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X - Prototype


Le soir, Marinette raconta la scène à Adrien.

— Tu crois que j'ai fait une bêtise ? s'inquiéta-t-elle.

— Je ne pense pas. La collection dont tu t'es inspirée est ancienne, et tout le monde la connaît. Je ne comprends même pas qu'on ne t'ait pas laissé prendre tes croquis ce soir.

Le lendemain, quand Marinette se présenta auprès d'Éliane, cette dernière lui dit :

— Madame Bernette veut te voir, ce matin.

Marinette sentit une boule se former dans son ventre. Elle avait bien senti hier qu'elle avait fait quelque chose de mal. Allait-on la renvoyer ?

Quand elle pénétra dans le bureau, elle sut qu'elle ne s'était pas trompée. Ses dessins étaient posés sur la table de travail de sa supérieure.

— Bon... bonjour, Ma... madame, se força-t-elle à prononcer.

— Bonjour, Marinette. Vos croquis m'ont donné une idée. Pourquoi n'en choisiriez-vous pas un pour créer un prototype. Vous avez vu pratiquement tous les postes, vous êtes supposée vous débrouiller sur tout le processus après deux années d'école. Comme vous vous êtes basée sur notre collection d'il y a trois ans, il nous reste les tissus et accessoires qui pourront correspondre. Vous demanderez à Marisa de vous les montrer. Vous en sentez-vous capable ?

— Je... je ne sais pas, répondit Marinette ébahie.

— Il faut vous décider. Je n'ai pas beaucoup de temps à vous accorder, répliqua madame Bernette d'une voix agacée.

— Oui, oui ! Je peux ! Je vais essayer ! Je... Oui, s'empressa d'accepter Marinette.

— Très bien. Vous verrez donc avec Marisa pour le tissu, Helen vous aidera pour le patronage, et Éliane supervisera l'assemblage.

— Bien, madame.

— Monsieur Joliet m'a fait savoir qu'il ne vous avait pas trouvé très douée. Avez-vous eu un problème avec lui ?

— Rien que je n'ai pu résoudre, répondit Marinette en levant le menton, ne voulant pas amoindrir la bonne opinion que la première d'atelier avait d'elle.

— Très bien, répondit madame Bernette. Allez, il est temps de vous mettre au travail.

— Oui, madame. Merci, Madame, dit encore Marinette avant de reculer vers la porte.

— N'oubliez pas vos croquis !

— Non, Madame, merci, Madame, répéta Marinette en prenant la liasse et se sauvant.

oOo

En sortant du bureau de la première d'atelier, Marinette flottait sur un petit nuage : elle allait créer un prototype, inspiré d'une collection de Gabriel Agreste, avec du matériel professionnel, sous la supervision de couturières de haut niveau. C'était comme dans un rêve. Elle eut envie d'appeler Adrien pour lui faire partager sa joie, mais elle décida d'être raisonnable. Cela pouvait attendre le soir.

Il fallait qu'elle se calme et prenne les choses dans l'ordre : choisir le modèle, vérifier qu'elle aurait les tissus et accessoires désirés à sa disposition, puis réaliser le patronage.

Elle revient près d'Éliane, ses papiers à la main et commença à les examiner. Elle avait prévu plusieurs sortes de vêtements : des robes de cocktail, robe du soir, pantalon avec blouse, une jupe-culotte longue. Pour chacun d'eux, elle nota le tissu approprié et le métrage approximatif dont elle aurait besoin, ainsi que tous les accessoires qu'elle projetait d'y ajouter. Elle avait aussi prévu des ceintures et des sacs, mais savait que cet atelier n'était pas outillé pour travailler le cuir.

Elle alla voir la responsable des matériaux pour expliquer ce que madame Bernette lui avait demandé. Toutes deux allèrent dans la réserve et regardèrent ce qui était à disposition. En touchant le tissu qu'elle avait prévu pour la blouse, Marinette craqua. Il était magnifique. Elle ne pouvait pas résister à l'envie de le travailler.

— On prend aussi de quoi faire le pantalon ? demanda Marisa en regardant le croquis.

Marinette hésita. Aurait-elle le temps ? Elle ne savait pas si elle serait encore là la semaine suivante. Oh, et puis après tout, pourquoi pas ? Aurait-elle une autre opportunité comme celle-ci ensuite ?

— Oui, s'il vous plaît.

Les deux femmes choisirent ensuite le tissu de la doublure, et mirent de côté les accessoires dont Marinette aurait besoin. Marisa conseilla utilement Marinette, lui indiquant quel matériau serait à même de donner le volume qu'elle avait prévu sur le papier, et quel accessoire risquait d'en alourdir la forme.

Ensuite, Marinette se rendit dans le coin du patronage. Elle vit avec soulagement que monsieur Joliet n'était pas venu ce matin-là. À deux tables de là, Helen était en train de découper des tissus, en suivant les patrons en papier que le patronnier avait créé les deux jours précédents.

— Tu as besoin de l'ordinateur ? demanda Helen.

— Euh, je dois faire un patronage, mais je ne suis pas certaine de connaître votre logiciel, dit prudemment Marinette qui en avait un autre sur son ordinateur personnel.

— Mais qu'est-ce qu'on vous apprend à l'école ? pesta la couturière.

— Je n'ai pas pu suivre tous les cours pour des raisons de santé, prétendit l'apprentie styliste.

— Bon, je vais te montrer les bases. Si tu n'y arrives pas, soit tu te débrouilles à la main, soit je te fais ça ce soir, si j'ai le temps.

— Merci.

Finalement, une fois qu'Helen lui eut fait une démonstration, Marinette se familiarisa facilement avec l'outil. Elle avait déjà dû l'utiliser. Pour qu'elle ne parte pas de rien, la couturière lui avait montré la bibliothèque où étaient stockés les fichiers correspondant à chaque collection. Marinette retrouva ceux qui avaient été dessinés pour créer celle sur laquelle elle se basait. Elle avait parfaitement en tête les modifications qu'elle avait prévues pour donner aux vêtements masculins une ligne plus féminine. Par contre, il lui fallait des mesures précises. Comme Gabriel Agreste ne faisait que de la mode pour homme, seules des mesures masculines – et notamment toutes celles qui avaient accompagné la croissance d'Adrien – se trouvaient dans l'historique des fichiers.

Elle pensa mettre les siennes, puis changea d'avis. Elle traversa l'atelier pour revenir auprès d'Éliane.

— Pourrais-je avoir vos mesures, pour mon prototype ? demanda-t-elle.

— Tu veux que je te serve de mannequin ?

— Cela vous ennuie ?

— Non, au contraire, je suis flattée que tu veuilles me voir dans ta création. Qu'as-tu choisi de faire ?

— L'ensemble blouse et pantalon.

— C'est vrai que cette forme m'ira bien. Tu as l'œil.

Elle prit une feuille de papier et griffonna une suite de chiffres.

— C'est bon, tu me relis ?

Marinette vérifia et hocha la tête.

— C'est parfait. Merci.

Elle passa l'heure suivante totalement concentrée sur l'ordinateur. Éliane et Helen durent insister pour que Marinette les rejoigne à la cuisine à l'heure du déjeuner. En arrivant, Marinette réalisa qu'elle était le sujet du jour.

— Alors, il paraît que tu veux féminiser les collections Agreste ? plaisanta une couturière.

— Ça nous changerait, relança la brodeuse.

— On aura le droit à un défilé ? demanda une troisième.

— Par contre, tu perds tes chances que notre mannequin vedette vienne pour l'essayage.

— C'est vrai, tu as raté l'occasion de planter des épingles sur le bel Adrien.

Marinette ne peut s'empêcher de rougir. Cela n'échappa pas à son entourage.

— Oh, tu vois de qui on parle, la taquina une couturière, bientôt suivie par ses collègues.

— Tu fais partie de son fan-club ?

— Tu vas changer d'avis sur le modèle ?

— Non, non, répondit Marinette. Même si j'avais opté pour un modèle masculin, il ne se serait sans doute pas dérangé pour ça.

— Ça, on n'en sait rien, dit Éliane. C'est vraiment un garçon adorable. Il faut bien le dire, c'est notre chouchou à toutes.

Tout le monde approuva de la tête.

— Et il est très poli, ajouta Marisa. Toujours un mot aimable, même quand l'ajustement a été long et qu'il pourrait se montrer fatigué ou irritable.

— Trop poli, en fait, déclara Helen. Un gamin qui ne dit pas un mot plus haut que l'autre, ce n'est pas normal.

Alors que s'engageait une discussion sur les méthodes d'éducation, Marinette songeait qu'effectivement, Adrien était adorable et patient. Mais pour autant, il avait des points faibles et des révoltes, mais ne les laissait voir qu'à très peu de personnes. Elle se demandait qui, à part elle-même, l'avait vu sous son vrai jour. Nino ? Oui, sans doute. Son père ? Elle n'aurait pas parié là-dessus. Alya ? Peut-être. Et cela s'arrêtait là.

— Ça te rend rêveuse qu'on parle d'Adrien ? demanda Helen.

— Je me disais que lorsqu'on est célèbre, ça doit être difficile de se faire de vrais amis, expliqua Marinette. Des personnes devant lesquelles on peut se montrer comme on est réellement, avec ses faiblesses.

— Il n'y a pas que les célébrités qui ont ce problème, contesta une couturière. Ça arrive à plein de monde, et la plupart n'ont pas autant d'argent pour avoir la belle vie. Je ne dis pas ça pour Adrien, qui est un garçon adorable, mais en général, je ne pleure pas sur les gosses de riches.

— En tout cas, c'est bien qu'il ait repris le mannequinat, dit Marisa. Cela faisait drôle de recevoir d'autres garçons. Et aucun ne lui arrivait à la cheville.

— À croire que c'était intentionnel pour le convaincre de revenir, souffla tout bas Helen, qui se trouvait la plus proche de Marinette.

À ce point de la conversation, Marinette s'excusa et revint à son patronage.

oOo

Ce soir-là, à l'heure où partirent les couturières, Marinette n'était pas réellement satisfaite de ses patrons. Elle avait commencé par la pièce la plus difficile à dessiner et elle avait pris du retard sur le programme qu'elle s'était fixé. Elle téléphona à Adrien pour le prévenir qu'elle rentrerait tard.

— Tu veux que je vienne te chercher ? proposa-t-il.

— Non, ne t'embête pas. Je t'appellerai en partant.

— Ne dépasse pas 22 heures, d'accord ?

— Non, non.

— Je t'appelle à 22 heures si je n'ai pas eu de nouvelles de toi, dit Adrien. Travaille bien, ma libellule.

Avant de partir, Madame Bernette, la voyant en plein travail, lui apprit qu'elle ne pouvait pas sortir sans l'assistance du veilleur de nuit après 20h. Elle lui donna le numéro de téléphone à appeler pour être raccompagnée à la sortie. Marinette termina finalement à 21h30 et fit la connaissance du gardien des locaux et de son chien.

De retour chez elle, elle raconta sa bonne fortune à Adrien.

— Ah, c'est pour ça que madame Bernette a gardé tes croquis, comprit-il. Elle voulait les examiner pour savoir s'ils valaient le coup. Apparemment, c'est le cas.

— Tu crois que ton père est au courant ? s'inquiéta Marinette. J'ai en quelque sorte copié sa collection.

— Tu t'en es inspiré, ce n'est pas pareil. Tu veux que je me renseigne ?

— Non. Inutile de donner à cette demande plus d'importance qu'elle n'en a. Je suppose que madame Bernette a voulu me tenir occupée, c'est tout.

oOo

Le jeudi, Marinette se plaça près d'Éliane pour commencer l'assemblage. Celle-ci lui prodigua quelques conseils, sans pour autant se prononcer sur ce qu'elle pensait des vêtements qui prenaient forme peu à peu. Elle dénicha dans les réserves un mannequin de couture féminin que Marinette put adapter pour le mettre aux mensurations qu'elle désirait.

Le jeudi soir, les mains un peu tremblantes que Marinette vêtit le mannequin de la blouse de soie qu'elle avait conçue. Elle ferma soigneusement les boutons et noua le ruban qui soulignait le col. Elle posa ensuite quelques épingles pour marquer les endroits où elle devait ajouter des accessoires.

— Je me vois bien là-dedans, déclara Éliane, qui s'était avancée pour la voir faire.

Elle regarda les coutures de près avant de remarquer :

— Tu as été un peu juste avec ta valeur de couture à la taille.

— Euh, oui, convint Marinette d'une voix penaude.

— Cela ne se voit pas tellement. On a l'œil, ici, forcément. De toute manière, tu ne seras pas couturière, toi.

Sur ces bonnes paroles, Éliane retourna à sa machine. Marinette, et ce n'était pas la première fois, se demanda quel genre de test on était en train de lui faire passer. Éliane avait bien compris que ce n'était pas un poste de petite main que Marinette espérait atteindre. La question était : est-ce qu'elle pouvait convaincre qu'elle ferait une bonne styliste en faisant ce pastiche féminin du travail de Gabriel Agreste ? Qu'est-ce que ce dernier allait-il en penser en l'apprenant ? Pourquoi Éliane, Helen et Marisa s'étaient-elles montrées si coopératives ? Était-ce simplement par gentillesse ou en avait-elle reçu l'ordre ? Qui l'avait donné ?

Marinette repoussa toutes ces questions. Elle devait se concentrer sur son travail. Elle espérait terminer le lendemain soir et elle avait encore beaucoup à faire.

oOo

Le vendredi, elle piqua et cousit sans lever le nez. Elle assembla le pantalon, sa doublure et entreprit de placer les accessoires. Elle avait utilisé les mêmes boutons que pour la forme masculine, mais en les disposant en décorations élaborées, et non seulement pour leur fonction utilitaire. De même, elle avait utilisé le ruban qui servait ganse d'une manière plus artistique.

— Je peux prévoir l'essayage pour 16h ? demanda Éliane en début d'après-midi.

— Je... oui, je pense que c'est possible.

— Parfait.

À l'heure dite, Éliane disparut derrière le rideau qui dissimulait un des coins de la pièce. Elle appela ensuite Marinette, pour l'aider à bien ajuster les plis du corsage et renforcer un ourlet.

Quand elles sortirent de leur cabine improvisée, Marinette vit que toutes les ouvrières s'étaient rassemblées et qu'elles étaient assises sur des chaises délimitant une sorte de piste. L'une d'elle lança de la musique avec son téléphone, et Éliane avança, regardant au loin comme un mannequin, la main sur la hanche pour mettre la forme de sa manche en valeur, entre les deux rangées de spectatrices. Il n'y avait nulle parodie dans sa démarche, et Marinette comprit que la mise en scène n'avait pas pour but de se moquer d'elle. On l'associait à un amusement entre collègues. Elle sourit largement, puis se concentra sur la couturière qui revenait vers elle, pour voir l'effet de sa création sur un corps en mouvement. Elle aurait pu se permettre de faire bouffer la manche un peu plus, décida-t-elle.

La rejoignant, Éliane lui prit la main, et l'entraîna avec elle pour un second tour de piste, tout comme un créateur accompagne son dernier modèle pour saluer son public. Marinette se prêta de bon cœur à la représentation, saluant de la tête, pour remercier ses collègues qui applaudissaient – car elle voyait bien une forme d'acceptation dans la mise en scène. Enfin, les deux femmes revinrent à leur point de départ et la musique s'arrêta.

— Merci à toutes, lança-t-elle à la cantonade. Ça fait rêver, un tel accueil.

— C'est important, les rêves, surtout à ton âge, dit Marisa.

— Ne lâche pas, tu es bien partie, confirma Helen. C'est vraiment très réussi.

— Ça fait un moment qu'on n'avait pas eu l'occasion de s'amuser, ajouta une des couturières. Merci à toi, Marinette.

La stagiaire aida les ouvrières à ranger les chaises puis madame Bernette vint la trouver.

— Lundi soir, vous me remettrez les fiches techniques de vos deux pièces. Faites-les comme si elles appartenaient réellement à la collection.

— Oui, Madame, dit Marinette, qui avait déjà soigneusement noté la plupart des éléments qu'elle devait y reporter.

— Par ailleurs, je trouve dommage que votre ensemble ne soit pas complété par une veste. Pensez-vous pouvoir en créer une d'ici la fin de la semaine prochaine ? Vous savez qu'ensuite nous fermons quinze jours, pour les fêtes de fin d'année.

— Oh, oui, j'aimerais beaucoup ! s'exclama Marinette.

— Parfait. Tenter de monter d'un cran. Prévoyez des broderies, car je ne vous ai pas encore mise à ce poste-là. Frida vous aidera. Soyez ambitieuse.

— Oui, Madame. Merci, Madame.

— Bien. Passez un bon week-end, Mademoiselle Dupain-Cheng.

oOo

Adrien eut du mal à obtenir l'attention de Marinette les deux jours suivants. Après lui avoir raconté avec émotion la scène du défilé, elle s'investit totalement dans son projet de veste.

— Marinette, il faut dormir, insista Adrien. Et manger. Tu as le droit de prendre une douche, aussi.

— Je l'ai prise ! s'insurgea Marinette.

— C'était pour voir si tu m'écoutais.

Adrien demanda également à Marinette de lui reproduire le croquis des modèles qu'elle avait terminés. Quand elle lui donna sa feuille de dessin, il sourit :

— Je vois tout à fait à quoi tu t'es référée. Et cela ne m'étonne pas. Tu as adoré cette collection à sa sortie. Regarde dans ton album, tu as plein de photos de moi dedans.

Marinette fouilla dans ses archives et retrouva les images qu'elle avait découpées dans les journaux de mode.

— Oh, tu es jeune, dessus, remarqua-t-elle.

— Ah, je suis rassuré.

— Pourquoi ?

— Je constate que tu t'es habituée à ma tête d'aujourd'hui. C'était moins vrai il y a trois semaines, pas vrai ?

— Oui, tu as raison. Je m'accoutume à la mienne aussi, réalisa-t-elle. Je ne suis plus surprise quand je me découvre dans la glace.

— Cela fait presque un mois que tu vis avec cette mémoire-là, rappela Adrien.

— Déjà ? s'étonna-t-elle. Bon, en tout cas, je confirme, j'adore cette collection-là, et tu es à croquer dedans.

— Je suis toujours à croquer, affirma Adrien.

Marinette lui jeta un regard en dessous.

— Mhum, pas faux. Il est possible que je commence à avoir faim.

— Oh, vraiment ? Bonne nouvelle. Mais je suppose que je n'ai aucune chance, aujourd'hui, face à cette fichue veste.

Marinette dut bien s'avouer qu'elle préférait continuer à dessiner plutôt qu'évaluer jusqu'où elle était prête à aller avec Adrien. Son air penaud fit rire son ami :

— Au moins une chose qui n'a pas changé, remarqua-t-il avec philosophie.

Il l'embrassa sur le haut du crâne et annonça :

— Je vais voir Nino. Je te laisse à tes crayons.

oOo

Le lundi matin, pressée de donner forme à son dessin définitif, Marinette se précipita sur l'ordinateur pour commencer son patronage. Elle était arrivée l'une des premières, et l'atelier se remplit peu à peu pendant qu'elle traçait les premières pièces.

— Qu'est-ce que tu fais là ? demanda soudain une voix courroucée.

Marinette découvrit monsieur Joliet à ses côtés, en train de la regarder d'un air furieux.

— Je dessine un modèle, répondit-elle le plus calmement possible.

— Je n'ai pas de temps à perdre avec tes gribouillages. Va jouer ailleurs.

Ravalant sa bile, Marinette prit le temps de sauvegarder et de fermer son fichier, pratiquement certaine qu'elle ne le retrouverait pas quand elle reviendrait. Le visage de marbre, elle laissa sa place et alla prendre des règles, crayons et feuilles à patron sur l'établi, avant de se replier vers la table d'Éliane. Elle allait dessiner à la main et n'avait pas envie de le faire à proximité de ce malotru.

Elle était en train d'étaler ses feuillets quand Helen vint la trouver.

— Tu ne veux pas tenter de faire un modelage ? lui proposa-t-elle faisant référence à la technique qui consistait à définir la forme des pièces de tissu en les appliquant directement sur un mannequin de couture.

— Je ne suis pas certaine d'y arriver, opposa Marinette en montrant ses croquis. Madame Bernette m'a demandé d'être ambitieuse, et je l'ai peut-être trop été.

Helen examina avec soin le projet de Marinette et indiqua :

— Écoute, il y a des personnes qui se croient sorties de la cuisse de Jupiter parce qu'elles savent tracer des traits avec l'aide d'un ordinateur. Et puis d'autres qui savent s'en passer et faire un modelage.

— À ce propos, je croyais que, pour la haute couture, on passait toujours par le modelage.

— Monsieur Agreste travaille toujours à plat. C'est sa méthode. Et si on suit bien les spécifications qu'il met, on obtient exactement ce qu'il avait en tête.

— Je vois. Mais je ne sais quand même pas si je saurais faire un modelage correct sur ce modèle, même si je sais ce que je veux au final.

— Eh bien, je suis là pour t'apprendre.

Elles prirent le mannequin de couture où Marinette avait disposé son premier ensemble, qui était déjà adapté aux mensurations d'Éliane. À midi, elles avaient déjà épinglé tous les bolducs et commencé des traçages sur des pièces de coton. Marinette avait l'impression que ce n'était pas la première fois qu'elle s'essayait à cet exercice, mais qu'elle ne s'était jamais mesurée à ce degré de complexité.

— C'est l'heure de manger, indiqua finalement Helen.

— Je finis ça, répondit Marinette, qui ne sentait ni la faim ni la fatigue quand elle faisait quelque chose qui la passionnait.

Helen n'avait pas la patience ni le degré de compréhension d'Adrien.

— J'ai dit, maintenant ! dit-elle un ton plus haut. Si tu ne viens pas, tu termines toute seule.

— Euh, tout de suite, accepta Marinette d'une voix plus docile.

Alors qu'elles se lavaient les mains, l'apprentie styliste remercia chaleureusement sa formatrice pour le temps qu'elle passait avec elle.

— Bah, si ça peut agacer Joliet, je considérerai que j'ai gagné ma journée.

Marinette allait demander à Helen pourquoi elle le détestait autant et, éventuellement, raconter ce qui lui était arrivé, mais la brodeuse, qu'elle connaissait moins bien, arriva à son tour dans les sanitaires et elle tint sa langue.

Vers le milieu de l'après-midi, Helen laissa Marinette continuer seule. Elle avait assez d'éléments pour se débrouiller avec le panneau en cours. La jeune fille était en train déplacer un pli d'aisance, quand Éliane lança soudain :

— Tiens, je ne savais pas qu'il devait passer aujourd'hui.

Marinette leva la tête et suivit le regard de la couturière. Adrien était dans l'atelier, en train de saluer celles qui se trouvaient près de lui.

Le choc fut tel qu'elle sursauta et se piqua avec l'épingle qu'elle était en train d'enfoncer dans le tissu. Tout en suçant son doigt malmené, Marinette se demanda frénétiquement comment réagir à la situation. Différentes attitudes défilèrent dans sa tête : je ne le connais pas ; il a été dans mon collège ; il a été dans ma classe ; on fait partie du même groupe d'amis ; c'est mon petit copain (non, surtout pas ça !). Elle se reprit cependant et calqua son attitude sur celle de sa mentor qui continuait à travailler tout en surveillant la situation du coin de l'œil. Au bout d'un temps qui parut à la fois très long et très court à l'apprentie styliste, le mannequin arriva à leur table.

— Oh, bonjour, Marinette ! dit-il d'une voix surprise. Ça fait un bout de temps !

— Bonjour Adrien, répondit-elle avec circonspection.

Marinette sentit, plus qu'elle ne vit, l'attention des couturières alentour se focaliser sur eux.

— Vous vous connaissez ? osa demander la première d'atelier qui accompagnait Adrien dans son tour de table.

— Nous avons été dans la même classe en troisième, répondit Adrien. Ça fait quoi... cinq ans ?

— Je ne pensais pas que tu te souviendrais de moi, posa Marinette pour justifier son silence sur leur relation.

— Quand même ! protesta Adrien. Tu étais la déléguée de classe. Et puis tu as gagné le concours de stylisme que mon père avait organisé au collège. J'ai même porté en défilé le chapeau que tu avais conçu.

Marinette s'efforça de ne pas le fusiller du regard. Elle n'avait pas du tout eu l'intention de s'en prévaloir.

— Vraiment ? s'étonna Éliane.

— Bonjour, Éliane, répondit Adrien. Toujours fidèle au poste à ce que je vois. Tout à fait. Malheureusement, le chapeau était couvert de plumes de pigeons et, comme j'y suis allergique, la première fois que je l'ai porté, j'ai eu une crise d'éternuements. On a dû les remplacer par des plumes synthétiques pour le défilé.

Les deux femmes sourirent à l'anecdote, puis Adrien et madame Bernette passèrent à la table suivante.

— Dis donc, petite, tu nous fais des cachotteries ? fit remarquer Éliane à Marinette.

— Ce n'était qu'un concours au collège. Monsieur Agreste l'a organisé pour faire plaisir à son fils, c'est tout.

— Si tu le dis, accepta la couturière.

Elles reprirent leur travail. Après avoir salué tout le monde, Adrien commença sa séance d'essayage. Il passa derrière un rideau pour se changer et se soumit aux mains des couturières. Au bout d'une heure, ce fut le tour d'Éliane de vérifier le modèle qu'elle avait exécuté la semaine précédente.

— Viens avec moi, dit-elle à sa stagiaire.

Marinette la suivit et bientôt Adrien sortit de la cabine. Il sourit à la jeune fille, avant de reporter son attention sur la couturière. Il bougea pour lui permettre de vérifier que le vêtement lui allait parfaitement bien.

— Qu'en penses-tu, Marinette ? questionna la couturière.

La jeune fille n'avait vu aucun problème. Adrien souleva discrètement une de ses épaules, permettant à Marinette de repérer le pli qui n'aurait pas dû se trouver là.

— Oh, d'accord, fit-elle, n'ayant pas l'intention de dissimuler l'aide qu'elle avait reçue. L'emmanchure à droite.

— Tout à fait, confirma Éliane. Juste quelques millimètres. Cela ne vous dérange pas, Adrien, que ce soit Marinette qui vous pose les épingles.

— Pas du tout.

Marinette prit le coussin à épingles et s'avança. Elle vit les yeux d'Adrien se mettre à briller et elle sut qu'il allait faire des siennes.

— Tu es moins maladroite qu'il y a cinq ans, j'espère ! lui lança-t-il.

— Il n'y a qu'une seule manière de le savoir, rétorqua-t-elle du tac au tac.

— Et la curiosité tua le chat, commenta-t-il d'une voix lugubre.

Tandis que des petits rires s'élevaient autour d'eux, Marinette ne put s'empêcher de fusiller son petit ami du regard, ce qui arracha un large sourire à Adrien. Monsieur Joliet, par contre, qui travaillait non loin, poussa un petit grognement méprisant, que Marinette s'efforça d'ignorer. La jeune fille s'empressa de poser les épingles. Éliane, qui s'était approchée pour vérifier qu'elle le faisait correctement, approuva de la tête, et Marinette recula. Après un dernier tour de piste, le mannequin alla changer de costume. Il lui allait parfaitement, ainsi que le suivant. Éliane et Marinette retournèrent à leur table, laissant la place à une autre couturière.

Une fois qu'elles furent réinstallées, Éliane dit à Marinette :

— Je ne pense pas qu'il ait voulu être méchant avec sa remarque. C'était juste une petite plaisanterie.

— Je le sais, la rassura la jeune fille. Dans le cas contraire, il aurait reçu un coup d'épingle. Tout à fait malencontreusement, bien sûr.

— Oh, tu es comme ça ! commenta en riant Éliane, qui ne semblait la croire qu'à moitié.

— Je dois reconnaître que j'étais vraiment très maladroite quand j'étais plus jeune, confia Marinette. Adrien m'a vu faire tomber des piles de livres, faire voler ma trousse et je crois bien que je lui ai écrasé les pieds une bonne dizaine de fois.

— Et avec ça, tu t'étonnes qu'il se souvienne de toi ? feignit de s'étonner la couturière, les faisant rire toutes les deux.

Plus tard, Adrien réintégra ses propres habits et revint vers Éliane et Marinette, toujours flanqué de madame Bernette.

— J'ai été étonné de voir un modèle féminin, expliqua Adrien en montrant le mannequin de couture où Marinette avait placé les pièces de vêtements qu'elle avait créées la semaine précédente. Madame Bernette m'a dit qu'elles étaient de ta composition.

— C'est juste... euh... pour mon stage.

— Je peux regarder ?

Elle l'y invita d'un geste de la main, embarrassée d'être le point de mire de tout l'atelier (car tout le monde suivait la scène de loin, plus ou moins discrètement). Adrien examina son travail avec intérêt. Il regarda ensuite le mannequin où se trouvaient le modelage pratiquement terminé et les dessins que Marinette avait éparpillés sur la table :

— Je vois que la veste va venir compléter l'ensemble. Vais-je enfin avoir une compagnie féminine sur le podium ? questionna-t-il.

— Je crains que ce soit moi, intervint malicieusement Éliane. Marinette a fait son prototype à mes mesures.

— Oh, mais j'en serais enchanté, fit galamment Adrien en lui adressant un sourire amical.

— Je ne pense pas qu'on m'acceptera avec mon mètre soixante-cinq, opposa gaiement la couturière.

— Je crois que je faisais encore moins, la première fois que j'ai défilé, répondit Adrien avec humour.

Sur ce bon mot, il prit congé et se dirigea vers la porte, suivi de la première d'atelier.

— Si tu veux mon avis, il ne risque plus de t'oublier, commenta Éliane avec un petit sourire.

— Il est gentil avec tout le monde, rétorqua Marinette.

Il était désormais assez tard et la plupart des machines étaient maintenant recouvertes de leur housse pour la nuit. Cependant, il n'était pas question de laisser passer l'occasion de commenter la visite du mannequin vedette et les couturières s'assemblèrent autour de la table d'Éliane.

— Eh bien, il était d'humeur taquine, aujourd'hui, résuma Helen.

— C'est l'avantage d'avoir une jeune et jolie stagiaire parmi nous, lança Frida.

— Un bon argument pour en avoir plus souvent, dit Éliane en riant.

— Si Adrien parle de nouveau d'interrompre sa carrière, nous savons comment le faire revenir, imagina Marisa, les faisant toutes éclater de rire.

Un peu gênée, Marinette souriait avec les autres, sachant que ces plaisanteries ne prêtaient pas à conséquence.

— Eh bien, si la demoiselle arrive à quelque chose, on saura comment elle s'y est prise ! lança une voix acide.

Cela jeta un froid et une dizaine de regards courroucés se tournèrent vers le seul homme de l'assemblée. Marinette vit plusieurs des couturières ouvrir la bouche pour répliquer, mais l'ancienne Ladybug n'était pas du genre à laisser les autres répondre pour elle. Instinctivement, elle posa la main sur les ciseaux qu'elle avait utilisés pour son travail et rétorqua d'une voix glacée :

— Me reprocheriez-vous d'appliquer les méthodes que vous vouliez m'enseigner l'autre soir ?

Un « oh » choqué s'échappa de l'assistance. Monsieur Joliet fixa Marinette avec colère. Celle-ci lui rendit crânement son regard, tout en jouant négligemment avec ses ciseaux. Il éructa :

— Espèce de petite...

— Ça suffit ! intervint madame Bernette, couvrant l'invective, que tout le monde entendit tout de même distinctement. Je ne veux pas de dispute ici !

Elle regardait alternativement les deux protagonistes, les mettant sur le même plan. Cela choqua Marinette, mais elle voulait terminer la semaine à l'atelier. Si elle se faisait mettre dehors, ce serait une victoire pour le patronnier.

— Je vous prie de m'excuser, Madame, dit-elle de la voix la plus calme qu'elle pût. Cela ne se reproduira plus.

La première d'atelier accepta ses paroles d'un signe de tête puis se tourna vers monsieur Joliet. La position de celui-ci était plus solide et il refusa de reculer :

— Je vous laisse entre vous pour caqueter sur le petit coq de basse-cour, dit-il avec mépris.

Il tourna les talons et se dirigea vers la sortie de l'atelier. Furieuse, Éliane lui renvoya silencieusement l'injure en mimant des deux mains des becs en mouvement, rabaissant les paroles qu'il venait de prononcer aux caquetages qu'il dénonçait.

— Il est temps de rentrer chez vous, Mesdames, dit madame Bernette.

Alors que toutes repartaient vers leur table pour prendre leurs affaires, Éliane prononça assez fort pour être entendue de sa patronne :

— Il serait surtout temps de museler ce nabot. Il nous fatigue avec ses airs supérieurs.

Si madame Bernette l'entendit, elle ne le montra pas. Alors que Marinette, les dents serrées, se dirigeait avec son sac, Éliane la rattrapa et lui dit doucement :

— Tu peux lâcher tes ciseaux. Je vais te raccompagner jusqu'au métro.

Marinette regarda avec surprise l'arme improvisée qu'elle tenait encore sans l'avoir remarqué. Elle les posa à leur place et ouvrit la bouche pour refuser la protection, mais finalement hocha simplement la tête. La couturière avait raison. Elle s'était fait un ennemi, qu'elle imaginait facilement rancunier. Il serait bien capable de vouloir lui faire payer le soir même de l'avoir ridiculisé : il était clair que, s'il avait eu le dernier mot, c'était elle qui avait remporté la joute verbale.

Une fois dans la rue avec sa garde du corps improvisée, Marinette balaya les alentours du regard, sans repérer le patronnier.

— Tu sais, commença Éliane, quand tu m'as dit que tu aurais piqué Adrien avec tes épingles s'il s'était moqué de toi, j'ai cru que c'était une bravade. Mais apparemment, sous tes airs timides, tu n'es vraiment pas du genre à te laisser marcher sur les pieds.

— Je ne pense pas que je me serais permis d'attaquer le fils du patron, reconnut Marinette.

— Je n'ai pas dit que tu étais une idiote, sourit la couturière. Mais je remarque que tu avais répondu à sa plaisanterie, sans te démonter.

— Il attendait que je le fasse, assura Marinette.

— C'est vrai qu'il n'est pas du genre à s'amuser au détriment de quelqu'un qui n'oserait rien dire. Tu lui as plu, tu sais. Si jamais il te recontacte, suis tes envies, ne te laisse pas empoisonner par les paroles de cet idiot de Joliet.

— Je n'ai pas l'intention de courir après Adrien, opposa Marinette mal à l'aise.

— Je ne pense pas que tu auras à le faire.

Marinette décida de ne pas être hypocrite :

— Je lui laisserai sa chance, s'il est vraiment intéressé. Lui, au moins, il est du genre à entendre, quand on lui dit non, justifia-t-elle.

— Et pour revenir à l'autre abruti, continua Éliane, tu as eu raison de ne pas te laisser insulter. Un jour, c'est toi qui lui donneras des ordres.

— J'en doute, répondit Marinette. D'après Helen, il ne sait même pas faire un modelage, précisa-t-elle d'un ton mi-ironique, mi-méprisant.

Tout en ricanant, Éliane descendit avec sa stagiaire dans le métro et la laissa aux portillons sur un :

— Continue comme ça ma petite. Tu as tout ce qu'il faut pour réussir.

oOo

Vous avez aimé la visite d'Adrien ? (Je sais que oui, je vous connais ;-) 

Le prochain chapitre s'appelle "Une note inespérée".

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