Je veux faire du théâtre
Hello hello ! Me voilà avec un texte assez particulier, parce qu'il s'agit d'une rédaction de français. Le sujet était : « dans un texte qui prendra l'aspect de l'autobiographie, vous raconterez le souvenir d'un épisode qui a constitué un moment décisif ou un tournant dans votre vie » (le souvenir pouvait être inventé tant qu'il restait « réaliste »). Et franchement, j'en suis assez fière, chose rare avec mes rédactions. En fait souvent je trouve mes rédactions terriblement impersonnelles, j'ai la plupart du temps de très bonnes notes mais j'arrive pas à les considérer comme mes textes. Ici au contraire le sujet permettait quelque chose de très personnel, et du coup même si le style est plus « scolaire » qu'à mon habitude j'ai quand même l'impression d'avoir mis une part de moi dedans. Bonne lecture 😊
Je déambulais dans le Musée d'Orsay lorsque le souvenir me revint. Des nuages d'un gris très sombre encombraient le ciel et la pluie avait rendu humides les chaussées parisiennes. J'en avais profité pour visiter une exposition qui me tentait depuis bien longtemps ; la surcharge de travail m'avait empêchée de me rendre au musée jusqu'à ce jour-là.
Une toile accrocha soudain mon regard. Elle représentait un coucher de soleil et était plutôt bien faite, mais ce n'est pas sa beauté qui me poussa à m'arrêter devant. Non, si je décidai de m'asseoir sur le banc en face du tableau, c'est à cause de la couleur qu'avait choisie le peintre pour son astre. C'était un rouge très particulier : un rouge un peu plus clair que celui du sang mais un peu plus sombre que celui du drapeau tricolore, un rouge ni vraiment terne ni vraiment éclatant, un rouge que chaque comédien reconnaîtrait entre mille : le rouge des rideaux des théâtres. La couleur envahit mon esprit, et à peine quelques fractions de secondes plus tard, je revivais mentalement la fin de ma première représentation.
J'avais eu neuf ans la veille. Je le sais, car dans mon esprit le souvenir de la pièce et celui d'avoir reçu le premier tome de « Harry Potter » sont étroitement liés. Dans la salle, l'atmosphère était moite et notre sueur nous collait à la peau. Je me rappelle avoir joué une adolescente en colère, bien que j'ai oublié le titre de la pièce. En tout cas, j'avais beaucoup crié, alors ma gorge était toute sèche et me brûlait un peu. En plus, le trac m'avait fait vomir avant de jouer et le goût ne m'était pas tout à fait passé. Nous arrivions à la fin de la scène et il ne me restait plus aucune réplique à prononcer. Je devais seulement rester debout sur scène en faisant abstraction des fourmillements qui me montaient dans les jambes et de la lumière des projecteurs qui m'éblouissait et me donnait mal au crâne. Quelques minutes encore passèrent, et le rideau tomba. Et à ce moment précis, lorsque le tissu soyeux vint nous cacher et que les applaudissements de nos parents résonnèrent, je sus, en dépit de tous les désagréments que j'avais subi, que le théâtre était ma passion et que jamais je n'arrêterais de jouer.
« Je veux faire du théâtre », la phrase m'avait frappée, soudain et irrévocable. Je veux faire du théâtre, même si je souffre, même si je stresse, même si je pleure. Je veux faire du théâtre, parce que je veux ressentir une nouvelle fois l'exaltation lorsque les souvenirs de la pièce remontent et que ma fierté grandit. Je veux faire du théâtre, pour ne jamais quitter le sentiment d'euphorie qui se propage dans tout mon corps. Je veux faire du théâtre, et rien ne pourrait empêcher l'enfant que j'étais de réaliser son rêve.
Bien des années ont passé, et j'ai pris de nombreuses décisions qui ont eu une influence sur ma vie, mais jamais ma détermination n'égala celle que je possédais le lendemain de mes neuf ans. Aujourd'hui encore, il m'arrive régulièrement de monter sur scène. Pas autant que dans ma jeunesse, certes, mais suffisamment souvent pour que je puisse me considérer comme une femme pratiquant sa passion. Et il n'est pas une représentation, pas une seule, où lorsque le rideau tombe je ne pense pas à cette fameuse première fois sur scène. Et chaque fois, les émotions me submergent, aussi fortes qu'auparavant. Quelques larmes de joie viennent même parfois me piquer les yeux.
Certains diront que ce souvenir n'a rien d'incroyable, que c'est seulement une petite aventure d'enfant. Mais pour moi, c'est le bien le plus précieux que l'on trouve dans ma mémoire. Car c'est grâce à lui, qu'aujourd'hui, je suis une comédienne. Une comédienne pas forcément très douée, pas forcément très riche ni très célèbre. Mais une comédienne tout de même, et une comédienne heureuse.
Au fait, je posterai probablement bientôt une réécriture de la rédaction avec un style plus poétique et cassant les codes, un truc encore plus perso quoi ^^
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro