C26 - Ultime duel (2/3)
La mâchoire de Sojeyn se crispa sous l'insulte. Cependant, il ne répliqua pas à ce piège grossier et conserva son calme.
Après tout, les Astrydiens nous traitent depuis des années. Cette tenue représente notre symbole pour la libération d'Aurora.
Sa réflexion lui fit mieux accepter le vêtement, si opposé à la longue robe blanche de son ennemi. En revanche, Flore ne l'entendit pas de la même oreille.
— Vous vous êtes attaqué lâchement à un adolescent qui ne savait pas se battre. Ne vous gaussez pas de ce faux exploit.
— Je suis seulement les lois de la nature, rétorqua Xénon avec un haussement d'épaules. Les faibles ne durent jamais. L'adolescent affolé, incapable de se battre, est devenu un homme, mais il n'en demeure pas moins un Auroréen. Pacifique, docile.
Un grondement dans les rangs de la résistance accueillit la déclaration, qu'ignora l'ennemi juré. Il cherchait à rester le maître, comme le confirma sa question.
— Avant de démarrer ce duel, quel en sera son enjeu ?
— L'enjeu ? s'enquit Kris, un sourcil arqué.
— Il y a six ans, nous en avions : la vie du couple royal. Puisqu'ils sont décédés, il nous en faut donc un autre. Le prince déchu veut récupérer son trône. Moi, qu'obtiendrais-je si je gagne ?
— Vous n'êtes pas en mesure de négo...
— La liberté pour vous, vos gouverneurs et votre second, coupa Sojeyn.
Si la colère grondait dans ses veines face à l'audace de l'usurpateur, il n'avait pas hésité à lui donner ce qu'il désirait. Une décision impulsive, certes, mais stratégique. Elle ne plut pas à sa sœur.
— Tu n'y songes pas ! lui souffla-t-elle dans sa tête.
— Je dois reprendre mon trône avec honneur et m'imposer au Conseil.
— Il t'obéit déjà...
— En tant que chef de la résistance, mais il tentera de me contrôler par la suite... comme avec notre père. Le désires-tu ?
— Il doit y avoir un autre moyen, moins dangereux !
— Hum... cela me rappelle notre conversation quand tu t'es lancée seule contre Xénon, juste après son invasion, grande sœur. Devrais-je t'assommer ?
Flore lui jeta un coup d'œil agacé, avant d'objecter.
— Nous avons tous les deux payé au prix fort cette erreur.
— Elle nous avait pourtant sauvé la vie, et tu le referais. Par Kilyan, apporte-moi ton soutien !
Sa sœur coupa le contact avec lui et se tourna vers ses amis dalghariens. Brian, avec son esprit d'aventurier, lui donnerait son accord. Qu'en serait-il pour le roi ? L'enjeu exigé par Xénon allait au-delà d'Aurora, sa planète était concernée. Ses yeux troublés le prouvaient.
— Vous me demandez beaucoup, lui annonça-t-il en pensée. Cet homme doit rendre compte devant la justice de Dalghar pour le meurtre de mes parents et de ma sœur.
— J'en suis conscient, à vous de m'accorder votre confiance.
Kris le fixa quelques secondes, puis indiqua à Xénon qui les observait tour à tour.
— L'enjeu est accepté. Toutefois, vous serez tous renvoyés sur Tzunig et Dalghar protégera Aurora.
— Comme nous n'aurons de cesse de te chasser, si tu oses poser un pied proche d'Aequalis, compléta Brian.
— Si cela vous chante ! J'ai une autre requête : Esperane et ses cousines viendront avec nous.
— Ne pousse pas le bouchon trop loin ! gronda le prince de Dalghar. Elles resteront avec les Auroréens et décideront de leur vie.
— Cousines ? s'enquit Sojeyn auprès de Flore. Esperane n'est pas la seule enfant entre les Astrydiens et les Auroréens ? Les avez-vous trouvées ?
— Non, elles ne logent pas au palais. Nous devrons les chercher en ville, déterminer leur... mère... pour les rendre à leur famille... si celles-ci acceptent.
La voix de sa sœur avait chevroté. Quelque chose l'affectait ? Quoi ? Impossible à savoir, elle avait monté ses barrières. Sa peau pâle et la tête baissée le confortaient dans son analyse.
Que me cache-t-elle ?
Il éluciderait ce mystère plus tard, son attention devait se concentrer sur son duel avec Xénon. Au moment où il s'installait dans l'arène, son ennemi l'interpella :
— Il reste un dernier point à régler : les pouvoirs psychiques. Je pars, désavantagé.
Sojeyn serra les poings, tandis que son regard accrochait le corps sans vie de Faline. Son kiriah de guérison, libéré de l'emprise brouilleur, avait échoué à la sauver. Aux portes du monde des Morts, elle s'était confiée.
— Je ne voulais pas inquiéter Daliohn... mais je savais que nous quitterions... le monde des Vivants.
Elle simulait son espoir de retourner au village !
— Promettez-moi... de vous... occuper de Daliohn, le supplia Faline d'une voix affaiblie.
— De lui et d'Enorian, n'ayez crainte.
— Mon compagnon... de vie... m'attend... Je le rejoins... rassurée.
Même s'il avait tressailli, Sojeyn ne l'avait pas contredit. Cette femme courageuse savait mieux que lui où se trouvait sa famille.
Pour cet assassinat et tous les morts d'Aurora, je gagnerai ce duel. À la loyale.
Quand son diadème vola jusque dans les mains de Flore, un murmure de protestation ébranla la résistance et le Conseil. Il l'ignora.
— Je ne m'abaisserai pas à utiliser mes pouvoirs contre vous, sauf si vous trichez. Maintenant, démarrons !
Ils se placèrent face à face, chacun muni d'une électase, dont les halos avaient été bloqués. Lorsqu'un Dalgharien emporta le corps de Faline, les Auroréens posèrent une paume sur le cœur. Lui, y compris. Une erreur que lui signala Brian en un cri.
— Sojeyn, attention !
D'instinct, il bondit sur le côté et la lame de son adversaire écorcha son bras gauche. Une douleur remonta jusque dans son épaule, mais il l'accepta tel un avertissement. Une seconde de retard, Xénon l'aurait envoyé rejoindre la mère de Daliohn !
— Ne jamais se laisser distraire dans un duel, railla son ennemi.
Son regard jubilait : il avait touché son bras armé. Sojeyn conserva un visage impassible, appliquant les consignes d'Akeno. Le maître d'armes, présent dans la salle de réception, approuva d'un signe bref de la tête.
Électase dans la main droite, il la leva pour contrer le nouvel assaut de l'Astrydien. Xénon poussait son avantage sans perdre de temps. Maintenant, ils se retrouvaient lame contre lame, yeux dans les yeux.
— Tu sais te battre avec chacune de tes mains, félicitations ! murmura son ennemi.
— Le meilleur des maîtres d'armes m'a formé, je vous abat...
Un coup dans le ventre interrompit ses paroles.
— Tu n'es pas assez torve pour me vaincre, prince déchu !
Personne ne protesta dans la salle de réception, Xénon avait réussi à masquer son coup en traître. Un second lui coupa le souffle. Son bras flancha. Celui de son ennemi appuya plus. Sa lame s'approchait dangereusement de son visage. La sueur coula dans le dos de Sojeyn : si l'Astrydien trichait encore, il gagnerait.
Pas question !
Sojeyn se laissa tomber au sol pour une roulade sur le flanc, si vite que Xénon perdit l'équilibre. Mais pas son adresse. Il effectua un roulé-boulé et se releva en même temps que lui. Tous les deux enchaînèrent alors les assauts. Le choc des lames écrasait le silence dans la salle, envoyait des vibrations dans son corps, la douleur dans son bras blessée. Il fallait l'oublier et persister. Feinter, tournoyer, se décaler. Ne jamais s'immobiliser comme l'assistance hypnotisée par leur duel, ne jamais découvrir son flanc à l'ennemi.
Xénon souffrait et soufflait autant que lui. La morve avait abandonné ses iris jaunâtres, son adversaire semblait même douter de sa victoire. Ses mouvements devenaient saccadés et il esquivait plus qu'il n'attaquait.
Fatigue ou ruse ? Reste prudent.
Comme s'il souhaitait confirmer sa pensée, Xénon enchaîna une série d'assauts. Encore et encore. Sojeyn se retrouva acculé contre une des tables en U, le cœur galopant plus vite qu'un okyda. La faille que devait espérer son ennemi : il lança un puissant coup d'estoc.
Un réflexe de survie guida Sojeyn.
Il effectua un salto arrière et retomba au centre d'une table. S'il avait bien mémorisé leur disposition, il n'avait pas réfléchi aux gouverneurs. Ni au danger qu'ils représentaient.
L'un d'eux lui avait saisi les chevilles !
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