Chapitre 31

Alizée et Zéphyr tombèrent en plein milieu du lac noir. Ils nagèrent jusqu'à la surface et sortirent dans le parc, où des Détraqueurs tournaient en quête d'un repas. Il la prit dans ses bras et l'embrassa comme il ne l'avait jamais embrassée, avec passion, fureur et tristesse. Elle lui rendit son baiser, des larmes sur les joues, en sanglotant doucement, et le remercia de l'avoir sauvée. En réponse, il l'embrassa plus fort.

Alors qu'elle le serrait contre elle, elle sentit soudain son cœur se réduire en miettes en se souvenant d'Albe. Morte, inerte, sur le sol de la grotte. Albe, morte, Albe, morte... elle ne pourrait plus jamais lui parler, voir ses yeux briller en un sourire complice, elle ne pourrait plus jamais lui demander conseil... elle avait envie d'être quelque part ailleurs, n'importe où, ailleurs, là où personne ne viendrait l'embêter et où elle pourrait faire son deuil. Elle promit doucement à Zéphyr de revenir bientôt et transplana sans savoir où elle allait avant qu'il ne puisse la rappeler.

La jeune fille apparut au sommet de la tour d'Astronomie. Pourquoi être venue ici ? Elle croyait savoir. Elle regarda par-dessus la barrière de fer et scruta les profondeurs de la terre, les lieux autour de Poudlard, le lac, la forêt, ce lieu qu'elle aimait tant, ce lieu qu'elle adorait, sa maison, son vrai foyer. Il avait été et restait encore le foyer d'Harry Potter. Et de Dumbledore avant lui. Dumbledore, tombé de cette même tour pour aller s'écraser au pied de la colonne, mort, mort comme Albe. Mort comme Albe. Cette pensée la traversa et elle sentit les larmes couler sur ses joues. Elle pouvait peut-être revoir Albe si elle... Non, elle ne sauterait pas de la tour. Elle ne pouvait pas faire ça. Imposer un double deuil à ses amis, ce serait trop dur, trop cruel. Et puis, le suicide n'était pas la solution... Si Harry Potter s'était suicidé, où en seraient-ils ? Elle devait être forte et se venger de celui qui avait tué Albe. Se venger...

Son regard se perdit au loin, vers le paysage d'où avaient mystérieusement et heureusement disparu les Détraqueurs, scruta les montagnes, la forêt à la lisière de laquelle se dressait la petite cabane de Rubeus Hagrid, le refuge de Sombrals et des autres créatures. Les animaux magiques des bois, Lame, Shadow, les licornes, allaient-ils bien ? L'emprise des Détraqueurs affamés d'âmes les avait-elle réduits à néant ? Elle s'aperçut brutalement qu'elle était dans le château que Royle s'attendait à la voir rejoindre, qu'elle était dans un piège mortel et qu'une fois capturée, elle ne pourrait plus jamais revenir en arrière. Royle la posséderait et elle ne serait qu'un pantin, une marionnette ridicule, que l'on peut jeter ou manipuler, mais elle ne voulait pas se laisser faire. Il fallait qu'elle contrôle sa soif de vengeance et l'utilise sans qu'elle ne l'utilise elle-même. Encore un instant et elle repartirait. L'air frais lui faisait du bien et lui donnait du recul.

Elle regarda par-dessus la barrière, juste pour admirer de plus près le paysage, quand elle sentit qu'on la poussait brutalement dans le dos ; elle se retourna juste avant de basculer dans le vide et vit Ruth, Walters, Cassandra et ... Gwendolyn. Elle tomba du haut de la tour, trop choquée pour invoquer son pouvoir : son ancienne amie venait de suivre Ruth Lebb lorsqu'elle l'avait précipitée vers la mort. C'était comme si elle l'avait tuée.

°O°o°O°o°O°

Alizée voyait le sol se rapprocher. Il fallait qu'elle se concentre, qu'elle forme un bouclier ou transplane, il le fallait.

Mais Gwendolyn...

Gwendolyn, Gwendolyn Mane, Gwendolyn était avec Ruth lorsqu'elle l'avait poussée du haut de la tour...

Les pierres filaient sur la tour, les paysages s'approchaient d'elle...

Tout était arrivé si vite !

Elle avait l'impression qu'Albe était morte deux minutes plus tôt !

- WINGARDIUM LEVIOSA !!!

Son corps soudain en apesanteur tomba doucement sur le sol herbeux, avec la lenteur et la douceur d'une plume. Quelqu'un, Zéphyr sans doute, l'avait sauvée. Mais elle ne pouvait plus penser à rien à part à Albe.

Elle ne se souvint plus vraiment de ce qui arriva après. Zéphyr vint la voir et l'aida à se lever, lui demanda se qui s'était passé, et elle ne lui répondit pas, sachant qu'il irait attaquer Ruth si elle disait la vérité. Albe occupait toujours ses pensées. Il lui fallut un bon moment avant que la tristesse ne laisse place à une colère noire. Elle n'avait pas réussi à tuer Royle, mais au moins, elle savait qu'ils se retrouveraient et que, cette fois, elle se vengerait. Car il avait tué Albe...

Ces mots lui étaient tellement insupportables...

« Je ne dois pas m'enfoncer dans la tristesse. Ce n'est pas ce qu'elle aurait voulu. Mais, pour elle, je dois me venger de Royle. »

Zéphyr ne l'emmena pas dans le château ; apparemment, la plus grosse quantité des élèves était rentrée chez eux, et les autres étaient cachés à l'intérieur du bâtiment, hors de la portée des Détraqueurs. Zéphyr la conduisit dans la forêt interdite, au milieu d'une clairière au-dessus de laquelle on voyait le ciel qui avait viré au bleu foncé, et guérit sa blessure avec sa baguette en lui disant doucement qu'ils n'avaient qu'à attendre les autres.

Elle se sentait étourdie par l'attaque de Ruth et le deuil, qu'elle n'arrivait pas encore à totalement à accepter ainsi que par la colère et la tristesse. Mais elle s'efforça de rester lucide pour comprendre ce à quoi voulait en venir Zéphyr.

- Hey tout le monde !

Kenric, le bras en écharpe, entra dans la clairière, suivi par Will, Gill, Alithéa et un jeune homme aux cheveux couleur ocre et aux yeux brillants qui était inconnu à Alizée. Derrière venait Kathy, l'air renfrogné, puis Annie, Klyr et Quinn. Elle réalisa, trop tard, qu'aucun d'entre eux n'était au courant de la mort d'Albe.

La mort d'Albe.

Ça faisait si mal de penser ça.

La mort d'Albe occupait totalement ses pensées et elle en oublia presque l'incident de la tour, qu'elle n'avait eu l'impression de voir qu'à travers une brume blanche.

- Où est Teddy ?

- Là ! lança le garçon aux cheveux bruns jaunis en levant la main, avant d'ajouter ; ah oui, ma couverture !

Fièrement, il changea d'apparence pour redevenir un Teddy aux cheveux mauves, un sourire aux lèvres. Kathy, qui venait d'entrer, alla le frapper de toutes ses forces sur la tête pour le punir d'avoir prit son apparence, mais il continua de rire et Alizée eut mal en pensant qu'elle allait briser son sourire. Albe était amoureuse de Teddy, se souvint-elle, ce serait un choc dur pour lui, ainsi que pour Klyr et Quinn... Et Annie, si fragile...

- Eh, où est Albe ? s'étonna Klyr, justement, qui fouilla du regard la clairière.

La Gryffondor leva les yeux vers le ciel devenu noir et piqueté d'étoiles aussi brillantes que les yeux de Ted. Elle aurait aimé que ce soit Zéphyr qui se charge de leur annoncer la nouvelle, même si elle savait que c'était lâche ; mais de toute façon, son petit-ami semblait anéanti et pensif, assis sur un carré de mousse, au pied d'un chêne, et plongé dans ses réflexions.

Elle s'éclaircit la gorge et dit d'une voix tout de même enrouée, le cœur brisé ;

- Albe est morte.

Dire ces mots faisait encore plus mal. C'était comme si ça rendait le fait plus réel.

Ce fut un remue-ménage impossible. Klyr ne la crut pas, au début, puis s'effondra en hurlant de douleur et en frappant le sol de ses poings ; Quinn resta droite comme un i, les lèvres serrées comme si elle ne voulait pas accepter la vérité mais tentait de rester forte ; Kenric prit Kathy, qui pleurait, dans ses bras ; Teddy les regarda, l'air brisé, et ses cheveux devinrent gris et ternes tandis qu'il comprenait le sens de ces paroles ; Will et Alithéa se tinrent la main en se regardant avec désespoir, Gill se fourra le visage dans ses mains et Annie trembla de tous ses membres.

La pauvre Annie.

Elle était déjà fragile avant, mais en plus, elle perdait la considération de Klyr, devenait un loup-garou, perdait sa meilleure amie... et lorsqu'enfin elle pensait avoir trouvé une nouvelle meilleure amie, elle mourrait.

Oui, pauvre Annie...

Alizée la prit dans ses bras, jugeant qu'elle était celle qui avait le plus besoin d'elle en ce moment précis.

Après une demi-heure durant laquelle ils ne firent que pleurer en silence et discuter entre eux dans leurs coins, derrière un bouleau ou avachis sur un parterre de fleurs, Zéphyr se leva et les rappela. Il avait le visage durci, les sourcils froncés, les yeux sombres. Alizée s'inquiéta de le voir ainsi. Dans sa main, il tenait une coupure de journal de la Gazette et la jeta sur le sol herbeux ; le titre mouvant s'étalait en grand sur la page. « Waler Royle au pouvoir du monde des sorciers ».

- Eh ! Tout le monde ! cria-t-il. Il faut qu'on réfléchisse à une stratégie ! Les Détraqueurs ont prit Poudlard et Royle a saisi le monde des sorciers. Est-ce qu'on va se laisser faire ? Est-ce qu'on va le laisser détruire nos vies, ou est-ce qu'on va se battre ? Pour Albe ?

- On va se battre ! répondit fortement Kenric.

- C'est ça que je veux entendre ! reprit Zéphyr. On a assez pleuré. Il est temps de reprendre les choses en main.

« Il est temps de se venger... » songea amèrement Alizée.

- Mais comment ? On ne peut pas retourner à Poudlard ! cria Will.

- Alizée, fit le jeune homme en se tournant vers elle. Je crois avoir comprit quelque chose. Royle m'a dit qu'avec ton pouvoir, il pourrait se saisir de Franck, et qu'avec il pourrait détruire le monde des sorciers. Est-ce que tu vois ce de quoi il parle ?

- Par mon pouvoir, il parle de ma capacité à me servir de mes pouvoirs sans baguette ?

- J'espérais que tu me le dises.

Elle hésita. Il y avait beaucoup de Frank et de Franck ; Frank Bryce, Franck Londubat, Franck le...

Franck ! Mais bien sûr ! Et son pouvoir... Oh ! Elle s'empressa de crier à ses amis endeuillés :

- Mais oui ! Mon pouvoir, c'est ma magizoomagie ! Et je connais tout sur Newt Scamander... C'est pour ça que Royle a besoin de moi ! Il veut Franck, l'oiseau-tonnerre de Newt Scamander !

- L'oiseau-tonnerre ? répéta Kathy en séchant une larme.

- Oui ! Mais pourquoi il a besoin de lui ?

- Je pense qu'on devrait le lui demander, répondit Zéphyr.

- À qui ? Tu veux parler à un oiseau ? répliqua Quinn. Tu es magizoomage ? Ou bien tu veux aller voir Royle et lui offrir un thé ?

- Je parlais de Scamander... il pourrait nous éclairer... Mais il faut qu'on se sépare en groupes... L'un pour aller voir Newt Scamander, un pour se rendre dans d'autres pays pour récolter des alliés et les avertir du danger que représente Royle et une dernière équipe pour rester ici, à Poudlard, et organiser la nouvelle résistance.

Alizée hocha la tête, fascinée par son discours ; quelques instants plus tôt, ils pleuraient dans leur coin sans aucun plan, et maintenant, ils savaient où aller. Malgré le deuil et la soif de vengeance, elle ne put s'empêcher d'être excitée ; elle allait donc rencontrer Newt Scamander ?

- Ça m'a l'air d'être de bonnes idées ! approuva Teddy. Qui va dans quel groupe ?

- Minute, l'interrompit Zéphyr. J'aimerais parler à quelqu'un. À quelqu'un qui doit être ravi d'avoir de quoi informer Royle sur nos moindres mouvements. N'est-ce-pas, Gill ?

/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\/\

Ouuuh encore du suspense. Comment trouvez-vous ce chapitre ? Triste? Rapide? Croyez-vous qu'Alizée sera surpassée par sa soif de vengeance, et Gill, à votre avis, est-ce le véritable espion?

Allez bises et merci pour touuus vos retours! (Et de ne pas m'avoir tuée malgré le coup de la dernière fois!)

Hermy