Huit mois plus tôt. Partie 2

Louis,

James tient fermement la bouteille par le corps, et pousse le bouchon avec ses deux pouces vers l'extérieur. Le bouchon s'échappe de la bouteille en un « bop » et se dirige vers le plafond. James remplit rapidement la première coupe et la donne à Monsieur Styles, la seconde à Harry, la troisième à moi-même et la quatrième pour lui. Nous levons tous les quatre nôtres verre à ce nouvel accord conclu entre Styles Factory et M&T Affaires. Je me penche vers Harry et trinque avec lui en lui faisant un clin d'œil. Il me regarde en esquissant un sourire, confiant et boit sa première gorgée de champagne.

Après avoir signé mon contrat avec mes clients français lors de mon voyage d'affaires à Paris, j'ai dès mon retour, discuté avec James Miller, mon associé, du potentiel projet avec l'entreprise du père d'Harry. Nous avons organisé quelques rendez-vous avec Robin Styles afin de connaître ses motivations, ses projets pour son entreprise et en commun avec notre entreprise. Puis, nous avons rédigé un contrat qui convienne aux deux parties. Trouver un terrain d'entente a été assez compliqué, mais nous avons réussi. James est un très bon homme d'affaires, mais c'est un vrai requin. S'il peut prendre plus de part sur un contrat, alors il le fera sans pitié. Mais je n'avais pas envie de jouer cette carte avec le père d'Harry, alors j'ai essayé de le raisonner et il a accepté de faire 50/50.

Après avoir discuté avec Monsieur Styles de ses futurs projets avec notre entreprise, James s'approche de moi.

- Alors Louis, comment as-tu rencontré Harry ? Me demande James, curieux.
- Lors d'une soirée. J'étais avec mes amis, et tu me connais James, je déteste danser. Alors, je me suis assis au bar, et Harry est venu m'offrir un verre, et nous avons commencé à discuter.
- Vous vous entendez plutôt bien à ce que j'ai pu voir.
- Oui, Harry est très gentil, et il est très pétillant. On ne s'ennuie jamais avec lui.
- D'accord, je suis content pour toi.

Je souris faiblement à James. Je déteste ce genre de phrase. On dirait que je ressemble à un désespérer. Je termine ma coupe de champagne, et la pose sur le bureau de mon collègue. Je vais retourner travailler dans mon bureau. Je dis au revoir à Monsieur Styles en lui serrant la main. Je lui dis que s'il a besoin de quoi que ce soit, qu'il n'hésite pas à m'appeler, je serai disponible pour lui. Puis je fais la bise à Harry et lui dit à demain. Nous allons dîner au Gizmo demain soir. C'est moi qui l'ai proposé à Harry. J'ai tellement aimé ce restaurant, que j'avais envie d'y retourner pour goûter d'autres spécialités.

Je sors du bureau de mon collègue et retourner travailler dans le mien.

Je lève les yeux pour la énième fois en écoutant Zayn râler à propos de son travail ou des choses de la vie quotidienne qui l'agacent, et ça me fait sourire. Je suis en train de me préparer pour mon dîner avec Harry. Zayn a débarqué chez moi à l'imprévu, comme très souvent. Il n'a pas de jour ou d'heure habituelle, mais ça lui prend comme une envie pressante. Je me recoiffe en me regardant dans le miroir, je me remets un peu de parfum, je regarde si je n'ai rien de coincé entre les dents, puis je me tourne vers mon meilleur ami qui est assis sur le bord de mon lit, et lui demande comment il me trouve.

- Tu es très beau, et en plus tu t'es rasé. Ça me fait plaisir.

Nous rions. J'avais besoin de me raser, c'est rare, mais ça arrive. Je me dirige vers mon armoire et je sors une veste noire.

- Tu ne m'as même pas dit ce que tu faisais ce soir.
- Je vais au restaurant.
- Tout seul ?
- Non, dis-je en riant. Avec... Quelqu'un.

Zayn me regarde en plissant les yeux, puis il se lève et s'avance vers moi.

- Pourquoi tu me regardes comme ça ?
- Lou, je sais que tu vois quelqu'un depuis quelque temps maintenant, et tu ne m'en pas encore parlé.
- C'est juste un ami, Zayn. Il n'y a rien entre nous. On s'entend juste bien.

Il me regarde de nouveau en plissant les yeux. Je pouffe de rire et roule des yeux.

- Je peux au moins connaître son prénom ?
- Harry.
- D'accord.

J'esquisse un sourire en le regarde. Je vois qu'il s'apprête à dire un truc du genre "Je suis content pour toi", mais je le coupe en lui demandant gentiment de ne rien dire. Il acquiesce simplement de la tête. Bien. Je suis prêt. Nous descendons dans l'entrée. Je prends mes affaires, puis nous sortons de la maison. Je ferme la porte à clé et me tourne vers Zayn pour lui dire au revoir. Je lui demande d'embrasser Liam pour moi, et lui souhaite une bonne soirée. Mon meilleur ami ne peut s'empêcher de faire quelques sous-entendus vis-à-vis d'Harry et moi. Je ris, et lui dit qu'il serait le premier au courant s'il se passait quoi que ce soit. Misère. Maintenant que Zayn a confirmation que je vois quelqu'un et qu'il sait comment ce quelqu'un s'appelle, il ne va pas arrêter de faire des blagues de tout genre. Je secoue vaguement la tête de façon négative en pensant à ce que Zayn serait capable de dire, avant de monter dans ma voiture. Je boucle ma ceinture, et pars en direction du Gizmo.

Quelques minutes plus tard, j'arrive et parviens à me garer juste devant "Le Gizmo". Lorsque je roulais, j'ai reçu un message d'Harry me disant que l'on se rejoigne à l'intérieur. Je descends de ma voiture, la ferme à clé et me dirige vers l'entrée du restaurant. Harry est dans le hall, il discute avec la femme de la dernière fois, Sarah, il me semble. Encore une fois, Harry est magnifique. Ses cheveux bouclés sont coiffés vers l'arrière, ses lèvres sont légèrement rosées et son sourire est toujours aussi charmeur. Sarah me voit arriver et lui signale ma présence. Harry se tourne vers moi et me fait un grand sourire avant de venir me faire la bise.

- Comment vas-tu ?
- Très bien, et toi ?
- Bien, merci.

Sarah nous emmène à la merveilleuse table d'Harry, accompagnée de cette formidable vue sur New-York. Nous nous installons l'un en face de l'autre. Sarah nous donne la carte des menus, et nous demande ce que nous souhaitons boire. Je prends un cocktail ananas et kiwi et Harry un Monaco pêche. Sarah prend note avant de partir en cuisine.

- Je ne te l'ai pas demandé la dernière fois, mais pourquoi cette table est aussi importante pour toi ?
- Eh bien, c'est une histoire de famille. Avant, cette salle était agencée autrement. Et il y avait une table à cet endroit qui pouvait accueillir cinq personnes. Mes parents, ma sœur et moi venions y manger deux fois par mois. Et c'était notre table.
- D'accord. Et maintenant qu'ils ont changé la salle, vous n'y venez plus tous ensemble ?
- Ma sœur est décédée il y a quatre ans. Mes parents ont cessé de venir dîner ici, mais pas moi. Ce restaurant est beaucoup trop symbolique pour moi.
- Je suis désolé pour toi.
- Tu ne pouvais pas savoir.

Nous changeons rapidement de sujet pour passer à quelque chose de plus joyeux. Sarah revient avec nos boissons, et nous décidons de trinquer à cette soirée en tête-à-tête, avant de déguster nos cocktails.

Le dîner se passe merveilleusement bien. Harry a pris une escalope milanaise et moi une pizza typiquement italienne : La Regina. Tous ces bons petits plats sont accompagnés d'un verre de vin rouge. Nous discutons de tout et de rien, de mon voyage d'affaires en France, de la ville de Paris que j'ai vaguement pu visiter. J'étais plus là-bas pour le côté professionnel que pour le tourisme. Harry me raconte ensuite quelques-uns de ses voyages qu'il a fait avec ses parents lorsqu'il était plus jeune ou bien des voyages qu'il a fait avec ses amis. Il me dit qu'il rêve d'aller en Australie et au Japon. Je pense que l'Australie me plairait, mais le Japon un peu moins. C'est un peu moins mon univers. Puis, il y a un petit blanc entre nous. Ce qui est plutôt rare étant donné qu'Harry parle beaucoup en général.

- Je tenais à te remercier de nouveau pour mon père. Signer avec ton entreprise va beaucoup l'aider, dit Harry en posant sa main sur la mienne.

Je suis assez surpris par son geste, mais je ne dis rien. Je souris avant de répondre que c'était avec plaisir, et que j'espère que nous ferons de grands projets ensemble.

- Il avait vraiment besoin de quelque chose de nouveau. Depuis le départ de son associé, il avait l'impression de ne plus rien faire d'enrichissant, et de nouveau. Il tournait en rond dans son bureau et à la maison aussi.
- Je comprends. C'est toujours difficile de gérer seul ses affaires après le départ d'un collègue.

Harry semble hésiter quelques instants avant de se lancer à me poser sa question.

- Tu faisais quoi avant de travailler avec James ?
- Rien, dis-je rapidement.
- Rien ? Répète Harry, surpris.
- Rien d'intéressant.
- C'est-à-dire ?

Je ne réponds pas, et baisse la tête. Je n'aime pas vraiment parler de ce que je faisais avant de travailler avec James. Je n'aime pas parler de mon passé tout court. Harry penche sa tête et continue de me regarder.

- Louis ?

Je relève la tête pour le regarder. Je soupire intérieur et sors un truc bidon, comme travailler dans la communication pour une entreprise de prêt-à-porter pour hommes. Harry trouve ça plutôt intéressant, lui qui aime la mode. Je ne donne pas de détails sur ce mensonge. Je lui dis que ce n'était pas quelque chose qui me correspondait et que c'est pour cela que j'ai décidé de me diriger vers les affaires et de monter ma propre boîte avec James qui était l'un de mes amis de la fac.

- Et toi ? Pourquoi tu as voulu faire instituteur ? Lui demandé-je à mon tour.
- Parce que j'adore les enfants depuis que je suis ados. Je faisais du baby-sitting, et de l'aide aux devoirs quand j'étais au lycée, puis à la fac pour pouvoir me payer ma première voiture.
- Super.
- Tu veux des enfants plus tard, Louis ?
- Non.

C'était peut-être un peu brusque, mais c'est la vérité. Je ne veux pas d'enfants. Dans un monde comme le nôtre, ce serait égoïste de ma part de vouloir leur faire vivre ce que nous vivons au quotidien. Je suis pour l'adoption homosexuelle, mais ce n'est pas pour autant que je veux moi-même des enfants. Je sais que je fais partie d'une famille nombreuse, mais je ne veux pas fonder une famille. Ma famille.

- Oh. D'accord. Tu... n'aimes pas ça ?
- Si, j'aime les enfants. J'aime mes sœurs et mon petit frère, mais je ne veux pas d'enfants. Ce n'est pas... dans mes projets.
- Je vois.

Harry semble être déçu de ma réponse, mais je préfère qu'il le sache maintenant. Ce n'est pas dans mes projets aujourd'hui, et ça ne le sera pas non plus dans les années à venir. Désolé Harry.

Je sais que j'ai perdu quelques « points » auprès d'Harry ce soir. La fin du dîner n'était pas tendue, mais plutôt calme, et c'était la première fois qu'Harry était aussi silencieux. En dessert, nous avons simplement pris une boule de glace à la vanille pour moi, et à la pistache pour Harry. J'ai payé le dîner. Il m'a remercié avec un doux baiser sur la joue, puis nous nous sommes quittés dehors, devant le restaurant. Je n'ai pas osé lui proposer de venir chez moi boire un « dernier verre », alors nous sommes repartit chacun de notre côté. Et depuis cette soirée-là, je ne fais que de penser à Harry, et sa réaction. Pourquoi a-t-il été aussi déçu de ma réponse ? Nous ne sommes pas ensemble, nous ne sommes pas un couple. Alors pourquoi a-t-il réagi comme ça ? Est-ce qu'il attend quelque chose de moi ? Non... Je ne suis pas... Le style d'homme d'Harry. Je suis le genre d'aucun homme. Je ne suis pas intéressant, je ne suis pas drôle, je suis trop... Renfermé et sérieux. Je ne peux attirer un homme comme Harry. Nous sommes trop différents, ça ne pourrait pas marcher entre nous.