31. Eric
ERIC
Le chevalier déserteur se redressa avec difficulté dans sa cotte de mailles. Oh... ma tête ! Il ouvrit les yeux et crut s'étouffer de surprise.
La pièce dans laquelle il s'était éveillé était une réplique exacte de ses appartements privés au château de... Je ne sais plus où j'habite, mais c'est exactement pareil ! La petite table avec des parchemins étalés dans tous les sens, la chaise confortable mais sommaire – Eric n'aimait pas le luxe inutile –, une petite clochette en permanence accrochée à sa porte pour réclamer de la viande... Tout était là, comme s'il était encore au matin de son départ à la guerre.
Pourtant, quelque chose n'allait pas. Il se serait attendu à retrouver les livres de sa bibliothèque, des ouvrages hors de prix dans des langues qu'il parlait à peine. À leur place se trouvaient des boîtes en bois de quelques pouces de large.
Eric se leva péniblement et s'empara de l'un des coffrets. Il sourit en entendant le bruit que ses chausses faisaient sur le parquet. Cela m'avait déjà manqué... Après chaque guerre qu'il avait lâchement évitée, il était retourné chez lui avec soulagement. À Azincourt, lorsque le soldat anglais s'était approché de son corps immobilisé dans la boue, il avait ressenti plus de regret que de peur. J'aurais dû déserter cette bataille aussi. Au diable, les exceptions.
Attristé par ces souvenirs, il ouvrit le coffret. Il en sortit un morceau de parchemin immaculé. Ce n'est pas à moi. Mêmes ces boîtes ne me disent rien... Eric devina qu'il s'agissait d'une nouvelle facétie de leur hôte et examina le parchemin de plus près. Il finit par y discerner un message dans une écriture minuscule.
« Monsieur, lut-il en plissant les yeux. Ceci est une partie de cache-cache. Cachez-vous successivement dans les huit salles que vous visiterez, et vous aurez un présent. »
Il haussa les sourcils et reposa la boîte, songeur. Le chevalier se frotta la barbe en se dirigeant vers son lit. S'il lui fallait se cacher, il savait exactement où aller... Le passage secret fera l'affaire. Eric tira sur les deux pieds au chevet du lit, espérant que ces appartements fussent vraiment identiques aux siens. Le cliquetis caractéristique de la porte cachée derrière sa bibliothèque se fit entendre. Merci Seigneur. Il se redressa pesamment et se hâta de déplacer le meuble pour se glisser dans l'ouverture. Il tira la bibliothèque vers lui pour s'enfermer et cligna des yeux dans le noir.
Bon. Et maintenant ? Il étendit les bras pour voir si le passage secret se prolongeait jusqu'à l'extérieur – peut-être pourrait-il fuir d'ici ! – mais rencontra immédiatement le mur d'en face : le tunnel était bouché. Ses espoirs de cavale s'envolèrent.
Eric soupira en silence et s'appuya contre le mur, les sens en alerte. Quelques secondes plus tard, il entendit le bois de la porte d'entrée craquer. Le souffle coupé, Eric se raidit. Il ne savait pas qui était là, mais il s'approchait déjà de la bibliothèque. Le chevalier écarquilla les yeux, certain d'avoir refermé le passage mais tout de même terrorisé. Le maître des lieux n'avait tué personne depuis son arrivée, mais comment savoir ce qu'il s'était passé... avant ? Peut-être qu'il y avait seize personnes au départ. Parbleu, et s'il avait tué quatre d'entre nous ? Il sentit qu'il allait paniquer et tenta de se calmer. Il devait se faire le plus discret possible...
Eric entendit alors des doigts se poser sur le bois de la bibliothèque. Il retint sa respiration, blême de terreur. Le bruit se rapprocha dangereusement du bord du meuble. Ne me dites pas qu'il va le déplacer. Par pitié, non ! Incapable de bouger le moindre orteil, il ferma les yeux et réprima des sanglots de panique. Même à Azincourt, il n'avait pas ressenti un tel affolement !
Lorsque l'inconnu s'éloigna enfin de la bibliothèque, Eric serra les lèvres et entrouvrit les paupières. Devait-il être soulagé ou non ? Il sursauta violemment lorsque la voix du maître des lieux résonna autour de lui.
« ERIC, VOUS AVEZ RÉUSSI CETTE ÉPREUVE AVEC BRIO. »
Le chevalier fit une moue interrogative. Quoi ? Il poussa la bibliothèque en avant. Lorsqu'il lui fallait sortir de sa cachette, il n'hésitait pas. Pour une raison qui lui échappait, entendre leur hôte le rassurait. Aucun mal ne leur arrivait lorsqu'il leur parlait directement... mis-à-part l'endormissement forcé. Et encore, c'était plutôt sympathique comme petite sieste.
Il se planta au milieu de sa chambre et fronça les sourcils.
« Pourquoi m'avez-vous stoppé ? La règle du jeu indiquait qu'il y avait huit parties différentes...
— JE SUIS SI IMPRESSIONNÉ PAR VOTRE TALENT QUE JE VOUS FAIS GRÂCE DES AUTRES PARTIES. VOTRE PRÉSENT VOUS SERA BIENTÔT OFFERT. »
Eric rit nerveusement. Mais c'est stupide ! Effroyablement stupide ! Il avait l'impression que leur hôte ne cherchait qu'à leur faire perdre du temps. Cependant, il était encore trop effrayé pour oser le lui faire remarquer. Il se tourna vers la porte en bois et se demanda ce que serait son cadeau. Je mangerais bien une deuxième assiette de viande. Il recula d'un pas lorsque quelqu'un entra. Ni le maître, ni un fantôme : il s'agissait du vieil homme qu'il avait rencontré plus tôt.
« Oh, vous êtes l'Ancien ! s'exclama Eric d'un ton joyeux, soulagé de voir un visage familier.
— C'est Maurice Lalie pour toi, grommela-t-il. Qu'est-ce que c'est que ce délire ? On nous a dit qu'on ferait des activités en binômes et... et j'ai joué à cache-cache tout seul. Je me suis planqué dans le placard à spatules, rien de plus simple. Me demander de me cacher dans une réplique de mon propre labo... »
Il soupira et secoua la tête. Eric sourit en voyant ses trois cheveux tanguer tels des brins d'herbe dans le vent.
« C'était affreusement facile ! s'énerva Maurice.
— J'ai ressenti la même chose, acquiesça le chevalier. Je connais mes appartements comme ma poche, il est donc normal que je sache m'y dissimuler.
— Quel jeu pourri. J'espère que les cadeaux seront sympas, au moins. »
Ils se regardèrent en silence. Eric ne connaissait pas le vieil homme et c'était certainement réciproque : aucun des deux ne s'était présenté en détail pendant le repas collectif. Était-ce le moment adéquat pour le faire ? Allez, un peu de courage.
« Dites-moi, Maurice, je me pose une question.
— Sur les cadeaux ? Ouais, moi aussi.
— Non, plutôt sur votre époque, à vrai dire.
— Oh, j'allais te demander la même chose ! Tu m'as l'air d'une espèce de soldat, un chevalier, non ? Sauf que je ne fais pas la différence entre vos armures. Quelle année ?
— 1415. J'ai participé à la bataille d'Azincourt. »
Maurice haussa les épaules et soupira.
« Ça ne me dit absolument rien. Toutes vos bagarres de paysans, là...
— Charles s'en souvenait, lui. » répliqua Eric en ignorant son insulte sur son rang.
En voyant le vieil homme froncer les sourcils, le chevalier précisa :
« C'est le jeune homme blond. Charles.
— Ah... J'ai toujours eu du mal avec les prénoms, et pourtant je lui ai parlé. Il a eu moins d'événements à retenir, c'est normal qu'il s'en souvienne ! Ne compare pas l'incomparable, on doit avoir deux siècles d'écart. J'en ai déjà plein la tête avec la science.
— Mais vous êtes très intelligent, vous. Charles n'est qu'un garçon du peuple et il le restera. C'est triste, mais vous savez autant que moi que c'est comme ça que cela fonctionne. Les riches ne se révoltent pas. Vous, vous êtes au-dessus de ces considérations. »
Maurice éclata d'un rire sans joie et déclara :
« Je suis habillé comme un pouilleux, qu'est-ce que ça peut bien t'indiquer sur moi, à part que c'est bizarre pour un scientifique ? Tu ne sais même pas à quoi ressemblent les scientifiques de mon époque, en plus. Je m'habille comme ça parce que j'aime sentir le froid de Moscou sur ma peau. C'est tout ce qu'il me reste.
— Vous avez du génie dans les yeux. »
Maurice en resta bouche bée. Eric ne savait pas comment l'expliquer, mais il l'avait vu en lui. Ce n'était pas la première fois, cependant.
« Je pense pouvoir distinguer aisément les pensées d'autrui, dit-il. C'est très utile de savoir quand fuir le combat sans être vu par l'armée adverse... Je sens ces choses-là. Ils me regardent mais ne réfléchissent pas. Ils ne se rendent pas compte que je disparais !
— Ça ne te gêne pas de déserter ? lui demanda Maurice. Aucune culpabilité ?
— Diantre, certainement pas !
— T'as bien raison. La guerre est la pire des bourdes... Et je te dis ça sans hypocrisie, parce que j'en profite au quotidien mais je n'aime pas ça. »
Eric, étonné, désigna d'un geste de la main la petite chaise à côté de sa table personnelle.
« Asseyez-vous, Maurice, et expliquez-moi ce que vous faites. Votre vie. Je veux comprendre s'il y a encore des guerres dans le futur, et pourquoi.
— Il y en a, commença Maurice en s'asseyant, et ça va être long à raconter. Tu es un gars sensé donc je veux bien le faire, mais ne me juge pas trop vite. J'ai une passion, la science, et j'étais prêt à tout pour en vivre. Le contexte importait peu, je voulais juste qu'on me laisse tranquille dans mon labo. En France, ça ne se passait pas comme ça, tu comprends ? Alors je suis parti. Je n'ai pas encore retrouvé tous mes souvenirs, mais je sais que j'ai dû prendre des décisions très importantes. »
Maurice prit une longue inspiration et s'apprêtait à continuer lorsque la porte s'ouvrit à nouveau. Ils se tournèrent tous les deux comme un seul homme, alertes. Oh, mon Dieu, qui est-ce ?
« Un fantôme ? » fit Maurice, inquiet.
L'esprit qui venait d'entrer avait l'apparence d'une femme vêtue d'une robe blanche. Ses cheveux étaient pâles et attachés par un ruban. Ses yeux éteints jaugèrent le chevalier avec lenteur, ce qui le fit tressaillir. Le fantôme tenait deux objets de petite taille, indiscernables dans ses poings fermés. Eric prit son courage à deux mains et effectua une petite révérence.
« Bonjour, ma dame.
— Bel exemple de politesse, répondit l'ectoplasme. Je vous remercie. »
Son regard inexpressif s'attarda sur Maurice avant de revenir sur le chevalier.
« Qui êtes-vous, gente dame ? lui demanda Eric avec déférence. Êtes-vous... décédée ?
— Je suis une entité créée par votre hôte, messieurs. Mon histoire se situe quelque part au XXème siècle. »
Eric jeta un coup d'œil au vieil homme. Maurice rougissait de manière très visible, le regard fixé sur le sol. Étrange. Le chevalier reporta son attention sur le fantôme, gardant ses questions pour plus tard.
« Et, sinon... Pourquoi cette robe ?
— C'est une robe de mariée, le Créateur aime beaucoup ces vêtements.
— Il aurait vu ces tenues dans notre monde... donc il connaît notre univers ! s'exclama Eric. C'est un homme qui vient de chez nous ! Un magicien, sans doute.
— Les magiciens n'existent pas, répliqua Maurice en levant les yeux au ciel. Tout ce qui est surnaturel de se trouve qu'ici. Il doit connaître certains détails de notre vie, et c'est valable pour nous tous, parce que... »
Son regard se reporta sur le fantôme. Le scientifique fronça les sourcils.
« Parce que c'est constant. Des références à la pelle.
— Le Créateur comprend ce que vous voulez voir, murmura la femme.
— Je ne veux pas voir ça. » répliqua le vieil homme en fermant les yeux.
Eric voulut les interrompre mais se ravisa. De quoi parlent-ils ? Il n'osait pas le leur demander. La tension qui régnait dans la pièce devenait étouffante. Maurice fit un pas en avant en entrouvrant les paupières. Il semblait blessé et déçu.
« C'est juste... cruel de me faire ça. Franchement, c'était ça, mon cadeau ? Eh bien vous pouvez le reprendre.
— Pardonnez-moi, le coupa Eric, mais est-ce que–
— Quoi ?
— Qui est-ce ? Je ne comprends pas votre désarroi. »
Le chevalier crut que Maurice allait se décomposer. Les deux hommes se tournèrent vers le fantôme de concert, silencieux. Eric hésita encore une fois à être trop curieux, mais il avait besoin de savoir.
« Vous la connaissez. Est-ce que je me trompe ?
— Tu ne te trompes pas, mon gars, soupira le scientifique en se grattant la tête. Cette fille a le même visage que Galina, la secrétaire de mon laboratoire.
— Je vois, acquiesça Eric, même s'il ne voyait pas du tout. Et... aurait-elle eu un accident ? Permettez-moi d'être curieux, mais vous sembliez triste.
— Non, elle va très bien, mais elle ne s'intéresse pas à un vieillard comme moi. »
Eric marmonna quelques excuses contrites. Il avait voulu se renseigner sur son nouvel ami et n'avait découvert qu'un amour à sens unique. C'est tellement... désolant. Le chevalier héla le fantôme :
« Ma dame, pourriez-vous changer de visage, s'il-vous-plaît ? Mon ami n'apprécie pas que vous imitiez sa bien-aimée. »
Eric sentit les poils de ses bras se hérisser lorsqu'il vit les traits de la jeune femme se transformer sous ses yeux. Mais la surprise le quitta vite et il soupira en reconnaissant la personne choisie par le fantôme.
« J'ai eu peur. Ce n'est que ma mère. Allez-y, cela ne me dérange pas ! »
Il déglutit tout de même avec difficulté. Voir un membre de sa famille alors qu'il était si loin de chez lui n'était pas aisé à vivre. Eric avait toujours été sujet au mal du pays, qu'il fût à quelques jours de marche de sa grande maison ou dans un monde parallèle. Il tenta de focaliser son esprit sur autre chose que le regard inquisiteur de sa mère et demanda :
« Veuillez excuser ma question, ma dame... Où se trouvent nos présents ? Nous ne voudrions pas abuser de votre temps.
— Prenez ceci. »
Même sa voix est celle de Mère... Eric fit la moue, toujours un peu inquiet, et tendit une main vers le fantôme. Sa mère avait beau être une femme respectable et juste, il se sentait intimidé par sa présence physique. Ce n'est pas elle, garde ton calme. Après tout, il n'était pas sur un champ de bataille.
« Je vous rappelle, dit le fantôme, qu'il s'agit d'un moment fantastique de votre vie. Chérissez-le. »
Eric saisit l'objet supposé être sien. Le chevalier haussa les sourcils, étonné.
« Cela ne me dit rien. Est-ce que... Serait-ce un morceau de métal... ? Oh. Oh non, parbleu, non. »
Il secoua la tête et laissa tomber le fragment sur le sol, sonné. Sous l'insistance du regard interrogatif de Maurice, Eric reprit sa contenance et expliqua :
« C'est le morceau d'épée qui était resté logé dans ma cuisse après mon tout premier entraînement au combat à cheval. Après cet accident, j'ai décidé de déserter chaque guerre à laquelle on m'enverrait. J'avais eu si mal, et c'était si... humiliant ! En quoi est-ce un bon souvenir, Mère? J'ai failli attraper la gangrène ! On aurait dû m'amputer de la jambe droite jusqu'à la hanche ! »
Il regarda le fantôme avec incompréhension.
« Comment avez-vous pu entrer en possession de ce fragment ?
— C'est une copie, répondit l'ectoplasme, du ton sévère de sa mère.
— Mais comment pouviez-vous le savoir ? Est-ce que vous m'observez depuis ma naissance ? »
Le fantôme ne répondit pas. Eric était de plus en plus effrayé.
« Est-ce une conspiration ?
— Eric... »
Le chevalier se tourna vers Maurice, inquiet du ton que son nouvel ami venait d'employer. Le vieil homme tenait du bout des doigts l'objet qu'il avait reçu, comme si celui-ci le dégoûtait.
« Je n'ai jamais vu une chose pareille, avoua Eric.
— C'est un Nagant M1895. Une arme à feu, un revolver.
— Je vois. Et... est-ce qu'il vous appartient ?
— Non. Mais ce n'est clairement pas un bon souvenir. Ça ne peut pas en être un. Je suis un scientifique, je ne manie pas ce genre d'engins.
— Peut-être devrions-nous poser cette question à– »
Le reste de la phrase mourut sur ses lèvres lorsqu'il s'aperçut qu'ils étaient de nouveau seuls.
« Elle est partie, pardieu.
— Vraiment incroyables, tes jurons..., se moqua gentiment Maurice. Ils se sont fichus de nous avec leurs cadeaux, tu ne crois pas ?
— En effet... Il faut retrouver nos compagnons pour les aider à supporter la vision de ces objets. Certains ici ne semblent pas capables de supporter le moindre choc. »
Il pensait à Charles et Juka. Maurice haussa les épaules et se dirigea vers la porte. Il voulut l'ouvrir et émit un juron qu'Eric n'avait jamais entendu.
« C'est fermé ! s'exclama le vieil homme en râlant.
— VOUS DEVEZ RESTER ICI JUSQU'À LA FIN DES ÉPREUVES DE VOS AMIS.
— Faites-nous sortir ! rugit Eric. C'est une honte d'enfermer des innocents sans plus d'explications !
— JE SUIS DÉSOLÉ. »
Maurice devint cramoisi de colère.
« Ça ne va pas suffire ! Arrêtez de nous prendre pour des cons, ça a assez duré ! Est-ce qu'on saura ce qu'on fait ici avant de crever ?
— PEUT-ÊTRE PAS.
— Mais... mais vous vous foutez vraiment de–
— VOUS NE COMPRENEZ TOUJOURS PAS.
— Vous n'expliquez toujours pas ! répliqua Eric en croisant les bras. Si vous n'avez pas peur de nous, prenez au moins conscience de notre désarroi. Nous sommes désespérés. Regardez Maurice ! Il est loin de la femme qu'il aime. Est-ce humain de l'enfermer ici ? »
Si jamais notre hôte est Dieu en personne, je brûlerai sans doute en Enfer pour l'éternité après de telles provocations.
« CE QUI EST HUMAIN NE ME REGARDE PAS. »
Interloqué, Eric ne sut que répliquer. Il jeta un coup d'œil à Maurice, mais ce dernier était aussi pétrifié que lui.
C'est sans espoir.
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