J'ai déraillé un jeudi soir.

Je ne déraille jamais les jeudis soirs.

C'est écrit, quelque part dans l'infini, vérité absolue que l'on n'ose pas défier.

Le jeudi soir, j'ai théâtre.

Le jeudi soir, je me couche euphorique et je plonge dans des vapes de sommeil douces et belles. Bien sûr, quelques fois, mes émotions me submergent si fort que je laisse passer un peu de temps, musique dans les oreilles et pensées à fond la caisse, avant que le repos ne me gagne.

Le jeudi soir, je suis heureuse, toutes les semaines et indéniablement.

Et pourtant

J'ai déraillé un jeudi soir.

Les larmes me piquent les yeux si fort, sanglots étouffés, torrents glacés. Oh, ce n'est pas la première fois que je pleure un jeudi soir, loin de là, bien souvent ces jours-là j'essuie des gouttes salées sur l'air de la bohème. Mais les larmes habituelles sont douces, ce sont les larmes que je chéris comme des trésors, étoiles et écume qui me tombent par les yeux.

Ce jeudi soir, les larmes me brulent, rendent mes paupières rouges, mes yeux bouffis et ma gorge sèche. Ce jeudi soir, les larmes tombent pour des raisons obscures, trop légères aux yeux de tous, et cela entraîne une culpabilité extrême, la culpabilité entraîne de nouvelles larmes et voilà que depuis deux heures je suis recroquevillée au fond de mon lit, misérable enfant fragile qui n'ose pas ouvrir ses yeux.

J'ai déraillé un jeudi soir.

Je ne déraille jamais les jeudis soirs.

Une extrême pression me déchire la poitrine et même le théâtre – même le théâtre ! – n'a pas su l'atténuer. Je m'accuse, m'accuse de m'accuser et tord mon esprit et mon corps dans toutes les positions afin de peut-être trouver une manière de m'apaiser.

Rien ne va vraiment mal dans ma vie, et c'est presque pire que si quelque chose n'allait pas, car je me sens égoïste de ressentir la douleur qui consume mes poumons. Alors je me renferme, me force à contenir cette douleur qui n'a pas raison d'être, et la douleur n'en ressort qu'un million de fois plus forte.

J'ai déraillé un jeudi soir

Cela n'aurait jamais du arriver

J'ai déraillé un jeudi soir

Et cela m'angoisse, me terrorise, et me déchire. 

Je suis vraiment désolée, ce texte est pas du tout travaillé, à peine relu et pas franchement intéressant mais j'avais vraiment besoin de lâcher un truc et j'avais nulle part où le faire...