C3 - La clairière des Imlayas (4/4)
Trois jours plus tard, ils arrivèrent à l'orée d'un vaste espace dégagé, où le vénérable cekouro au feuillage rouge, défleuri en cette saison, trônait au centre. La brume matinale d'hiver commençait à se dissiper.
Des milliers d'aiguilles picotèrent la peau de Flore agréablement.
— Idsou, je te présente la clairière de la tribu légendaire. Nous avons atteint notre but.
— On fait quoi maintenant ?
— Attendre une prise de contact soit de la résistance soit des Imlayas.
— Ou des Astrydiens, grogna-t-il.
Flore ne répliqua pas. Elle ne lui avait pas avoué ses vaines tentatives de connexion avec Sojeyn ou sa tante ou tout kiriahni chez les Imlayas, grâce à son kiriah de communication longue distance. En cas de succès, un Cercle les aurait téléportés. Elle-même ne connaissait pas la route à travers les hautes montagnes, terrassée par la maladie du sommeil.
Kishor n'en savait pas plus, se consola-t-elle.
L'ancien pêcheur de Melaki, devenu un redoutable combattant, lui avait raconté le paysage désertique, sans repères, et les multiples embranchements sur des chemins escarpés, à peine visibles. Se lancer dans ce labyrinthe ne les conduirait nulle part.
Ils devaient patienter.
Elle invita donc Idsou à s'installer au pied du cekouro. Au lieu de lui obéir, son ami attrapa un sac parmi ses affaires et grimpa dans les arbres. Certainement pour rejoindre la pantigra.
Deux félins aussi sauvages, soupira Flore en poussant sa monture des genoux.
Mais elle s'était trompée : Idsou réapparut au sol, les mains vides. Il courut vers le vénérable cekouro, où il accrocha les okydas avant de s'appuyer contre le tronc, pendant qu'elle s'asseyait. Ses oreilles qui tournaient en tous sens trahissaient sa nervosité.
Heureusement, l'attente ne dura pas des heures. Huit silhouettes pénétrèrent dans la clairière, enveloppées de longues capes sombres. Des langues blanchâtres s'enroulaient autour de leurs corps, comme si elles cherchaient à les ralentir, à les retenir, avant de s'élever vers le soleil laiteux, vaincues par leur puissance. Une image fantomatique qu'avait décrite Kishor maintes fois.
La résistance existe ! Sojeyn, petit frère, je vais bientôt te revoir.
Flore se leva d'un bond, puis réprima son envie de courir vers la troupe, tant la joie la brûlait, tant elle rêvait de précipiter les secondes des retrouvailles.
— Reste prudente, grogna Idsou dans son dos.
Son entrain lui fit ignorer le conseil d'Idsou, et elle accueillit les Imlayas, une paume sur la poitrine :
— Je suis l'Initiée Flore et demande audience auprès de votre gardienne Lorina, nous avons beaucoup de choses à échanger.
Un silence lui répondit, pendant que le groupe se découvrait... lentement. Au fur et à mesure que des visages crayeux et des cheveux blonds parsemés de mèches carmin se dévoilaient, un étau se resserrait sur le cœur de Flore.
Comment est-ce possible ?
Les Astrydiens les entourèrent en un claquement de doigts et dégainèrent leurs électases, rayon de la paralysie activé. L'un d'eux n'avait pas sorti son arme, il lisait quelque chose sur son large bracelet, tendu vers eux. Son visage jubila au résultat.
— Tu croyais nous échapper, princesse Flore d'Aurora, mais le garde du palais a donné l'alarme. Le Chef Suprême réclame ta présence. Nous allons t'accompagner avec tous les honneurs dus à ton rang, railla-t-il.
Malgré son sang glacé dans ses veines, Flore fulmina :
— Comment m'avez-vous retrouvé ? La planète est trop grande pour tomber sur nous par hasard.
— En partie. Si tous les gardes dans chaque doryaum vous recherchent, nous ne vous aurions pas trouvé sans les maisons abandonnées en forêt. Elles ne sont pas pourvues de brouilleurs pour endormir la méfiance des hors-la-loi, mais des détecteurs nous alertent de leur présence. Nous n'osions croire en notre chance... ou en ta stupidité, jusqu'à ce que ma montre me confirme ton identité, princesse. Xénon sera enchanté de découvrir qu'il ne se trompait pas, une belle récompense nous attend.
Un poids s'abattit sur les épaules de Flore, aussi douloureux que son enthousiasme l'avait été, aussi douloureux que son espoir l'avait été.
La résistance n'existait plus, Sojeyn était décédé.
Et elle n'avait écouté aucune mise en garde.
Idsou, pardonne-moi de t'avoir entraîné dans cette folie, je me suis montrée aussi arrogante que le Conseil.
La main de son ami effleura la sienne, une chaleur vive l'envahit, transmise par le pouvoir d'empathie du garçon. Il lui ordonnait de ne pas abandonner, de songer à son peuple.
Tu as raison de me bousculer. Pour Aurora, pour mes parents, pour Sojeyn, je combattrai les Astrydiens jusqu'au bout !
— Nous ne nous rendrons pas sans nous battre, assena-t-elle en se redressant.
Le chef de la troupe exhiba une boule décorée de flammes jaune et rouge sur un fond bleu pastel, dont il tourna les deux parties jusqu'à former à nouveau des figures cohérentes.
Un brouilleur. Il l'avait désactivé pour mieux me piéger !
Le vide entourait la kiriahni en Flore, elle ne percevait plus aucun esprit. Alors qu'elle enrageait, l'Astrydien persifla :
— Deux contre huit, et sans pouvoirs psychiques, ce sera un jeu d'enfants. Paralysez-les !
Les capes de l'ennemi comme celle d'Idsou tombèrent au sol. Son ami déclencha les flammes rouges de ses deux petites armes, une déclaration de mort, les tendit à l'horizontale, l'une devant lui, l'autre au-dessus de sa tête. Position de combat, une jambe avancée. Flore l'imita avant de se mettre dos à dos, son électase tenue à deux mains.
La bataille pour leur destin démarrait.
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