermement Jenovefa. Ton père fera le nécessaire pour te protéger, et pour retrouver la personne qui a osé s'en prendre à toi. Et il lui fera amèrement regretter. Comment tu te sens ?

– J'ai mal partout.

– Tu aurais pu t'en tirer bien plus mal. Tu étais à moitié morte de froid quand je t'ai trouvée. Ton père a remonté ta trace dans la forêt, jusqu'au creux dans l'arbre. Je me suis déplacée à l'autre bout du chemin pendant qu'il suivait ta piste. J'ai vu la neige remuée, et je n'ai eu qu'à suivre le sillon pour te trouver. Je t'ai veillée la première nuit, et puis je suis allée prendre des dispositions pour me rendre disponible. Je suis là, maintenant.

– J'ai eu si peur, maman !

– Je sais.

– Et ce chemin... Il m'a sauvé la vie. C'est comme si quelqu'un l'avait balisé pour moi.

– Ça m'étonnerait, rit sa mère. C'est moi qui l'ai tracé, et ton père a porté les cordes. Un sacré chantier, mais on ne pensait pas à toi. Le but était de donner à Havel et aux apprentis myslivec un moyen de nous rejoindre en cas de danger.

– Mais, et si le monstre trouve le terrier dans la forêt ?

– Ton père a coupé toutes les cordes. Sauf sur la falaise, parce qu'il est resté coincé dans la faille. Je vais devoir le mettre au régime, s'amusa-t-elle. En tout cas, tu es en sûreté ici.

– Justement, où est-ce que vous m'avez emmenée ?

– Svata Zeme.

– La Terre Sainte ?

– Oui, c'est le nom de ce monde. Accessoirement, c'est aussi là que je suis née. »

Miracle marqua un temps pour intégrer ces informations. Elle dévisagea sa mère d'un œil circonspect.

« Comment ça, un autre monde ? Ça veut dire que t'es pas humaine, genre une fée ou une elfe ?

– Grands dieux, non ! rit Jenovefa. Les gens d'ici sont très ordinaires. Tu t'en apercevras bien assez tôt.

— Maman, si tu savais... Cette chose qui m'a attaquée, elle n'avait rien d'humain. Elle ressemblait à une gentille dame en détresse, et puis elle s'est transformée. Et elle a essayé de me... »

Miracle fondit à nouveau en larmes. Sa mère la serra longuement dans ses bras et lui frotta le dos.

« Ton père et moi nous sentons si coupables de ce qui t'est arrivé. Nous avons toujours essayé de te préserver, de faire en sorte que tu aies une vie normale, malgré nos activités. Malgré ta maladie. Je suis vraiment désolée que tu aies dû endurer des épreuves si terribles. Ça n'arrivera plus. Nous te garderons en sûreté ici, le temps de comprendre ce qui s'est passé, et de régler ce problème.

— Et l'école ? s'inquiéta la jeune fille.

— L'année scolaire est quasiment finie. Tu pourras rester ici pendant les grandes vacances. D'ici là, nous aurons coincé ce monstre, où qu'il se cache. »

Jenovefa essuya les larmes sur les joues de sa fille et l'embrassa avec tendresse sur le front, avant de la serrer contre son cœur.

« Pour l'heure, mange, ordonna-t-elle d'un geste vers un plateau posé au pied du lit. Tu n'as rien mangé depuis deux jours. Tu nous raconteras en détail ce qui t'est arrivé une fois que tu seras rétablie. Et puis... » Elle eut un mouvement du menton vers un coin de la chambre où des couvertures empilées se soulevaient par intermittence. « Il faut aussi prendre soin d'elle. »

Miracle adressa un regard interloqué à sa mère. Jenovefa se leva et s'approcha avec mille précautions du tas de tissus, et en souleva le coin. Une masse sombre gisait au centre, comme dans un nid douillet.

« Vous vous êtes tenu chaud pendant quelques minutes cruciales. On ne pouvait pas la laisser mourir. Havel dit qu'elle survivra.

— Elle ?

— Oui. Havel l'a nommée Moniyah. »

***

Durant deux autres jours, Miracle ne quitta pas sa chambre. Elle alterna entre de longues périodes de sommeil et les soins que lui prodiguaient Jenovefa et Havel. Elle accepta de mauvaise grâce de faire ses besoins dans un pot de chambre. Elle consentit à ingurgiter la mixture infâme, censée guérir ses engelures, préparée à son intention par le vieux maître, et mangea ce qu'elle put. Du bouillon de légumes, principalement, accompagné de miches de pain qu'elle parvint à ingérer à force de patience.

Jenovefa lui tint compagnie, lui fit la lecture, et lui apprit à jouer aux dames.

Tout ce temps, Miracle garda un œil inquiet vers le panier au coin de la pièce. Une gamelle d'eau propre y avait été déposée, assortie d'un morceau de saucisse. Mais l'animal n'y avait pas touché.

« Elle refuse qu'on l'approche, se désola Jenovefa. Havel pense qu'elle a subi des violences. Elle ne durera pas longtemps, à ce rythme. »

Un soir, alors que sa mère s'entretenait avec le vieux maître dans la salle attenante, Miracle se leva et marcha péniblement vers les couvertures. Elle s'accroupit près de l'animal, malgré la douleur dans ses jambes, et lui caressa le museau.

« Mange, s'il te plaît. Ne me laisse pas survivre toute seule. »

La bête ouvrit les paupières et une lueur de compréhension s'alluma dans ses prunelles. Miracle l'encouragea.

« Tiens, essaye ça. » fit-elle en lui tenant le morceau de viande sous les naseaux.

Une timide langue vint lui lécher les doigts.

« C'est bien. Tu peux y arriver. »

Elle effrita la chair en petits morceaux, et en tendit un vers les mâchoires de l'animal. Les crocs se refermèrent avec délicatesse sur la saucisse.

« Moniyah, souffla l'adolescente. Le vieux Havel ne manque pas de sens de l'humour. Mais ça me plaît. »

***

Les six adultes qui dévisageaient Miracle la rendaient nerveuse. Outre Havel et sa mère, deux jeunes hommes, une femme plus âgée, et un vieillard la détaillaient sous toutes les coutures. Elle n'avait pas prononcé le moindre mot, et Havel avait fait l'article, à grand renfort de gestes et de silences lourds de sens, tandis que la jeune fille restait assise sur son fauteuil de bois massif au coin du feu. Dans l'atmosphère chaude et accueillante de la pièce circulaire, aux épais murs de pierre, où les bûches incandescentes répandaient une douce odeur de cheminée et lançaient de temps à autre une braise accompagnée d'un craquement, l'ambiance était anormalement tendue et solennelle.

Jenovefa non plus n'avait pas pipé mot, mais son regard alternait entre sa fille, Havel, et les quatre autres. Plus que la situation étrange où elle se trouvait, c'était principalement l'attitude anxieuse de sa mère qui inquiétait Miracle. Seule la présence de Moniyah, couchée sur ses pieds, la rassurait. De toute façon, elle ne pouvait plus quitter une pièce sans que la jeune chienne ne la suivît, et ce n'était pas pour déplaire à la jeune métisse.

Elle tenta de porter son attention au discours du vieux maître, dans un tchèque un peu compliqué pour son niveau, mais suffisamment intelligible pour qu'elle en saisisse le sens. Il s'agissait principalement d'une explication sur la présence de l'adolescente.

« Et donc, continua Havel, Jenovefa et Désiré vous demandent expressément de garder le secret le plus absolu sur l'identité de leur fille. J'espère que vous comprenez la délicatesse de la situation. Certes, l'Ordre leur doit beaucoup, et certains parmi nous seraient enclins à leur vouer une admiration sans borne... » Le maître s'interrompit une seconde pour lancer un regard évocateur à un jeune homme tellement absorbé dans la contemplation de Jenovefa que l'on aurait cru voir des étoiles briller dans ses yeux. « Toutefois, je vous rappelle que nous avons des ennemis qui seraient ravis de trouver en cette demoiselle une arme contre ses parents, et nous-mêmes. Est-ce que c'est bien clair ?

Oh, euh... oui, maître Havel ! s'écria le garçon comme s'il venait d'émerger d'un rêve éveillé.

Fort bien. Nous allons donc prendre des mesures pour assurer non seulement sa sécurité, mais aussi son anonymat. Tout d'abord, vous vous doutez bien qu'il vous est interdit de révéler son véritable nom. Les disciples qui comprennent le français sont un peu trop enthousiastes au sujet de l'histoire de Désiré et Jenovefa. Je doute qu'ils parviennent à tenir leur langue s'ils apprennent le prénom plutôt évocateur de notre protégée. Sans vouloir vous offenser, évidemment, madame. »

Havel et Jen échangèrent un hochement de tête respectueux. Le vieil homme allait reprendre, quand Miracle éleva la voix.

« Quoi ? Vous voulez me filer un genre de pseudo ?

— Crois-moi, ma puce, c'est préférable, intervint sa mère.

— Et vous avez prévu quoi ?

Pourquoi pas Toniyah ?» suggéra Havel. Miracle ouvrit la bouche pour protester, mais ne sut quoi dire. « C'est donc décidé. Toniyah sera notre invitée pour un temps indéterminé. En ce qui concerne son teint quelque peu inhabituel, j'ai peur qu'il ne faille recourir à un moyen radical. »

Le silence qui s'ensuivit n'augura rien de bon pour la jeune fille, et ce sentiment se trouva confirmé lorsque Havel tourna les épaules vers Miracle pour lui parler droit dans les yeux.

« Tu devras conserver les bandages sur tes bras, et il faudra aussi que tu mettes ceci à chaque fois que tu sortiras de cette tour. »

Le vieil homme souleva du sol un sac en toile de jute qui traînait sous sa chaise. Miracle comprit ce qu'il insinuait, et se leva d'indignation.

« Ah mais quoi, mais y a pas moyen que je sorte avec un sac à patates sur la tête. C'est quoi, ce délire ? Maman, tu peux pas cautionner ce truc.

— Je t'en prie, chérie, implora sa mère. C'est pour ta sécurité.

— Tu m'avais promis que je ne risquais rien ici.

Sous certaines conditions, répondit Havel. L'alternative est de te garder enfermée dans la tour de l'Ordre. Est-ce cela que tu souhaites ?

— Maman, je t'en supplie. Ramène-moi à la maison.

— C'est trop dangereux, et tu le sais bien. J'aimerais qu'il y ait une autre solution, malheureusement tu vas devoir te plier à ces conditions pour l'instant.

— C'est ce qu'on verra. » lança la jeune fille à sa mère, avec un éclair de colère dans les yeux.

L'air dans la salle devint aussi glacial qu'une nuit d'hiver, tandis que mère et fille se jaugeaient.

« Aux yeux de tous, Toniyah sera une lépreuse que nous avons recueillie dans l'espoir de la soigner.

Mais personne ne s'étonnera de ce traitement de faveur ? » s'inquiéta une femme au ventre légèrement arrondi, calée dans un siège rembourré. Elle n'avait pas prononcé le moindre mot depuis le début de la réunion, et avait attentivement observé la scène, de ses yeux d'un bleu perçant. Ses traits rudes trahissaient un mode de vie au grand air, et sa robe verte était garnie d'un étui à la ceinture, où pendait un coutelas dont Miracle supposait qu'elle ne manquait pas de faire usage. Les hautes bottes à ses pieds avaient le cuir râpé par de longues marches. Et surtout, la longue cicatrice sur sa joue gauche lui donnait un air d'amazone qui inspirait à la jeune fille un sentiment d'admiration mitigé de méfiance. Elle tenta sans succès de déterminer l'avancée de sa grossesse, car même si le ventre arborait une courbe qui ne trompait pas, le terme semblait encore bien éloigné.

« Tu es mieux placée que personne, Marika, pour savoir que la tradition de notre Ordre nous dicte de prendre soin des faibles, ainsi que de répandre le progrès dans notre monde. Nous avons recueilli Toniyah dans le but d'étudier sa prétendue maladie et d'y trouver un remède.

— Et pour la louve ? » objecta un homme dans un parfait français, à la grande surprise de Miracle. Sa coupe de cheveux taillés sur les côtés, et ses joues et son menton parfaitement rasés avaient alerté Miracle sur la particularité de cet individu au sein du groupe, où même le garçon le plus juvénile, celui à qui Havel s'était adressé précédemment, portait une coupe de cheveux à peine entretenue, et un duvet de barbe jusqu'au ras du cou. Cet homme-là, habillé de cuir et de tissus bruts, portait le même genre de fourrures que ses pairs, mais se démarquait du lot par une hygiène capillaire qui n'appartenait décidément pas à ce monde.

« Nous avancerons la même théorie à son sujet. Moniyah et Toniyah formeront un seul et même tout. Les habitants n'en seront que plus découragés de se montrer curieux à leur égard. De plus, Jocelyn, mon cher apprenti, je te charge de veiller sur notre invitée, à bonne distance.

Très bien, maître, acquiesça l'intéressé en tchèque.

Quant à toi, Lumir, continua Havel, tu seras le tuteur de Toniyah chez les disciples de l'Ordre. Je compte sur toi pour lui éviter toute situation embarrassante. »

Le jeune à la tignasse noire posa les yeux sur Miracle et tenta de mettre un peu de sérieux et de détermination dans sa posture. Ses joues s'empourprèrent, tant il dut rester en apnée pour bomber le torse. Mais ses yeux débordaient d'une joie communicative, dont Miracle s'amusa intérieurement.

« Havel, interrompit Marika, je crois que tes apprentis devraient nous laisser. »

Le maître et la femme échangèrent un regard entendu.

« Bien. Jocelyn, Lumir, vous pouvez disposer. »

Les deux jeunes apprentis se levèrent et prirent congé par la massive porte de bois cloutée de fer.

Le vieillard dans son fauteuil, qui n'avait pas bougé d'un pouce depuis le début du conseil, et dont Miracle commençait à croire qu'il s'était endormi dans sa cape de fourrure, releva la tête et ouvrit des yeux pétillants d'une curiosité impatiente. Jenovefa regarda Havel d'un air intrigué.

« Qu'y a-t-il, Havel ?

Nous avons un invité inattendu, qu'il serait préférable que ces jeunes gens ne croisent pas. Il arrive à point nommé.

Vous voulez dire que ... »

La porte s'ouvrit à cet instant, et une voix familière retentit.

« Ah ben c'est pas trop tôt. J'ai cru que les gamins allaient prendre racine. Havel, Buhurt, Marika, je suis content de vous voir.

— Papa ! s'écria Miracle. Tu es revenu.

— Oui, mon cœur, fit le grand noir couvert de sueur. Je me faisais du mouron pour ma fille chérie. »

Il n'en fallut pas plus pour que Miracle se précipite sur son paternel et l'étreigne de toutes ses forces. Il lui rendit son embrassade mais un soubresaut de douleur secoua son torse et il la repoussa légèrement. Elle leva vers lui des yeux pleins d'incompréhension et de détresse. Il lui répondit d'un regard tranchant qui lui intima de ne pas dire un mot. Puis il lança un signe du menton vers Jenovefa qui le fixait avec impatience, et secoua la tête comme pour indiquer un échec. La communication silencieuse entre les trois membres de la famille N'Kanté ne passa pas inaperçue du reste de l'assemblée, aussi Désiré prit la peine de s'adresser à eux.

« Vous m'excuserez mais j'ai besoin de m'entretenir en privé avec Miracle. Tu me montres ta chambre, ma puce? »

Miracle était trop inquiète au sujet de la santé de son père pour lui reprocher l'usage de ce surnom dégradant. Elle le prit par la main et l'emmena à l'étage. Lorsqu'il passa la porte du nouveau refuge de sa fille, Désiré haussa les sourcils et posa les yeux sur le panier de chiffons sales au coin .

« Je comprends mieux d'où te vient cette nouvelle odeur de chien mouillé. En tout cas tu as l'air bien installée.

— C'est pas le souci, papa ! s'alarma la métisse. Tu es blessé, ou quoi ? Fais-moi voir.

— T'inquiète pas, rétorqua le chef en repoussant les assauts de sa fille. J'ai vu pire, juste une côte cassée et des égratignures. Je dirai à ta mère que je me suis esquinté en tombant de cheval.

— Tu veux dire que ce qui t'a fait ça... » La jeune fille écarquilla les yeux d'horreur.

« Oui, c'est la saleté de monstre qui t'a attaquée dans la forêt. J'ai remonté sa piste et j'ai fini par le retrouver. C'était clairement pas humain, on aurait dit une sorte de dragon aux écailles blanches. Tout mon arsenal y est passé et rien ne lui a fait le moindre mal, cette saleté régénère plus vite que je ne peux lui laminer la face.

— Tu... tu as déjà combattu des dragons ?

— En quelque sorte. Celui que j'ai battu était une création de mon esprit et c'était il y a longtemps. Celui-ci, par contre, était bien réel. Tu as eu de la veine de lui échapper, et moi aussi d'ailleurs.

— Papa, tu dois me raconter tout ça, tous ces trucs étranges que vous faites, toi et maman. Je sais depuis longtemps qu'on n'est pas une famille normale, mais là...

— Écoute, je saurais pas par où commencer. Un jour, oui, il faudra que ta mère et moi on te mette au parfum de ce qu'on a accompli et de ce qu'on a construit. On t'a tenue à l'écart pour ne pas te perturber, pour que tu aies une vie aussi normale que possible, que tu puisses aller à l'école et te faire des amis.

— Maman m'a sorti le même refrain. C'était pas un grosse réussite, de toute façon.

— Peut-être mais on a essayé. Pour l'instant, tout ce qui importe c'est que tu dois rester en sécurité ici. Tu es avec des gens de confiance qui te protégeront. Mais je dois savoir une chose. » Il planta son regard droit dans les yeux de son enfant. « Miracle, est-ce que tu as essayé de te défendre quand il t'a attaqué ?

— Je ne sais plus, lâcha-t-elle d'une voix chevrotante. Il me tenait, j'ai perdu connaissance et un cri a résonné. Quand je me suis réveillée, je courais dans la forêt.

— Ça confirme ce que je soupçonnais. Quand je l'ai retrouvé, ce bâtard était blessé. Sa main droite avait été coupée net. Je pense que c'est toi qui l'as amoché.

— Mais papa c'est impossible, protesta-t-telle. Je ne m'en souviens même pas !

— Voilà une raison supplémentaire pour toi de rester ici. Je veux que tu comprennes comment tu as réussi à le toucher. Et tu sais ce qu'on dit, sourit-il d'un rictus carnassier. Si ça saigne, on peut le tuer. Quand tu sauras ce que tu as fait, on trouvera le moyen de reproduire la méthode et j'irai moi-même régler son compte à cette saleté. On fait comme ça ? »

Il leva son petit doigt recourbé en forme de crochet, comme il le faisait quand elle était petite pour conclure une promesse mutuelle, celle de lui ramener des bonbons si elle restait sage avec sa mère pendant son absence, ou bien la fois à l'hôpital où il lui avait juré qu'elle n'aurait plus aucun souci avec des méchants camarades. Elle accrocha son auriculaire et scella le pacte.

« Pigé. »


—————
Les affaires reprennent.

J'ai laissé reposer les cinq premiers chapitres, histoire de recueillir quelques retours. Pour l'instant, que du positif. Merci à mes lecteurs cobayes. Un mois s'est écoulé, et il est temps de reprendre le cours de notre récit.

Voici donc le début de l'arc Svata Zeme, où Miracle va se rendre compte que ses parents ont laissé quelques traces de leur passage. Mais ce sera aussi l'occasion pour elle de laisser son empreinte. J'espère que vous aimerez.

Si c'est le cas, faites briller la petite étoile. 👇⭐

Garnath out

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