14 | Requête
Tournant les chiffres du vieux combiné de la boutique Mûto, je frissonnais à l'idée même d'entendre cette voix suave, le téléphone calé entre ma tête et mon épaule j'attendis patiemment qu'il ne daigne décrocher. Ne serait-ce que pour respecter son engagement.
« Tss, tu n'auras pas trainé pour crier au secours Châtel.
_ Il n'y avait pas de date précise pour utiliser mon Joker, lui rappelais-je.
_ Je te préviens, tu n'utiliseras pas ce numéro deux fois. Je peux te l'assurer.
_ C'est déjà un exploit que tu consentes à m'en donner un. »
Il eu un silence. Il attendait sans doute que je lui confie ma requête. J'avais beau jouer les indifférentes, mais cette convocation téléphonique représentait un enjeu suffisamment important pour me mettre la pression.
« Ton jeu virtuel... Lui rafraichissais-je la mémoire. Ce truc où tu t'installes pour te retrouver dans un monde programmé... Il marche toujours ?
_ Eclaircis moi Châtel... Je n'ais pas que deux, trois inventions révolutionnaires dans ma manche.
_ Mmmh disons ... Mokuba déguisé en Princesse ? Ca ne te rappelle rien ? »
Je pensais qu'il allait raccrocher. Il soupira, épris d'une réflexion qui devait le fatiguer. Chose qu'il se hâterait de me dire pour prouver à quel point je le gênais.
« Ce n'est qu'un prototype... En quoi cela t'intéresse-t-il ?
_ J'ai besoin de l'utiliser. Enfin c'est pour un ami.
_ Il faudra faire des tests... Tu passeras ce soir ? Non c'est une affirmation. Tu passeras ce soir, c'est tout. Je n'ais pas que ça à faire. Grommela-t-il.
_ Merci ... Soufflais-je presque soulagé. »
Je l'entendis pianoter sur son clavier à une vitesse affolante. Me concentra sur les sons aux travers du combiné, j'analysais qu'il avait chaud en ce début d'après midi, il buvait à même le goulot une bouteille d'eau. Sacré Kaiba... Après tout tu es humain, comme nous tous.
« Rendez-vous pris. Dit-il d'un air subitement sérieux. Ce soir 7:45pm. Aucun retard ne sera accepté. Et amène ton ami puisque cela le concerne.
_ Merci beaucoup...
_ Ca va faire deux fois que tu me le dis Châtel. Je ne te sauve pas la vie, inutile d'en faire un drame. Lâcha-t-il d'un ton amicalement surprenant. »
Si Kaiba... Ton aide m'est précieuse et cela tu ne peux imaginer à quel point.
Nous avions trouvé un moyen... Un moyen non assuré mais un espoir peut être.
Pharaon ...
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C'était le matin. Chronologiquement, je n'avais pas encore appelé Kaiba, et je n'avais pas mis le doigt sur une façon de remédier au problème d'Atem et de Yûgi. Même si ce dernier n'était pas informé de ces récentes nouvelles... Comment allait-il le prendre d'ailleurs ? Bien j'espère.
Je remuais légèrement la tête, allongée à même le sol près de Jonouchi en mercenaire, le revolver plastique sous l'oreiller prêt à le brandir au moindre danger.
J'étais calé contre quelque chose d'agréable. Quelque chose qui respirait. Ouvrant les yeux, j'avais ma joue collé sur l'abdomen de mon protégé. Cette situation aurait pût paraître mignonne si le haut de son pyjama n'était pas relevé d'une façon suspicieuse. Qu'avais-je fait la nuit dernière ??
Me relevant brusquement je rabattais le vêtement sur sa peau nu et partit m'enrouler à deux bon mètres de lui sous ma couette.
Des rires retinrent mon attention. Saucissonnée, je levais les yeux vers le couloir donnant sur la cuisine dont la porte était légèrement entrouverte. Me laissant ainsi apercevoir Anzu et Honda qui semblait étrangement complices.
« Jonouchi l'a vu dans ses bras ! Insistait la voix de la jeune fille.
_ Je ne pense pas qu'un type pareil puisse donner son téléphone comme ça !
_ On appelle pour vérifier ? »
Les écoutant glousser, tout me revint à l'esprit. Ils parlaient de Kaiba ! Et de son numéro ! Telle une chenille disgracieuse, je me laissais traîner vers le téléphone, prête à protéger mon territoire. Personne n'appellera Kaiba, c'était mon privilège ! Pas le leurs !
« Oh salut ! Léa-chan. Lança Anzu surprise.
_ Papier... Grommelais-je en tendant une main. »
Leurs sourires s'étirèrent, ça y est ... Je sentais leurs questions approcher à vive allure.
« Alors c'est qui ? Pouffa-t-elle presque persuadée de la réponse.
_ Le mec le plus beau de la terre. Fis-je en me relevant. Beau mais con.
_ C'est c'qu'on dit. Rigola Honda. »
Je les remerciais sèchement en arrachant mon indice des doigts fins de l'adolescente. Faisant quelques pas jusqu'à la cuisine, je restais tétanisée devant tant de saleté. Si Sugoroku voyait ça... J'ouvris le placard où se trouvait la poubelle, et renifla l'odeur qui s'en dégageait. Merci Miho, ce que tu as vomis ici je m'en souviendrais toute ma vie !
Enroulant le sachet plastique, j'enfilais mon long manteau et partit dehors sortir les déchets. Ouvrant la porte d'entrée je trottinais jusqu'au local, n'aimant pas ce geste écolo et pourtant si crucial. C'est quand je fis face à l'enseigne de la boutique que je le vis...
Il était installé comme un clochard, mais vêtu comme un prince. A petit pas, je contournais l'individu posé contre les murs de la boutique, faisant le tour pour l'inspecter en détail. C'était l'adolescent qui était avec Bakura durant toute la soirée. Je ne voyais pas son visage, à moitié masqué. Que faisait-il là ?
Je pris une branche d'arbre, tombé malencontreusement à terre... Bon non, j'avais forcé le destin en l'arrachant d'un arbuste. Bref. Je touchais l'inconnu du bout de mon bâton, redoutant inutilement tout contact physique. Ne tardant pas à se réveiller, je sursautais quand son chapeau haut de forme chuta. Cette tignasse que je jugeais blonde mais qui n'en était rien... C'était...
« Marik ? Qu'est ce que tu fiches là !?
_ Hein ? Quel jour sommes-nous ? Bailla-t-il en retirant avec peine son cache œil. »
Se redressant, son costume d'aristocrate des années 1800 poussiéreux, il me jeta un regard interrogatif. Je le lui rendis, attendant une réaction négative de sa part.
« Je ne me rappelle plus ce que je fic... Ah si ... En DUEL ! »
Il tendit son avant bras dans ma direction, figé. Cette position me rappelait ces duellistes... Duellistes qui portaient normalement un Duel Disk. Chose qu'il semblait avoir oublié d'amener avec lui. Je tournais les talons, lassé de ces duels auxquels je ne comprenais pas toujours tout, et m'apprêtait à retourner chez les Mûto.
« Ah nan ! T'es lourd là ! Protestais-je lorsqu'il m'empêcha d'ouvrir la porte. Je te prierais de partir, avant que je n'emplois des mots familier !
_ Ainsi c'est donc ici que se cache les Dieux... Comment se fait-il qu'une simple fille dans ton genre puisse savoir les contrôler ?
_ Je regarde sur Wikipédia comme tout le monde, certifiais-je le plus sérieusement du monde.
_ Alors ca serait vraiment toi... La passeuse ? ... »
Fronçant les sourcils, je ne fis pas le lien dans ce qu'il venait de me dire. La passeuse ? Aurait-ce un rapport avec ce que me disait Shadi ? Comment ce Marik pouvait-il être au courant ?
« Ma sœur, Isis à prédit ton arrivée. Elle t'as vu pénétrer notre dimension... Nous les Ishtar sommes envoyés au Japon pour t'aider dans ta quête en tant que Gardien de la mémoire du Pharaon. Cette histoire nous concerne... »
Il posa un genou à terre, la tête baissée en signe de respect.
« Tu es l'élue. Celle qui doit aider le Pharaon à trouver le chemin. Passeuse. »
Quel était ce revirement de situation ? Il y a une semaine il tentait de m'arracher le bras avec sa hache millénaire, et aujourd'hui il se prosterne devant moi, adolescente en chemise de nuit.
« Marik... Tu peux m'expliquer ? Et relève-toi bon sang ! »
Il épousseta ses jambes et me regarda droit dans les yeux.
« Je comprends que mon comportement sois étrange... Je m'en excuse d'avance et ... »
Je n'écoutais pas ce qu'il disait, mon attention se portait sur les tics étranges qu'il arborait sur son visage basané. De temps en temps il souriait machiavéliquement, le tout accompagné d'une grimace. Cela ne durait même pas une seconde. Mais c'est terriblement dérangeant.
« Je suis prêt à te servir.
_ Tu me laisses le temps de petit déjeuner ? »
Il acquiesça. Me laissant partir, légèrement sur les rotules tant toute cette mascarade m'accaparait. Dans l'entrée, j'entendis l'eau bouillonner, Sugoroku devait être aux fourneaux. Yûgi m'attendait dans le couloir, un sourire timide sur les lèvres. Il m'accompagna à table pour nous installer avec nos amis.
Se disputant avec les boulettes de Riz, les adolescents se chamaillaient à coup de baguettes. Je jetais un œil à l'extérieur, le cœur battant voyant Marik qui attendait au dehors, étrangement attaqué par une horde de pigeons. Ce pays allait avoir ma peau...
« Tu sais ... Je ne te questionnerais pas sur la personne qu'aime le Pharaon. Me confia Yûgi alors que nous rangions la vaisselle.
_ Je suppose que tu es un peu curieux...
_ Comment ne pas l'être ? Siffla-t-il en frottant énergiquement son assiette avec l'éponge. De toute façon, il me le révélera de son plein gré un jour. S'il veut que je l'aide il va être obligé non? Ajouta-t-il en se forçant à rire. J'espère que cette révélation ne te compliques rien ... »
Je ne répondis pas. J'étais étonnée de l'aisance dont Yûgi faisait preuve à mon égard. Il était toujours un peu discret, timide, mais avec moi tout semblait différent. Ma présence le rendait-elle plus confiant ? Repensant aux paroles du garçon, j'expérimentais dans ma tête, mes chances de réussites. Elles étaient quasi nulles ... Alors pourquoi étais-je si calme ?
Un coup de tonnerre nous fit tous sursauter. Une averse énorme nous tomba dessus. Plus tard dans la matinée, je me changeais pudiquement dans un recoin de la chambre avec Anzu. Elle me questionnait sur Kaiba. J'en profitais pour la féliciter elle et Otogi. Je fus sincère quand je parlais de ma valse avec l'héritier et son égo, il était fichtrement sexy, personne ne pouvait le daigner.
« Heureusement qu'il n'a pas plut comme ça hier soir ... Observa Anzu à travers le vasistas. »
J'opinais doucement, fasciné par cette eau claquant d'une puissance phénoménale sur la vitre. J'en avais la chaire de poule. Mon bras gauche ne ressentait pas le moindre frisson. Je le massais de ma main droite, ayant l'espoir que celui-ci ne se mette à réagir. En vain.
Alors que nos amis resserraient leurs lacets dans l'entrée, j'eu un pincement au cœur en m'imaginant rester seule avec Yûgi. Et aussi avec ce temps. Avec les garçons, on se fit un check viril de la main, je m'attardais un peu plus sur Miho en lui soufflant tout bas qu'elle allait me manquer. Je vis sa première expression peinée sur le visage. Oui elle allait véritablement me manquer cette petite.
« On se revoit dans la semaine ! Les apostropha Yûgi en faisant de grand signe de mains. »
Je l'imitais, faisant de grands au revoir enjoués du bras, comme je n'en aurais jamais fait en France. Un remord soudain m'envahit lorsque je vis le clochard de tout à l'heure, vautré tout près de l'entrée, grelottant comme jamais. Il était trempé, se réfugiant sous son chapeau.
« Mais qui...
_ Marik ! Mais fallait pas attendre comme ça ! Viens entre ! »
J'agrippais, sous la pluie battante, l'Egyptien et l'entraîna à l'intérieur sous les protestations de Yûgi. Kare wa warudearu, répétait-il sans cesse. Je le fis taire d'un geste de main.
« Non Yûgi... Il n'est pas maléfique ! L'informais-je en grognant. Retire tes vêtements trempés toi ! Lançais-je soudainement à Marik. Non pas tout !
_ Mais Léa... Essaya le garçon peu à l'aise.
_ Pharaon... Murmura soudainement Marik en se jetant au pied du garçon qui restait interloqué. »
Je m'effaçais du décor face à cette scène terriblement jouissante. Si j'ose dire ! Couché face à l'adolescent, le puzzle millénaire réagissait. Brillant de tout son éclat, l'âme du roi de la Basse Egypte s'éveilla pour regarder son inférieur. Un air de mépris se faisait sentir dans ses yeux, il ne m'accordait pas la moindre attention, trop concentré sur le garçon étendu devant lui.
« Relève-toi Marik. »
L'égyptien aux yeux souligné par du Khôl, lui conta cette histoire de gardien de la mémoire du Pharaon et sa nouvelle venue au Japon. Atem le laissa s'expliquer sans broncher. Puis un silence pensant se faisait entendre au travers de la pluie battante sur le toit de la boutique. Je décidais de le couper, intrigué par un détail troublant.
« Et sinon ton autre entité nuisible ? Elle se porte comment ?
_ Mon entité ... ? »
Sa grimace se reforma sur ses traits doux, déformant son visage dans une demi-seconde.
« Je parle de ça !
_ Marik, je crains ne pas pouvoir te faire confiance avec un double aussi maléfique enfermé au fond de ton âme, expliqua Atem contraint de refuser son aide.
_ Je comprends tout à fait. J'arrive cependant à le contrôler. Essaya-t-il de se convaincre. »
Atem soupira et l'invita à avancer jusqu'au salon, lui proposant de s'asseoir dans le canapé. Tellement mon avenir me semblait incertain, je m'asseyais sans peur aux côté de Marik qui semblait affligé. Le Pharaon restait debout, toujours aussi splendide.
« Que sais-tu au sujet de Léa-chan ? Demanda-t-il en me désignant d'un mouvement de tête.
_ Elle vient d'un autre monde. Un endroit identique mais cependant tellement différent au notre. Elle a été choisie pour accomplir la tache des passeurs. Elle a traversé les ténèbres pour t'aider, Pharaon. Et je suis ici pour éviter que qui que ce soit ne se mette en travers de son chemin. »
Je détestais qu'on parle de moi, avec tant de sérieux, et ceci en ma présence. Cela me changeait sans doute des réunions parents-professeurs, car ici à Domino j'avais au moins un rôle important !
« Nous les Gardiens avons écartés le danger dans l'ombre. Battle City n'aura pas lieu, ainsi vous ne serez pas contraint de perdre du temps dans le peu qu'il vous en reste. Mes partenaires ont mis hors d'état de nuire le dernier survivant de l'Atlantide, Dartz, expliqua-t-il, il ne pourra pas vous importuner non plus ...
_ Tu ... Tu ne l'as pas quand même ... Enfin il n'est pas si méchant que ça... M'inquiétais-je vouant une affection pour ce méchant qui avait dévoilé dans l'animé les plus grandes faiblesses du Pharaon.
_ Ne vous inquiétez pas Passeuse... Nous avons agis humblement. »
Alors c'était à cause d'eux que Kaiba ne pouvait organiser son tournoi comme il se devait ? Marik se racla la gorge et se tourna vers Atem.
« Tu es déjà en possession de ton propre nom, Pharaon. Mais c'est l'identité d'une autre personne qui nous intéresse. »
Il était au courant à ce point ? Décidemment... Autant lui laisser faire le travail.
« La personne que le 18ème roi d'Egypte porte en son cœur et en son âme. Au nom de la déesse Hathor, permet à ton humble serviteur de connaitre cette personne...
_ Euh Mare... Marik. Bredouillais-je. Il a mis plus de six mois à me dire de qui il s'agit... Je ne crois pas qu'il cédera aussi facilem...
_ Il s'agit de Yûgi. Lâcha Atem contre toute attente. »
Quoi ? Il ose le lui dire comme ça ? Et moi je compte pour du beurre ? Je ne pouvais m'empêchais de trouver cette situation totalement déplacé et pestais intérieurement, le rouge aux joues, tandis que les deux anciens ennemis commentaient la difficulté de la tache. Atem je vais te tuer ! Ignoble Pharaon de mes deux !
« Pour te prouver ma loyauté Pharaon... Voici la Hache Millénaire. Se pencha le garçon en lui tendant l'objet antique. »
Lorsqu'il se courba, un collier sortit de son col, pendant librement de son cou. Je l'observais, intrigué par ce petit sablier au sable blanc. Atem prit l'objet sans hésitation, le coinçant à l'arrière de son pantalon au niveau de la ceinture. Marik vit mon regard et se précipita pour m'apporter ses explications.
« Du gros sel... Cliché, mais efficace. Les occidentaux ont des idées originales en matière de spiritisme. Fit-il en approchant son pendentif.
_ Tu ne vas pas me faire croire qu'un truc pareil peut éloigner ton côté obscure ? Enfin je veux dire c'est grotesque ! Et tes grimaces louches ?
_ Il aime résister, soupira-t-il en parlant de son double ténébreux. Mais je contrôle la situation. Alors que faisons-nous ? Lança soudainement Marik à l'adresse du Pharaon. Permettez-moi de mettre le garçon au courant.
_ Surement pas, répliqua sèchement Atem. Je le ferais moi-même. »
Nous le regardâmes tout deux. Intrigués. Les joues du Roi Egyptien s'empourprèrent légèrement, m'arrachant un léger sourire. Nous lui demandâmes comment il comptait s'y prendre. Car réunir deux âmes, ce n'était pas simple. L'objet millénaire ne permettait pas une approche directe des deux jeunes hommes.
« Tout ce que je désire... C'est de le rencontrer réellement. »
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« Atem veut me voir en vrai ? Demanda Yûgi en sirotant son lait vitaminé. »
Les nuages avaient disparus en fin de journée, sur les coups de quatre heure de l'après midi, le soleil commençait déjà à sommeiller. Nous avions décidé de nous rendre au parc pour discuter tranquillement, assis sur les balançoires métalliques. Marik nous avait quittés, il devait aller chercher sa sœur à l'aéroport. Isis. Celle qui portait le Torque Millénaire.
« J'aimerais beaucoup le voir aussi. Affirma-t-il dans un petit sourire. Mais cela risque d'être compliqué puisque nous partageons le même corps. Mais pourquoi soudainement il...
_ Il veut sûrement te parler de la personne qui... »
Je me stoppais aussitôt, comme si je venais de recevoir une claque intérieure. L'âme du Pharaon surveillait mes propos. Bien sûr ... Comme si j'étais assez idiote pour tout lui balancer comme ça ! Tu veux que je le fasse hein ?
Il protesta de nouveau en s'acharnant sur mon esprit.
« Ca ne vas pas Léa-chan ? S'inquiétant Yûgi me voyant en proie à un conflit silencieux.
_ Si, si ... Le rassurais-je aussitôt. Donc je disais, Atem aimerait te rencontrer en chair et en os parce que... Parce que vous êtes ami ! Voilà. Comment dit-on déjà... Aibou [1] ? »
L'adolescent ouvrit de grands yeux quand je prononçais ce dernier mot. Comme si j'avais dit une vulgarité ou ... Quelque chose que je n'étais pas censé savoir.
« J'ais dit quelque chose de mal ? M'interloquais-je me penchant près de sa balançoire.
_ Non, non... C'est juste que... Qu'il m'a toujours appelé comme ça. C'est mon petit surnom. »
Il était gêné. Ses petites mains pressaient sa brique de jus de fruits, sous mon regard interrogateur. Un ange passait... Qu'est ce qu'il voulait dire par là ?? Nous restâmes silencieux. Des enfants passaient devant nous, se disputant pour une peluche gagnée à la fête foraine. Oui c'est vrai que la grande foire était installée à Domino durant les vacances.
« Enfin. Peut être que dans dix ans on trouvera un moyen de séparer nos âmes pour faire... Enfin deux personnes à part entière. Il faudrait une technologie super avancé. Minauda-t-il.
_ Technologie super avancé... Répétais-je dans un murmure.»
Une idée me vint soudainement à l'esprit. On se regarda tout deux en même temps, comme si nous venions d'être brusquement illuminé.
« Kaiba ! S'écria-t-on en cœur. »
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Il faisait déjà nuit. Les réverbères des rues étaient allumés. Cela me rappelait hier, c'était presque pareil. Nous nous apprêtions à prendre le même chemin, comme pour aller au bal. Et dire qu'il y a vingt-quatre heures je ne connaissais pas encore le lourd secret du Pharaon. Tout cela allait décidemment trop vite.
J'avais appelé Kaiba. Utilisant mon Joker, dans le but de poursuivre ma mission. Cette machine qu'il utilisait dans le but de créer un monde virtuel, pour s'entrainer peut être... Je voulais savoir si cette technologie le permettait... Qu'elle permettait de faire apparaitre virtuellement ces deux êtres et ceci dans leurs propre corps. Ce n'était qu'un programme, mais si cela était aussi réaliste que pouvait bien le prétendre l'héritier... Alors Atem rencontrera réellement Yûgi.
« Hey Yûgi-kun ! Léa-san ! S'exclama une voix aigue. »
Le jeune Mokuba s'approcha de nous, cet air si arrogant sur le visage, tel un petit garçon sûr de lui. Nous le saluons poliment, le cadet nous fit entrer dans l'enceinte de la Kaiba Corporation. Il nous expliqua que son frère était très occupé, mais qu'il avait tout de même trois heures à nous consacrer. Je serrais les dents... Cela sera-t-il suffisant ?
Dans un gigantesque ascenseur, je pensais que nous rejoindrons le plus haut étage, sans doute l'endroit où Kaiba se sentait dominer le monde de cette hauteur vertigineuse. Au lieu de cela nous descendîmes six pieds sous terre. Au sous sol numéro 13. Un chiffre qui ne me disait rien qui vaille. En plus d'être idiotement croyante, j'étais bel et bien superstitieuse.
« On m'a informé que vous vous étiez proposé pour tester le module virtuel. Fit le garçon à haute voix en pensant devant quelques employés. Sachez que vous n'êtes pas les seuls à avoir postulé. »
Yûgi et moi nous regardions mutuellement, ne comprenant pas tellement ce qu'il voulait dire. Il nous fit entrer dans une pièce, qu'il ferma à double tour.
« Désolé. Je devais être discret. On ne pouvait se permettre de faire venir des visiteurs par simple caprice. Avancez. Fit amicalement le garçon.
_ Ce n'est pas un caprice, soulignais-je. C'est plutôt urgent.
_ Oui, oui je comprends. Assura-t-il en se frottant le nez. Mais les employés ne comprennent pas toujours ça. Et ne me parlez surtout pas des avocats, en plus Seto à d...
_ Mokuba. Cesse de raconter n'importe quoi à tes amis, le coupa Kaiba en entrant par une autre porte. Vous avez deux minutes de retard au fait. »
Il retira cette veste bleu marine qu'il portait dans la saison 1, me permettant pour la première de la voir en chemise à manche mis longue. Il avait des avant bras parfaits. Une main dans la poche de son pantalon, il alluma d'un mouvement de pied le module central, basculant l'interrupteur vers le bas. Sans nous dire quoi que ce soit, il enleva la house de protection de l'engin, ainsi que celle d'un grand moniteur, ressemblant à ses premiers ordinateurs qui n'était en fait que des calculatrices géantes.
« Bien. Je ne vais pas attendre. Venez. »
On s'exécuta, Yûgi m'agrippait la main, peu assuré.
« Tu vas mettre ça sur ta poitrine, fit-il en tendant à Yûgi des patch adhésifs d'où des fils pendaient mollement reliés à la machine. »
Le garçon s'exécuta. Il souleva son tee-shirt pour y placer les capteurs. Instinctivement je détournais le regard. Maintenant que je connaissais les sentiments du Pharaon envers Yûgi, j'aurais l'impression qu'un peu de voyeurisme serait mal vu.
Kaiba s'assura que tout était bien branché. Il s'élançait avec sa chaise roulante jusqu'au bout du tableau de bord et activa la mise en marche. Six écrans s'allumèrent, un seul d'entre eux n'affichaient pas un message d'erreur. Je ne comprenais pas tout mais laissait mon ami entre les mains de ce génie. Oui, il fallait tout de même l'admettre. Kaiba était un ignoble personnage, mais il n'en restait pas moins intelligent.
« Tss... »
Un autre écran se mit en route, des termes techniques s'affichaient, mais je réussis à discerner quelque chose comme quoi c'était positifs.
« Je me disais bien que ce n'était pas le même type que j'affrontais. Lâcha-t-il.
_ Ca donne quoi ? Demandais-je anxieuse et énervée à l'idée de ne rien comprendre.
_ L'ordinateur détecte deux personnes. Il me donne l'âge, la taille, le poids... même l'ADN si je le lui demandais. Pourtant il n'y a que Yûgi qui soit connecté.
_ Et si je vais dans la machine ? S'inquiéta Yûgi.
_ Dites moi clairement ce que vous voulez, s'impatienta Seto en jetant un œil à son petit frère qui jouait à la Game Boy. »
Je me devais de ne pas en dire de trop. Je pris une profonde inspiration.
« Là tu vois c'est Yûgi, fis-je en posant une main sur mon ami. Mais la personne que tu affrontes est une âme qu...
_ Une âme d'un Pharaon sans nom qui erre et qui n'a pas trouvé le repos, récita Kaiba désespéré. Je la connais cette histoire Châtel. En quoi mon module peut-il t'aider ?
_ J'aimerais pouvoir le voir réellement. Je t'en pris Kaiba-kun. Supplia Yûgi en se penchant du mieux qu'il pouvait sur sa chaise. Permet moi de le voir grâce à ton invention.
_ Je vois. »
Restant indifférent aux efforts que faisait le garçon pour lui requérir de l'aide, il appuya sur deux boutons en même temps, rendant les écrans inactifs d'un bleu opaque.
« N'hésite pas. Fit-il en tendant une main.
_ Tu peux réellement faire ça ? M'étonnais-je presque trop enjouée.
_ Je suis Seto Kaiba, rappela-t-il. Rien ne me dépasse. Alors si tu veux rencontrer ton petit copain, tu n'as qu'à monter dans ce fichu module. »
Le garçon posa une main sur le puzzle. Je ressentais l'énergie s'en dégageant. Aibou... Atem l'appelait. Je sentais sa gratitude, communiquant avec celui qu'il aimait, par la pensé, il semblait hésiter. Yûgi le rassurait.
« Tu peux mettre n'importe quel décor ? Demandais-je à l'intention de Seto qui fixait avec curiosité mon ami.
_ Châtel... Si j'ai besoin d'un voyage sur une île paradisiaque alors je n'ais qu'à m'installer. Je lui programme quoi du coup? »
Yûgi semblait toujours concentré sur son pendentif. Je cherchais une idée... N'importe laquelle. Un endroit où les deux amis se sentiraient à l'aise.
« La grande foire. Vers les alentours de trois heures de l'après midi. Tu peux faire... »
Il me jeta un regard qui en disait long. Bon ça va ! Puisque tu peux tout créer, vas-y fait-le ! Le jeune homme pianota deux, trois données illisibles. L'entrée de la fête foraine apparue, comme si quatre caméras à différents angles étaient implantées.
Je repensais à Marik. Il était sûrement là pour donner les objets millénaires au Pharaon. Afin qu'il puisse regagner l'endroit d'où il venait. Mais si Atem aimait Yûgi alors il ne partirait pas... Mon esprit s'embrouillait, il voulait les cartes de Dieu Egyptiens pour une autre raison. Il ne voulait plus dominer le monde, peut être était-ce par sécurité ? Quel beau bordel. Qui aurait cru que l'esprit malfaisant sera contré par du gros sel ?! Stupéfiant.
« Bien. Je m'installe ?
_ Je t'en pris. Soupira Seto en se levant. »
A demi allongé, le garçon avec les doigts crispé sur les bords de la machine. Kaiba s'occupa de boucler les lanières de sécurité, il semblait excité à l'idée de voir son invention à l'œuvre avec un tel spécimen. Spécimen qui n'était autre que Yûgi, adolescent avec deux personnalités.
« A ce stade Yûgi. En espérant que tu n'es pas claustrophobe. Ironisa Kaiba prêt à refermer le module. »
Il fit non de la tête. J'apercevais son regard légèrement anxieux derrière la vitre de sécurité. Je levais un pouce d'encouragement dans sa direction. Kaiba m'appelait. Un dernier encouragement de la main et je rejoignis l'héritier qui me tendait une paire d'oreillettes.
« Tu vas m'aider à vérifier le bon fonctionnement de mon invention. Même si je l'ais créée dans les moindre détails, l'erreur reste humaine.
_ Toi ? Tu pourrais te tromper ? Me moquais-je ouvertement. On ne va quand même pas les espionner ?
_ Non... Au départ du moins. »
Il approcha un petit micro portable et demanda à Yûgi s'il était prêt. La voix du garçon bredouilla que oui, au travers des oreillettes. Seto se dépêcha de taper les commandes de lancements du programme. Il était concentré. Mokuba observait son grand frère en silence.
« On y va petit frère. »
Du poing le garçon, aux cheveux long, appuya sur un grotesque bouton rouge bien voyant. Une barre de chargement apparu, surmonté d'un pourcentage arrivant facilement à cent. Je me rongeais les ongles persuadés de ne voir que Yûgi seul dans le décor.
Les yeux rivés à l'écran, les frères Kaiba appréhendaient la moindre anomalie. Le paysage pixélisé, se contrastait peu à peu, ne laissant apparaitre qu'un garçon de dix-sept à l'écran. Je soupirais déçue... Seto ne semblait au contraire pas étonné le moins du monde... Il était certain de lui. Il n'en démordrait pas, son invention était un succès !
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Les bras croisés, Yûgi était perplexe face au réalisme où il se retrouvait plongé. Les gens amicaux lui accordaient un sourire quand ils passèrent devant lui, tout ceci n'était pas réel et pourtant ... Cela semblait si improbable. La fête foraine était ouverte, elle en était surpeuplée. Mais il était seul... Le Pharaon n'était pas là.
« Yû.. Yûgi ? »
Cette voix... Il se retourna le cœur battant. Son ami de toujours était là, face à lui, le visage quasi identique, mais empreint d'une sagesse vieille de 3000 ans. Il portait les mêmes habits que lui, d'une façon plus décontracté, comme il l'imaginait dans ses pensées. Tel deux jumeaux, sa couleur de peau le différenciait. Atem était un beau garçon Egyptien.
Il ne savait qu'elle attitude adopter face à lui, il le connaissait depuis si longtemps, et pourtant cela semblait complètement différent.
Atem, s'avança vers cette personne chère à ses yeux. Il contempla le garçon, plongeant dans ses grands yeux mauves, se perdant dans l'immensité de son regard. Ils étaient là, tout deux, dans un corps, l'un ne sachant quoi dire à l'autre.
« Aibou... »
Il tendit une main hésitante vers son partenaire. Yûgi n'hésitait pas à laisser la présence du Pharaon essayer cette possibilité de proximité. Il sentit la poigne d'Atem sur son épaule, il était soulagé... C'était la première fois qu'il ressentait son ami ainsi.
Se jetant dans ses bras, Yûgi avait les larmes aux yeux. Celui qui l'avait rendu plus fort durant tant d'années oubliés, il pouvait le prendre dans ses bras. Atem souriait, il était heureux. Heureux d'avoir le bonheur de serrer contre son cœur, celui qu'il avait toujours aimé... Yûgi.
[1] Aibou : Surnom qu'emploie souvent Atem dans la version originale du manga, qui signifie dans notre langue «camarade» ou «l'ami». Dans beaucoup d'oeuvres pornographiques reprenant le manga Yu-Gi-Oh, Aibou est utilisé à consonance sexuelle... Comme c'est bizarre !
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