Dim 6 novembre

4h40

Rowan et moi venons de finir de petit déjeuner. Après un bref passage à la salle de bain, il est temps de partir pour l'aéroport. Il fallait bien que ce jour arrive, mais ça arrive toujours trop vite.

- Bon tu es sûr que tu n'as rien oublié ?

- Certain puis si j'ai oublié quelque chose, c'est pas bien grave puisque qu'on va se revoir.

- Oui. J'espère que ce temps de séparation passera aussi vite que notre dernière semaine.

- Je l'espère aussi.

Il attrape sa valise par la poignée sur le côté et nous tâchons de quitter l'appartement sans faire de bruit pour ne pas réveiller Éva. Je referme à clé derrière nous et nous nous engouffrons dans l'ascenseur. Mes mains prenant place sur les hanches de mon chéri, je profite de cette courte descente pour échanger de tendres baisers. Chaque petit instant tendresse est bon à prendre.

Les portes s'ouvrent sur le rez-de-chaussée et nous quittons l'immeuble. On rejoint après quelques pas, ma voiture garée dans la rue. J'ouvre mon coffre et y dépose la valise. Je reste sûrement figé un instant puisque ma voix de Rowan me sort de mes pensées.

- Honey ça va ?

- J'étais juste en train de me dire à quel point j'adorais faire ma valise pour partir, et à quel point je n'aimais pas la faire au retour. Bon enfin, je vais essayer de tenir jusqu'à l'aéroport avant de me laisser gagner par l'émotion.

Je ferme la malle et monte en voiture, imité par Rowan qui prend place sur le siège passager. J'allume mes phares, démarre le véhicule et m'engage sur la route. À cette heure, les rues sont quasiment désertes. Le silence règne. Tout comme dans la voiture. On a tout deux cette boule dans la gorge, chargé de tristesse qu'on s'efforce de canaliser par le silence. Je me contente de prendre sa main dans la mienne le long du trajet, qui me paraît bien plus court qu'à l'ordinaire.

Nous parvenons rapidement à l'aéroport et il prend son bagage, toujours en silence, le coeur serré. Pour profiter du maximum de temps qu'il nous reste, Rowan s'enregistre dès son arrivée et récupère sa carte d'embarquement. On va ensuite s'assoir non loin des points sécurité.

Il est cinq heures et dans environ une heure et quelques minutes je devrais le laisser partir. Il doit passer la sécurité et confié son bagage quarante minutes avant son vol, et après cette étape, je ne pourrais plus attendre avec lui.

- On se croirait dans un film romantique sauf qu'il se termine tristement...est-ce que c'est toujours aussi dur ? Est-ce qu'on s'habitue à voir l'homme qu'on aime partir ?

- C'est la première séparation depuis le début officiel de notre relation, donc c'est dur mais quand on aura pris nos marques, qu'on se sera retrouvé plusieurs fois, on aura moins peur de se perdre. On aura gagné en sérénité sur la solidité de notre couple. Je ne te dirais pas que c'est de plus en plus facile, le pincement au coeur sera toujours là mais on se sentira mieux qu'aujourd'hui. Ce qui serait pas normal, ça serait qu'on ne soit pas triste.

- Oui c'est sûr.

- Moi ce que je fais pour être moins triste, c'est penser à nos retrouvailles. Aux endroits où je t'emmènerai quand tu reviendras. Au dîner en amoureux que je préparais pour nous.

- Et ça marche ?

- Quand tu occupes tes pensées avec des choses qui te font plaisir, tu te sens un peu moins triste. Puis il te faudra passer du temps avec Valentine, ton collègue Daniel, appeler Lily et passer du temps avec Éva si elle devient moins pénible. Tu verras que si tu t'occupes l'esprit le temps passera plus vite et tu seras moins triste.

- Je ferais ça alors.

- Puis nous deux, on se fera des appels vidéos le soir. Et dans la journée on pourra échanger des sms. Tu verras, on arrivera à supporter la distance.

- Si j'arrive à supporter le caractère d'Éva, la distance, j'en ferais qu'une bouchée.

- Elle va surement s'apaiser comme je serais plus là.

- Y'a des chances mais si elle se met outrageusement à être heureuse de ton départ, je serais vraiment blessé même si je ne le montrerais pas.

- Si elle le fait, montre lui que mon départ ne change rien, que notre relation va continuer.

- C'est ce que je compte faire mais tu vois le fait qu'elle ait conscience de me faire du mal et qu'elle le fasse quand même, ça me tue. Elle ne veut pas mon bonheur.

- C'est une ado, tu as chamboulé sa vie, elle extériorise en forme de crise.

- On ne fait rien de mal, on est juste amoureux. J'adore ma fille mais les adolescents parfois, c'est vraiment insupportable. Je ne lui demande pas de t'aimer, juste de rester à sa place et de ne pas se mêler de ma vie amoureuse.

- Elle me manque moins de respect, c'est déjà ça

- Parce que j'ai menacé d'arrêter son forfait téléphone

- Elle y a cru, c'est qu'elle te sait capable de le faire. Garde cette autorité et elle s'épuisera. Elle grandira et finira par accepter.

- Tu m'as l'air beaucoup plus serein qu'hier ?

- Tu m'as rassuré puis j'ai décidé d'essayer de mettre mes peurs liées à ta fille et à ma précédente relation à distance, de côté. Je sais que tu ne feras pas de choix entre Eva et moi, puis que tu n'es pas l'homme qui m'a brisé il y a quelques années.

- Je suis tout à fait d'accord, laissons les ondes négatives derrière nous et pensons juste à notre bonheur.

- J'aurais pas dit mieux !

Je relance la conversation sur le programme qu'il nous a prévu pour nos futures retrouvailles et il m'énumère tout ce qu'il a en tête, tandis que les minutes s'égrènent à une vitesse folle. La boule que j'ai dans la gorge s'intensifie au fur et à mesure que le temps passe. Puis l'heure de se quitter fini par arriver et Rowan se lève tout en me disant :

- Il faut que j'y aille maintenant. On a retardé au maximum, je pourrais plus embarquer si je traine encore.

Je me lève à mon tour et rétorque :

- J'ai bien envie de te faire rater ton vol moi

- J'adorais rester tu sais mais j'ai des obligations.

- Je sais bien, je dis ça mais je vais te laisser partir même si c'est dur.

- Dis-toi que dans quelques courtes semaines c'est toi qui viendras ici pour monter dans cet avion et me rejoindre. Après les larmes, y'a la joie. Allez fais-moi un câlin avant que j'y aille.

Je le prends aussitôt dans mes bras et murmure, mes larmes coulant contre sa nuque :

- J'ai tellement pas envie que tu partes mon amour

- Moi non plus je ne veux pas partir, j'essaie de tenir le coup mais tu vas tellement me manquer.

- On se fait des appels vidéos chaque soir sans faute.

- Tout les soirs Honey.

- Putain les aurevoirs c'est de la merde.

- Je confirme. Ça fait chier.

- Les retrouvailles ont intérêt à être magique.

- Elles le seront sans aucun doute. Il faut que je parte maintenant

- Oui.

Je le relâche à contrecoeur et ajoute :

- Tu m'appelles quand tu as atterris ?

- Promis.

- Tu m'oublieras pas là-bas

- Je penserais à toi tout le temps.

Il vient me serrer dans ses bras et dépose un baiser dans ma nuque avant de me souffler à l'oreille :

- Je t'aime Honey.

- Je t'aime aussi mon amour.

Je pose un doux baiser sur sa joue, puis sur ses lèvres et notre étreinte se desserre. Rowan ramasse son bagage et s'éloigne, le regard triste, mais avec un beau sourire. Mes yeux s'embuent alors qu'il s'en va vers le contrôle de sécurité. Je vois flou. Je l'observe tout le temps de l'étape de sécurité puis il disparait pour se rendre dans la salle d'embarquement. Je me retrouve seul dans ce grand aéroport et mes larmes menacent de se remettre à couler. Je les essuie et reprend le chemin vers la sortie, le coeur lourd. Je retrouve ma voiture et m'apprête à monter dedans quand mon téléphone vibre dans ma poche. Un message de "mon amour".

L'amour à distance, c'est pas facile, mais si on est dans cette situation, ça veut dire une chose. Nous ne sommes plus seuls. On est triste aujourd'hui, mais si on pense à notre vie, avant notre rencontre, on se rend compte, qu'elle est bien plus belle maintenant. ♥

Tu as raison, on a plus de raisons d'être heureux, que d'être triste. Merci de m'avoir montré la voie vers le bonheur, maintenant, je ne la quitterais plus. Fais bon voyage mon amour et à très bientôt. ♥