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PROLOGUE

Makayla

       Maman me fusille du regard, les épaules entravées par le bras de papa. Les dieux savent à quel point je suis bousillée de l'intérieur à la vue de cette scène. Les larmes aux yeux et le poing serré contre ses lèvres, la femme qui m'a mise au monde ne sait plus quoi dire. Ses sanglots résonnent entre les murs qui m'ont vue grandir, si bien que je ferme les yeux pour inspirer longuement et faire le vide. Oublier où je suis. Ce que j'éprouve. À quel point j'ai envie de disparaître...

          Ma démarche est cependant vaine car les sons réguliers des gyrophares, signalant le passage des gardes royaux, ravivent ma douleur et mon mal-être. Cette sensation est tout bonnement horrible. Je passe une main tremblante sur mon visage et remets quelques-unes de mes mèches noires dans mon chignon avant de me triturer les doigts. Je garde la tête baissée, car je n'ai plus le courage de contempler la désolation sur le visage de mes parents.

          — L-Loin de moi l'idée de... de vous alarmer, mais si je ne me hâte pas, je... je risque de mourir. Comme elle...

          Après avoir prononcé ces mots, je ravale difficilement la vague de sanglots que je sens arriver. La perspective du trépas m'effraie bien plus que ce que je laisse transparaître. Cependant, je dois m'accrocher, me reprendre en main et aller de l'avant. Je n'ai, de toutes façons, pas d'autre issue : c'est ça ou périr, et le choix est vite fait. Je relève la tête en constatant le manque de réaction de mes parents. Malgré mes dires, ils ne semblent pas prendre conscience de ce qui est en train de m'arriver. Papa se masse les tempes d'une main et maman garde les yeux rivés dans le vide.

          — Si j'avais l'âge requis pour cette opération, je ne vous aurais pas mêlés aux problèmes qui constituent désormais mon quotidien. Je vous en supplie, accompagnez-moi ! les imploré-je en joignant mes mains devant ma poitrine.

          Papa se gratte la nuque avant de soupirer.

          — Tu es au centre du plus gros scandale que la dernière décennie ait connu ! Et, toi, tu trouves bon de nous raconter cette...

          Papa inspire profondément pour reprendre contenance et faire baisser sa voix qui part dans les aigus. Je me mords les lèvres, meurtrie et désorientée.

          — Maintenant, ça suffit avec les mensonges ! finit par tonner mon paternel. Pourquoi est-ce que tu veux faire ça ? Qu'est-ce que tu nous caches, Kyky ?

          — C'est juste au cas...

          — L'oracle n'acceptera jamais, même si nous donnons notre accord ! renchérit maman, la voix monotone. Tu veux vraiment prendre des risques inutiles, au lieu de te rendre immédiatement à l'hôpital pour vérifier si...

          Je déboutonne prestement ma cape de berger et soulève mon tee-shirt jusqu'en-dessous de ma poitrine, ancrant à tour de rôle mon regard dans celui de mes géniteurs. Simultanément, leurs yeux dévient vers la peau qui couvre mes côtes gauches. Je lâche un rire nerveux arrosé de larmes, puis j'éclate définitivement en sanglots.

          — Oui ! Je vous ai menti ! hurlé-je, dépassée. C'est... je l'aime et... et je l'aime comme une folle mais... cette fichue maladie... je... il m'a fait souffrir, j'ai supporté parce que... oh, Sainte Rhéane ! Les choses échappent à mon contrôle et je... je suis... tellement désolée.

          Du bout des doigts, maman vient caresser la parcelle de mon épiderme qui s'est recouverte d'une encre indélébile. Elle hoquette, ébranlée, avant de retourner se réfugier dans les bras de son mari en me tournant le dos. En se cachant les yeux. En rejetant l'idée que je leur ai caché la vérité depuis tout ce temps.

          Papa se contente de soupirer, les rétines empreintes de déception et de colère.

          — Je suis désolée, répété-je en allant m'accouder au plan de travail de la cuisine pour ne plus me confronter à leur souffrance. Je vous jure que je suis infiniment désolée...

          Je baisse les yeux vers le cercle divisé en deux qui orne mon ventre. D'un côté, il y a un diamant majestueux et, de l'autre, un bouclier surplombé de trois cercles. Avec douleur, je remets en place mon tee-shirt pour ne plus voir ces motifs de malheur. Ils me rappellent une époque qui n'est plus, car je ne suis désormais qu'une jeune femme souillée et déshonorée, sujette des calomnies du peuple et du regard haineux de celui qui a été la pièce maitresse de mon existence pendant ces dernières semaines. Ma famille n'est que la victime de mon inconséquence : j'ai jeté l'opprobre sur le nom des Holloway en croyant dur comme fer que jamais mon âme-sœur ne pourrait m'exposer de cette façon. Pourtant, les abîmes dans lesquels m'a propulsée ma naïveté sont aussi noirs que les démons de l'homme qui hante mes pensées.

          Je finis par me tourner vers mon père, en pleine détresse quand un vertige prend d'assaut mon corps. Ma tête tourne, mes jambes flageolent, ma vue se brouille. Réactifs, mes parents ne se font pas prier pour venir me soutenir avant que je ne rejoigne le sol. Quelques minutes plus tard, je suis assise sur le canapé, un verre de jus en main, une oreille tendue vers mes parents qui chuchotent dans la cuisine. Papa demande à sa femme de faire abstraction de mes erreurs pour se concentrer sur le plus important : la menace dont ma vie est l'objet. Je vois le dépit dans les yeux de maman, la nervosité lorsqu'elle tire furieusement sur ses cheveux noirs en se mordant la lèvre inférieure. Elle se ressaisit rapidement, sûre d'elle, en écoutant son partenaire.

          — Sèche tes larmes, ma chérie. Il y a encore un moyen de la sauver pour l'empêcher de finir comme sa sœur. On s'occupera du reste plus tard.

          En pensant à Élène, mon cœur se serre vivement et mon regard se perd dans le vide. Je souhaite tout sauf avoir le même destin qu'elle. Maman semble d'ailleurs sortir de sa léthargie, essuyant ses joues d'un air affligé.

          — Décidément, ce sont ces satanés bourgeois qui vont causer notre perte, prédit-elle amèrement.

          Je serre les dents en revoyant les images de ma propre âme-sœur, me traitant comme la dernière des moins que rien. Quelques jours en arrière, j'étais encore lovée dans ses bras, à écouter les plus belles promesses qui soient. Les derniers instants de douceur passés avec lui sont désormais des souvenirs amers qui me causent une douleur sans nom.

          — Allons-y ! accepte enfin maman avec détermination.

          Elle m'approche et me serre contre elle. Si fort qu'elle parvient à recoller quelques morceaux de mon cœur. Si tendrement qu'elle me donne l'impression d'être la fillette apeurée à qui elle chantait des berceuses pour faire fuir les monstres qui se cachaient dans les coins sombres de ma chambre. Je la serre contre moi en retour pour me redonner la volonté de commettre cet acte irréversible. Je passe ensuite la capuche de ma cape sur ma tête pour éviter de me faire remarquer. Le statut de bourgeoise que je portais il y a quelques jours m'a contrainte à m'habituer aux paparazzis et aux regards des gens. Aujourd'hui, je dois les fuir comme la peste et esquiver les gardes royaux de mon mieux.

          Le pire dans tout ça, c'est que je n'ai jamais rien demandé. Je n'ai pas désiré être sous le feu des projecteurs, j'ai même détesté cette idée pendant longtemps. Pourtant, quand c'est arrivé, j'y ai pris goût. C'était une regrettable erreur. À présent, le retour à la réalité est aussi brutal qu'un coup de poing en pleine face.

          — Les gens vont certainement vous accoster pour vous poser des questions, les préviens-je. On ne peut donc pas marcher ensemble. Je vais y aller, vous viendrez derrière moi.

          Ils acceptent mon idée et, l'instant d'après, je sors par la porte arrière en jetant des regards craintifs autour de moi. Depuis ma fugue, des journalistes rôdent dans les parages, espérant capturer une déclaration de mes parents à afficher en première page de leurs torchons. Je marche tête baissée, le dos voûté, comme si le poids de ma bêtise pèse sur mes épaules. Quelques mètres derrière moi, mes parents subissent de temps en temps des œillades et des questions auxquelles ils n'ont pas de réponses. J'entends parfois des gens discuter près de moi, associant mon nom à tous les qualificatifs les plus pitoyables.

          Je marche pendant une trentaine de minutes, alerte aux moindres mouvements près de moi, me perdant de temps en temps dans mes pensées en regardant les étoiles. J'ai les jambes en compotes et des nausées régulières. Cette maladie m'affaiblit de plus en plus, et je vais m'évanouir une énième fois si je ne me dépêche pas. Je presse donc le pas, priant intérieurement pour que tout ça s'arrête le plus vite possible.

          Après être sortie de la petite ville dans laquelle j'ai fait construire la maison qu'habitent actuellement mes parents, j'arrive enfin devant un imposant bloc de briques blanches de forme pyramidale. C'est l'édifice le plus majestueux du royaume, après le palais. Il a été construit à l'époque de nos premiers rois et fait l'objet d'une rénovation régulière. Ses fondations solides, les multiples fenêtres où se balancent des rideaux aux teintes sombres, l'architecture unique, le style intérieur avec ses époustouflantes gravures, le plan et les souterrains du bâtiment : j'ai appris chacune de ces choses dans les bras d'une seule personne.

          La cour gigantesque est le lieu de prédilection pour les adorateurs de nos dieux. Au milieu des lueurs orangées des flambeaux, des gens sont prosternés et d'autres remettent des offrandes sur lesquelles les dhoumanes prononcent des prières purificatrices. Il s'agit des subalternes des autorités religieuses, ceux qui ont choisi de passer leur vie à servir les divinités sans se mêler de la vie mondaine. Peut-être que j'aurais dû opter pour cette voie dès mon plus jeune âge. J'aurais eu un parcours différent, j'aurais été épargnée de ma souffrance actuelle, et les rires des enfants qui jouent près de la statue de Rhéane ne m'auraient pas paru si agaçants. Tout ce bonheur, ces familles entrelacées, ces sourires et cette joie qui gravitent autour de moi... Cette torture est insoutenable : le monde qui continue de vivre alors que je m'éteins à petit feu. Littéralement.

          Je caresse mon Symbole sous mon tee-shirt, dépitée. Une vague de sanglot me secoue avant que je n'ouvre silencieusement les vannes. Je m'écroule alors dans les bras de mon père qui vient d'arriver à mon niveau. Maman nous rejoint quelques instants plus tard avant de nous serrer contre elle en me caressant les cheveux.

          — Je sais que c'est dur, me chuchote papa, mais ça fait partie de ton expérience de vie. Plus tard, tu raconteras tout ça à tes enfants en souriant. Tout ira pour le mieux.

          Mes enfants... Oh, papa... Ils sont déjà, là, nichés dans mon utérus.

          Une main sur la bouche, je m'empêche de pleurer plu fort. De dire la vérité à mes parents. D'avouer que je lutte pour moi, mais aussi pour ces deux innocents qui ont élu domicile en moi. De reconnaître que je veux vivre pour eux afin de ne pas m'éteindre en les condamnant. Alors, je me tais. Je garde la vérité pour moi, car si tout ça ne marche pas pour une raison ou une autre et que je finis par rejoindre ma sœur dans le firmament, je ne veux pas que mes proches pleurent trois être. Ma perte leur sera largement suffisante.

          — Tu dois l'oublier ou cette maladie t'emportera ! m'ordonne doucement maman. Il faut qu'on y aille. On va attirer l'attention.

          Je me détache d'eux en essuyant rapidement mes joues. Elle a raison. Je vais me désunir de mon âme-sœur. La douleur passera, j'oublierai et me reconstruirai, peu importe le temps que ça prendra. J'acquiesce donc, souffle un bon coup et traverse la cour du Temple jusqu'aux portes ouvertes. Deux dhoumanes gardent l'entrée et s'inclinent devant moi alors que je reste immobile à observer l'intérieur du bâtiment avec hésitation. Leur regard est empli de compassion lorsqu'ils m'observent comme s'ils lisaient dans un livre ouvert, apercevant les fêlures de mon âme et les blessures que l'amour m'a infligé. Observant mon ventre, et les vies qu'il cache. Une main sur l'abdomen, je me décide à entrer, mais un bruit de frein, une portière qui s'ouvre et se ferme, des pas précipités et une voix familière m'interrompent. Je ferme les yeux et grimace quand Aidan m'interpelle.

          — Majesté ? Majesté ! Que faites-vous ici ?

          Je garde le dos tourné, me contentant de scruter l'allée en face de moi, celle que je dois emprunter pour mettre fin à tout ça. Trois dhoumanes sont alignés d'un côté du couloir, le regard fixe devant eux, prêts à accompagner quiconque voudrait rencontrer l'oracle. Et, moi, je suis tout autant immobile qu'eux, pétrifiée à l'idée que l'homme que je fuis soit là, dans mon dos.

          — Êtes-vous seulement consciente du sang d'encre qu'on s'est fait au Palais ? Les gardes réalisent une battue de tout le royaume pour vous trouver. Vous entendez ce que je dis ? s'exaspère Aidan en s'approchant.

          S'il est là, il n'a toujours rien dit. Il n'est pas d'un naturel bavard, il est même froid et difficile à cerner, et j'ai souvent détesté ces traits de caractère avant de me rendre compte qu'il préférait l'écoute à la prise de parole, et qu'il était un observateur redoutable qui décryptait même les détails les plus anodins. J'ai fini par être plus amoureuse de son calme qu'autre chose. Mais cette tranquillité qu'il affichait n'était qu'une façade. Je me suis confrontée à sa rage et à sa folie, et je souhaite à présent perdre la mémoire pour oublier cette image de lui, prêt à briser tout ce qui lui tombe sous la main.

          Dans le même temps, s'il était ici, je l'aurais senti. Je suis son âme-sœur et son épouse, il m'a fait sienne et nous nous sommes complétés de toutes les façons possibles. Par conséquent, tout mon intérieur est exalté lorsqu'il est dans les parages, comme si sa présence recharge ma jauge d'énergie. Je peux donc m'avancer, m'en aller et me faire soigner, mais je reste là, troublée malgré moi.

          Il est trop tard, n'est-ce pas ?

          Le mal est déjà fait. Il a d'ailleurs eu le temps de proliférer dans mon organisme, de contaminer chacune de mes cellules et répandre l'amertume dans mon cœur. Je refuse qu'il se distille davantage en moi, qu'il s'approche de ma progéniture. Du coin de l'œil, je vois mes parents exécuter une révérence alors que les gardes et quelques curieux murmurent, indignés de voir la femme calomniée que je suis immobile devant le cadet de la famille royale.

          Agacée et désespérée, je me tourne vers Aidan et me courbe en baissant un genou, mais il vient saisir mes bras pour m'aider à me redresser.

          — Non, pas de ça avec moi, Majesté !

          — Votre altesse, je crains que ma position actuelle ne m'oblige...

          — Pas de faux-semblants avec moi, reprend-t-il en ancrant son regard vert parsemé de minuscules particules bleues dans le mien. Peu m'importent les avis des autres, vous êtes encore la femme de mon frère et donc la reine de ce royaume !

          Il l'a dit suffisamment fort pour que tout le monde l'entende, ce qui a le don de calmer les ardeurs des uns et des autres. Je déglutis en constatant que de nouveaux arrivants s'approchent. Les gardes essaient de maintenir l'ordre, mais je sais que, dans les minutes qui vont suivre, ils auront besoin de renforts. Des journalistes vont affluer, je serai prise en photo, ils hurleront leurs questions dans tous les sens... Ça va être difficile à gérer. Je m'éloigne donc doucement, murmurant au prince cadet que je suis désolée et que je dois me dépêcher.

          Je me retourne pour ouvrir les portes, mais deux mains me retiennent. Je me retrouve alors plaquée contre le torse d'Aidan. Derrière nous, un garde recommande vivement à ce dernier de s'éloigner de moi, mais il n'en tient pas compte pour s'approcher de mon oreille.

          — Je n'ignore pas ce que tu vas faire là-dedans, Makayla, mais je te supplie d'y réfléchir à deux fois. Quelle que soit la décision que tu as prise, tu...

          — Lâche-moi, Aidan ! pesté-je à voix basse. Je ne veux rien entendre. S'il te plaît.

          — Discutons un moment. Seule à seul, entre amis. Tu feras ce qui te plaît ensuite. Je te le promets.

          — Le temps joue malheureusement contre moi. Je... Laisse-moi y aller.

          Il me libère lentement de son étreinte. De nouvelles gouttes salées roulent sur mes joues, mais j'entre d'un pas résolu dans le temple, même s'il se met en quête de me suivre.

          — Je sais tout.

          Ces trois mots ont le don de me faire ralentir malgré moi. Je ressens une panoplie d'émotions à la fois, et je n'ai qu'une envie, hurler pour m'en débarrasser. À la place, je murmure, si bas que je ne suis pas certaine que mon ami m'écoute.

          — Je lui ai dit... je lui ai... jamais, jamais de la vie je n'aurais commis une telle abomination, mais il ne m'a pas crue. Je suis malade, Aidan et je vais mourir si je ne brise pas ce foutu Symbole.

          Nous arrivons dans un espace vide avec des escaliers qui montent vers les étages supérieurs. Les dhoumanes sont comme des fantômes, leur présence ne se fait remarquer qu'à l'éclairage des torches dans leurs mains qui flambent de façon vive.

          — Il regrette. Il a compris que tu as été victime d'un complot, et je sais qu'il n'est pas trop tard pour...

          Je n'entends plus rien de ce qu'il dit. Mon cœur entame une course effrénée contre ma poitrine alors que les souvenirs affluent dans ma mémoire : ses yeux dont j'adore la teinte grise, son sourire aussi charmeur que son regard, ses mains dans mes cheveux, ses lèvres exigeantes sur ma peau... J'ai lu tant de choses dans ses prunelles. J'ai affronté sa froideur et aimé ses démons en même temps que lui. Tout ce que j'ai obtenu en retour, c'est ça. Une foule qui afflue à l'extérieur et commence à me hurler que je ne suis pas digne de la couronne. Que j'aurais mieux fait de rester dans les bas-fonds de mon petit village.

— Après que tu te soies enfuie de l'hôpital, le docteur lui a laissé consulter ton dossier. Il m'a tout de suite demandé de venir ici car il savait ce que tu avais en tête. Il regrette vraiment. Par pitié, Makayla, il est à l'autre bout du Royaume, sur le point de faire un accident parce qu'il roule à une vitesse déraisonnable. Je te demande juste de patienter le temps qu'il arrive et d'avoir une discussion avec lui avant que de chercher à...

Un rire incontrôlé sort du fond de ma gorge et je m'arrête pour prendre une grosse inspiration. Il regrette. Après tout ce qu'il m'a fait endurer, il se contente de « regretter ».

— Dis à ton frère qu'il peut aller voir aux enfers si j'y suis, craché-je en m'éloignant. Et qu'il y reste à jamais !

De cette façon, je n'aurais pas à expliquer à mes enfants pourquoi leur père est absent de leur vie.

Mes parents me suivent en se faisant tout petit. Ils n'ont pas eu la force de prononcer un seul mot. Je me demande comment ils se sentent en me voyant, mariée et malheureuse, sur le chemin d'un divorce horriblement difficile et médiatisé. Pensent-ils à Élène ? L'imaginent-ils suivre la même procédure pour échapper à la maladie, au lieu de se laisser mourir d'amour comme elle l'a fait ? Sont-ils fiers de mon courage ou déçus de ma naïveté ? Je préfère ne pas le savoir.

Nous délaissons l'immense espace carrelé et ses murs peints de dessins qui retracent l'histoire de mon peuple au fil des siècles. Les torches des dhoumanes continuent d'éclairer notre chemin en même temps qu'ils avancent devant nous. Après avoir emprunté les marches, nous débouchons sur deux couloirs, mais nos accompagnants se dirigent vers celui de droite et m'abandonnent après avoir ouvert l'unique porte rouge.

Surprise de ne voir personne j'entre pleinement et tourne sur moi-même pour observer l'endroit. Les seuls meubles sont un bureau et un fauteuil dans un coin et, contre un mur, des chaises alignées comme dans une salle d'attente.

Je remarque enfin celui que je cherche. J'aurais juré qu'il n'était pas là quand je suis entrée, mais je ne m'en étonne pas. Il est penché vers les fenêtres, écartant discrètement le rideau, comme s'il se délecte du spectacle que j'ai créé au rez-de-chaussée. J'entends les pas de mes parents qui arrivent derrière moi au moment où le trentenaire, un sourire aux lèvres, se tourne vers moi, sa longue tunique blanche gênant ses pieds.

— Les chiens de garde du dernier des Sullivan sont toujours indignés par ton comportement, Makayla, s'esclaffe-t-il. Leurs têtes éberluées sont un vrai régal.

Ses yeux d'un bleu insondable sont illuminés par une lueur rieuse avec des iris qui pétillent, comme si je viens de lui raconter la blague du siècle.

— Mon temps est précieux, Cyriac.

Maman se rapproche de moi pendant qu'il rigole en regardant à nouveau à l'extérieur.

— Pourquoi es-tu aussi familière avec l'Oracle, chérie ? murmure-t-elle à mon oreille.

— Parce que nous sommes amis, madame Holloway, lui répond Cyriac en se tournant à nouveau vers nous. Vous auriez dû apercevoir son mari quand il la voyait rire avec moi. Ça fait des siècles que je vis ici, mais les éclairs dans ses yeux...

Il simule un frisson en se frictionnant les bras. J'inspire profondément, sur le point de perdre patience.

— Cyriac, je peux perdre connaissance et mourir dans les minutes qui vont suivre alors, s'il te plaît, arrête.

— Qu'est-ce qui t'amène à moi, jeune reine ?

— Cesses de tester ma patience. Tu peux lire dans mes foutues pensées, alors arrêtons de perdre du temps.

Malgré ma bonne volonté, je n'ai pas pu m'empêcher d'employer ce langage vulgaire. Mes nerfs supportent peu la pression des événements et mon corps ne réclame qu'un peu de répit. Cyriac a mal choisi son moment pour plaisanter.

— Bien sûr que je sais pourquoi tu es là, confirme-t-il en souriant. Mais les esprits veulent l'entendre de ta bouche car personne ne prononcera ces mots fatidiques à ta place.

— Je veux briser mon Symbole ! affirmé-je sans me laisser le temps de réfléchir.

Il jette un regard à mes parents en leur souriant. Une dhoumane sortit de nulle part vient à leur rencontre en leur demandant de l'accompagner dans une autre salle.

— C'est juste pour les autorisations et la paperasse, explique Cyriac. Toi, tu me suis.

Il se dirige vers la pièce adjacente et je me tourne vers mes parents, leur souris pour les rassurer et emboîte le pas à l'Oracle. La porte se referme d'elle-même derrière moi. Plusieurs bougies brûlent en formant un cercle, sans un meuble aux alentours. Cyriac s'assied au centre, près d'un couteau posé sur un tissu blanc. J'observe autour de moi, totalement sous le choc.

— Ce... dispositif a-t-il été mis en place pour... moi ?

— Oui.

— Tu savais... que je... j'allais venir ? bégayé-je. Oui, bien sûr. Tu sais tout.

— En effet. Trempes tes pieds dans le bac de poudre juste ici et entre dans le cercle.

Je vais m'asseoir en face de lui après avoir suivi ses instructions. Je réalise enfin l'ampleur de ce qui est en train de m'arriver. Les lèvres serrées, je me triture les doigts en me questionnant intérieurement.

Est-ce donc vraiment mon destin de me séparer de mon âme-sœur ? Tout a été apprêté en ce sens, en tous cas. Les choses doivent sûrement se passer comme ça, sans que je n'aie la possibilité de choisir une autre alternative. Je suis coincée, avec le choix entre mourir et me séparer de celui pour qui je crève d'amour. J'inspire profondément quand l'Oracle place le couteau à égale distance entre nous. À l'idée que cette lame va bientôt me déchirer la peau, je tremble d'appréhension.

— Dis... c'est vraiment... c'est comme ça que c'est censé se passer ?

Il me sourit avant de soupirer.

— Les carrefours existentiels ne sont pas de bons moments pour demander une prédiction. Certains choix t'incombent et ce sont eux qui écriront la suite. Du moins, jusqu'au prochain carrefour.

Je hoche la tête, compréhensive.

— Pourquoi veux-tu briser ton Symbole ?

— J'ai contracté la maladie d'amour. Je n'ai pas le choix.

C'est son tour de hocher la sienne.

— Raconte-moi tout.

C'est la seule épreuve à passer. Revivre tous ces souvenirs, du début à la fin. Ensuite, et seulement après ça, on peut décider de tout rompre, jeter aux oubliettes ce lien unique et tout ce qu'on a partagé avec la personne dont on veut se délier.

Je peux encore faire marche arrière, tout arrêter, essayer de réparer les choses... Je ferme les yeux car une douleur vive commence à s'insinuer dans mes entrailles, comme un rappel à l'ordre. C'est beaucoup trop risqué. Si ça ne marche pas, je serai condamnée et mes enfants aussi. Il faut à tout prix que je brise ce Symbole si je veux avoir une chance de survivre. J'ai laissé l'amour me détruire, je ne peux pas le laisser me mener à la tombe en même temps que ma progéniture. C'est une trop grande perte pour un homme si tourmenté qu'il a fini par commettre l'irréparable. Je relève finalement les paupières et commence à conter mon histoire. Notre histoire.

Celle d'Anario Derek Sullivan et moi.

__________

Ici le capitaine Esther. Vous êtes à bord de Soulmates' Bonds pour une soixantaine(ou plus) de chapitres, alors merci d'avoir embarqué, sincèrement.

Cette histoire est en correction, mais c'est avec le même plaisir que lors de la première publication que je la réécris. Merci à tout ceux qui l'ont lue et m'ont apporté des critiques.

Pour ceux qui ont lu la 1ère version :
Énormément de choses ont changé depuis la première publication, vous l'avez déjà constaté avec ce prologue où Makayla est déjà reine d'Amarcam 🫶🏽. Les personnages que vous avez connus ne sont plus exactement les mêmes, particulièrement Derek qui est à présent PLUS DARK, BIEN RUTHLESS. La trame de l'histoire aussi a changé, la chronologie, de nouveaux personnages (comment ça, y en avait déjà assez ? ), de nouvelles scènes et des scènes supprimées. BREF... VOUS ENTREZ DANS DU TOUT NEUF, LÀ.

Pour ce qui est de la publication, je garde une distance de 10 chapitres entre ce qui est publié ici et ce que j'ai déjà écrit sur Word. De cette façon, je m'évite les corrections de certaines incohérences après avoir publié pour vous permettre une lecture fluide. Du coup, j'ai envie d'aller sur un rythme de 5 chapitres publiés d'un coup toutes les 2 semaines, on verra si je pourrai tenir 🫣

Maintenant que ceci a été clarifié, n'hésitez pas à me laisser vos impressions sur ce prologue. (En dehors du fait qu'il soit très long 😂 car je suis tout à fait au courant)

Kiss kiss et merci pour le soutien.

📷 IG : Nothin_moreauteure

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